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Full text of "Mémoires"

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MÉMOIRES 






DE 



L'ACADÉMIE DE VAUCLUSE. 



DEUXIÈME SÉRIE 
TOME IV. — ANNÉE 1904. 




AVIGNON 

FRANÇOIS SEGUIN, IMPRIMEUR-ÉDITEUR 
//, rue Bouquerie. ti 

«904 






ACADEMIE DE VAUCLUSE 

FONDÉE LE 20 JUILLET 1801. 



Président d'honneur : M. Mordon. 

BUREAU POUR U ANNÉE 1904. 

Président , . . . . MM. de Vissac. 

Vice-présidents { Joleaud. 

( H. Paul. 

Secrétaire général Labande. 

' DE Terris. 

Présidents de section ) , Pansier. 

( R. Roux. 

Secrétaire Ghatelet. 

Trésorier Bonnecaze. 

Bibliothécaire Dxdiée. 



I. - MEMBRES D'HONNEUR. 
MM. 

L'Archevêque d'Avignon. 

Le Général commandant la 3o* division militaire. 

Le Préfet de Vaucluse. 

Le Maire de la ville d'Avignon. 

Fabre, ^y docteur es sciences, à Sérignan. 

FuzET (Mgr), ^, archevêque de Rouen. 

Guillaume, G. O. *, directeur de l'Académie de France, à Rome. 

JuLLiAN, Camille, *, Q L, professeur à l'Université de Bordeaux. 

Lasteyrie (Comte de), Robert, *, L, membre de l'Institut, à 

Paris. 
Mistral, Frédéric, O. *, à Maillane. 



l32 MÉMOIRES 

Le rôle de la documentation graphique est de venir en aide à la 
description toujours insuffisante ; nous ne l'oublierons pas ; il ne 
s'agit plus, en effet, de signaler des monuments, de copier plus 
ou moins correctem*L*nt des inscriptions, il importe que les 
constructions, les objets d'art, les documents épigraphiques 
soient exactement reproduits, de façon à permettre l'exercice de 
la critique lorsque les objets auront disparu. 

Sans oublier ce qui a pu être publié ou écrit avant ces Études, 
je ne me suis fié ni aux affirmations ni aux racontars ; j'ai tenu à 
me rendre compte de visu de tout ce dont j'avais à parler ; ce 
travail ne sera donc point autre chose que le résultat d'une fré- 
quentation prolongée des lieux, des hommes et des choses. J'es- 
time en effet que ce n'est que par une sorte de cohabitation avec 
les textes et les monuments qu'il est possible de formuler des 
conclusions solides et sérieuses ; les erreurs que j*ai pu com- 
mettre n'entacheront donc pas ma bonne foi. 

Je souhaite, en terminant, que dans les centres d'une certaine 
importance historique, d'autres enquêtes de ce genre soient 
entreprises ; ce n'est qu'après la publication de tous les monu- 
ments, de tous les vestiges anciens, que l'on pourra dégager 
définitivement les éléments de l'archéologie nationale. Le grand 
essor donné par de Caumont à l'étude de nos édifices a abouti, 
ces temps derniers, à la publication d*un ouvrage aussi impor- 
tant que celui de M. Enlart ; son Manuel a été mon guide : je le 
recommande à tous ceux qui veulent avoir un conseiller exact 
dans leurs études archéologiques. 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE i33 



I. 

Le Vallon de l'Aiguebrun. 
BUOUX 

Le Village et l'ancien Fort. — Saint-Symphorien. 



SOURCES et bibliographie (I). 

Archives communales de Buoux. — Des archives antérieures à 1790, des documents 
révolutionnaires et même de ceux du XIX' siècle, antérieurs à i83o,il ne subsiste que 
quelques papiers qui ont échappé, par hasard, à un acte de vandalisme relativement 
récent : en 1848, le maire delà commune, ignorant et inconscient, fit un auto-da-fé de 
tous les documents qu'il trouva à la mairie. « ces paperasses n'étant bonnes, dit-il. 
qu'à engendrer la poussière •; deux registres de l'état-civil trouvèrent grâce, ainsi 
que le cadastre et les états de sections ; parmi les rares liasses oubliées, se trouvent 
trois comptes du trésorier communal, des circulaires imprimées, des quittances de 
paiement des tailles (XVII* et XVIU" siècles). 

Tout ce qui pouvait éclairer l'histoire de Buoux, comptes, délibérations, titres du 
moyen âge, pièces relatives au Fort, tout est anéanti ; les registres d'état religieux 
(baptêmes, mariages et décès) commencent au i*' janvier 1637 et vont jusqu'au 
3o décembre 1792(2); la série CC ne comprend que deux terriers dressés, l'un en 
i665 par deux notaires (in-fol. de 129 p., incomplet) et le second en 1718(3). 

Archives de la ville d'Apt. — Directement intéressée au sort de l'ancien Fort de 
Buoux, la ville d'Apt s'est trop préoccupée à toutes les époques de la défense de ce 
point et de sa garnison, pour que les documents aptésiens n'en aient pas conservé de 
fréquentes traces ; les délibérations depuis le XIV siècle jusqu'au milieu du XVII'. 
les comptes trésoraires, les pièces relatives aux dépenses des guerres de religion ont 
fourni la plus grande partie des renseignements sur l'histoire du Fort consignés dans 
cette partie des Études, 

Les Archives des Bouches-du-Rhône contiennent quelques documents intéressant 
Buoux, surtout après le XV' siècle ; ils ont été employés. 

L'Histoire de la ville d'Api de Rémerville, sans donner des renseignements précis 
sur le rôle du fort de Buoux, n'était pas à négliger; nous avons pu nous rendre 
compte par la comparaison de son récit avec les documents qu'il avait consultés, du 
scrupule apporté par cet érudit à la rédaction de son œuvre. 

(i) Nous ne mentionnerons pas, dans les bibliographies de ces études, les grlhids 
ouvrages utilisés pour tout le territoire, par exemple : Papon (Histoire dt Provence] ; 
Bouche, Id Gallia Christiatta, le Corpus inscriptionum latinarum, t. XII, etc. 

(a) 3 vol. in-4» reliés, en assez bon état. 

(3) L'inventaire des vestigia des archives de Buoux, par Achard, existe sur fiches 
à la Bibliothèque d'Avignon, ms. n* i588. 



Fi 



1^0-^ 



ACADEMIE DE VAUCLUSE 

FONDÉE LE 20 JUILLET 1801. 



Président d'honneur : M. Mordon. 

BUREAU POUR L'ANNÉE 1904. 

Président , . . . . MM. de Vissac. 

y<ce^résùUn>s j J-"- 

Secrétaire général Labande. 

' DE Terris. 

Présidents de section ) , Pansier. 

( R. Roux. 

Secrétaire Chatelet. 

Trésorier Bonnecaze. 

Bibliothécaire Didiée. 



I. — MEMBRES D'HONNEUR. 
MM. 

L'Archevêque d'Avignon. 

Le Général commandant la 3o' division militaire. 

Le Préfet de Vaucluse. 

Le Maire de la ville d'Avignon. 

Fabre, ^, docteur es sciences, à Sérignan. 

FuzET (Mgr), *, archevêque de Rouen. 

Guillaume, G. O. *, directeur de l'Académie de France, à Rome. 

JuLLiAN, Camille, *, y L, professeur à l'Université de Bordeaux. 

Lasteyrie (Comte de), Robert, *, L, membre de l'Institut, à 

Paris. 
Mistral, Frédéric, O. *, à Maillane. 



IV LISTE DES MEMBRES TITULAIRES 



MEMBRES TITULAIRES AYANT PERPETUE LEUR COTISATION. 

MM. 

Chobaut, Alfred, <ij, docteur en médecine, bienfaiteur de l'Académie, 

à Avignon (5 avril 1889). 
Eysséric, Joseph, O, artiste peintre, à Carpentras (i*' mars 1895). 
L'Epine (Marquis de), Raymond, à Avignon (i3 avril 1899). 
Manteyer (de) Georges, archiviste paléographe, à Manosque 

(7 janvier 1904). 
Owens (Miss), Florence-Shakespeare, à Avignon (5 mars i9o3). 
Pansier, Pierre, docteur en médecine, à Avignon (3 février 1898). 



MEMBRES TITULAIRES (i). 

MM. 

Abric, Maurice, négociant, à Avignon (i883). 

AcHARD, Félix, percepteur, à Avignon (1882). 

Alphant, O. *, docteur en médecine, à Avignon (i*" juin 1895). 

Amic, Joseph, avocat, â Avignon (6 mars 1902). 

Annequin, Jehan, secrétaire de la Chambre des avoués, à Lyon 

(9 octobre 1902). 
Antiq, notaire, à Avignon (5 mai 1904). 
Arbaud, Paul, bibliophile, à Aix-en-Provence (1884). 
Arnaud, notaire, à Arles (1886). 
Arnaud, notaire, à Barcelonnette (6 juin i885). 
Arnaud df Fabre, docteur en médecine, à Avignon (i883). 
Aubert, juge de paix, à Chénerailles (Creuse) (1892). 
AuGROs, docteur en médecine, à Lyon (4 mars 1904). 
Augûiot, docteur en médecine, à Lyon (i885). 
Aurouze (Abbé), professeur, à Avignon (2 décembre 1897). 
Avon, Emile, propriétaire, à Avignon (i 883). 
Avon de Collongue (Baron d^), ministre plénipotentiaire de 

France, à Collongue, près Cadenet (6 novembre 1902). 
Azémar, docteur en médecine, à Avignon (2 décembre 1897). 

(I) L'Académie, en réformant dernièrement ses statuts^ a décidée la suppression de 
la catégorie des membres associés. L'astérisque indique les anciens associés, qui, par 
le bénéfice du nouveau règlement, sont devenus titulaires. 



DE LA SOCIETE V 

Bayol, dessinateur à la chefferie du 7* génie, à Avignon (2 décem- 
bre 1897). 

Beaulieu (Db), Roger, notaire, à Avignon (5 mai 1904). 

Bec, Fortuné, docteur en médecine, à Avignon (3 décembre igoS). 

Belladen, Louis, négociant, à Avignon (2 décembre 1897). 

Berger, Jean, pharmacien-chimiste, à Lyon (9 octobre 1902). 

Biret, Noël, ((I, ferronnier d*art, à Avignon (1882). 

Blanc, Alfred, professeur au Lycée d'Avignon (4 mars 1904). 

Blanc, Léon, instituteur en retraite, à Serviers-Labaume (Gard) 
(1891). ^ 

BocH, architecte, à Avignon (7 janvier 1904). 

BoNNECAZE, agent d'assurances, à Avignon (16 avril 1896). 

Bonnet, Julien, ancien conseiller de préfecture, à Avignon (1882). 

Bonnet, Léon, ancien bâtonnier de Tordre des avocats, à Avignon 
(i883). 

Bonnet, Victor, docteur en médecine, à Oppède (6 février 1896). 

Bourges, Gabriel, Q L, professeur de dessin à Avignon (1882). 

Bourges, Michel, médecin de la marine, à Madagascar (i*' février 
1900). . 

Broelemann, Henry, banquier, à Paris (11 octobre 1900). 

Bruguier-Roure, au Pont-Saint-Esprit (8 janvier 1887). 

Brun, Pierre-, juge de paix, à Laghouat (Alger) (6 janvier 1897). 

Brunel, Léon, à Avignon (2 avril 1887). 

Camatte, notaire, à Avignon (16 janvier 1902). 

Capeau, Edmond, publiciste, à Avignon (6 janvier 1898). 

Capdevilla, Dominique, négociant, à Avignon (3 décembre I903j. 

Carre, docteur en médecine, à Avignon (1882). 

Cartoux, professeur de rhétorique au Lycée d'Avignon (17 octobre 
1901). 

Cassin, Paul, docteur en médecine, à Avignon (1882). 

Caucanas, ingénieur du canal de Pierrelatte, à Orange (7 février 
i885). 

Chambon, a., juge au Tribunal de commerce d'Avignon (16 jan- 
vier 1902). 

• Chambre de commerce d'Avignon (1892). 

Chassang (Abbé), professeur au Petit Séminaire d'Avignon 
(i'" février 1895). 

Chatelet, Casimir, employé à la Préfecture, à Avignon (9 no- 
vembre 1899). 

Chrestian, ancien maire, à Sault (1882). 

Clavel lAbbé), aux Imberts (14 juin 1900). 



yi LISTE DES MEMBRES TITULAIRES 

CouRjON (D'), directeur de rétablissement médical de Meyzieu 
(Isère) (5 février igoS). 

CussAC (Abbé), ancien vicaire général, au château de Mimande, à 
Chaudenay (Saône-et-Loire) (i i novembre 1897;. 

Darmet, Emmanuel, à Lyon (17 avril 1902). 

Dauvergne, avoué, à Avignon (2 juin 1898). 

David, Paul, ingénieur, au château du Joncquier, près Bagnols 
(6 juin 1901). 

Delacour, Théodore, à Paris (i883). 

Delaly, Alfred, ingénieur à la C'*P.-L.-M., à Avignon (4 juillet 
1891). 

Deleuze, avocat, à Paris (1886). 

Delmas, Jacques, H^ L, professeur hon. au Lycée de Marseille 
(25 octobre 1899). 

Delorme, sculpteur, àUzès (1886). 

Destandau, pasteur de la religion réformée, à Mouriès (1892). 

Deydier, Marc, notaire, à Cucuron (1890). 

DiDiÉE, conducteur des Ponts-et-chaussées, à Avignon (17 octobre 
1901). 

Ducommun, André, électricien, à Avignon (7 juin 1895). 

Ducos, O. *, ancien député de Vaucluse (1882). 

DuLaurens (Baron), Guillaume, à Avignon (i3 avril 1899). 

DuNAND, Paul, à Avignon (11 juin 1903). 

Duprat, Eugène, professeur au Lycée d'Avignon (16 janvier 1902). 

Durand (Abbé), chanoine honoraire, directeur au Petit Séminaire 
de Beaucaire (4 janvier 1889). 

Durbesson, docteur en médecine, à Avignon (4 juin 1896). 

Épinat, *, Pierre, industriel, à Lyon (17 avril 1902). 

EspÉRANDiEu, Emile, ejf, 1^ L, capitaine à Paris (6 septem- 
bre 1895). 

Fagniez, Charles, entomologiste, au château de la Bonde (16 jan- 
vier 1902). 

Faucher (De), Paul, à Bollène (1882). 

Fauchier, notaire, à Orange (5 juillet 1890). 

Faure, Jean-Louis, à Lyon (6 mars 1902). 

FiCHAUX, O. *, lieut.-colonel d'artillerie territoriale, à Avignon 
(1886). 

Florence, Q L, professeur à la Faculté de médecine de Lyon 
(il juin 1903). 

Florent, ancien président du Tribunal de commerce, à Avignon 
(11 novembre 1897). 



DE LA SOCIETE VII 

Francion, Louis, négociant, à Avignon (i6 janvier 1902). 

Fructus (Abbé), curé de Grillon (7 mars 1901). 

Frutière (Mgr), prélat de la maison de Sa Sainteté, à Nimes 

(4 janvier iSgS). 
Gap, Lucien, instituteur, à Suzette (1882). 

• Garcin, JI, ancien greffier du Tribunal civil, à Apt (1884). 
Gaudemaris (Marquis de), au château de Massillan, par Orange 

(5 novembre igoS). 
Genin, Joseph, *, officier principal d'administration en retraite, 

à Avignon (i" décembre 1899). 
Gérin-Ricard (Vicomte de), ||, à Marseille (1882). 
Gilles, Joseph, à Avignon (5 mars igoS). 
Gleizal, Albert, ingénieur civil, à Avignon (5 juillet iSgS). 
Glénard, F., *, docteur en médecine, correspondant de l'Acadé- 
mie de médecine, à Paris (11 juin igoS). 
GoNDRAN, avocat, à Avignon (i3 avril 1899). 
GouBET, Henri, avocat, à Avignon (i3 avril 1899). 
Gouell, *, médecin en chef de Thôpital militaire d'Avignon 

(3 mars 1898). 
Grailly (Comte de) , inspecteur général du Crédit foncier, à Paris 

(7 juin 1895). 
Granet, Léonce, propriétaire, à Roquemaure (1882). 
Grimaud (Abbé), |>, directeur de Tlnstitut des sourds-muets, à 

Montfavet (2 juin 1890). 
Grimaud (Abbé), Augustin, curé de Sorgues (10 janvier 1901). 
Griolet, #, sous-intendant militaire, à Nice (9 septembre 1895). 
Grivolas, Pierre, Q L, directeur de TÉcole des Beaux-Arts, à 

Avignon (1882). 
Guende (M"*), Blanche, à Cavaillon (4 juin 1887). 
GuÉRiN, Joseph, propriétaire, à Marseille (2 juillet 1896). 
GuiBERT, avoué, à Avignon (i883). 
GuiGNARD DE BuTTEviLLE, à Chouzy (Loir-et-Cher) (i885). 

• Honorât, Bastide, à Digne (1892). 

HuGUET (Abbé), Joseph, à Saint-Chamond (Loire) (6 mars 1902). 
Imbert de la Touche, docteur en médecine, à Lyon (8 janvier 1903). 
JoLEAUD, *, OL, sous-intendant militaire, à Avignon (8 novembre 

1900). 
Jouve (M"'), Marie-Thérèse, à Cavaillon (6 mars 1902). 
Kasler, tapissier, à Avignon (8 janvier i9o3). 
Labande, L.-H., q L, conservateur de la Bibliothèque et du 

Musée-Calvet, à Avignon (7 mars 1891). 



Vni LISTE DES MEMBRES TITULAIRES 

La Boulie (Giraud de), Hippolyte, à Avignon (9 octobre 1902). 
Laffont, docteur en médecine, à Llsle (17 octobre 1901). 
Larché, 0, docteur en médecine, à Avignon (i883). 
Lassalle, capitaine trésorier au 7* génie, à Avignon (2 juillet 1896). 
Laval, Victorin, ^^ || L, médecin major en retraite, à Avignon 

(1882). 
Le Gras, notaire, à Avignon (2 juin 1898). 
Levezou (Abbé), ciiré delà Barthelasse (11 novembre 1897). 
Leydet, Victor, artiste peintre, à Avignon (6 juin 1901). 
Limasset, docteur en droit, à Avignon (1882). 
Maisonneuve, Georges, à la Bégude, près Rochefort (2 avril igoS). 
Manivet, Paul, 9, juge de paix, à Bollène (i883). 
Mariéton, Paul, chancelier du Félibrige, à Paris (1891). 
Marmoiton, conseiller à. la Cour d'appel de Nancy (5 avril 1900). 
Martin, architecte, à Avignon (5 juin 1902). 
Martin, propriétaire, à Thouzon (Le Thor) (1886). 
Maumet, Rémy, lépidoptériste, à Avignon (6 décembre 1900). 
Meffre (Mgr), prélat de la maison de Sa Sainteté, à Rome 

(29 avril 1893). 
Méritan (Abbé), Jules, curé au Villars (3 février 1898). 
Meunier (Mgr), évêque d'Évreux (8 juillet 1897). 
Michel, Fernand (Antony Real fils), à Orange (4 janvier 1895). 
Michel, Louis, lyj, O. *, directeur de la Société générale, 

ancien président du Tribunal de commerce, à Avignon (16 no- 
vembre 1898). 
Michel-Béchet, docteur en médecine, à Avignon (7 juin 1895). 
Mistral, notaire, à Sault (14 novembre 1901). 
Mordon, F., ancien trésorier-payeur général, à Bourg-la-Reine 

(Seine) (2 avril 1887). 
MouRAL, *, chef du génie, à Toulon (3 mai 1900). 
MouziN, Alexis, Q L, receveur municipal, à Avignon (1882). 
Naquet, Gustave, ancien président du Tribunal de commerce, à 

Avignon (2 juin 1898). 
NouRRY, Marcel, à Avignon (7 décembre 1899). 
Paillasson, egs, docteur en médecine, conseiller général du Rhône, 

à Lyon (2 avril 1903). 
Palun, Auguste, négociant, à Avignon (1882). 
Pamard, O. ^, Q L, docteur en médecine, à Avignon (1882). 
Parrocel, Pierre, Q L, docteur en droit, substitut du procureur 

de la République, à Marseille (5 avril 1898). 
Paul, Henri, O. *, préfet honoraire, à Avignon (16 juin 1901). 



DE hh SOCIÉTÉ IX 

Pellat. Edmond, O. *, inspecteur général honoraire au Ministère 

de l'intérieur et ancien président de la Société géologique de 

France, à la Tourette près Tarascon (2 juillet i8g6). 
Penne, docteur en médecine, à Avignon (14 novembre igoO- 
Pernod, Jules, négociant, à Avignon (1882). 
Perret, Marius, homme de lettres, à Avignon (i3 février 1902). 
Perrin, instituteur, à Avignon (5 janvier 1892). 
PiCHENOT, rpédecin en chef de Tasile des aliénés à Montdev^rgues 

(17 octobre 1901). 
PouPART, à Avignon (3 décembre igoS). 
Prat, directeur de rinstitut médical d'aérothermothérapie , à 

Paris (2 avril igoS). 
Privât (Général), O. «J, commandant 1^ Sg* brigade d'infanterie, à 

Nimes (6 juin 1901). 
Protton, Pierre, fabricant de meubles, à Avignon (i883). 
Puthod, administrateur-directeur de la Société des tnineç de 

Sainte-Paule et de Ternand (Rhône) {17 avril 1902). 
PuYMALY, Henri, 0, au château Lafosse, à Cauderan (Gironde) 

(4 décembre 1902). 
QuEYTAN, Félix, chanoine titulaire, à Avignon (17 octobre 19P1). 
Ranchier, pharmacien, à Carpentras(i7 octobre 1901). 
Rastoul, Joseph, à Singapour (6 juin 1901). 
Raynolt, anc. greffier du tribunal, à Avignon (i*' février 1900). 
Reboulet, *, capitaine au 58' d'infanterie, à Avignon (4 décembre 

1902). 
Redon (Abbé), grand-vicaire du diocèse d'Avignon (4 juillet 1901). 
Requis, docteur en médecine, à Villeneuve-lez-Avignon (1882). 
Renaut, *, ^ I., professeur à la Faculté de médecinq de Lyqn 

(ï I juin 1903). 
• Rencurel, conseiller de préfecture, à Avignon (1882). 
Requin (Abbé), 1^ I. , archiviste diocésain, à Avignon (7 février i885) . 
Ripert, professeur de musique, à Avignon (2 décembre 1897). 
RiPERT-MoNCLAR (Marquis de), 0.*,anc. ministre plénipotentiaire 

de France, au château d'Allemagne (B.-Alpes) (6 novembre i9o3). 
Roche, Gaston , docteur en médecine, à Sorgues{ 14 novembre 1902). 
RocHETiN (M"*), à Arpaillargues (Gard) (1 1 novembre 1897). 
Rouis, inspecteur-adjoint des forêts, à Carcassonne (5 avril 1895). 
RoussET, Antonin, inspecteur des forêts en retraite, à l^'Isle 

(3 mai 1900). 
RouviÈRE, avoué, à Avignon (3i mars 1898), 
Roux, notaire, à Cavaillon (1882), 



VIII LISTE DES MEMBRES TITULAIRES 

La BouLiE (Giraiid de), Hippolyte, à Avignon (9 octobre 1902). 
Laffont, docteur en médecine, à Llsle (17 octobre 1901). 
Larché, <|, docteur en médecine, à Avignon (i883). 
Lassalle, capitaine trésorier au 7* génie, à Avignon (2 juillet 1896). 
Laval, Victorin, ^, ^ L, médecin major en retraite, à Avignon 

(1882). 
Le Gras, potaire, à Avignon (2 juin 1898). 
Levezou (Abbé), curé de la Barthelasse (11 novembre 1897). 
Leydet, Victor, artiste peintre, à Avignon (6 juin 1901). 
Limasset, docteur en droit, à Avignon (1882). 
Maisonneuve, Georges, à la Bégude, près Rochefort (2 avril igoS). 
Manivet, Paul, 9, juge de paix, à Bollène (i883). 
Mariéton, Paul, chancelier du Félibrige, à Paris (1891). 
Marmoiton, conseiller à la Cour d'appel de Nancy (5 avril 1900). 
Martin, architecte, à Avignon (5 juin 1902). 
Martin, propriétaire, à Thouzon (Le Thor) (1886). 
Maumet, Rémy, lépidoptériste, à Avignon (6 décembre 1900). 
Meffre (Mgr), prélat de la maison de Sa Sainteté, à Rome 

(29 avril 1893). 
Méritan (Abbé), Jules, curé au Villars (3 février 1898). 
Meunier (Mgr), évêque d'Évreux (8 juillet 1897). 
Michel, Fernand (Antony Real fils), à Orange (4 janvier 1895). 
Michel, Louis, lyj, O. ♦, directeur de la Société générale, 

ancien président du Tribunal de commerce, à Avignon (16 no- 
vembre 1898), 
Michel-Béchet, docteur en médecine, à Avignon (7 juin 1895). 
Mistral, notaire, à Sault (14 novembre 1901). 
Mordon, F., ancien trésorier-payeur général, à Bourg-la-Reine 

(Seine) (2 avril 1887). 
MouRAL, *, chef du génie, à Toulon (3 mai 1900). 
Mouzin, Alexis, Q L, receveur municipal, à Avignon (1882). 
Naquet, Gustave, ancien président du Tribunal de commerce, à 

Avignon (2 juin 1898). 
NouRRY, Marcel, à Avignon (7 décembre 1899). 
Paillasson, ^, docteur en médecine, conseiller général du Rhône, 

à Lyon (2 avril 1903). 
Palun, Auguste, négociant, à Avignon (1882). 
Pamard, O. ^, ijk L, docteur en médecine, à Avignon (1882). 
Parrocel, Pierre, Q L, docteur en droit, substitut du procureur 

de la République, à Marseille (5 avril 1898). 
Paul, Henri, O. *, préfet honoraire, à Avignon (16 juin 1901). 



DE hK SOCIÉTÉ IX 

Pellat, Edmond, O. *, inspecteur général honoraire au Ministère 

de l'intérieur et ancien président de la Société géologique de 

France, à la Tourette près Tarascon (2 juillet 1896). 
Penne, docteur en médecine, à Avignon (14 novembre 1901). 
Pernod, Jules, négociant, à Avignon (1882). 
Perret, Marius, homme de lettres, à Avignon (i3 février 1902). 
Perrjn, instituteur, à Avignon (5 janvier 1892). 
PiCHENOT, ipédecin en chef de l'asile des aliénés à Montdev^rgues 

(17 octobre igoi). 
PouPART, à Avignon (3 décembre igoS). 
Prat, directeur de l'Institut médical d'aérothermothér^pie , à 

Paris (2 avril igoS). 
Prhtat (Général), 0. *, commandant 1^ bot brigade d'infanterie, à 

Nimes (6 juin 1901). 
Protton, Pierre, fabricant de meubles, à Avignon (i883). 
^PuTHpD, administrateur-directeur de la Société des mineç de 

Sainte-Paule et de Ternand (Rhône) (17 avril 1902). 
PuYMALY, Henri, 0, au château Lafosse, à Gauderan (Gironde) 

{4 décembre 1902). 
QuEYTAN, Félix, chanoine titulaire, à Avignpn (17 octobre 1901). 
Ranchier, pharmacien, à Carpentras(i7 octobre 1901). 
Rastoul, Joseph, à Singapour (6 juin 1901). 
Raynolt, anc. greffier du tribunal, à Avignon (i" février 1900). 
Reboulet, *, capitaine au 58* d'infanterie, à Avignon (4 décembre 

1902). 
Redon (Abbé), grand-vicaire du diocèse d'Avignon (4 juillet 1901), 
Requis, docteur en médecine, à Villeneuve-lez-Avignon (1882). 
Renaut, *, I., professeur à la Faculté de médecine de Lyon 

(il juin 1903). 
• Rencurel, conseiller de préfecture, à Avignon (1882). 
Requin (Abbé), 1^1 1., archiviste diocésain, à Avignon (7février i885). 
Ripert, professeur de musique, à Avignon (2 décembre 1897). 
Ripert-Monclar (Marquis de), O.*, anc. ministre plénipotentiaire 

de France, au château d'Allemagne (B.-Alpes) (6 novembre igo3). 
Roche, Gaston , docteur en médecine, à Sorgues( 14 novembre 1902). 
RocHETiN (M"*), à Arpaillargues (Gard) (11 novembre 1897). 
Rouis, inspecteur-adjoint des forêts, à Carcassonne (5 avril 1895). 
RoussET, Antonin, inspecteur des forêts en retraite, à L'Isle 

(3 mai 1900). 
RouviÈRE, avoué, à Avignon (3i mars 1898), 
Roux, notaire, à Cavaillon (1882), 



X MEMBRES TITULAIRES DE LA SOCIÉTÉ 

Roux, Rémy, docteur en médecine, à Avignon (8 juillet 1897). 

Sabatier, Antoine, (i> L, professeur agrégé à la Faculté de méde- 
cine de Lyon (7 janvier 1904). 

Sage (Abbé), curé de Mormoiron (9 novembre 1899). 

Saint-Martin, Jean, avocat, à Avignon (6 septembre 1895). 

Salles, Antoine, avocat à la Cour d'appel, président de la Société 
littéraire, historique et archéologique de Lyon (5 mai 1904). 

Sallustien (Frère), directeur des Écoles chrétiennes, àUzès(i886). 

Saurel, Ferdinand, Q L, chanoine titulaire, à Montpellier (1884). 

Sauve, Fernand. 0, archiviste-bibliothécaire, à Apt (1892). 

Savinien (Frère), anc. inspecteur des Frères des Écoles chrétiennes, 
à Rome (1886). . 

Savournin , conseiller général du canton de Gordes , à L'Isle 
(17 octobre 1901). 

Seynes (De), Léonce, propriétaire, à Saint-Didier (1882). 

Tallet, docteur en médecine, à L'Isle-sur-Sorgue (4 mars 1904). 

Tardieu, *, docteur en médecine, à Arles (i3 octobre 1888). 

Terris (De), ancien notaire, à Avignon (1882). 

Thomas, Joseph, négociant, à Avignon (i883). 

Thomas, René, pharmacien, à Lyon (9 juillet 1903). 

Tourtet, Q, architecte départemental, à Avignon (2 février 1897). 

Trouillet (Abbé), curé du Thor (3 mai 1900). 

Valabrègue, Roger, avocat, à Avignon (i" mars 1890). 

Valayer, Louis, propriétaire, à Avignon (1882). 

Valentin, Q, architecte, à Avignon (1882). 

Valla (Abbé), Q, curé-doyen de Villeneuve-lez-Avignon (7 dé- 
cembre 1894). 

Vallentin du Cheylard, Roger, Q, receveur des domaines, à 
Montélimar (5 novembre 1887). 

• Vayssières, ^ L, professeur à la Faculté des sciences et 
conservateur du Muséum d^histoire naturelle, à Marseille (.1891)- 

Vécat, Ernest-Frédéric, Qy jurisconsulte, adjoint au maire de 
Lyon (9 octobre 1902). 

VÉRAN, Auguste, L, architecte, à Arles (i883). 

Verdet, Gabriel, *, à Avignon (i883). 

Verdet, Marcel, à Avignon (1882). 

Vernet, Lucien, Q L, sculpteur, à Avignon (6 juin i885). 

ViLLARET (De), *, lieutenant-colonel attaché au XV' corps 
d'armée, à Marseille (2 mars 1899). 

ViNCENTi, docteur en médecine, à Avignon (14 novembre 1902). 

ViONNET, Charles, y>, professeur à TÉcole des Beaux-Arts, à 
Avignon (9 novembre 1899). 



MEMBRES CORRESPONDANTS DE LA SOCIETE XI 

VissAC (Baron de), Marc, directeur du Crédit foncier pour le 

département de Vaucluse, à Avignon (i8 octobre iSgS). 
VissAC (Baron de), Raoul, château de Montsauve, à Sauveterre 

(Gard) (i5 novembre igoS). 
Xavier de Fourvières (R. P.), prieur des Prémontrés, à Stor- 

rington, duché de Sussex, Angleterre (!•' février iSgS). 
Zacharewicz, <|, O. *, professeur û l'École départementale 

d'agriculture de Vaucluse (6 juin 1901). 



MEMBRES CORRESPONDANTS. 

MM. 

Allec, Ludovic, anc. directeur de la Revue historique de Pro- 
vence, à Marseille. 

André, Charles, *, O L, professeur à la Faculté des sciences et 
directeur de-l'Observatoire de Lyon. 

Barrier, docteur en médecine, à Meyzieu (Isère). 

Barthélémy (De), Anatole, *, membre de l'Institut, à Paris. 

Beauregard, *, professeur au Muséum, à Paris. 

BoiSLiSLE (Dé), *, membre de l'Institut, à Paris. 

Cazalis de Fondouce, géologue, à Montpellier. 

CoMPAYRÉ, Gabriel, O. *, recteur de l'Université et de l'Académie 
de Lyon. 

Depéret, Charles, *, doyen de la Faculté des sciences de Lyon. 

Devars, docteur en médecine, à Barcelonnette. 

Duhamel, Q L, archiviste départemental de Vaucluse, à Avignon. 

Gaudry, Albert, *, membre de l'Institut, à Paris. 

GouRju, Antonin, sénateur du Rhône. 

Guillaume (Abbé), archiviste des Hautes-Alpes. 

Janet, Charles, ingénieur des manufactures, à Beauvais. 

Lacroix, *, archiviste de la Drôme, à Valence. 

Lecomte, adjoint du génie, à Commercy. 

Leenhard, géologue, à Montpellier. 

Lenthéric, *, ingénieur, à Nimes. 

LiEUTAUD, Victor, à Volonne (Basses- Alpes). 

LocARD, à Lyon. 

Marchand, Henri, sous-directeur honoraire au Ministère de l'agri- 
culture, à Paris. 

Mas, député de l'Hérault. 

MoRTiLLET (De), Adrien, 0, à Paris. 

NicOT, pharmacien, à Paris. 



XII 



SOCIETES CORRESPONDANTES 



Saint- Venant (De), inspecteur des forêts, à Nevers. 
Testu, professeur à la Faculté de médecine de Lyon. 
Villefosse (Héron de), *, conservateur au Musée du Louvre, 
membre de Tlnstitut, à Paris. 



Sociétés avec lesquelles l'Académie échange ses Mémoires. 



Alpes (Basses-) — Société scientifique et littéraire des 

Basses-Alpes, à Digne. 

Alpes (Hautes-) .... — Société d*étude des Hautes-Alpes, à 

Gap. 

Alpes-Maritimes .... — Société des lettres, sciences et arts des 

Alpes-Maritimes, à Nice. 

Aude — Société des arts et sciences de Carcas- 

sonne. 

Bouches-du-Rhône ... — Académie des sciences, arts et belles- 
lettres d'Aix. 
Société d'études provençales, à Aix. 
Société d'horticulture et de botanique 

de Marseille. 
Société de statistique de Marseille. 

Calvados — Société française d'archéologie pour la 

conservation des monuments histo- 
riques, à Caen. 

Charente — Société archéologique et historique de 

la Charente, à Angoulême. 

Charente-Inférieure . . — Revue de Saintonge et d'Aunis, à 

Saintes. 

Constantine — Société archéologique du département 

de Constantine. 

Corrèze — Société des lettres, sciences et arts de 

la Corrèze, à Tulle. 

Côte-d'Or — Académie des sciences, arts et belles- 
lettres de Dijon. 
— Commission départementale des anti- 
quités de la Côte-d'Or, à Dijon. 

Doubs — Académie des sciences, belles-lettres et 

arts de Besançon. 

Drame — Société départementale d'archéologie et 

de statistique de la Drôme^àValence» 



SOCIETES CORRESPONDANTES 



xin 



Drôme — Bulletin d^histoire ecclésiàstfque des 

diocèses de Valence, Gap, Grenoble 
et Viviers, à Romans. 

Gard — Société scientifique et littéraire d'Alais. 

Académie du Gard, à Nimes. 
Comité de Tart chrétien, à Nimes. 
Société d'étude des sciences naturelles, 
à Nimes. 
Garonne (Hanite-) ... — Académie des sciences, inscriptions et 

belles-lettres de Toulouse. 
Société archéologique du Midi de la 
France, à Toulouse. 
Gironde — Académie nationale des sciences, belles- 
lettres et arts de Bordeauk. 
Société archéologique de Bordeaux. 

Hérault — Société archéologique, scientifique et 

littéraire de Béziers. 
Académïe des sciences et lettres de 

Montpellier. 
Société archéologique àé Montpellier. 
Société languedocienne de géographie, 

à Montpellier. 
Société pour l'étude des langues roma- 
ines, à Montpellier. 

Isère — ACiadémlb delphinale, à Grenoble. 

Sbcîété de statistique de Tlsère, à Gre- 
noble. 
Société des Amis des sciences natu- 
relles de Vienne. 

Loire — La Diana, ^ Montbrison. 

Loiret — Société historique et archéologique de 

rOrléafiais, à Orléans. 

Lot-et-Garonne — Société 'd'agriculture, sciences et arts 

d'Agen. ' " 

Meurthe-et-Moselle. . . — Académie de Stanislas, à Nancy. 

Société d'archéologie lorraine, à Nancy. 
Nord — Comriiissîon historique du départe- 
ment du Nord, à Lille. 
Université de Lille. 

Pas-de-Calais — Société des antiquaires de la Morinie, 

à Saint-Omer. 



xrv 



SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES 



Puy-de-Dôme — Société des Amis de TUniversité de 

Clermont-Ferrand. 

Pyrénées (Basses-) ... — Société des sciences, lettres et arts de 

Pau. 

Pyrénées-Orientales . . — Société agricole, scientifique et littéraire 

desPyrénées-Orientales,àPerpignan. 

Rhône — Académie des sciences, belles-lettres et 

arts de Lyon. 
Bulletin historique du diocèse de Lyon. 
Société linnéenne de Lyon. 
Société littéraire, historique et archéo- 
logique de Lyon. 
Université de Lyon. 

Saône-et-Loire — Société éduenne des lettres, sciences et 

arts, à Autun. 
Société des sciences naturelles de Saône- 
et-Loire, à Chalon-sur-Saône ' 

Savoie — Société savoisienne d'histoire et d'ar- 
chéologie, à Chambéry. 

Savoie (Haute-) .... — Société florimontane de la Haute- 
Savoie, à Annecy. 

Seine — Ministère de l'Instruction publique et 

des Beaux-Arts : Archives du service 
des monuments historiques. — Co- 
mité des travaux historiques et 
scientifiques. 
Société nationale des antiquaires de 

France. 
Université de Paris. 

Somme — Société des Antiquaires de Picardie, à 

Amiens. 

Tarn — Société des sciences, belles-lettres et 

arts du Tarn, à Albi. 

Tam-et-Garonne. ... — Société archéologique du Tarn-et-Ga- 

ronne, à Montauban. 

Var — Académie du Var, à Toulon. 

Société d'études scientifiques etarchéo^ 
logiques de Draguignan. 

Vienne (Haute-) .... — Société des Amis des sciences et arts 

de Rochechouart. 



SOCIETES CORRESPONDANTES XV 

Alsace-Lorraine .... — Académie de Metz. 

Société pour la conservation des monu- 
ments historiques, à Strasbourg. 
États-Unis d'Amérique. — American Muséum of natural history, 

à New- York. 
The Missouri botanical garden. 
Lioyd library, à Cincinnati. 

Italie - Accademia di conferenze storico-giuri- 

diche di Roma. 

Suède , . . . _ Université royale d'Upsal. 

Kongl.vitterhets, historié och antiqui- 
tets Akademien, à Stockholm (Acadé- 
mie royale des belles-lettres, histoire 
et antiquités). 

Suisse — Société neuchâteloise de géographie, 

à Neuchâtel. 
Historiche und antiquarische Gesell- 
schaft, à Bâle. 




Installation du nouveau Bureau. 



En sa séance du 7 janvier 1904, TAcadémie de Vauciuse, 
conformément à ses statuts, a procédé à l'élection de ses membres 
qui auront à faire partie du Bureau pour les années 1904 et igoS. 

Ont été élus : 

MM. M. DE VissAC, président ; 
JOLEAIJU, ) . . . . , 

H.Paul, (^'''-^^''^^'^^"' 
Labande, secrétaire général ; 
J. DE Terris, \ 

D"^ Pansier, > présidents de section ; 
D^ R. Roux, ) 
C. Chatelet, secrétaire; 
BoxNECAZE, trésorier ; 
Di DiÉE , bibliothéca ire-arch iviste . 

L'installation du nouveau Bureau a eu lieu le 4 février suivant. 
M. Gabriel Bourges, président sortant, en remettant ses pouvoirs 
â son successeur, a prononcé l'allocution suivante : 

Monsieur le Président, 

Ce n'est pas avec de longs discours ou en des termes très 
choisis que je saluerai votre élection à la présidence de l'Académie 
de Vauciuse : les elïorts oratoires tant soit peu prolongés me 
sont interdits, et s'il me prenait fantaisie de faire, en votre hon- 
neur, une incursion dans l'art de bien dire, je montrerais bientôt 
combien j'y réussis peu. Notre auditoire, malgré son extrême 
bienveillance, ne manquerait pas de faire, entre mon allocution et 
votre réponse, une comparaison qui ne serait pas à mon avantage. 

Je vous dirai donc bien simplement que je suis enchanté de 



1 . MEMOIRES 

VOUS voir au fauteuil présideniiel et que je vous y trouve bien à 
votre place. La presque unanimité des suflrages qui s'est réunie 
sur votre nom prouve que je ne suis pas seul ici de cet avis. 

Depuis une dizaine d'années vous êtes parmi nous ; vous arri- 
viez de l'Auvergne. Ce n'est pas impunément qu'on habite cette 
merveilleuse contrée ; vous en subissiez le charme comme tous 
ceux que délectent les grandes scènes de la nature ou de l'histoire. 

Cet exode, de quelque regret qu'il fût accompagné, n'était pas 
un exil ; il me semble même qu'en venant parmi nous vous 
retrouviez votre véritable patrie. Je m'explique : pour qui sait 
lire vos travaux historiques sur l'Auvergne, en particulier pen- 
dant la période révolutionnaire, pour qui sait écouter votre 
inoubliable discours sur les Filles d'Avignon, votre tempérament 
littéraire n'est pas une énigme longue à deviner. Vous êtes un 
historien aussi consciencieux que peut l'exiger la conscience la 
plus scrupuleuse. Vos idées, vos convictions ne doivent rien 
qu'aux documents que vous réunissez abondants, que vous con- 
trôlez avec une rare sagacité et une critique impeccable. Mais 
une fois en règle avec votre conscience, rassuré contre toute 
controverse, vous ne pouvez vous astreindre à faire de votre récit 
une œuvre impersonnelle, froidement exacte, purement scientifi- 
que. Il devient sous votre plume alerte, éloquente, émue, une 
œuvre littéraire, je dirais volontiers une œuvre d'art. Quand on a 
cette conception particulière de l'histoire on doit naître en Pro- 
vence : à Aix comme Mignet ou à Marseille comme Thiers ; ou 
bien, si l'on a omis cette formalité, car on n'a pas toujours le choix 
du lieu de sa naissance, on prend le parti que vous avez pris : on 
devient avignonais. Vous pourriez m'objecter qu'on n'est pas le 
maître de sa destinée et que telles circonstances, dont vous donne- 
riez les détails justificatifs, vous ont conduit parmi nous. Erreur, 
Monsieur le Président, vaine apparence ! En venant en Vaucluse 
vous avez obéi à une loi plus mystérieuse que celle qui précipite 
les cours d'eau des hautes vallées dans les plaines basses, mais . 
tout aussi inéluctable : vous êtes avignonais par prédestination. 

Voilà pourquoi vous êtes aussi bien, mieux à votre place à la 
tête de l'Académie de Vaucluse qu'à celle de l'Académie de Cler- 
mont, quelle que soit du reste l'importance des deux assemblées. 
La nôtre, après deux ans d'une présidence que je qualiiierai de 
suffisante, avec les plus indulgents, avait droit à des compensa- 
tions ; c'est de vous qu'elle les attend. 

Je soupç^>nnc n^tre nouveau vice-président, M. Henri Paul, de 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE S 

se dérober par une absence opportune à Téloge que je lui prépa- 
rais. Il savait qu'un demi-siècle et plus de relations annicales 
ininterrompues m'avait richement documenté pour cette besogne 
et de quel cœur je m'y livrerais. Qu'il se rassure : je n'abuserai 
pas plus de son absence que de sa présence pour l'accabler d'un 
panégyrique qui ne serait ni dans son goût ni dans le mien. Mais 
ne peut-on le louer d'une qualité qui apparaît à tout le monde, 
dont il bénéficie sûrement sans qu on puisse affirmer qu'il en a 
tout le mérite : son admirable conservation. 

Ayant déjà parcouru une longue carrière administrative, il nous 
quitta il y a quelque vingt-cinq ans. Il nous revint il y a peu de 
mois, toujours vaillant d'esprit et de corps, plus jeune s'il est 
possible. N'a-t-il pas conservé môme ses illusions, car c'en était 
une de croire que ses concitoyens le laisseraient tranquillement 
jouir d'un repos bien gagné, l'hiver au coin du feu, Tété à l'ombre 
et au frais.. Aujourd'hui, suivant le courant, vous félevez à la 
vice-présidence de votre Académie et il y restera à moins que 
vous n'en fassiez, à terme échu, votre président. 

Je suis mal à l'aise aujourd'hui pour donner à M. le vice- 
président Jolcaud la part d'éloges qui lui revient. Si je le montre 
dans cette journée mémorable où sa vaillance arracha au Rasteau 
le secret de sa formation, je risque de déflorer la communication 
qu'il nous a promise, je prive l'Académie d'une de ces confé- 
rences dont l'intérêt, le charme communicatifs sont bien connus. 
Car c'est la grande qualité de notre nouveau vice-président de 
rendre attrayante cette science de la géologie, que d'aucuns sem- 
blent s'attacher à rendre abstruse, réservée aux seuls initiés. Sous 
sa parole elle redevient ce qu'elle doit être, une Genèse moderne 
se dressant au vestibule des autres sciences, comme les Genèses 
anciennes précédaient les histoires des religions. 

Espérons que nous aurons le plaisir de l'accompagner dans de 
futures excursions et que, grâce à lui. nous connaîtrons de mieux 
en mieux notre département, ce qui sera une raison de l'aimer 
davantage. 

Messieurs, la tache de thuriféraire ne va pas sans quelque 
monotonie. Le choix que vous avez fait des présidents de sectic^n 
me fournira-t-il l'occasion de quelque malice pas trop acérée, de 
quelque réserve dans l'optimisme dont je fais profcssir)n aujour- 
d'hui > Hélas non ; le choix de MM. de Terris, D' Pansicr, 1)^ Remy 
Roux me semble des plus heureux. Quelque esprit chagrin pré- 
tcndra-t-il que deux médecins c'était trop peu, qu'il en fallait 



4 MEMOIRES 

trois?Certes nous n'avions que rembarras du choix: les disciples 
d'Esculape sont nombreux dans notre Compagnie et leur mérite 
s'est maintes fois affirmé dans des communications bien souvent 
étrangères à la science médicale, ce qui prouve que leur compé- 
tence connaît peu de limites. Mais il vous a paru qu'un notaire et 
deux docteurs faisaient un groupe d'une gravité suffisante. Loin 
de moi l'idée qu'ils pourraient assister notre assemblée en danger. 
Dieu merci, notre jeune centenaire n'a nul besoin des bons 
offices que les mourants attendent d'ordinaire des gens de leur 
profession ; elle ne profitera que de leur zèle de savant, d'ama- 
teur des arts, d'érudit qui sont les aspects sous lesquels je les 
salue. 

M. Didiée est un jeune, il pourra supporter sans fléchir les 
fonctions de bibliothécaire. Quant à M. Chiitelct, ce sera un 
véritable soulagement pour lui de n'être plus que secrétaire des 
séances, après avoir cumulé pendant près de deux ans. 11 appor- 
terai cette tache réduite les qualités d'ordre et d'exactitude dont 
nous avons eu à le louer et dont nous le remercions. 

Et maintenant, Messieurs, vous me permettrez de finir par un 
apologue. On ma enseigné dans le temps que la première 
dynastie des rois de France, les Mérovingiens, je crois, s'était 
éteinte après avoir fourni des monarques assez obscurs qu'on a 
flétris du nom de rois fainéants. Je ne veux pas retenir ce nom 
trop peu parlementaire ; la délicatesse moderne s'accommode mal 
d'un qualificatif aussi Mérovingien. 11 paraît cependant que sous 
ces rois... constitutionnels les an"aires de l'État n'étaient pas 
tout à fait à vau-l'eau. C'est qu'il y avait à côté d'eux un homme 
doué de toutes les qualités dont ils étaient dépourvus : c'était le 
maire du Palais. 

Eh bien, mon cher successeur, je vous ferai une confidence ; 
peut-être vous rassurera-t-elle contre l'idée qu'une charge exces- 
sive vous attend. Mon prédécesseur, le D' Laval, ne me démentira 
pas. Il a été un président... constitutionnel. J'ai suivi fidèlement 
cette tradition et, si vous m'en croyez, vous ferez de même. Vous 
avez à côté de vous un maire du Palais idéal. C'est notre secrétaire- 
général et j'espère qu'il le restera longtemps, aussi longtemps 
qu'il pourra suffire à la tâche souvent très lourde et en même 
temps très délicate qu'il assume avec un zèle dont nous ne pou- 
vons lui être trop reconnaissant. Après quoi, le plus tard qu'il 
nous sera possible, nous en ferons un président. Cet honneur, il 
ne l'aura pas volé ! 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



En prenant place au fauteuil de la présidence, M. le baron de 
Vissac, président de l'Académie, a répondu en ces termes à 
l'allocution de M. Gabriel Bourges: 

Mes chers collègues, 

Le grand honneur que vous avez bien voulu me faire en m'ap- 
pelant à la présidence me remplit tout à la fois d'orgueil et de 
confusion. 

D'orgueil, car on est toujours fier d'être l'élu d'une assemblée 
d'élite, d'une réunion d'hommes aussi distingués par l'esprit qye 
par le savoir. 

Mais le chatouillement d'amour-propre provoqué par d'aussi 
précieux suffrages se transforme bien vite, à la réflexion, en une 
défiance de soi-même, en une appréhension légitime, en une de 
ces craintes qui sont le commencement de la sagesse. 

Il y a environ quinze ans, comme on le rappelait tout à l'heure, 
la sympathie de collègues aussi bienveillants que vous me valut 
la même faveur dans une autre enceinte académique. Eh bien, 
chose extraordinaire ! j'ai dû constater que les trois lustres écoulés 
depuis cette époque n'avaient rien rajeuni en moi, ni les aptitudes 
physiques, ni les élans de la pensée, ni les ardeurs de l'action, ni 
les facultés de travail et d'application. Ajouterai-je que deux 
années de présidence de section parmi vous, suivies de deux 
années de vice-présidence, — et vous savez combien sont absor- 
bants et pénibles les labeurs imposés par ces diverses fonctions 
— ont épuisé les restes de mon énergie. 

De telle sorte que je croyais avoir payé ma dette, qu'il me sem- 
blait avoir conquis des droits à la retraite, à un effacement qui 
m'est de plus en plus cher, à cet oljutn cum dignitate dont le bon 
Horace nous fait venir l'eau à la bouche. 

Vous en avez jugé autrement : Que votre volonté soit faite. 

Quand je scrute la pensée qui a dirigé votre vote, alors que le 
choix eût pu se porter si aisément sur de plus dignes, je m'ima- 
gine que c'est un prix d'assiduité que vous avez voulu décerner à 
un collègue pour sa tidèle assistance à vos travaux depuis longues 
années, chaque fois que le devoir professionnel lui en laissait le 
loisir. Vous vous êtes dit que Ton ne recherche ainsi que ce que 
Ton aime - trahii sua qiiemqiic voluptas— et qu'aimer une insti 
tution est déjà un pronostic, un premier gage de dévouement. 



6 MÉMOIRES 

S'il en est ainsi, votre sentiment n'a pas fait fausse route. 
J'éprouve, en effet, un profond attachement pour l'Académie de 
Vaucluse ; ses travaux m'inspirent un vif intérêt ; je me plais et 
je m'instruis à ses conférences, dont j'admire la variété, la fécon- 
dité, le talent et le charme. J'apprécie par dessus tout les 
agréables relations qu'elle me procure. 

Les Académies de province, en dépit des railleries dont elles 
sont l'objet, railleries dont nous sommes les premiers à sourire 
lorsqu'elles sont spirituelles, ne stationnent plus de nos jours sur 
le terrain facile et léger que nos pères appelaient les plaisirs de 
l'esprit. Elles sont allées de Tavant, agrandissant leur champ 
d'action, faisant des incursions hardies, mais fécondes, dans le 
domaine des spécialités littéraires, scientifiques et artistiques, 
jadis réservées aux seuls initiés de marque. Elles sont devenues 
des ateliers où se préparent les matériaux de la grande refonte 
historique qui s'impose. Observations, monographies, décou- 
vertes même dues à leur initiative, viennent révéler des faits 
ignorés, mettre en lumière des épisodes, des documents, des per- 
sonnages jusqu'à présent restés dans l'ombre. Grâce à elles, 
ranalyse succède à la synthèse, complétant par des détails précis, 
par des circonstances locales, des concisions souvent trompeuses. 
Que de doutes n'ont-elles pas déjà dissipé, que d'erreurs n'ont- 
elies pas rectifié, que de mines n'ont-elles pas ouvert à l'exploi- 
tation ! 

Parmi les sociétés de province, l'Académie de Vaucluse est 
incontestablement une de celles dont la vitalité est le moins 
contestable. Ses publications périodiques, de plus en plus sélec- 
tionnées, provoquent les éloges de la critique et les subventions 
du Ministère. Elle parait vouloir s'approprier la devise du grand 
fleuve qui baigne nos rivages : Crescit eundo. Elle ne se confine 
plus dans l'intimité de ses salles de réunion, derrière le mur de 
la vie privée. Elle s'extériorise de temps à autre. On la voit tenir 
ses assises sous les arcades d'un cloître ou d'un monastère, à 
l'ombre des voûtes d'un antique sanctuaire, aux pieds des rem- 
parts édentés d'une féodale forteresse, en face des merveilles de 
la nature. 

Pourquoi ne multiplierait-elle pas ses investigations archéolo- 
giques et géologiques ? Pourquoi, dans des séances publi- 
ques, ou au moins dans des séances ouvertes, ne se mettrait-elle 
pas plus souvent en contact avec ce grand public, dont le goût 
inné pour les choses de l'art semble être puisé dans l'air de notre 
pays et développé au chaud soleil du midi ? 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE ^ 

Certes, en m'elTorçant de conserver intactes les belles traditions 
dont vous m'avez confié la garde, je ne négligerai rien pour aider 
à la prospérité croissante de notre chère société et à son expan- 
sion intellectuelle de plus en plus intense. 

Pour atteindre ce but, je ne saurais mieux faire que de suivre 
les traces de mes devanciers, et notamment celles du sympathique 
président qui nous est enlevé aujourd'hui par les rigueurs du 
règlement. 

On ne se sent guère à Taise pour louer une modestie présente, 
et la gène est encore plus grande lorsqu'on vient d'être person- 
nellement l'objet d'un portrait, que la présomption seule pourrait 
faire considérer comme ressemblant. 

Je sais bien qu'en fait de portraits, de dessin, de coloris et de 
palette il ne faut pas passer derrière le maître. Son esprit conçoit, 
sa main exécute, coneeption et exécution sont aussi finement 
spirituelles Tune que l'autre. Que M. Bourges me permette 
cependant le reproche d'avoir abusé un peu du privilège qu'a 
t<^ut artiste de flatter son modèle. 

Il me félicite de parler alors qu'au contraire il devrait me 
plaindre, puisque je ne parle qu'cî raison de la difficulté que 
j'éprouve à lire, difficulté qui me prive aujourd'hui du plaisir de 
le remercier en périodes abondantes, déroulant leurs arabesques 
et leurs métaphores à travers les astragales d'une phrase endi- 
manchée, comme la circonstance le comporterait. 

Il m'excusera donc de ne rappeler qu'en une modeste prose 
verbale le tact exquis, l'aménité constante, la délicatesse de 
doigté, la séduction de manières qu'il a déployés durant son 
passage au fauteuil. C'est un don bien rare que de savoir asso- 
cier, comme il l'a fait, le dilettantisme à la pondération, l'obser- 
vation sagace, parfois légèrement railleuse, à la courtoisie la plus 
parfaite, l'originalité personnelle ou mieux la personnalité origi- 
nale à cet éclectisme de bon aloi qui admire le beau et le bien 
partout où ils se trouvent et qui prévient ainsi tout froissement, 
toute susceptibilité entre les éléments divers de Virritabile genus 
dont se compose toujours une famille académique. 

Comme vous le voyez. Messieurs, pour être belle la succession 
n'en est pas moins lourde à recueillir. 

Heureusement, votre prévoyance m'a adjoint deux collègues 
d'un haut mérite, en compagnie desquels on peut sans crainte 
affronter difficultés et obstacles, collègues que je me bornerai à 
nommer, puisque le crayon de M. Bourges a déjà fixé leur physio- 
nomie sur votre album de souvenirs : 



8 MÉMOIRES 

M. Henri Paul d'abord, l'administrateur éminent dont la com- 
pétence s'est affinée aux plus hautes fonctions. Son concours est 
pour nous une bonne fortune. Avignonais de cœur comme il Test 
presque de fait, il était tout désigné pour la sauvegarde des insti- 
tutions et des intérêts de sa ville natale. Ce n'est pas lui, on peut 
en être convaincu, qui laissera effleurer d'une pensée sacrilège 
aucun des fleurons de sa couronne. 

M. l'intendant Joleaud ensuite, naturaliste dont la réputation 
n'est plus à faire et dont le monde savant depuis longtemps 
connaît le nom. Vous Tavez vu à l'œuvre au cours des excursions 
géologiques dont il a bien voulu accepter la direction et vous 
avez pu constater quelle perspicacité, quelle sûreté de coup 
d'œil, quelle profondeur d'érudition il apporte dans l'auscultation 
des mystères de la nature et dans la diagnose des phénomènes 
terrestres, M. Joleaud est un folkloriste doublé d'un charmeur. 

Avec de pareils auxiliaires, secondés par les spécialistes que 
vous avez placés à la tête de chaque section, et que l'on vous a 
présentés tout à l'heure, on peut avoir confiance en l'avenir, sur- 
tout quand on songe qu'à votre bureau temporaire sont adaptés 
des éléments plus stables, moins transitoires, depuis longtemps 
façonnés au maniement de nos rouages intimes, je veux parler de 
M. le secrétaire général et de M. le trésorier. 

De M. Labande on vous a dit déjà beaucoup de bien ; on n'en 
saurait jamais trop dire. L'étendue de ses connaissances égale 
l'ardeur de son zèle. Il a le don d'ubiquité. Il voit et prévoit tout ; 
il propose, il dispose, il prépare, il combine, sans jamais con- 
naître la fatigue. M. Bourges, avec un grand bonheur d'expres- 
. sion, vous l'a représenté substituant son activité féconde de 
maire du palais à l'indolence des rois fainéants — ou constitu- 
tionnels, c'est un peu la même chose — qui se succèdent à la 
tête de notre petite république des lettres. Un de nos anciens 
présidents l'a comparé au Dieu Lare de notre foyer. On l'a com- 
paré encore à la Vestale entretenant parmi nous le feu sacré. 
Décemment, je ne puis aller plus loin que Vestale. Mais, sans 
remonter à Pépin le Bref ou encore à une plus haute antiquité, je 
suis convaincu de traduire votre sentiment en disant, en termes 
moins imagés, que M. Labande est la cheville ouvrière de notre 
société, qui ne périclitera pas tant qu'il lui continuera son 
dévouement. 

Il sera aidé dans sa tache par le secrétaire des séances, M. Cha- 
telet, à la complaisance et au savoir duquel on ne fait jamais 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 9 

appel en vain. Il sera aidé encore parle nouveau bibliothécaire 
archiviste, M. Didiée, dont j'aurais bien envie de trahir le poéti- 
que incognito. Certain sonnet en ma possession me fait espérer 
qu'il voudra bien, au grand agrément de nous tous, descendre 
quelquefois de la tour d'ivoire où il se confine avec un soin trop 
jaloux. 

Quant à M. le trésorier, aux éloges qui lui ont été adressés et 
qu'il mérite si bien, je n'ajouterai qu'un mot : il ne manque à 
l'Académie de Vaucluse pour être riche que la possibilité de le 
devenir. Seule, en effet, une déclaration d'utilité publique peut 
lui permettre de recevoir par legs ou par donation. Or, — singu- 
larité administrative ! — cette déclaration n'est généralement 
accordée qu'aux sociétés qui ont déjà des rentes. Donc, par une 
gestion magique, M. le trésorier, faites-nous des rentes, et vous 
aurez bien mérité de l'Académie. 

Et maintenant que j'ai salué tous les officiers du bord, il ne me 
reste qu'à souhaiter bonne marche au navire, et à renouveler à 
l'équipage l'expression de ma vive gratitude. 




LA SÉPULTURE DE SILVANUS 

A VACHÈRES. 



La commune de Vachères (i), entre le Calavon à l'ouest et le 
Largue à Test, se trouvait à Textrémité du diocèse d'Apt, dont la 
circonscription correspond au territoire des Vulgientes. Au sud, 
la commune limitrophe de Reillanne relevait d'Aix ; à l'est, celle 
d'Aubenas relevait de Sisteron. 

M. l'abbé Arnaud d'Agnel a déjà exploré le petit plateau, site 
d'un ancien oppidum, qui domine tout le terroir de Vachères (2) ; 
tout à côté, sur les bords d'un vieux chemin romain, fut trouvée 
jadis une statue de grande taille, représentant un guerrier appuyé 
sur son bouclier, qui figure maintenant au musée d'Avignon. 

Il y a environ deux mois, un propriétaire cultivateur, M. Anto- 
nin Benoit, qui possède le domaine de la Grange-du-Bois, sur les 
pentes exposées à l'occident par lesquelles on descend du som- 
met de Vachères vers le lit du Calavon, a eu l'occasion de ren- 
contrer et de fouiller, sur ces mêmes pentes, des sépultures à 
incinération romaines. 

Elles se rencontrèrent, sur un versant inculte, immédiatement 
au-dessus d'un ravin, ta environ 200 mètres au-dessus du petit plan 
où se trouve l'habitation de la Chaume. Le site dépend du domaine 
de ce nom et appartient à M. Benjamin Hugues, maire actuel de 
Vachères. 

La plupart des cultivateurs que le hasard met en présence de 
tombes antiques songent à y trouver beaucoup d'or et ils traitent 
sans ménagements tous les objets qui déçoivent leur premier 
espoir. Mais, il est des exceptions : le propriétaire de la Grange- 
du-Bois suffirait à s'en convaincre. 

(1) Vachères (Basses-Alpes), arrondissement de Forcalquier, canton de Reillanne. 

(2) L'abbé Arnaud d'Agnel et Ludovic Allée, Compte rendu de l'exploration d'une 
station préhistorique découverte à Vachères { liasses- Alpes). Paris, imprimerie nat. 
MDCCCCI, 16 pp. et 2 planches. (Extrait du Bulletin archéologique, 1901.) 



12 MÉMOIRES 

Averti que de petites pierres, en apparence insignifiantes, 
valent davantage qu'un grain de blé, il a passé de longues jour- 
nées à ramasser tous les silex qui couvrent la terre de certains 
quartiers ; puis, il s'est mis à rechercher les sépultures dont il 
pouvait soupçonner depuis longtemps l'emplacement. Seul, dans 
ses fouilles qui ont été heureuses, il a minutieusement observé la 
structure des tombes ; il a été attentif à ne rien briser. Son récit, 
quand on l'amène à grouper les faits, permet donc de savoir 
comment se présentait la tombe de Silvanus, de sa femme, de 
leurs fils, Calventius et Birro. 

Sur le talus à pente assez raide et à quatre « pans » de profon- 
deur (i), se rencontrèrent, alignés du nord au sud, quatre grandes 
urnes, en terre jaunâtre et à anses, placées debout, consolidées 
par des « laves » (2), coiffées par des tuiles « sarrazines » en terre 
rouge (3). 

Pour les deux amphores placées aux extrémités, c'est-à-dire au 
nord et au sud de l'ensemble, les souvenirs n'indiquent rien de 
très particulier; dans celle du sud, toutefois, une urne de verre 
bleuâtre se rencontra que la pioche brisa. Ce résultat fâcheux 
démontrait la nécessité d'une circonspection plus grande : les 
deux amphores du milieu furent donc abordées avec précaution. 
Chacune d'elles contenait également une urne de même qualité, 
en verre bleuâtre, couchée à plat, son orifice circulaire dirigée 
vers le midi. Chaque urne était remplie de cendres et de terre. 
A l'entrée de chacune de ces deux urnes couchées se trouvait 
debout une petite fiole lacrymatoire en verre bleuâtre, inclinée 
légèrement vers le nord, de manière à ce que la panse inférieure 
de la fiole fût en dehors de furne et l'orifice supérieur en dedans. 
Ces deux fioles étaient remplies de terre. 



(i) Le pan. huitième partie de la canne, vaut environ o"25. 

(2) Les « laves » dans cette région, comme les « lauses » dans les Hautes-Alpes, 
sont les pierres qui, naturellement ou non, se présentent en dalles plates, plus ou 
m oins grandes et plus ou moins épaisses. 

(3) Les tuiles « sarrazines » sont, bien entendu, les grandes tuiles plates et à 
rebord, de fabrication romaine ou romane. 

Les débris des grandes amphores terminées en pointe et une partie des tuiles ont 
été portés avec la pierre de l'inscription dont il sera question, chez le pro- 
priétaire du terrain, à la maison de la Chaume. Les autres objets ont été 
Ô portés â la Grange-du-Bois par l'auteur des fouilles. Sur Tune des tuiles, 
du côté des rebords, une marque de fabrique tracée avec les doigts dans 
le bas ; et, dans le haut, tracés à la pointe sèche en cursive, quelques 

c aractères où l'on distingue F III, soit J[iglina] Iir (>). 



DE l'académie de VAUCLUSE [3 

L'une des deux urnes funéraires couchées est un peu plus 
grande que l'autre. Elles n'ont pas d'anse : elles sont bombées 
avec un orifice à rebord circulaire et plat, un fond aplati. 

La plus petite mesure 19 centimètres de haut, rS centimètres de 
diamètre à Torifice et 8 centimètres de diamètre au fond. Son 
diamètre maximum à mi-hauteur est de lyS millimètres. 

La plus grande mesure 22 centimètres de haut, i5 centimètres 
de diamètre à rorifice, 10 au fond et 195 millimètres de diamètre 
maximum à mi-hauteur. 

La hauteur des fioles lacrymatoires est à peu prés égale au 
diamètre de l'orifice des urnes. 

A gauche de l'urne couchée, dans chacune des deux amphores, 
une tasse de poterie samicnne. Dans l'une, elle est brisée depuis 
l'antiquité; dans l'autre, elle est intacte. Celle-ci est penchée, 
l'orifice vers le midi. Toutes deux sont identiques de forme et de 
dessin. C'est une terre jaunâtre et fine recouverte d'un vernis 
rouge. Elles sont décorées en relief d'une frise où alternent des 
palmes et des feuilles d'un style assez souple. La hauteur de la 
tasse intacte est de 60 millimètres, le diamètre de l'orifice en haut 
est de 79 millimètres. 

A droite de l'urne couchée, dans chacune des deux amphores, 
une lampe de terre jaunâtre renversée. L'une d'elles est intacte, 
l'autre brisée. Toutes deux paraissent être identiques de forme et 
de décor : elles sont ornées d'oves. 

Déplus, dans l'une des deux amphores, avec le mobilier pré- 
cédent, un vase de terre jaunâtre en forme de pichet, à fond plat 
d'un diamètre étroit, fortement bombé à mi-hauteur, avec goulot 
court et muni d'une anse. 

Dans l'autre amphore, en plus du mobilier précédent, un bra- 
celet en fer, de diamètre assez grand, brisé et fortement oxydé ; 
ce bracelet est accompagné d'une grosse aiguille ou passe-attache 
en métal très peu oxydé, qu'il y aurait lieu d'examiner pour véri- 
fier s'il ne serait pas en argent. 

Tel est le mobilier des deux amphores. Par dessus et entre 
elles deux, deux soucoupes de poterie du type d'Arezzo. L'une 
d'elles a été trouvée ébréchée ; l'autre a été cassée par la pioche. 
Celle qui est ébréchée mesure 3o millimètres de hauteur et 14 de 

(I) Le rectangle extérieur de la moulure, au niveau du cadre en relief mesure 
425— de large et 4io"" de haut. I^ rectangle intérieur de cette moulure, au niveau du 
fond en retrait, mesure 400"" de large et 38o"" de haut en moyenne. 



14 MÉMOIRES 

diamètre au sommet. Elle porte au centre la marque rectangu- 
laire, en relief : OF-PATRIC, avec les lettres T et R liées. L'autre 
porte : OFSARRVT, avec les lettres R et V liées. Au revers, un 
graffite tracé à la pointe sèche; VA', c'est-à-dire Va[le] ou Va[lete\. 

Avec ces deux soucoupes, un plat en terre de pâte jaunâtre, 
trouvé brisé, recouvert, semble-t-il, jadis d'un vernis rouge et me- 
surant environ 17 centimètres de diamètre. 

Également, au niveau supérieur des amphores, c'est-à-dire à 
I mètre environ sous la surface actuelle du sol en pente, un bloc 
de pierre en « safre >> de teinte jaunâtre. Ce bloc mesure 59 centi- 
mètres de haut, sur Sy de large et Sg d'épaisseur. Équarri plus ou 
moins grossièrement sur cinq de ses faces, la fouille le trouve 
jeté à terre sur la sixième qui, plus soignée, porte une inscription. 

Cette inscription, sur un fond légèrement en creux, dont la 
différence de niveau avec le cadre est rachetée par une moulure 
sommaire, porte le texte suivant : 

CAlVEN/TiyS 

ET-BIKKO-PATKl 
ET-/V\ATKI'DE6V0 

PECVLIO 
SllVAMifl' 

Les lettres ont environ 5o millimètres, les interlignes sont de 
5 millimètres. Il n'y a pas de traces bien certaines de ponctuation, 
sauf un point et une virgule entre MAÏRI et DE SVO. Il y faut 
peut-être ajouter un point entre SILVANI et FI (i). Les O sont 



(i) 11 existe un point assez léger, à mi-hauleur, dans le G de GALVENTl VS. 
Ce point, à 40" de la moulure, soii dans le sons horizontal, soit dans le sens verti- 
cal, a dû être inscrit par l'ouvrier, avant la gravure de l'inscription, pour marquer le 
début de la première ligne à tracer. 



DE l'académie de vaucluse i5 

délibérément circulaires et mesurent 49 millimètres de diamètre. 
Cela est tellement voulu, que manquant de place à la troisième 
ligne pour achever le mot SVO, le lapicide n'a pas craint de faire 
porter TO final à moitié sur la moulure plutôt que d'en restrein- 
dre le diamètre horizontal. 

Les T, les E, les F, les Lsont fort étroits; ils mesurent i5 milli- 
mètres de large environ. Les barres des E et des F, au lieu d'être 
horizontales, sont relevées, sauf dans l'E de la première ligné. Par 
contre, la barre des L se penche en baissant au-dessous de la 
ligne. La panse supérieure des R, des P, du B se restreint et s'ar- 
rête au-dessus du milieu de la hauteur des lettres. De même, le 
trait inférieur des F et des A. Les V, N et I sont réguliers. La 
lettre M se compose du tracé d'un V entre deux barres penchées 
au lieu d'être verticales. 

Le lapicide paraît avoir voulu éviter de scinder un mot entre 
deux lignes. Aux deux premières lignes il s'en est bien tiré ; à la 
troisième la place lui a manqué. Aussi, aux trois dernières, il a 
préféré laisser un vide à la fin des lignes plutôt que d'avoir à 
scinder un mot ou que d'avoir à empiéter de nouveau sur la 
moulure. 

D'après les caractères paléographiques des E, F et L, l'inscrip- 
tion ne peut guère être antérieure au second siècle de l'ère chré- 
tienne ; en raison de la forme des O, elle ne peut guère être pos- 
térieure au troisième (i). 

Cette pierre fut élevée par Calventius et Birro sur la tombe de 
leur père et de leur mère, de leurs biens personnels. Les deux 
frères n'ont rien de plus pressé que de se nommer : ils oubliaient 
de nommer leur père et leur mère à qui s'adressait ce témoi- 
gnage da leur piété. Après coup, comme une ligne restait vide, 
on a réparé l'oubli, en ce qui concerne le père : mais la place a 
manqué pour la mère. 

Calventius et Birro étaient des hommes libres, mais ils ne 
devaient pas être cependant citoyens romains. Sans doute, 
c'étaient de simples cultivateurs qui, au II* siècle, vivaient dans 
un quartier de la Chaume (2). 

(i) R. Gagnât, Cours d'épigraphie latine, 3* édition. Paris, 1898, pp. 14, 18. 19. 

(a) J-e nom de Silvanus se rencontre assez fréquemment en Narbonnaise. On en 
trouve douze exemples qui se répartissent entre Toulouse {Corpus inscription, latin., 
t. XII. n» 539a), Narbonne (IbiJ.. n" 4408, 4541. 5141, Saig), Substantion {Ibid., n'4ïi3), 
Margucrittes {Jbid., n* 3oi2 , Arles (Jbid,, n« 810), Aix {Ibid., n' 534), Saint-Maximin 
{làid,, n* 5749), le Buis {Ibid., n* iSgô) et Aoste dans Tlsêre (Jbid,, n* 2394). On connaît 



l8 MÉMOIRES 

« Le noble chevallier Jehan de Sainct-Miquel (î), cappitaine et 
viguier del castel des Baux et de sa baronnie por la Regina», 
authentique de son nom le premier procès-verbal de la délibéra- 
tion prise par les syndics et conseillers nouvellement établis, et 
réunis en sa présence comme assehriblée délibérante en i45i.Le 
registre étant en fort mauvais état de conservation, le nom de 
« Boisseron » a disparu depuis 1887. 

Le conseiller Jean Isnard nous donne la troisième à la date du 
2 février 1454. « Ita est, Johannes Isnardi. » 

Antoine Pascal, autre conseiller, approuve, en 1480 et en qua- 
lité d'auditeur, les comptes du trésorier. « Ita est, Antonius Pas- 
cali. » 

La cinquième est du 10 février 1487, donnée par noble François 
de La Bruyère, écuyer, échanson du roi et gouverneur du château 
et de la baronnje des Baux de 1483 a 148H. 

En 1488 et le 18 avril, le capitaine Armand Charbonnelle (2) 
accuse réception de douze canes d'huile fournies annuellement 
par le moulin de la ville. Sa signature est la sixième. 

La septième et dernière est du 2 septembre 1492 et donnée par 
Monet Peyre (3) : « Ita est, Monetus Pétri ». Ce personnage 
approuve ainsi la cession à lui faite par la communauté, d'une 
auberge située avec ses dépendances tout près des portes de la 
ville, probablement la maison de Beaumanière, détruite par la 
chute des rochers (4;. 

D'un autre côté, le registre manuscrit des censives des sei- 
gneurs de Manville donne à Monet Peyre un frère du nom de 
Michel, qui fut curé aux Baux jusques au commencement du 
XVl' siècle, ayant une maison sur la place de la ville qui fut pos- 



(i) Jean de Saint-Michel, seigneur de Boisseron, petit village du canton de Lunel, 
capitaine et gouverneur des Baux de 1426 à 1468, date de sa mort. Il fut enseveli ci 
Beaucaire, probablement dans la môme église que Tanneguy du Ghâtel. 

(2) Ce capitaine avait un fils nommé Charles, qui résidait aux Baux en i535. 
(Notaire André Salomé.) 

(3) Monet Peyre, fils de Brusson Peyre, avait épousé vers la fin du XV» siècle, noble 
Silette Alaffier de Beaucaire, qui lui donna huit enfants; elle mourut aux Bauxen 
i538, et fut inhumée dans l'église Saint-Vincent. 

(4) L*an mil six cens cinquante trois et le dernier jour du mois de avril sur les cinq 
heures du matin, la grande baulme de Baumaniere avec son bastiment et moulin 
tomba où il y avait beaucoup de moyens de Monsieur Cabardet. Il tua sa fille (Barbel > 
et servante, son cheval et beaucoup d'autre bétail. Ce feust ung grand spectacle. 
Dieu nous en préserve. 

SigTié : BouYER. notaire. 
(Registre de 1577 du notaire Salomé./ 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE I9 

sédée plus tard par Anne de Montmorency. Et, comme nous le 
verrons plus loin, trois de ses fils sur cinq savaient signer d'une 
main dégagée; nous estimons que l'instruction était en honneur 
dans cette famille et dans toutes celles qui ont fourni dans la 
suite à fa communauté des syndics, des notaires et des magistrats 
comme les Ricard, les Laugier, les Quenin et les Coye. Nous 
pensons aussi qu*aux. noms des seigneurs lettrés déjà mention- 
nés, il convient d'ajouter ceux des autres gouverneurs : les 
Guilhem de Montmorency, les Raymond d'Agoult, sieurs de 
Cipières, et le juge des Baux en 14S4, noble Honorât Picarel, 
bachelier es lois. 

Par qui l'enseignement a-t-il été donné ? Évidemment par des 
professionnels laïques ou ecclésiastiques et au domicile des 
élèves. Rien ne nous permet d'établir l'existence d'écoles publi- 
ques. A remarquer aussi qu'aucune signature de femme de cette 
époque n'est parvenue jusqu'à nous. 



II. 

Le r» du mois de mai 1549, '^ conseil général s'étant réuni pour 
élire ses nouveaux consuls, désigna par la voix des sufTrages 
Antoine Peyre, qui refusa cette charge parce qu'il était âgé de 
plus de 60 ans. En vain on le menaça d'une amende portée de 
2S à 5o et à 100 livres; rien n'y fit et il fallut la requête et les sup- 
plications de tous les assistants au nombre de 62 pour vaincre sa 
résistance. Or, ce nouveau magistrat savait signer ainsi que ses 
frères, Jean, Petit-Jean, Jeannon et Michel (i), leur beau-frère 
Richard Sordet, procureur juridictionnel ; Guillem Ricard (2), 
noble Jean de la Vèze (3), Jean et Claude de Manville (4), 
Richard Laugier et son fils Charles (S), le juge Cassole et son 
substitut Vernet, Gauven Coye (6) et bien d'autres se trouvaient 

(i) Fils de Monet Peyre, ils avaient trois sœurs, Louise. Catherine et GelTanele 
qui épousa Richard Sordet au mois de juillet i528. (Notaire Andrée ^Salomé. ) 
(a) Personnage important, qui fut excommunié une dizaine de fols, de i533 à .i535. 

(3) Ce lieutenant de capitaine gouvernait les Baux en l'absence de Claude de Man- 
ville et continua après la mort de ce dernier jusque en 1554, époque où il fut rem- 
placé par Pierre de Cotheron. 

(4) Fils de Guilhem de Manville et de Marie d'Aymard, neveux du chevalier et 
capitaine Claude. (Notaire Andrée Salomé, [525.) 

(5) Son fils Honoré Laugier, filleul du capitaine Grille, fut anobli vers 1620, *^ous 
Louis XIIL 

(6) Né en i53y, il fut, lors des troubles de i562, détenu comme prolestant dans les 
souterrains du chAteau, et rendu ensuite  la liberté par un échange contre un sei- 
gneur prisonnier de Varméc catholique. (Notaire Louis Quenin.) 



20 MEMOIRES 

dans le même cas. De plus, dans l'espace de trois ou quatre mois 
et chez le seul notaire Louis Quenin, nous avons relevé trente-cinq 
signatures différentes données en iNb, dont quelques-unes par 
des vieillards de 6c ) â 70 ans. 

Cela établi, il est de toute évidence que la lumière intellectuelle 
dont nous avons salué Taurore au siècle précédent, a continué 
dans celui-ci sa marche ascendante et progressive. 

La délibération consulaire du 3i août ]r>44nous place sur un 
terrain plus solide encore et fournit des indications positives et 
précieuses. Voici ce qui fut dit : « Plus a esté expausé par Mes- 
sieurs les consuls comment est yenu ung magister et veult lever 
escoUes, si on luy bailhe une maison etqueseroit luy bailherune 
chambre a la maison de la ville et led. magister demande que n'h- 
ait que ung magister et une escolle. Led. conseil décrète que 
lescolle serabailhée audict magister et lesquelles dès a presant 
luy bailhent et led. magister aura la chambre de la maison de la 
ville dessus les Gregnons sive molin des Gregnons (1), et n'y aura 
que une escolle et ung magister, donant la commission a Mes- 
sieurs les consuls de servanter lesd. escolles. » 

Nous sommes ici en présence d'un précepteur qui réclame un 
titre et un secours officiel et ne voulant pas de concurrent. 

En i5?2 et le 5 février ^notaire, Simon Salomé), Maurice de 
Lacour, du lieu de Rillian, diocèse d'Aix, « recteur jadis des 
écoles des Baux», passe contrat de mariage avec Jeanne Ché- 
raud, fille â feu Jean, du lieu de Beaucaire. La donation de 
?() écus qu'il fit à sa future en cas de prédécès semble indiquer 
une certaine aisance. Parmi les assistants se trouvaient André 
Imbert et Jean Olivier, « recteur moderne des escolles ». Toute- 
fois, ce dernier ne le fut qu'à partir du 3o septembre suivant. 

L'année d'après et le 12 mars, le conseil eut à s'occuper de 
l'école. « Aultre part a esté par devant messieurs les consuls et 
conseillers susdits expousé par maistre Jeap Olivier, recteur des 
escolles des Baulx, comme a la dernière feste de la Saint-Micheu, 
par décret du présent conseil, luy auroit esté délivré les escolles 
et régiment des enfans du présent lieu des Baulx aulx conditions 
plus amplement contenues au décret faict sur ce, et exercent son- 
dit office le mieulx qu'il a pieu a Dieu, et de présent est venu ung 
maistre Maurisse de la Cour, lequel a présent le vient empeschier 
en sondit office, faisant aultre congrégation et escolles d enfans 

II) Établi dans le roc à l'angle sud-ouest delà place Saint-Vincent. Dans le courant 
de cette année-ci, le rocher et les ruines se sont effondrés. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 21 

dudit Baulx, luy hostant par ses moiens les enfans qu'il avoit 
ja depuis la dernière feste de la Saint-Micheu a son grand dom- 
maige, pour ce qu'il se seroit entretenu a ces fins, a ceste cause 
requiert estre faict commandement audict maistre Maurisse de 
ne tenir telle congrégation suyvant l'appointement du présent 
conseil. » Le conseil décrète que maître Olivier continuera ses^ 
fonctions jusquesà la Saint-Michel et que « inhibitions et deferises 
seront faites au sieur Maurisse de la Cour, sur certaines et 
grandes peines, de ne tenir escolles publiquement et faire amas 
des enfans. » 

En 1 554, la place de maître d'école est vacante. Nous lisons à 
la date du i" avril : « Fut exposé après par messieurs les consuls 
sire Petit Jehan Pierre (i), comme n'y a point aulcung maistre 
d'escolles, et pour ce que Monseigneur le cappitaine viguier (2) 
dict n'avoir ung honneste homme, bien seaige et bien cappaible, 
pour régir et governier les enfans de la présente communauté, 
offrant de le norrir durant le tems d'une année, au pache que n*y 
aura point aultre congrégation d'enfans, synon celui que sera 
créé, veu l'absance aujourd'hui d'escolles. » Le conseil, après 
avoir entendu ladite exposition, « a créé et faict de nouveau pour 
nomer recteur des escolles M* Anthoine. . . . a présent maistre des 
enfans dud. sieur cappitaine viguier, absent, comme s'il etoit 
présent, a régir les escolles et monstrer a tous les enfans de la 
communauté et aultres que le requerront, tant au pauvre que au 
riche pour une année, en exercent dans la présente maison 
consulere aulx gaiges que seront accordés entre ledit sieur 
maistre et les pères et mères des enfans, tant gramatis que aul- 
tres, sauf que ledit sieur cappitaine le nourrira a ses despens 
durant ung an, comme il a présentement promis de ce faire.,.. 
Que proclamations et crys publics seront faicts par tous les lieux 
accoustumés des Baux, que aulcune personne de quelle qualitté 
que ce soyt n ayent a fayre aulcune congrégation d'escolles et 
amas d'enfans, ains laissent toutesfois toute liberté a ceulx qui 
vcullent élever leurs enfans chez soy. » Mesure libérale et éton- 
nante, même dans une époque si reculée, mais rendue nécessaire 
par rinsuftisance du personnel officiel, car au lieu d'une école il 
en aurait fallu cinq à six pour répondre aux droits de l'enfant. 

Ayani à s'absenter au sujet de certaines affaires du conné- 



i) Ce consul possédait le domaine de Servanes. 
l'i Noble Pierre de Cotheron, capitaine viguier, i554-i55«j. 



22 MÉMOIRES 

table (i) et des siennes propres, le viguier Pierre de Cothéron 
réunit le conseil, le 29 novembre i556, pour présenter son lieu- 
tenant sire Petit-Jean Pierre et lui faire prêter serment, dont acte 
fut ensuite remis aux consuls. Avant la fin de la séance, on 
aborda la question d'enseignement, ainsi que suit : « A esté dict 
par le consul come y a a présent ung maistre d'escoUe, lequel 
desireroit faire son debvoir a tous les enfans qui voudront venir, 
porveu que luy soyt bailhé la présente maison consulere et 
neantmoings inhibitions et deffances estre faictes a M* Jacques 
Charles, prestre, et a tous aultres de ne tenir cambrade, si n'est 
qui voudroit pour les siens dans leurs maisons.» Le conseil décide 
que « M* Jehan Clappier sera pourveu a régenter les escolles du 
présent lieu pour une année, aulx gaiges et qualités acoustumés 
et inhibitions estre faictes a tous prestres et aultres de ne faire 
assenblee et cambrades si n'est pour ses enfans tant seulement, 
sur certaines grandes peines. » 

Au 3o mai i558, il n'y a point de régent « pour régir et gover-. 
nier les enfans de la communauté ; seroit bon de en avoir ung, 
nommant M* André Imbert, demeurant audict Baulx, seul sans 
aultre faisant aulcune aultre assemblée. A esté commis auxd. 
consulz de entendre si M* André Imbert veult accepter la charge 
et en quelle qualité, et le relieront au premier conseil comme on 
vouldra user. » 

Pendant le règne tourmenté des derniers Valois et sous les 
premières années de celui de Henri IV, la situation politique est 
si troublée, que par contre coup l'enseignement en fut atteint. 
Toutefois, malgré l'absence de documents officiels pendant une 
trentaine d'années, la délibération consulaire du \t> janvier ibçp 
et les signatures apposées aux actes notariés du commencement 
du siècle qui suit nous autorisent à affirmer que Técole ne fut 
point complètement fermée et que Télan donné était devenu 
absolument irrésistible. A la date précitée, le conseil, présidé 
par Charles Laugier, lieutenant du viguier Pierre de Verace, 
« après avoir mandé vcoir led. M' pédagogue, nommé Jacques 
Régnier, de Thollon, qu'il servira la ville une année por appren- 
dre les pauvres enfans ; quant aux autres, le nourriront et paye- 
ront ce qu'ilz seront d'acord pour huict cscus d'or sol, a»>oixante 



(i) Anne de Montmorency, baron et deuxième engragisle des Baux à partir du mois 
de mars iSaS. (D' Barthélémy, Inventaire chronologique et analytique des chartes de la 
maison de Baux, p. 52i.) 



DE l'académie de VAUCLUSE 23 

soûls pièce, jaçoit qu'il en vouloit plus seize au poinct des 
aultres par ci-devant ; mais ont esté résolu aud. huict escus. » 

Ce nouveau régent avait donc eu des prédécesseurs, que nous 
ne connaissons pas, aux gages de i6écus, qui leur furent aussi 
accordés à une date inconnue. 



III. 



Au XVII* siècle, l'instruction de la jeunesse se fait dans l'école 
officielle par des régents laïques et ecclésiastiques ; elle est aussi 
donnée par des maîtres particuliers, que des chefs de farnille 
catholiques et protestants appellent pour ce faire. * 

Les registres des délibérations consulaires sont muets en ce 
qui concerne le sujet que nous traitons, jusqu'en 1648. Toutefois, 
cette lacune est comblée par les comptes des trésoriers, qui four- 
nissent, avec le nom des professeurs, des renseignements uniques 
et précieux, comme on le verra plus loin au chapitre V (i). 

A la date du 25 octobre 1648, messire Barbarin, arrivé depuis 
peu, demande la place de troisième prêtre et la régence des 
écoles, malgré la présence de messire Barnéoud, qui avait été 
chargé de cette fonction. Le conseil accorda la demande, aux 
gages accoutumés et sous le bon plaisir de Mgr l'archevêque (2). 
Mais, le 3i janvier 1G49, attendu que messire Barbarin ne peut 
vaquer à la régence des écoles et qu'il y a différentes plaintes, il 
fut révoqué par le conseil et remplacé par messire Allemand, 
auquel on remit les clés de l'école. 

Toutefois, ce changement ne se réalisa qu'un peu plus tard, 
« proposant le dit sieur de Rispe (10 août) que messire Barnéoud, 
quoiqu'il soit bon prêtre et de bon exemple, neantmoings parce* 
qu'il est recteur d'une chapelle du sieur de Manville, pour 
l'obligation qu'il a d'icellc les dimenches et bonnes festes, il s'en 
va dire messe a Maussane, et par ce moyen il n'y en a que deux 
a la place de trois, au préjudice du public, de sorte qu'il se pré- 
sente ung prêtre, messire Paul Allemand, capable et appreuvé, 
por faire la fonction de troisiesmc prêtre et tenir les escolles 
soubs les gaiges acoustumés, demande d'y estre délibéré. » Tout 
pouvoir fut donné au sieur de Rispe. 

I ) Pièce justificative n' I. 

(21 François II Adhémar de iMonteil de Grignan, archevêque d'Arles de 1643 a 1689. 
C*e*it la première fois que rautorité ecclésiastique est appelée à intervenir. 



24 MÉMOIRES 

En i653 et le 3i août, le conseil augmenta les gages du régent. 
Le consul Vincent, sieur de Servanes, dit : « Qu'on a coustume 
de pourvoir à la jeunesse d'un précepteur pour l'éducation 
d'icelle, pour raison de quoy on a destiné annuellement pour les 
gaiges dudit précepteur 36 livres, et d'autant que ses gaiges ne 
sont pas beaucoup considérables pour arrestcr un homme de 
vertu dans un si petit lieu, s'en présente maintenant un très 
propre pour l'éducation de la jeunesse, soit pour les bonnes let- 
tres qu'il possède que pour avoir un très bon caractère, deman- 
dant que le conseil aye a délibérer pour l'augmentation des 
gaiges pour l'advenir a la somme de yS livres. » Le conseil décida 
qu'il serait donné chaque année à un précepteur la somme de 
60 livres et sans conséquence, aux formes et payes acoustumés, 
à condition « qu'icelluy enseignera gratuitement et sans autre 
salaire les pauvres enfans, tant orphelins que autres nécessiteux, 
sauf ceux qui ont de comodittés, esquels il exigera ce qu'il jugera 
raisonnable. » 

Au mois d'août de l'année r654, le juge Cabassol refusa de 
donner la clé de la maison de ville au régent, qui s'adressa au 
consul Dumas, lequel fit ouvrir la porte de force, persuadé que 
l'immeuble appartenant à la communauté, celle-ci devait en jouir 
pleinement, excepté le jour d'audience de la justice. Le conseil 
agréa la conduite du consul et donna ordre au valet de ville de 
garder la clé, en le chargeant d'ouvrir la chambre pour l'instru- 
ction de la jeunesse aux jours indiqués. 

Le 27 juin i655, à Jean Durand, qui demandait le loyer de la 
chambre aiTectée à l'école, le conseil répondit < que les Pénitents 
blancs payeront ledit logement, attendu que c'est a cette condi- 
tion que la communauté leur a cédé l'édifice proche de Teglise 
affecté a cet usage, » Les ruines en subsistent encore, sous le 
nom de chapelle des Pénitents et occupent la place de la maison 
consulaire achetée le 21 mars i537 pour 3()0 florins à Pierre 
Jacquet par les syndics Michel Manson et Nicolas Flandrin. 

En i(.)62, messire Salvagny avait la direction de l'école aux 
gages de fo livres, mais il s'acquittait si mal de ses fonctions que 
plusieurs familles furent obligées de prendre des maîtres parti- 
culiers; aussi les consuls Antoine Coye et Grimardier demandc- 
rent-ils sa révocation. Messire Salvagny ayant été entendu, le 
conseil lui renouvela sa confiance, mais ne put le maintenir 
en charge. Au mois de mai, le sieur de Vinsargues le présenta, 



DE l'aCADFCMIE DE VAUCLUSE 25 

en efïet, comme entièrement indisposé de sa personne (i), ajou- 
tant « qu'ils ont eu diverses plaintes de plusieurs habitans 
comme étant incapable d'enseigner le latin et Farithmetique, 
comme chacun le désire. Le conseil est d'avis qu'il sera destitué 
et remplacé par maître Aubert, qui en fait le métier. » Ce dernier, 
en 1675, eut ses gages portés de ù) a mo livres, payables par tri- 
mestres, comme par le passé. 

Le nouveau règlement de la communauté, établi le 29 mai 1679, 
portait que les écoles seraient données au choix des consuls, 
sous l'approbation du conseil, aux gages ordinaires et annuels de 
3o écus payables par quartiers. Le régent choisi devait être un 
homme probe, capable et catholique. 

En 1689, ^" s'occupa de la création dune école de filles. Il est 
dit dans la séance du i"' mai : « Messire Jean Matty, prêtre et 
vicaire perpétuel de Teglise paroissiale Saint-Vincens de ceste 
ville, auroict propprozé qu'il avoict un ordre de ses supérieurs, 
d'aultre part qu'il y avoict les edicts de Sa Majesté qu'il estoit 
nécessaire de pourvoir aux escolles de ceste ville ; a l'esgard des 
tilles, qu'il estoit prohibé de se servir du maistre d'escoUe pour 
lesdites filles, qu'en diminuant de ses gaiges et la ville y 
adjoustant a ceste diminution, que reviendroict au proffîct d'une 
fîlhe, qu'il oflroict de produire pour l'enseignement des petites 
filles de ceste ville quelque somme pour survenir a son entretien 
et gaiges... que M* Aubert, maistre d'escolle, seroict inhibé de 
faire aulcune foncion pour l'enseignement desdites filhes. » A 
l'unanimité, il fut décidé que a l'on s'informera comme on pro- 
cède aux aultres villes et lieux de ceste province et des edicts 
que messire Matty proppoze sans les exibcr... » 

Au mois de mai iCx)!, messire Bonnet, vicaire de l'église Saint- 
Jacques de Mouriès, fit remettre au consul Jacques Manson, 
avocat, un billet de l'intendant Lebret, daté du 22 octobre précé- 
dent, invitant le conseil à subventionner une personne propre à 
instruire les enfants, surtout ceux des Nouveaux-Convertis, et de 
l'établir à Mouriès. Le conseil répondit qu'il y avait impossibilité 
absolue et qu'établir un maître d'école à Mouriès c'était s'exposer 
à voir les habitants de Saint-Martin-de-(^astillon en demander un 
troisième pour eux ; qu'il convenait de laisser l'état actuel des 
aiTaires tel que; enfin que le premier consul était prié de faire de 
très humbles remontrances à l'intendant pour revenir sur sa déci- 

(i) Pièce justificative n* H. 



26 MÉMOIRES 

sion, dans le cas où il en aurait pris une en faveur de messire 
Bonnet ou d'autres solliciteurs. 

L'intendant n'insista pas, mais il eut recours ù un autre moyen 
pour résoudre cette question à l'entière satisfaction du conseil 
des Baux et de l'église. Par son ordonnance du 17 août lôgS, ce 
magistrat obligea les Nouveaux-Convertis à envoyer régulière- 
ment leurs enfants aux écoles, instructions et catéchismes, sous 
peine d'une amende de cinq sols pour chaque délit et immédiate- 
ment applicable. Les curés, vicaires et régents devaient dresser 
un rapport bi-mensuel et le lui faire parvenir sans retard (i). 

On comprendra toute l'immoralité et toute la cruauté de cette 
mesure qui mettait tous les enfants protestants de Mouriès dans 
l'obligation de fréquenter la seule école existante alors, celle des 
Baux, éloignée de plus de onze kilomètres! à moins que les 
vicaires de Mouriès et de Saint-Martin-de-Castillon ne fussent 
chargés de leur instruction, ce qui était possible. 

En 1697 et le 8 mars, Jacques Aubert, « professeur aux lettres » 
de la ville des Baux, fut installé dans sa charge d'auditeur et 
d'examinateur des comptes, par le viguier Charles de Por- 
cellet. 

Maîtres particuliers. — D après le notaire Jean David, Laurent 
Bastidy, «clerc ecclesiasjiqueou escollier», originaire d'Aix, était 
au service du sieur de Manville, dont il séduisit la chambrière, 
Anne Espérance. Les preuves matérielles étant à un moment 
donné devenues des plus évidentes, le séducteur fut incarcéré 
dans la prison des Baux, le 3 septembre 162 1, par ordre du viguier, 
quoique, sur la plainte de la victime, Pierre de Manville eût 
résolu de châtier le coupable. De cette affaire criminelle s'éleva 
un conflit entre ce seigneur et le viguier, dont l'ingérence inop- 
portune et usurpatrice portait ombrage au premier. 

Honoré Peyre, également notaire, nous a conservé le nom de 
quelques autres professeurs de famille, savoir : 

Jean Bonnet, de la ville d'Entrevaux, précepteur des enfants du 
sieur de Molières, en \C1i\4 : 

Jean Malet, de la ville de Castellane, régent des enfants de 
Pierre Manson, résidant au Paradou et à la même date que 
dessus ; 

Louis Fal la vel, originaire de la ville de Gordes, où son père 
Jean était maître d'école, régente au Destet les enfants de Simon 

(i) Pièce justificative n* III. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 'TJ 

Peyre, bourgeois. 11 appartenait à la Religion réformée et fit son 
testament à la date du lo janvier 1670; 

Antoine Pascaly, « escollier du lieu de Maiche, diocèse de Glan- 
devès », figure, le 16 juillet 1674, comme témoin dans le testa- 
ment de Anne Imbert, veuve de Jean Boussot, marchand de 
Lourmarin, résidente à Mouriès. Cette testatrice était protes- 
tante ; 

André Arnaud, écolier du liçu de Serre en Dauphiné, fut un 
des témoins du testament lait par Honoré Peyre à son mas du 
Destet, le 26 septembre 1666. 



IV. 

Après avoir dirigé l'école des Baux pendant un demi-siècle, 
Jacques Aubert mourut le 6 décembre 1712, âgé de 82 ans; on 
rinhuma dans Téglise Saint-Vincent. Originaire de Quinson, 
mais établi aux Baux en i663, en qualité de « professeur aux 
lettres », ce personnage s'y maria en i683 avec une veuve, 
Catherine Rangon, de laquelle il eut quatre fils. Les deux aînés 
s'appelaient Antoine, le troisième Honoré qui fut notaire, le 
quatrième Joseph-Ignace, successeur et continuateur de Tœuvre 
de son père jusqu'en 1718. 

Au mois de mars 1720, le sieur Chartroux, lieutenant en Pro- 
vence de l'intendant Lebret, écrivait (i) aux consuls des Baux et 
à ceux d'Eyguières, Sénas, Laroque d'Anthéron, Velaux, Mérin- 
dol et Lourmarin, que les Nouveaux-Convertis ne devaient pas 
s'attendre à voir rétablir l'exercice de leur culte et qu'il fallait 
prévenir les pères, mères et curateurs d'envoyer les enfants aux 
instructions données à leur intention dans les paroisses, et même 
de les y faire conduire. C'était le prélude aux aflaires de 1724. 

En 1720, le trésorier de la communauté se déchargea de la 
somme de trente livres, qu'il déposait entre les mains du notaire 
royal Sallomé, comme paiement des gages du maître d'école, le 
sieur Roux, qui s'obstinait à les refuser. 

Tout le monde connaît la déclaration royale donnée à Versailles 
le 14 mai 1724, concernant la religion et l'établissement dans 
toutes les paroisses des maîtres et maîtresses d'école, aux gages 
de i5oet 100 livres, payables par tous les habitants là où il n'y 

(I) Pièce justificative n' IV. 



28 * MÉMOIRES 

aurait pas d'autres fonds. 11 est dit à l'article VI : « Enjoignons à 
tous les pères, mères, tuteurs et autres personnages qui sont 
chargées de l'éducation des enfants, et nommément de ceux dont 
les pères et mères ont fait profession de la religion prétendue 
réformée ou sont nés de parents religionnaires, de les envoyer 
^ux écoles et aux catéchismes jusqu'à l'âge de 14 ans, même 
pour ceux qui sont au-dessus de cet âge jusqu'à l'âge de 20 ans, 
aux instructions qui se font les dimanches et les fêtes... Enjoi- 
gnons aux curés de veiller avec attention particulière sur l'in- 
struction desdits enfants dans leur paroisse, même à l'égard de 
ceux qui n'iront pas aux écoles... » 

S'inspirant de cet article et se conformant à son contenu, le 
curé de Mouriès, Baussan, s'occupa sans retard de créer une 
double école dans sa vaste paroisse, dont la population augmen- 
tait, tandis que celle des Baux était en diminution constante. 
Aussi, en 1725. plusieurs habitants de Mouriès présentèrent-ils à 
l'archevêque d'Arles, Jacques II de Forbin-Janson, une requête 
demandant l'application de l'article VI de la déclaration précitée, 
attendu que dans ladite paroisse il y avait un grand nombre de 
Nouveaux-Convertis, dont les enfants avaient besoin d'être 
instruits de la religion catholique. Le prélat, avisé et consulté, 
répondit de la manière la plus favorable, ordonnant la création 
d'une double école à Mouriès, sauf aux habitants de se pourvoir 
par devant qui de droit pour taxer les gages du maître et de la 
maîtresse, appelés à diriger ces nouvelles écoles. Saisi de cette 
affaire, le conseil de la ville des Baux eut recours à un moyen 
terme. Il consentit à créer une école de garçons et à subvention- 
ner le maître, mais quant à celle des filles, il pria les impétrants 
de ne pas insister, étant donné le très petit nombre de filles à 
qui Ton apprenait à lire. 

Ce demi-succès déplut au curé Baussan, qui insista à nouveau 
et mit le conseil dans l'obligation de répondre favorablement 
dans trois jours à la sommation qu'il leur fit faire par l'huissier 
Vachier avec menaces de porter requête à l'intendant. Le conseil 
de la ville des Baux craignant une surpriseetestimant avec raison 
que la paroisse de Saint-Martin-de-Castillon pourrait lui adresser 
une demande identique, dépêcha à Aix le sieur de Momblan pour 
prendre avis d'avocat et saisir l'intendant de cette grave question, 
en insistant surtout sur l'état précaire des finances. Ce magistrat, 
sollicité des deux côtés, renvoya les parties sans rien imposer, et 
l'école, fondée à Mouriès par Tautorité ecclésiastique, ne fut 
point pour le moment subventionnée par la communauté. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 29 

En 1727 et le r> juillet, le consul Darmure demanda au conseil 
des Baux de salarier le maître d'école établi à Mouriès, à cause 
de la présence de nombreuses familles de la religion prétendue 
réformée et de chercher un moyen convenable pour éviter un 
procès dont la poursuite serait très onéreuse, son sentiment étant 
de rendre justice aux habitants dudit hameau en chargeant la 
communauté des gages du régent. La majorité du conseil émit 
ravis de maintenir les décisions précédentes. 

C'est le 6 décembre 171k) que fut porté le coup décisif, celui qui 
devait vaincre Tentêtement du conseil des Baux. Il est vrai que 
celui-ci avait montré l'année d'avant quelques sentiments de 
modération, en accordant la somme de six livres pour la con- 
fection de quelques tables et de quelques bancs réclamés pour 
l'école de Mouriès. Le sieur Quenin ayant fait remarquer que les 
enfants de ce lieu étaient souvent sans éducation à cause de l'ex- 
trême difficulté d'avoir un maître d'école auquel on pût donner 
par cotisation des gages suffisants, et qu'il conviendrait que la 
communauté donnât au régent de Mouriès autant qu'à celui des 
Baux, soit i5o livres par année, le conseil à l'unanimité accorda 
une subvention annuelle de cent livres et sur la requête des 
conseillers habitant Saint-Martin-de-Castillon, fonda une double 
école au Paradou et à Maussane avec un traitement de cinquante 
livres à chacun des deux maîtres appelés à les diriger. Ainsi 
furent créées en même temps et pour les mêmes motifs trois nou- 
velles écoles dans le pays. 

Cela accompli, le conseil songea à établir des maîtres, lesquels 
devaient être examinés par les consuls qui s'assureraient que, 
tant pour les mœurs que pour le savoir, les postulants étaient 
aptes à remplir les fonctions de régents, qu'ils seraient ensuite 
présentés par eux à l'acceptation et à l'approbation de l'archevê- 
que et qu'une fois nommés, les maîtres d'écoles prendraient l'en- 
gagement de ne demander aucune augmentation de salaire pour 
quelque cause et prétexte que ce fût. Dans ces conditions, trois 
nouveaux pédagogues furent nommés, savoir : Tardy à Mouriès, 
Giraudau Paradou et Dufaur à Maussane. 

L'année 1 740 n'était pas encore écoulée que déjà deux voisins 
avaient entre eux la guerre. Le régent du Paradou ne faisait 
aucune difficulté pour recevoir et attirer à son école des enfants 
appartenant au hameau de Maussane. Sur la plainte du sieur 
Dufaur et pour rétablir la bonne union et concorde, le conseil de 
la communauté fixa au Touret qui existe entre les deux villages 



28 



MEMOIRES 



aurait pas d'autres fonds. 11 est dit à l'article VI : « Enjoignons à 
tous les pères, mères, tuteurs et autres personnages qui sont 
chargées de l'éducation des enfants, et nommément de ceux dont 
les pères et mères ont fait profession de la religion prétendue 
réformée ou sont nés de parents religion naires, de les envoyer 
^ux écoles et aux catéchismes jusqu'à l'âge de 14 ans, même 
pour ceux qui sont au-dessus de cet âge jusqu'à Tâge de 20 ans, 
aux instructions qui se font les dimanches et les fêtes... Enjoi- 
gnons aux curés de veiller avec attention particulière sur l'in- 
struction desdits enfants dans leur paroisse, môme à l'égard de 
ceux qui n'iront pas aux écoles... » 

S'inspirant de cet article et se conformant à son contenu, le 
curé de Mouriès, Baussan, s'occupa sans retard de créer une 
double école dans sa vaste paroisse, dont la population augmen- 
tait, tandis que celle des Baux était en diminution constante. 
Aussi, en 1725, plusieurs habitants de Mouriès présentèrent-ils à 
l'archevêque d'Arles, Jacques II de Forbin-Janson, une requête 
demandant l'application de l'article VI de la déclaration précitée, 
attendu que dans ladite paroisse il y avait un grand nombre de 
Nouveaux-Convertis, dont les enfants avaient besoin d'être 
instruits de la religion catholique. Le prélat, avisé et consulté, 
répondit de la manière la plus favorable, ordonnant la création 
d'une double école à Mouriès, sauf aux habitants de se pourvoir 
par devant qui de droit pour taxer les gages du maître et de la 
maîtresse, appelés à diriger ces nouvelles écoles. Saisi de cette 
affaire, le conseil de la ville des Baux eut recours à un moyen 
terme. Il consentit à créer une école de garçons et à subvention- 
ner le maître, mais quant à celle des filles, il pria les impétrants 
de ne pas insister, étant donné le très petit nombre de filles à 
qui Ton apprenait à lire. 

Ce demi-succès déplut au curé Baussan, qui insista à nouveau 
et mit le conseil dans l'obligation de répondre favorablement 
dans trois jours à la sommation qu'il leur fit faire par l'huissier 
Vachier avec menaces de porter requête à Tintendant. Le conseil 
de la ville des Baux craignant une surpriseetestimant avec raison 
que la paroisse de Saint-Martin-de-Castillon pourrait lui adresser 
une demande identique, dépêcha à Aix le sieur de Momblan pour 
prendre avis d'avocat et saisir l'intendant de cette grave question, 
en insistant surtout sur l'état précaire des finances. Ce magistrat, 
sollicité des deux côtés, renvoya les parties sans rien imposer, et 
l'école, fondée à Mouriès par Tautorité ecclésiastique, ne fut 
point pour le moment subventionnée par la communauté. 



DE l'académie de VAUCLUSE 29 

En 1727 et le ?> juillet, le consul Darmure demanda au conseil 
des Baux de salarier le maître d'école établi à Mouriès, à cause 
de la présence de nombreuses familles de la religion prétendue 
réformée et de chercher un moyen convenable pour éviter un 
procès dont la poursuite serait très onéreuse, son sentiment étant 
de rendre justice aux habitants dudit hameau en chargeant la 
communauté des gages du régent. La majorité du conseil émit 
Tavis de maintenir les décisions précédentes. 

C'est le 6 décembre 1789 que fut porté le coup décisif, celui qui 
devait vaincre l'entêtement du conseil des Baux. Il est vrai que 
celui-ci avait montré l'année d'avant quelques sentiments de 
modération, en accordant la somme de six livres pour la con- 
fection de quelques tables et de quelques bancs réclamés pour 
l'école de Mouriès. Le sieur Quenin ayant fait remarquer que les 
enfants de ce lieu étaient souvent sans éducation à cause de l'ex- 
trême difficulté d'avoir un maître d'école auquel on pût donner 
par cotisation des gages suffisants, et qu'il conviendrait que la 
communauté donnât au régent de Mouriès autant qu'à celui des 
Baux, soit i5o livres par année, le conseil à l'unanimité accorda 
une subvention annuelle de cent livres et sur la requête des 
conseillers habitant Saint-Martin-de-Castillon, fonda une double 
école au Paradou et à Maussane avec un traitement de cinquante 
livres à chacun des deux maîtres appelés à les diriger. Ainsi 
furent créées en même temps et pour les mêmes motifs trois nou- 
velles écoles dans le pays. 

Cela accompli, le conseil songea à établir des maîtres, lesquels 
devaient être examinés par les consuls qui s'assureraient que, 
tant pour les mœurs que pour le savoir, les postulants étaient 
aptes à remplir les fonctions de régents, qu'ils seraient ensuite 
présentés par eux à l'acceptation et à l'approbation de Tarchevê- 
que et qu'une fois nommés, les maîtres d'écoles prendraient l'en- 
gagement de ne demander aucune augmentation de salaire pour 
quelque cause et prétexte que ce fût. Dans ces conditions, trois 
nouveaux pédagogues furent nommés, savoir : Tardy à Mouriès, 
Giraudau Paradou et Dufaur à Maussane. 

L'année 1 740 n'était pas encore écoulée que déjà deux voisins 
avaient entre eux la guerre. Le régent du Paradou ne faisait 
aucune difficulté pour recevoir et attirer à son école des enfants 
appartenant au hameau de Maussane. Sur la plainte du sieur 
Dufaur et pour rétablir la bonne union et concorde, le conseil de 
la communauté fixa au Touret qui existe entre les deux villages 



3o MÉMOIRES 

une limite séparative que les deux magisters ne pouvaient fran- 
chir pour le recrutement de leurs élèves, sans s'exposer à la perte 
totale de leur traitement. 

Afin d'assurer la présence d'un troisième prêtre aux Baux, le 
consul Maillard proposa, le jôavril de Tannée suivante, de renvoyer 
le régent, le sieur Pitola, et de donner son traitement avec la direc- 
tion de Técole à messire Roux, dont il patronnait et recomman- 
dait chaudement la candidature. Le conseil, ayant approuvé, 
donna six mois à Pitola pour se pourvoir d'un autre poste. Un 
mois après, ce régent, absolument disgracié, fut révoqué sur 
la plainte plus ou moins fondée de plusieuils pères de famille et 
le notaire Chamard lui notifia officiellement son malheur et la 
suppression de ses honoraires. 

En 17S8 et le 17 décembre, le sieur de Momblan obtint du 
conseil que les gages des maîtres de Maussane et de Saint- 
Martin-de-Gastillon fussent portés à cent livres. 

Même année et le 3i décembre, le consul Grognard proposa 
comme régent le sieur Diveux. a bon latiniste », à l'effet de rem- 
placer Duclerc, qui venait de quitter les Baux pour enseigner au 
Paradou. Le conseil agréa la proposition, le nouveau maître fut 
accepté, sauf l'approbation archiépiscopale, aux gages ordirian-es ; 
on lui accorda, deux ans après, sur sa demande, une table et 
deux bancs pour l'école, et douze livres annuelles en sus de ses 
gages pour la location d'une salle où désormais serait donné 
l'enseignement. Nous lisons, en effet, à la date du 3 août 1760 : 
« Plus a été proposé qu'il est de droit et d'usage que les com- 
munautés fournissent aux maîtres d'école une salle pour leur 
classe, ce qui avait même été ainsi pratiqué dans cette ville 
depuis qu'il y a un maître d'école établi, ce qui pourtant, pour 
certaines considérations, aurait été interrompu pendant quelques 
années, le sieur Diveux en demandant aujourd'hui le rétablisse- 
ment, leur avis était que cette demande paraissait légitime, mais 
que la communauté ne pouvant lui fournir dans ce pays une 
salle pour sa classe sans tomber dans une dépense extraordi- 
naire, il lui sera donné douze livres annuellement, la courante 
année comprise. » 

Si les conseillers des Baux nous paraissent en ce moment si 
bien disposés, c'est que l'intendant venait de leur faire sentir son 
pouvoir, en rétablissant d'office, comme on le verra aux Pièces 
justificatives (i), le traitement de Joseph Révcl, maître d'école à 

(1) Pièce |u8tlficative n* V. 



DE l'académie de vaucluse 3i 

Mouriès, supprimé le 20 janvier précédent pour des raisons que 
nous ne connaissons pas. 

Le sieur Diveux fut remplacé aux Baux en 1767 par un nommé 
Paris, lequel ayant l'approbation de Tarchevèque, Jean-Joseph de 
Saint-Jean-de-Jumilhac, crut par ignorance ou par orgueil devoir 
se passer de prévenir les consuls et d'avoir leur assentiment. Une 
violente opposition se produisit à ce sujet au sein du conseil du 
18 janvier et ses services ne furent agréés qu'à une majorité de 
quatre voix et à la condition de présenter des excuses avec toutes 
les formes requises à MM. les conseillers et à M. Coye, lequel 
persistant dans son ressentiment, dit « qu'il méprisait pour sa 
part lesdites excuses, attendu que le sieur Paris était venu dans 
cette ville comme maître d'école sans l'attache de messieurs les 
consuls de l'année précédente et qu'une semblable insulte rejail- 
lissait sur tout le corps de la communauté» ; il invitait donc le 
conseil à ne point accepter le candidat, afin d'éviter des précé- 
dents fâcheux et de semblables inconvénients à l'avenir. A la fin 
du mois d'août, Paris n'était plus aux Baux et l'opposition avait 
fini par triompher de son courage. Le premier consul dit, en 
effet, que maître Paris s'en était allé furtivement et qu'on avait 
reconnu que depuis quelque temps il ne remplissait pas ses 
devoirs avec exactitude; que, d'un autre côté, on avait reçu les 
offres de service d'un nommé Jullien, habitant Nimes. Sur quoi, 
M. Coye dit : « Que Paris n'avait décampé de cette façon indécente 
que faute d'instruction de mœurs ; que la communauté l'avait 
reçu maître d'école sur l'approbation de Monseigneur l'archevê- 
que, nonobstant le sentiment des conseillers qui ne le voulaient 
pas ; qu'à l'avenir et pour empêcher qu'un régent s'établisse sans 
l'agrément des consuls, il fallait tout d'abord l'approbation de 
ceux-ci pour pouvoir ouvrir écoles publiques et toucher les gages 
accoutumés, et que cette condition serait désormais absolue. » 

Jullien ne vint pas et le sieur de Saint-Roman proposa plus 
tard un abbé, que le conseil accepta, mais en recommandant à 
Sallomé et à Saint-Roman d'écrire au maître d'école pour le prier 
de se rendre aux Baux afin de s'entendre ; d'apporter avec lui 
un certificat de bonne vie et mœurs, délivré par le curé de Vendrait 
qu'il habitait, qu'ensuite il lui serait remis un extrait de la pré- 
sente délibération, pour être présenté au grand- vicaire, dont 
l'appro '.nation lui était nécessaire : les consuls lui donneront après 
cela la régence de l'école avec les émoluments attachés à ce 
service. 



32 MÉMOIRES 

La ville des Baux dépensa pour ses maîtres d écoles la somme 
de 462 livres en 1767 et pendant les années suivantes. 

En 1771 et le 23 juin, sur la proposition du consul Laugeiret, 
Joseph Granet eut la direction des écoles des Baux. Il s'était 
muni préalablement de toutes les pièces nécessaires : approbation 
des grands-vicaires, certificats et attestations diverses établissant 
qu'il possédait toutes les qualités requises. L'année suivante, il 
était secrétaire de la communauté. 

Le h décembre 1772, un grand nombre d'habitants du Paradou 
rédigèrent et présentèrent au conseil un mémoire dans lequel ils 
se plaignirent que le nommé Chambeau s'était immiscé de lui- 
même dans ladite paroisse pour y enseigner les enfants. Ils le 
déclaraient incapable d'enseigner l'arithmétique et l'écriture et 
proposaient de mettre à sa place un bon sujet qu'ils connais- 
saient et qu'ils recommandaient au conseil. Celui-ci fut d'avis d'en 
écrire aux grands-vicaires pour les prier d accueillir favorable- 
ment la requête des suppliants et de leur donner le régent de leur 
choix. Un mois après, le conseil fut de nouveau saisi de la même 
question par une pétition en sens contraire, qui fut remise par 
les soins du curé Alaureau ! On y vantait les capacités pédagogi- 
ques du régent et le contenu en fut certifié conforme à la vérité. 
Les consuls et conseil ers des Baux chargèrent les sieurs Olivier 
et Aubert de faire une enquête, dont le résultat devait être exposé 
à la prochaine séance pour y être examiné. La fin de cette alïaire 
fut favorable à Chambeau, qui resta au Paradou pendant une 
douzaine d'années encore. 

En 1775 et le 24 novembre, Joseph Revel, natif de Frontignan, 
époux de Simone Matavet et régent de l'école de Mouriès, mourut 
dans ce village, âge de Cxj ans, et fut inhumé dans le cimetière 
paroissial. Un an après, le maire et le consul exposèrent au conseil 
a que la régence des écoles était vacante depuis assez longtemps 
par le décès du sieur Revel et d'autant que cette paroisse est la 
plus nombreuse du terroir, il convient de remplir cette place 
pour que la jeunesse reçoive une éducation chrétienne et utile, 
et après s'être donné bien de soins, se procure un bon sujet. Le 
sieur Joseph Fugeiret, catholique, ap(jstolique et romain, homme 
de bonne vie et m(eurs, très en état de donner une bonne éduca- 
tion a la jeunesse, leur apparaît propre a remplir cette place, et à 
cet elïet, ils rt)nt propose au conseil pour y délibérer, leur avis 
étant de l'admettre et de lui accorder la somme de cent livres, que 
la communauté est d'usage d'accorder au régent des écoles de 



DE l'académie de vaucluse 33 

ladite paroisse et de supplier Monseigneur Tillustrissime et révé- 
rendissime archevêque d'Arles de lui accorder son approbation et 
commission pour remplir ladite place, d'autant que ledit sieur 
Fugeiret exerçait depuis cinq mois et au-delà la régence des 
écoles de Mouriès de leur consentement et qu'ils avaient attendu 
jusqu'à ce jour de le proposer pour être mieux à môme de con- 
naître sa conduite et sa capacité, desquelles ils ont été très satis- 
faits, de même que le public dudit Mouriès, au moyen de quoi 
leur avis est de lui accorder les honoraires attachés auxdites 
écoles pour les six derniers mois de cette année (i). » Le conseil 
approuva. 

L'école des Baux eut trois directeurs dans la seule année 1777, 
savoir : Millie, Aymard et Martin. Nous ne possédons aucun 
renseignement sur le premier; le deuxième était vicaire et dirigea 
Técole aux gages accoutumés pendant toute la vacance du poste ; 
quant au troisième, c'était un professionnel venant d'Arles et qui 
fut prié de présenter ses certificats de bonne vie et moeurs et de 
capacité pédagogique, le tout complété de l'approbation ecclé- 
siastique. Devenu peu de temps après régent à Mouriès, il y 
mourut le 3o septembre 1785, sans alliance ni famille. Il était âgé 
d'environ 53 ans, et fils d'Antoine, ménager à Saint-Gilles, en 
Languedoc. Il fut remplacé la même année par Jean-Pierre Gri- 
maldier des Baux, auquel on imposa de faire la classe pendant 
trois heures le matin et pendant trois heures le soir, excepté les 
quatre mois d'hiver (i). Au mois de juin de l'année suivante, il 
passa aux Baux, et le sieur Pierre Beauvais, de la ville de Crest en 
Dauphiné, régent à Salon, prit sa place à Mouriès. 

En 1780 et le 6 août, François-Pierre Pécoul fut chargé de 
l'école des Baux, et en 1788. le sieur Guillaume Fouret prit la 
direction de celle de Mouriès, à la condition de vendre son bil- 
lard. 

Le prêtre Aubert, qui dirigeait Técolede Maussane, mourut le 
M) septembre 1787. Coye de Vaumalle, premier consul et maire, 
demanda au conseil « de pourvoir à son remplacement par la 
personne de Jean-Martin Harmelier, natif de la ville de Seynes 
Haute-Provence), mais résidant aux Baux depuis plus de 20 ans.» 
Ct personnage fut agréé, après avoir pris l'engagement préalable 
de sj défaire de sa charge d'huissier. 



(I) Pièce justificative n* VI. 

i'j) Cette partie de l'année correspond à la cueillette et au grappillage des olives. 



34 MÉMOIRES 

Tout au commencement de ce XVIII* siècle, les maîtres appre- 
naient l'écriture, grosse, moyenne et fine, en donnant eux- 
mêmes comme modèles en tête de la page que Télève devait 
remplir les simples lettres de Talphabet, puis des syllabes, des 
mots entiers et enfin des exemples comme ceux-ci : « Vous êtes, le 
plus diligent de tous les écoliers», « Claude Peyre est plus sage 
que Louis Serre » (i). 



V. 



Nous consacrons ce chapitre à donner les noms du personnel 
enseignant tant aux Baux qu'à Mouriès, à Maussane et au 
Paradou, d'après Tordre chronologique et en commençant par 
les Baux. La série de ces divers personnages a été établie diaprés 
les opérations financières des trésoriers, les minutes des notaires 
et les délibérations consulaires. 

A. — Régents de l'école des Baux (2). 

N. en 1544. 

Imbert Andrieu. i5 juin 1847 (notaire Simon Salomé). 

Olivier Jean et de Lacour Maurice. f552-i554. 

Antoine... i554. 

Clappier Jean et Charles Jacques, prêtre. iS56. 

Imbert André de nouveau en i558. 

Reynier Jacques, de Toulon. iSgS. 

Doard Claude, « escollier ». 1604. 

Siméon François. i6o5-i6o7 (3). 

Jean François. iSmai 1607-15 mai 1608. 

Barneoud Jean, i*" octobre 1608-1609(41. 

Mouton Jean. i6i5. 

Ricard Guis. 161 7. 

(1) D'après des documents de 171 1, remis par nos soins aux archives du Comité des 
travaux historiques. 

(2) Les gages des régents ont beaucoup varié. Ils étaient de 16 livres en 1595, de 
36 en i6<:)6, de 60 en i653, de 90 en 1675, de looen 1716, et enfin de iSo en 1725 jusque 
en 1789. La communauté des Baux n'avait accordé tout d'abord que la maison com- 
mune pour salle de classe. 

{'à) Pièce justificative n" I. 

(4) Il y a après 1610 une lacune de quelques années. Le registre du comptable 
porte : « A celui qui enseignera après engagement pour trois ans. » 



DE l'académie de vauclusb 35 

Viard Jean. Février 1618. 

Gérard Louis, natif de Mormoiron. i^"" octobre 1 6 19- r^ octobre 162 1 . 

Benoît. 1622. 

Renaud. 1622-1623, pendant 10 mois. 

Richard. 1625. — Dupuis Jean. 1625-1626. 

Pélissier Pierre reçoit 6 écus pour 6 mois. Octobre 1627. 

Durand Henri. i628-i63o. 

Ailiaud Balthazard, « escollier de Riez ». 1682 (i). 

Pichaud. i633. — Il fut congédié par les consuls au bout de 

dix mois. 
De Manville Jean. i633-i634. — Il était le fils de Jacques, enfant 

naturel de Claude II. 
Fortolis Jacques. i638. 
Daucon. 1639- 1640. 
Barnéoud Laurent. 3* prêtre. 164 1- [645 et en 1648. — Il avait un 

frère marchand à Tarascon. 
Segond. 1646. 

Salvagny Urbain, 3* prêtre. 1647, '657, 1659-1663(2). 
Barbarin. 1648. 
Allemand Paul 3' prêtre. 1649. 

Aguillon 3* prêtre. A partir du 6 septembre i65o à i65i. 
Magdeleine Gaspard. ï653. 

Reynsud 3' prêtre, avec Urbain Salvagni. i655-i656. 
Besson J. 1 658- 1659. 

Aubert Jacques, natif de Quinson. 1663-1712. 
Au bert Ignace-Joseph, né aux Baux le 3i juillet 1694 et fils du 

précédent. 1712-1718. 
Rosais. 1719. 
Roux. 1720. — Nous pensons que Rosais et Roux sont un même 

personnage (Rosais, Rousset, Roux). 
Palureau, 3* prêtre. 1721. 

Bonnet Antoine. 1722-1740.— Pitola. 1741. — Roux. 1741. 
Blanchier Joseph, abbé. 1742-1744, 1746-1748. 
Fortin. 1745. 
Brousse Jean. 1749-1750. 
(^arbonel. 1751. — Argoud. Six mois en 1751. 

(I; Noiaire Jwouis Manson, 8 avril i632. (Archives de M' Gaston LaviUe, notaire à 
Mouriùs.) 

Ci Pièce iuslificative n- II. —Tous les prêtres qui avaient la direction de Pccole 
ciaient aussi chargrés de sonner les cloches, d'entretenir et de blanchir le l^ngre de la 
sacristie, moyennant une rétribution supplémentaire. 



36 MÉMOIRES 

Duclerc François. 1752-1760. — Il exerça ensuite au Paradou. 
Diveux Jean-Baptiste. 1760-1767.— II avait épousé en 1759 Jeanne 

Bonnet. 
Paris. 1768. 
Dubaï. 1769-1770. 
Granet. 1 771-1774. 
Amy ou Mille. 1775-1777. 
Aymard 3* prêtre, 1777, quelques mois. 
Martin Jean. 1778-1780. — Il avait dirigé Técole de Mouriès en 

1778 pendant trois mois; il y revint de nouveau. 
Pécoul François, chirurgien. 1 780-1 78G. 
Grimaldier Jean-Pierre, natif des Baux. 1787-1788. 
Marinier Etienne. 1789-1790. — Marié aux Baux en 1776 avec 

Pétronille Moutonet ; il était le secrétaire de la communauté 

en 1790. 

Précepteurs particuliers (i). 

Bastidy Laurent, à Manville(i). 1621. 
Bonnet Jean, chez le sieur de Molières. 1664. 
Malet Jean, chez Pierre Manson au Paradou. 1664. 
Arnaud André, chez Honoré Peyre au Destet. 1666. 
Fallavel Louis, chez Simon Peyre au Destet. 1670. 
Pascaly Antoine, à Mouriès. 1674. 

B. — Régents de V école de Mouriès (2). 

Tardy. 1740- 1743. 

Revel Joseph. 1744- 1775. 

Fugeiret Joseph. 1775-1777. 

Prat. 1778- 1779. 

Martin Jean. 1780- 1785. 

Grimaldier Jean-Pierre ; il était natif des Baux, où il passa sur sa 

demande. 1785-1786. 
Beauvais ou Bouvet Pierre. 1787. Originaire de Crest, il quitta 

Salon pour diriger Técole de Mouriès. 
Fouret Guillaume. 1788-1790. — Recommandé chaleureusement 
par M; de Bonnecorse. 

(1) D'après les minutes de Jean David et celles de Honoré Peyre, notaires aux Baux, 
aux dates indiquées. (Archives de M* Gaston Laville, notaire à Mouriès.) 

(i) Aux gages inconnus. 

(2) Aux gages de 100 livres. 



DE i/académie de VAUCLUSE 3/ 



C. — Régents de r école de Maussane (i). 

Tacy. 1740. 

Dufaur. 1 741 -1743. 

Granouxet Compagnon. 1748, pendant quelques mois. 

Duverné. 1745. 

Poncet. 1746. 

Argoux. 1761. 

Aubert Pierre-Louis, prêtre. 1755-16 septembre 1787. 

Harmelier Jean-Martin. A partir de décembre 1787. 

D. — Régents de V école de Saint-Martin-de-Castillon, 
autrement dit le Paradou, 

Giroud Jean-Claude. 1740-1741, 1743-1746. 

Pitola Antoine. 1742. 

Compagnon, originaire probablement d'Arles. 1745. 

Armand Nicolas, prêtre secondaire, natif d'Orange. 1747. 

De Retz Jacques. 1748. Né aux Baux le 4 février 1724, fils de 

Claude et de Jeanne de Salies et établi comme marchand au 

Paradou. 
Gras Charles. 1749-1754. 

Brunet Antoine. 1754- 1759. — Sa femme s'appelait Anne Nègre. 
Richaud Jean-André. 1759, 1763- 1767. 
Duclerc Barthélémy. i'/iyO'\j62. — Natif de Péronne en Picardie, 

il avait épousé Anne Pézenas, de Carpentras et mourut au' 

Paradou le 3 mai 1762, âgé de 61 ans. 
(^hambeau Antoine. 1 768-1 788. Naquit à Tarascon, en 1726, de 

Joseph et de Firmine Chabert. S'étant établi au Paradou avec 

son père et exerçant le métier de facturier, il épousa, le 20 août 

1753, Trophimette Ramel. Plus tard il s'improvisa régent. 
Hubac. 1789-1790. 

Quand la création de l'école du Paradou fut décidée en 1740, 
cinq habitants de ce lieu s associèrent pour l'établissement d'une 
maison d'école avec le matériel nécessaire. Le maître devait 
payer une annuité de neuf livres, réciter chaque samedi après la 
messe les litanies de la Vierge et dire un De Profundis en faveur 

(i) Aux gages de 5o livres jusque en 1 768 et de 100 livres à partir de cette date. 
Même observation pour les régents du Paradou. 



36 MÉMOIRES 

Duclerc François. 1752- 1760. — 11 exerça ensuite au Paradou. 
Diveux Jean-Baptiste. 1760-1767.— Il avait épousé en 1759 Jeanne 

Bonnet. 
Paris. 1768. 
Dubaï. 1769-1770. 
Granet. 1771-1774. 
Amy ou Mille. 1775-1777. 
Aymard 3* prêtre, 1777, quelques mois. 
Martin Jean. 1778-1780. ~ Il avait dirigé l'école de Mouriès en 

1778 pendant trois mois; il y revint de nouveau. 
Pécoul François, chirurgien. 1780-1786. 
Grimaldier Jean-Pierre, natif des Baux. 1 787-1 788. 
Marinier Etienne. 1789-1790. — Marié aux Baux en 1776 avec 

Pétronille Moutonet ; il était le secrétaire de la communauté 

en 179"). 

Précepteurs particuliers (i). 

Bastidy Laurent, à Manville(i). 1621. 
Bonnet Jean, chez le sieur de Molières. 1664. 
Malet Jean, chez Pierre Manson au Paradou. 1664. 
Arnaud André, chez Honoré Peyre au Destet. i66^3. 
Fallavel Louis, chez Simon Peyre au Destet. 1670. 
Pascaly Antoine, à Mouriès. 1674. 

B. — Régents de l'école de Mouriès (2). 

Tardy. 1740- 1743. 

Revel Joseph. 1744- 1775. 

Fugeiret Joseph. 1 775- 1777. 

Prat. 1778-1779. 

Martin Jean. 1780-1785. 

Grimaldier Jean-Pierre ; il était natif des Baux, où il passa sur sa 

demande. 1785-1786. 
Beauvais ou Bouvet Pierre. 1787. Originaire de Crest, il quitta 

Salon pour diriger Técole de Mouriès. 
Fouret Guillaume. 1788-1790. — Recommandé chaleureusement 
par M.' de Bonnecorse. 

(i) D*après les minutes de Jean David et celles de Honoré Peyre, notaires aux Baux, 
aux dates indiquées. (Archives de M- Gaston Laville, notaire à Mouriès.) 
(i) Aux gages inconnus. 
(2) Aux gages de 100 livres. 



DE l/ ACADEMIE DE VAUCLUSE 3/ 

C. — Régents de r école de Maussane (i). 

Tacy. 1740. 

Dufaur. 1741-1743. 

Granouxet Compagnon. 1748, pendant quelques mois. 

Duverné. 1745. 

Poncet. 1746. 

Argoux. i75r. 

Aubert Pierre-Louis, prêtre. 1755-16 septembre 1787. 

Harmelier Jean-Martin. A partir de décembre 1787. 

D. — Régents de V école de Saint-Martin-de-Castillon, 
autrement dit le Paradou. 

Giroud Jean-Claude. 1740-1741, 1743-1746. 

Pitola Antoine. 1742. 

Compagnon, originaire probablement d'Arles. 1745. 

Armand Nicolas, prêtre secondaire, natif d'Orange. 1747. 

De Retz Jacques. 1748. Né aux Baux le 4 février 1724, fils de 

Claude et de Jeanne de Salies et établi comme marchand au 

Paradou. 
Gras Charles. 1749-1754. 

Brunet Antoine. 1754-1759. — Sa femme s'appelait Anne Nègre. 
Richaud Jean-André. 1759, 1763-1767. 
Duclerc Barthélémy. 17(^0-1762. — Natif de Péronne en Picardie, 

il avait épousé Anne Pézenas, de Carpentras et mourut au' 

Paradou le 3 mai 1762, âgé de 61 ans. 
(]hambeau Antoine. 1768-1788. Naquit à Tarascon, en 1726, de 

Joseph et de Firmine Chabert. S'étant établi au Paradou avec 

son père et exerçant le métier de facturier, il épousa, le 20 août 

1753, Trophimette Ramel. Plus tard il s'improvisa régent. 
Hubac. 1789-1790. 

Quand la création de l'école du Paradou fut décidée en 1740, 
cinq habitants de ce lieu s'associèrent pour l'établissement d'une 
maison d'école avec le matériel nécessaire. Le maître devait 
payer une annuité de neuf livres, réciter chaque samedi après la 
meSwSe les litanies de la Vierge et dire un De Profundis en faveur 

(I) Aux gages de 5o livres jusque en 1758 et de 100 livres à partir de cette date. 
Môme observation pour les régents du Paradou. 



36 MÉMOIRES 

Duclerc François. 1752- 1760. — Il exerça ensuite au Paradou. 
Diveux Jean-Baptiste. 1760-1767.— Il avait épousé en 1759 Jeanne 

Bonnet. 
Paris. 1768. 
Dubaï. 1769-1770. 
Granet. 1771-1774. 
Amy ou Mille. 1775-1777. 
Aymard 3* prêtre, 1777, quelques mois. 
Martin Jean. 1778-1780. — Il avait dirigé Técole de Mouriès en 

1778 pendant trois mois; il y revint de nouveau. 
Pêcoul François, chirurgien. 1780178(3. 
Grimaldier Jean-Pierre, natif des Baux. 1787-1788. 
Marinier Etienne. ï789-i79(.). — xMarié aux Baux en 1776 avec 

Pétronille Moutonet ; il était le secrétaire de la communauté 

en 1790. 

Précepteurs particuliers (i). 

Bastidy Laurent, à Manville(i). 1621. 
Bonnet Jean, chez le sieur de Molières. 1664. 
Malet Jean, chez Pierre Manson au Paradou. 1664. 
Arnaud André, chez Honoré Peyre au Destet. i66^3. 
Fallavel Louis, chez Simon Peyre au Destet. 1670. 
Pascaly Antoine, à Mouriés. 1674. 

B. — Régents de l'école de Mouriès (2). 

Tardy. 1740- 1743. 

Revel Joseph. 1744-1775. 

Fugeiret Joseph. 1775-1777. 

Prat. 1778- 1779. 

Martin Jean. 1780- 1785. 

Grimaldier Jean-Pierre ; il était natif des Baux, où il passa sur sa 

demande. 1785-1786. 
Beauvais ou Bouvet Pierre. 1787. Originaire de Crest, il quitta 

Salon pour diriger Técole de Mouriès. 
Fouret Guillaume. 1788-1790. — Recommandé chaleureusement 
par M.' de Bonnecorse. 

( I ) D'après les minutes de Jean David et celles de Honoré Peyre. notaires aux Baux, 
aux dates indiquées. (Archives de M- Gaston Laville, notaire à Mouriès.) 
(i) Aux gages inconnus. 
{1) Aux gages de 100 livres. 



DE l/ACADEMiE DE VAUCLUSE 3/ 



C. — Régents de V école de Maussane (r). 

Tacy. 1740. 

Dufaur. 1 741-1743. 

Granouxet Compagnon. 1743, pendant quelques mois. 

Duverné. 1745. 

Poncet. 1746. 

Argoux. 1751. 

Aubert Pierre-Louis, prêtre. 1755-16 septembre 1787. 

Harmelier Jean-Martin. A partir de décembre 1787. 

D. — Régents de V école de Saint-Martin-de-Castillon, 
autrement dit le Paradou, 

Giroud Jean-Claude. 1740-1741, 1743-1746. 

Pitola Antoine. 1742. 

Compagnon, originaire probablement d'Arles. 1745. 

Armand Nicolas, prêtre secondaire, natif d'Orange. 1747. 

De Retz Jacques. 1748. Né aux Baux le 4 février 1724, fils de 

Claude et de Jeanne de Salies et établi comme marchand au 

Paradou. 
Gras Charles. 1749-1754. 

Brunet Antoine. 1754-1759. — Sa femme s'appelait Anne Nègre. 
Richaud Jean-André. 1759, 1763-1767. 
Duclerc Barthélémy. \']()0-\^()i, — Natif de Péronne en Picardie, 

il avait épousé Anne Pézenas, de Carpentras et mourut au' 

Paradou le 3 mai 1762, âgé de6r ans. 
(^hambeau Antoine. 1768-1788. Naquit à Tarascon, en 1726, de 

Joseph et de Firmine Chabert. S'étant établi au Paradou avec 

son père et exerçant le métier de facturier, il épousa, le 20 août 

1753, Trophimette Ramel. Plus tard il s'improvisa régent. 
Hubac. 1789-1790. 

Quand la création de l'école du Paradou fut décidée en 1740, 
cinq habitants de ce lieu s'associèrent pour l'établissement d'une 
maison d'école avec le matériel nécessaire. Le maître devait 
payer une annuité de neuf livres, réciter chaque samedi après la 
messe les litanies de la Vierge et dire un De Profundis en faveur 

(I) Aux gages de 5o livres jusque en 1 758 et de joo livres à partir de cette date. 
iMême observation pour les régents du Paradou. 



38 MÉMOIRES 

des associés, le tout approuvé par Tarchevêque qui se réservait 
le droit de nommer ou de révoquer le titulaire (i). Comme on 
devait donner à Timmeuble des proportions suffisantes pour 
recevoir aussi les enfants de Maussane, on s'explique la rivalité 
des deux régents dont nous avons parlé plus haut. 



VI. 



Il est à regretter qu'un travail de cette nature n'ait pas été rendu 
plus complet et plus vivant. Toutefois, malgré ses lacunes, ce 
qui vient d'être exposé et présenté, projette une lumière suffi- 
sante pour faire connaître ces vaillants et modestes pionniers de 
la civilisation, qui dans les circonstances et les conditions les 
plus diverses, ont combattu obscurément mais non sans succès 
contre l'ignorance. Et, maintenant, veut-on savoir ce que sont 
devenus tant d'eflbrts et de sacrifices, au lendemain de la Ter- 
reur où tout fut suspendu? Voici la fin d'un rapport qui servira 
d'épilogue, dont la minute anonyme, mais officielle, se trouve 
insérée dans les comptes de la communauté de Maussane à 
l'année 1794. 

« N** 7. — Demande. — Vous n'oublierez pas surtout de me 
faire connaître les établissements créés pour l'instruction publi- 
que et ce que vous croirez devoir être ajouté pour la perfec- 
tionner. 

« Répofwe. — Nous avons pris le i5 frimaire une délibération 
pour fixer dans une commune du canton un instituteur qui s'est 
présenté à la séance publique. Nous désirons qn'il s'en présente 
un pour chaque commune, la médiocrité des fortunes des admi- 
nistrés ne leur permet pas d'élever leurs idées jusques à la per- 
fection d'une grande éducation : la lecture, l'écriture, l'arithmé- 
tique, les éléments de la morale et des lois, voilà ce qui leur 
convient. 

« Observation, — Nous laissons aux villes populeuses et riches 
le soin de vous présenter leurs idées sur le perfectionnement des 
institutions. Le Comité d'instruction publique, composé d'hom- 
mes parfaitement instruits, ne nous laisse rien à désirer dans ce 
genre. Nous désirons seulement que la législation actuelle donne 

(i) Paulet, Les Baux et Caslillon, Saint-Remy, p. 345 et 346. 



OE l'académie de vaucluse 39 

de l'activité à une mesure imaginée par l'Assemblée constituante 
et trop longtemps retardée pour le malheur de la génération 
actuelle. » 

Tel est dans ses grands traits Thistorique de Tenseignemen 
aux Baux avant 1789, d'après des documents originaux et abso- 
luments inédits. 

Destandau. 



40 MÉMOIRES 



PIÈCES justificativfs. 



I. 

Quittance des gages de Simèon, maitre d'école des Baux. 
28 octobre 1606. 

(Archives de Maussane, sac du trésorier, année i6o5, art. 42.) 

Je soussigné, régent et mestre d'escole du lieu et commune des Baux, ay receu de 
mestre Louis Manson, trésorier de ladite commune, la somme de neuf livres en 
déduction et a bon compte des gaiges que me donne ladite commune et pour la 
présente année comensée le premier octobre dernier mil cis cens et cinq, de laquelle 
somme l'en quite. Et en foy de ce, pour sa décharge luy ay consedé la présente, en 
présence de mestre Marc Anthoine Trabaud, ce vingthuitiesme octobre 1606. 

Signé : SiMÉON. 



IL 

Mandat des consuls des Baux pour le payement du maitre d'école, 

i663, 

(Archives de la mairie de Maussane, sac du trésorier, année i663, art. 42.) 

i663 et le 18 avril, ordre des consuls de Vinsargueset Baillol donné au sieur Peyre, 
trésorier des Baux, de payer a messire Anthoine Salvagny, prestre, la somme de 
dix huit livres, a quoi se trouvent pourtés les appointements de feu Salvagny, son 
frère, en qualité de troisième prestre pour les écoles, orloges, cloches et blanchis- 
saiges, le tout a i38 livres et pour le prorata du temps qu'il a servi despuis le i5 mars 
de l'année 1662 jusques au 8 mai dernier qui ne fut plus aux gaiges de la ville. . 



m. 

Lettre de Vintendant Lebret transmettant les ordres du Roi pour 
l'instruction des enfants des Nouveaux-Convertis. 17 août i6g3. 

(Original papier aux Archives des Bouches-du-Rhône, C 2226.) 

Le Roy voulant que les ordres qu*il a cy devant donnez pour obliger les nouveaux 
catholiques d'envoyer régulièrement leurs enfants aux écoles, instructions et caté- 
chismes qui se font dans leurs paroisses, continuent de ce exécuter avec la même 
exactitude, et Sa Majesté voulant les y obliger, que les ecclésiastiques et maîtres 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE ' 4I 

d'ccoles, chargez dans les paroisses de l'instruction des enfants des nouveaux catho- 
liques, en tiennent un roUe exact, affin que Ihorsque quelques-uns manqueront d'y 
venir aux jours marquez, ils en donnent aussitôt advis au juge, qui sans delay 
condamnera les pères et mères a cinq sols d'amende pour chasque fois que chacun 
de leurs enfants auront manquez de venir auxdites écoles et instructions, et que les 
amendes soient distribuées sur le champ aux pauvres de la paroisse. Vous voyez 
Monsieur, que pour pouvoir exécuter les intentions du Roy. qui vous sont ci-dessus 
expliquées, il est nécessaire que vous obligiez les curez ou vicaires et maîtres d'école 
de votre lieu de tenir un rolle exact de tous les enfants des nouveaux convertis dudit 
lieu, de m'en envoyer un double et de les obliger a vous avertir régulièrement de 
ceux qui manqueront de se trouver a leurs instructions et leçons aux jours marquez, 
afiin que vous les condamniez invariablement a l'amende portée par cette lettre et 
que vous les fassiez payer et distribuer sur le champ aux pauvres de votre lieu, 
suivant les intentions de Sa Majesté, m'informant exactement de i5 en i5 jours de 
ce que vous aurez fait en exécution des ordres cy-dessus, que le Roy veut absolu- 
ment être suivi. 
Je suis, Monsieur, et très sincèrement et entièrement à vous. 

Le Bret. 
A Aix, ce 17 août 1693. 

Sur le repli : Ordre du Roy portant que les enfants des Nouveaux-Convertis aillent 
aux offices et écoles. 



IV. 



Lettre de M. Chartroux, subdélégué à Lourmarin, touchant 
les Nouveaux-Convertis, 

(Archives de la mairie de Maussane, sac du trésorier, année 1720, art. 4a.) 

Messieurs, 
Il y a longtemps que les Nouveaux-Convertis devraient ôtrc desabusés de leurs 
vaines espérances a être rétablis dans leur pretandu exercice, et comme il n'a esté 
fondé que par des hommes ramplis de haine et de malice, il n'y a nulle apparence 
au succès qu'ils s'en attendent. Dieu par sa miséricorde les appelle aujourd'hui a 
revenir dans son église, qui est la seule véritable, par les soins religieux de son 
Altesse Royalle Mgr le duc d'Orléans, dont je me trouve honoré de ses ordres, que 
Mgr de Lebret, intendant en cette province, m'a adressé. Son intention est que ces 
Messieurs envoyent régulièrement leurs enfans aux instructions qui se font dans les 
paroisses de vos lieux. Vous prendrez la peine d'avertir les pères, mères, tuteurs et 
curateurs qui en ont les soins, aussi bien que les maîtres de vos ecolles, de les y 
faire aller, môme de les y conduire, pour éviter tout prétexte. Je fairai dans la suite 
mes tournées dans vos lieux, pour prendre un état de la manière dont ils se compor- 
tent. Je suis persuadé qu'ils se conformeront a cet ordre salutaire et que j'auray lieu 
de vous marquer que je suis très sincèrement. Messieurs, 

Votre très humble et très obéissant serviteur. 

Chartroux. 
A Lourmarin, ce 10 mars 1720. 

A messieurs les consuls de la Roque. Velaux, Mouriès, les Baux, Eyguières, Mérindol 
et Sénas. 



42 



MEMOIRES DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



V. 

Lettre de riniendant de Provence, pour te payement des gages 
du maître d'êcote de Mouriès. 25 avrit 1760. 

(Archives de la mairie de Maussane, correspondance et lettres aux consuls 

des Baux.) 

A Monsieur Monsieur Manson, fabricien aux Baux. 

Le sieur Joseph Revel, Monsieur, maître d'école au hameau de Mouriès, approuvé 
par Mgr Tarchevéque d'Arles, se plaint du refus que font le consul des Baux de lui 
faire payer ses honoraires. Il paroist que ce refus est fondé sur une délibération 
prise le 20 janvier qui supprime les honoraires du maître d'école ; rtiais cette délibé- 
ration est contraire aux dispositions de l'arrest du Conseil du 21 décembre lyiS, por- 
tant vérification des dettes de cette communauté, lequel fixe des honoraires au maître 
d'école. Ainsi mal à propos le conseil de la communauté a supprimé une dépense 
qui a eu lieu depuis cet arrest. Les consuls n'ont pas le droit de nommer à la régence 
des écoles sans l'approbation de Mgr l'archevêque d'Arles. Le sieur Revel est muni 
de tous les pouvoirs nécessaires de la part de ce prélat pour les régenter, et il a été 
rendu d'ailleurs de très bons témoignages de sa conduite. Je vous prie donc, Mon- 
sieur, de faire sçavoir aux consuls qu'ils doivent sans difficulté faire payer au sieur 
Revel les honoraires qui lui sont dus en qualité de maître d'école et jusqu'à ce qu'il 
ait été remplacé par un autre approuvé par Mgr l'archevêque. 

Je suis. Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur. 

La Tour. 
A Aix, le 25 avril 1760. 



VI. 
Dénombrement des Baux en 17 65. 

(Archives de la mairie de Maussane.) 



Les Baux 


Habitants. 
611 
536 

945 
1.402 

3.494 habitants. 


Maisons. 
i58 


Saint-Martin-de-Castillon . . 

Maussane 

Mouriès 


127 
227 
296 

808 maisons 



Bertrand du Guesclin 
et les États pontificaux de France. 



Passage des Routiers en Languedoc (i36S-!367). 
Guerre de Provence (t3681. 



I. 

Depuis l'expédition d'Arnaud de Cervole en Provence (iSSy- 
i358), surtout depuis la prise et Toccupation du Pont-Saint-Esprit 
par la Grande Compagnie (i36oi 36 1), les habitants delà ville 
d'Avignon et du comté Venaissin, harcelés constamment par 
des troupes de brigands qui couraient et désolaient le pays, ne se 
sentaient plus en sûreté. Ils avaient beau élever à la hâte des 
remparts, renfermer les vivres de la campajgne dans leurs forte- 
resses, ainsi qu'ils en recevaient Tordre, conclure des ligues avec 
les gens du Dauphiné, de la Provence, de la Savoie et du comté 
de Valentinois (i), il leur était difficile d'empêcher les routiers, 
attirés par la perspective de capturer quelque riche seigneur ou 



(i) Cette ligue, que le pape Urbain V songeait à former dès les premiers jours 
d'octobre i363, fut définitivement constituée à la fin du mois suivant. Deux docu- 
ments la concernant ont été publiés par M. L. Duhamel, sous le titre : Une Ligue 
au XIV* siècle, dans le Bulletin historique et archéologique de Vaucluse, t. II (1880). 
p. ioq; mais d'autres ont été indiqués ou édités par M. Maurice Prou, Étude sur les 
relations politiques du pape Urbain V avec les rois de France (76* fascicule de la 
Bibliothèque de VÉcole des hautes études)^ p. 3a et suiv., 104 (n* xx), 106 (n* xxii), 
iio(n* xx\'ii|, etc.» et par le R. P. Henri Denifle, La Désolation des églises, mona- 
stères et hôpitaux en France pendant la guerre de Cent Ans, t. II. p. 441 et 44a ; d'autres 
enfin restent inédits dans le registre B 7 des Archives départementales de Vaucluse, 
fol. 14 et suiv. Voir encore le Compte de Raoul de Louppy, gouverneur du Dauphiné, 
publié par Ulysse Chevalier, p. i5, n* 57; p. 5i à 55. n»* m à 119. Le comté Venais- 
sin et les provinces voisines avaient agi en somme cpmme les seigneurs, nobles et 
communautés de Languedoc, qui à peu près à la même époque, avaient auss^ 
conclu une ligue semblable. 



44 MEMOIRES 

de rançonner les prélats se rendant à la cour pontificale, de 
revenir s'établir dans le pays. 

A l'automne de Tannée i365, leurs craintes redoublèrent quand 
ils apprirent la nouvelle de la prochaine arrivée de Bertrand du 
Guesclin, conduisant en Espagne toute une armée, dont ils pou- 
vaient à bon droit redouter les excès. Elle se composait, en 
effet, de ces soldats de fortune qui, après avoir été enrôlés par 
le roi de Navarre Charles le Mauvais, par du Guesclin lui-même 
combattant au nom de Charles V, par Charles de Blois et Jean de 
Montfort se disputant le duché de Bretagne, s'étaient trouvés 
sans emploi après les traités de Paris (6 mars i365) et de Gué- 
rande (ri avril i365). A ces Bretons, Anglais, Normands, Gascons 
ou Navarrais s'étaient encore jointes les compagnies d'aven- 
ture, qui après avoir longtemps ravagé le centre de la France, 
notamment le duché et le comté de Bourgogne, avaient consenti 
à suivre le futur connétable dans son expédition au-delà des 
monts. 

A vrai dire, cette expédition n'était qu'un prétexte : le but 
que Ton poursuivait était l'éloignement, souhaité définitif, de ces 
compagnies, véritable fléau pour les contrées sur lesquelles elles 
s'abattaient. Il faut lire dans les bulles pontificales et dans les 
docum.ents contemporains la série des crimes dont elles se ren- 
daient journellement coupables, les pillages, vols, incendies, 
meurtres, viols, sacrilèges qu'elles commettaient sans vergogne, 
les captures de forteresses qu'elles tentaient à chaque occasion 
pour s'y cantonner et de là faire trembler toute une région 
qu'elles obligeaient à se racheter, il faut lire tout cela, dis-je, 
pour avoir une idée de l'état de désolation dans lequel notre 
pauvre pays était tombé grâce à elles. Plusieurs fois déjà on 
avait voulu s'en débarrasser. Après la prise du Pont-Saint-Esprit, 
le pape Innocent VI avait été assez heureux pour en expédier une 
partie en Italie avec le comte de Montferrat, en guerre avec les 
Visconti milanais (i). L'année suivante, toute une armée, où se 
trouvait la fleur de la chevalerie française, commandée par le 
comte de Tancarville, Jacques de Bourbon, comte de la Marche, 
et surtout l'archiprêtre Arnaud de Cervole, s'était mise à leur 
poursuite; surprise elle-même, elle s'était fait battre à Brignais 



'îj Je tîie permets de renvoyer à l'article intitulé L'Occupation du Pont Saint-Esprit 
lk$ Grandes Compagnies (i36o-i36i), que j'ai publié dans la Revue historique de 
fnce, 1901, p. 79 et 146. 



DE l'académie de VAUCLUSE 4b 

[6 avril i362) (i). Trois mois plus tard (22 juillet i362), quelques- 
unes de ces mêmes compagnies avaient consenti, par un traité 
conclu à Clermont, à suivre en Espagne Don Enrique de Trasta- 
mare, révolté contre son frère Don Pèdre, roi de Castille (2) ; 
elles s'étaient arrêtées devant les Pyrénées. 

Après tous ces insuccès, le pape Urbain V était intervenu : 
comme le 3i mars i363, il avait lui-même prêché une croisade 
contre les Turcs et donné la croix aux rois de France, de Chypre 
et de Danemark présents à Avignon (3), par sa bulle du 25 mai 
suivant, il avait deman^dé aux capitaines et gens de compagnies 
de partir pour la Terre Sainte (4) ; sur leur refus, il avait publié 
contre eux les bulles les plus comminatoires et exhorté les 
fidèles à se liguer pour les repousser ; non seulement il les avait 
excommuniés, défendant à toute personne d'entretenir des rela- 
tions avec ces maudits, mais encore il avait accordé des indul- 
gences à ceux qui les combattraient (27 février et 27 mai 1364, 
5 avril i365)(5;. Cependant, il avait eu l'espérance de voir ses 
projets mis à exécution cette même année i365 et il avait obtenu 
de l'empereur Charles IV, venu le 23 mai à Avignon, qu'il laisse- 
rait les societates traverser l'Allemagne jusqu'à leur entrée dans 
la Hongrie, où elles étaient réclamées pour repousser les Turcs. 
L'Archiprêtre s'était mis à la tête de tous ceux qu'il avait pu 
entraîner, mais la mauvaise organisation de son expédition, les 
excès que ses troupes commirent et la terreur qu'elles inspirèrent 
partout sur leur passage les empêchèrent d'aller plus loin que 
Strasbourg (mai-juillet i36S) (6). 

(i) Je ne puis citer ici toutes les sources; je me borne à renvoyer aux ouvrag-es 
suivants: Chérest, L'Archiprétre, p. i66 et suiv.; G. Guiguc, Les Tard-Venus en Lyon- 
nais, Foijz et Beaujolais, p. 69 et suiv. ; H. Denifle, La Désolation des églises..., t. II, 
p. 407. 

(2) E. Molinier, Étude sur la vie d'Arnoul d'Audrehem (t. VI, a* série des Mémoires 
présentés par divers savants à l'Académie des inscriptions et telles- lettres, r** partie), p. 
107 à 109. 

(3) M. Prou, Étude..., p. 14 et 25. 
I4) H. Denifle, t. II. p. 444. 

(5) Idem, t. II, p. 445 à. 450.— L'Inventaire des Archives de Montpellier, publié parM. J. 
Berthelé, signale encore au t. I, p. lyit n** 2261 et 2262, des bulles d'excommuni- 
cation des 28 février i362 (v. st.) et i*' juin 1364 (2* année du pontificat d'Urbain V) 
contre les routiers ravageant le Languedoc et ceux qui entretenaient des relations 
avec eux. — Raoul de Louppy, le gouverneur du Dauphiné, porta dans ses comptes 
les dépenses qu'il avait faites du 3i mars au 10 avril i365, pour aller à. Avignon 
parler delà part du roi au pape, touchant c le fait des ennemis, gens de compaigne, 
qui lors estoient ou royaume, affin de yceulx faire vuidier et chasser dlcellui par 
sentences d'escommeniement, plainnes indulgences ou autrement.» {Loc. cit., p. 34, 
n*76.) 

(6) Sur cette expédition cf. Chérest, p. 3o4 et suiv.; H. Denifle. t. II, p. 478 et suiv. 



44 MEMOIRES 

de rançonner les prélats se rendant à la cour pontificale, de 
revenir s'établir dans le pays. 

A l'automne de Tannée i365, leurs craintes redoublèrent quand 
ils apprirent la nouvelle de la prochaine arrivée de Bertrand du 
Guesclin, conduisant en Espagne toute une armée, dont ils pou- 
vaient à bon droit redouter les excès. Elle se composait, en 
effet, de ces soldats de fortune qui, après avoir été enrôlés par 
le roi de Navarre Charles le Mauvais, par du Guesclin lui-même 
combattant au nom de Charles V, par Charles de Blois et Jean de 
Montfort se disputant le duché de Bretagne, s'étaient trouvés 
sans emploi après les traités de Paris (6 mars i365) et de Gué- 
rande (ii avril i365). A ces Bretons, Anglais, Normands, Gascons 
ou Navarrais s'étaient encore jointes les compagnies d'aven- 
ture, qui après avoir longtemps ravagé le centre de la France, 
notamment le duché et le comté de Bourgogne, avaient consenti 
à suivre le futur connétable dans son expédition au-delà des 
monts. 

A vrai dire, cette expédition n'était qu'un prétexte : le but 
que Ton poursuivait était Téloignement, souhaité définitif, de ces 
compagnies, véritable fléau pour les contrées sur lesquelles elles 
s'abattaient. Il faut lire dans les bulles pontificales et dans les 
docum.ents contemporains la série des crimes dont elles se ren- 
daient journellement coupables, les pillages, vols, incendies, 
meurtres, viols, sacrilèges qu'elles commettaient sans vergogne, 
les captures de forteresses qu'elles tentaient à chaque occasion 
pour s'y cantonner et de là faire trembler toute une région 
qu'elles obligeaient à se racheter, il faut lire tout cela, dis-je, 
pour avoir une idée de l'état de désolation dans lequel notre 
pauvre pays était tombé grâce à elles. Plusieurs fois déjà on 
avait voulu s'en débarrasser. Après la prise du Pont-Saint-Esprit, 
le pape Innocent VI avait été assez heureux pour en expédier une 
partie en Italie avec le comte de Montferrat, en guerre avec les 
Visconti milanais (i). L'année suivante, toute une armée, où se 
trouvait la fleur de la chevalerie française, commandée par le 
comte de Tancarville, Jacques de Bourbon, comte de la Marche, 
et surtout l'archiprêtre Arnaud de Cervole, s'était mise à leur 
poursuite; surprise elle-même, elle s'était fait battre à Brignais 



(i) Je me permets de renvoyer à Tarticle intitulé L'Occupation du Pont Saint-Esprit 
parles Grandes Compagnies (i36o-i36i), que j'ai publié dans la Revue historique de 
Provence, 1901, p. 79 et 146. 



DE l'académie de VAUGLUSE 46 

(6 avril i362) (i). Trois mois plus tard (22 juillet i362), quelques- 
unes de ces mêmes compagnies avaient consenti, par un traité 
conclu à Clermont, à suivre en Espagne Don Enrique de Trasta- 
mare, révolté contre son frère Don Pèdre, roi de Castille(2); 
elles s'étaient arrêtées devant les Pyrénées. 

Après tous ces insuccès, le pape Urbain V était intervenu : 
comme le 3i mars i363, il avait lui-même prêché une croisade 
contre les Turcs et donné la croix aux rois de France, de Chypre 
et de Danemark présents à Avignon (3), par sa bulle du 25 mai 
suivant, il avait deman^dé aux capitaines et gens de compagnies 
de partir pour la Terre Sainte (4) ; sur leur refus, il avait publié 
contre eux les bulles les plus comminatoires et exhorté les 
fidèles à se liguer pour les repousser; non seulement il les avait 
excommuniés, défendant à toute personne d'entretenir des rela- 
tions avec ces maudits, mais encore il avait accordé des indul- 
gences à ceux qui les combattraient (27 février et 27 mai 1364, 
5 avril i365)(5i. Cependant, il avait eu l'espérance de voir ses 
projets mis à exécution cette même année i365 et il avait obtenu 
de l'empereur Charles IV, venu le 23 mai à Avignon, qu'il laisse- 
rait les 50c/^/j/e5 traverser l'Allemagne jusqu'à leur entrée dans 
la Hongrie, où elles étaient réclamées pour repousser les Turcs. 
L'Archiprêtre s'était mis à la tête de tous ceux qu'il avait pu 
entraîner, mais la mauvaise organisation de son expédition, les 
excès que ses troupes commirent et la terreur qu'elles inspirèrent 
partout sur leur passage les empêchèrent d'aller plus loin que 
Strasbourg (mai-juillet i365) (6). 

(i) Je ne puis citer ici toutes les sources; je me borne à renvoyer aux ouvrage^ 
suivants: Chérest, L'Archiprêtre, p. i66 et suiv.; G. Guigue, Les Tard-Venus en Lyon- 
nais, Foi:z et Beaujolais, p. 69 et suiv. ; H. Denifle, La Désolation des églises..., t. II, 
p. 407. 

(2) E. Molinier, Étude sur la vie d'Amoul d'Audrehem (t. VI, a' série des Mémoires 
présentés par divers savants à l'Académie des inscriptions et belles-lettres, f* partie), p. 
ro7 à 109. 

(3) M. Prou, Étude..., p. 14 et 25. 
Ul H. Denifle, t. II. p. 444. 

(5) Ideni, t. II, ^. 4^ Èi^.— L'Inventaire des Archives de Montpellier, publié parM. J. 
Berthelé, signale encore au t. I, p. 171, n** 2261 et 2262, des bulles d'excommuni- 
cation des 28 février i362 (v. st.) et i"' juin 1364 (2* année du pontificat d'Urbain V) 
contre les routiers ravageant le Languedoc et ceux qui entretenaient des relations 
avec eux. — ■ Raoul de Louppy, le gouverneur du Dauphiné, porta dans ses comptes 
les dépenses qu'il avsiit faites du 3i mars au 10 avril i365, pour aller k Avignon 
parler delà part du roi au pape, touchant f le £ait des ennemis, gens de compaigne, 
qui lors estoient ou royaume, affin de yceulx faire vuidier et chasser dScellui par 
sentences d'escommeniement, plainnes indulgences ou autrement.» (Loc, cit., p. 34, 
n-76.) 

(6) Sur cette expédition cf. Chérest, p. 3o4 et suiv.; H. Denifle, t. II, p. 478 et suiv. 



44 MEMOIRES 

de rançonner les prélats se rendant à la cour pontificale, de 
revenir s'établir dans le pays. 

A l'automne de Tannée i365, leurs craintes redoublèrent quand 
ils apprirent la nouvelle de la prochaine arrivée de Bertrand du 
Guesclin, conduisant en Espagne toute une armée, dont ils pou- 
vaient à bon droit redouter les excès. Elle se composait, en 
effet, de ces soldats de fortune qui, après avoir été enrôlés par 
le roi de Navarre Charles le Mauvais, par du Guesclin lui-même 
combattant au nom de Charles V, par Charles de Blois et Jean de 
Montfort se disputant le duché de Bretagne, s'étaient trouvés 
sans emploi après les traités de Paris (6 mars i365) et de Gué- 
rande (ii avril i365). A ces Bretons, Anglais, Normands, Gascons 
ou Navarrais s'étaient encore jointes les compagnies d'aven- 
ture, qui après avoir longtemps ravagé le centre de la France, 
notamment le duché et le comté de Bourgogne, avaient consenti 
à suivre le futur connétable dans son expédition au-delà des 
monts. 

A vrai dire, cette expédition n'était qu'un prétexte : le but 
que Ton poursuivait était l'éloignement, souhaité définitif, de ces 
compagnies, véritable fléau pour les contrées sur lesquelles elles 
s'abattaient. Il faut lire dans les bulles pontificales et dans les 
docum.ents contemporains la série des crimes dont elles se ren- 
daient journellement coupables, les pillages, vols, incendies, 
meurtres, viols, sacrilèges qu'elles commettaient sans vergogne, 
les captures de forteresses qu'elles tentaient à chaque occasion 
pour s'y cantonner et de là faire trembler toute une région 
qu'elles obligeaient à se racheter, il faut lire tout cela, dis-je, 
pour avoir une idée de l'état de désolation dans lequel notre 
pauvre pays était tombé grâce à elles. Plusieurs fois déjà on 
avait voulu s'en débarrasser. Après la prise du Pont-Saint-Esprit, 
le pape Innocent VI avait été assez heureux pour en expédier une 
partie en Italie avec le comte de Montferrat, en guerre avec les 
Visconti milanais (i). I/année suivante, toute une armée, où se 
trouvait la fleur de la chevalerie française, commandée par le 
comte de Tancarville, Jacques de Bourbon, comte de la Marche, 
et surtout l'archiprêtre Arnaud de Cervole, s'était mise à leur 
poursuite; surprise elle-même, elle s'était fait battre à Brignais 



(I) Je me permets de renvoyer à Tarticle intitulé L'Occupation du Pont Saint-Esprit 
parles Grandes Compagnies (i36o-i36i), que j'ai publié dans la Revue historique de 
Provence, 1901, p. 79 et 146. 



DE l'académie de VAUCLUSE 46 

i6 avril i362) (i). Trois mois plus tard (22 juillet i362), quelques- 
unes de ces mêmes compagnies avaient consenti, par un traité 
conclu à Clermont, à suivre en Espagne Don Enrique de Trasta- 
mare, révolté contre son frère Don Pèdre, roi de Castille (2) ; 
elles s'étaient arrêtées devant les Pyrénées. 

Après tous ces insuccès, le pape Urbain V était intervenu : 
comme le 3i mars i363, il avait lui-môme prêché une croisade 
contre les Turcs et donné la croix aux rois de France, de Chypre 
et de Danemark présents à Avignon (3), par sa bulle du 25 mai 
suivant, il avait demandé aux capitaines et gens de compagnies 
départir pour la Terre Sainte (4) ; sur leur refus, il avait publié 
contre eux les bulles les plus comminatoires et exhorté les 
fidèles à se liguer pour les repousser ; non seulement il les avait 
excommuniés, défendant à toute personne d'entretenir des rela- 
tions avec ces maudits, mais encore il avait accordé des indul- 
gences à ceux qui les combattraient (27 février et 27 mai 1364, 
5 avril i365) (5;. Cependant, il avait eu l'espérance de voir ses 
projets mis à exécution cette même année i365 et il avait obtenu 
de l'empereur Charles IV, venu le 23 mai à Avignon, qu'il laisse- 
rait les 5ocîÉ?/a/e5 traverser l'Allemagne jusqu'à leur entrée dans 
la Hongrie, où elles étaient réclamées pour repousser les Turcs. 
L'Archiprétre s'était mis à la tête de tous ceux qu'il avait pu 
entraîner, mais la mauvaise organisation de son expédition, les 
excès que ses troupes commirent et la terreur qu'elles inspirèrent 
partout sur leur passage les empêchèrent d'aller plus loin que 
Strasbourg (mai-juillet i365) (6). 

(i) Je ne puis citer ici toutes les sources; je me borne à renvoyer aux ouvrag-e^ 
suivants: Chérest, L'Archipréire, p. i66 et suiv.; G. Guig^ue, Les Tard^Venus en Lyon- 
nais, For:z et Beaujolais, p. 69 et suiv. ; H. Denifle, La Désolation des églises..., t. II, 
p. 407. 

{2) E. Molinier, Étude sur la vie d'Amoul d'Audrehem (t. VI, a' série des Mémoires 
présentés par divers savants à l'Académie des inscriptions et belles-lettres, !•• partie), p. 
107 à 109. 

(3) M. Prou. Étude..., p. 24 et 25. 

(4) H. Denifle. t. II. p. 444. 

(5) Idem, t. II, p. ^ ^ ^.— L'Inventaire des Archives de Montpellier, publié parM. J. 
Berthelé. signale encore au t. I, p. 171, n*' 2261 et 2262, des bulles d'excommuni- 
cation des 28 février i362 (v. st.| et i»' juin i364 (2* année du pontificat d'Urbain V) 
contre les routiers ravag'eant le Languedoc et ceux qui entretenaient des relations 
avec eux. — Raoul de Louppy, le gouverneur du Dauphinô. porta dans ses comptes 
les dépenses qu'il avait faites du 3i mars au 10 avril i365. pour aller à Avignon 
parler delà part du roi au pape, touchant c le fait des ennemis, gens de compaigne. 
qui lors estoient ou royaume, affin de yceulx faire vuidier et chasser d*icellui par 
sentences d'escommeniemenl. plainnes indulgences ou autrement.! {Loc. cit., p. 34, 
n-76.) 

(6) Sur cette expédition cf. Chérest, p. 3q4 et suiv.; H. Denifle, t. Il, p. 478 et suiv. 



46 MÉMOIRES 

Pînaiement, c'était à Bertrand du Guesclin, comte de Longue- 
ville, seigneur de la Roche-Tesson et son chambellan, que 
Charles V s'était adressé pour mettre fin à une situation intolé- 
rable. Par acte passé le 20 août i365, l'illustre capitaine s'était 
engagé envers le roi, qui lui avançait 40,000 florins pour les pré- 
paratifs de sa nouvelle campagne et le paiement de sa rançon (il 
avait été fait prisonnier à Auray et sa rançon avait été fixée à 
100,000 florins), à emmener le plus tôt possible hors de France les 
routiers qui en désolaient les provinces (i). Le but de l'expédition 
était TEspagne et à cela on voyait de nombreux avantages, outre 
l'éloignement des bandes de brigands et de pillards : on ferait, 
pour le compte d'Enrique de Trastamare, la guerre à Don Pèdre 
de Castille, allié du prince de Galles et du roi d'Angleterre ; en le 
détrônant, on mettrait à sa place un ami fidèle, on se yengerait 
du félon, qui après avoir odieusement délaissé sa femme Blanche 
de Bourbon, belle-sœur de Charles V, passait pour l'avoir fait 
assassiner dans le château de Jerez. Le pape lui-même verrait là 
une occasion de châtier un roi excommunié pour sa cruauté, sa 
dureté envers son clergé et ses relations avec les Juifs ou les 
Maures ; il reprendrait aussi en cette circonstance ses anciens 
projets de croisade et au lieu de pousser les Compagnies contre 
les Turcs en Palestine, il les emploierait à rejeter les Maures 
hors de l'Espagne. D'ailleurs, Urbain V n'avait pas attendu l'en- 
rôlement de du Guesclin pour donner au roi autre chose que son 
appui moral dans son œuvre de pacification du royaume. Il lui 
avait accordé le produit d'une décime biennale à lever en France 
sur tous les revenus du clergé régulier et séculier, excepté sur 
ceux des cardinaux et des Hospitaliers de Saint-Jean de Jéru- 
salem, afin de permettre aux capitaines ayant traité avec les rou- 
tiers (c'est évidemment une allusion à du Guesclin ou aux 
premiers émissaires du roi), de les emmener hors de France 
combattre soit les Turcs, soit d'autres infidèles ; dès le 19 juillet 



(i) Charrière, Chronique de Bertrand du Guesclin par CMve/ter, dans les Documents 
inédits sur l'histoire de France, t. II, p. :<y:^; cf. Luce, Froissart, t. VI, p. lxxx, note 3; 
Maurice Prou, Étude..., p. 58; H. Denifle, t. II, p. 485. — Le texte de la promesse de 
du Guesclin est intéressant à relever: « Nous avons promis et promettons audit roy,.. 
mettre et emmener hors de son royaume lesdites compaignes a noslre povoir, le plus 
hastivement que nous pourrons, sans fraude ou mal engin, et aussi sanz les tenir ne 
souffrir demourer ne faire arrest en aucunes parties dudit royaume, se n'est en fai- 
sant leur chemin, et sanz ce que nous ou lesdittcs compaignes demandions ou puissions 
demander audit roy... ne a ses subgiez ou bonnes villes, Jinance ou autre aide quelcon- 
ques.... > 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE 47 

i365/ il donnait ses instructions en conséquence aux archevê- 
ques et évêques intéressés (i). 

L'entrevue, que selon le chroniqueur-romancier Cuvelier, aurait 
eue à Chalon-sur-Saône Bertrand du Guesclîn avec les capitaines 
d'aventure, Anglais, Bretons, Gascons et Navarrais, et le dis- 
cours qu'il aurait alors prononcé pour entraîner ses futurs com- 
pagnons, sont caractéristiques de Tétat d'esprit dans lequel 
ceux-ci acceptaient de partir. Il leur aurait bien promis d'obtenir 
du pape pour eux l'absolution de leurs crimes, mais il aurait 
surtout fait miroiter à leurs yeux des avantages plus matériels, 
la perspective d'une grosse solde et d'une liberté de pillage dans 
un pays des plus fertiles : 

A Dieu le veu, aurait-il dit, qui croire me voldra. 

Tous riches vous ferai, guères nedemoura... 

En Espagne porrons largement profiter, 

Car li païs est bon pour vitaille mener, 

Et si a de bons vins qui sont frians et clers... , 

Et se vous me volez ce fait ci accorder. 

Je vous ferai du roi baillier et délivrer 

Deux c. mile florins et devant vous compter... 

Faisons a Dieu honneur et le deable laissons... 

Je nous ferai tous riches, se mon conseil créons, 

Et arons paradis aussi quant nous morrons. * 

Tels étaient ceux dont les Avignonais et les Comtadins appre- 
naient avec effroi l'arrivée dans les premiers jours de novembre 
i365, et telles étaient leurs dispositions : faire un énorme butin et 
piller avec impunité le plus largement possible. Il est vrai que des 
troupes plus régulières, conduites par de notables seigneurs et 
capitaines français ou anglais, tels que le comte de la Marche, 
Jean l" de Bourbon ; Antoine, sire de Beaujeu ; le maréchal 
Arnoul d'Audrehem, Hugh de Calverly, Mathieu de Gournay, 



(I) M. Prou, Étude.,., p. ï33. - Cet auteur (p. 53) rapporte la bulle à Texpédition 
d'Arnaud de Ccrvole ; le R. P. H. Denifle (t. II, p. 479) également, bien qu'il ait 
remarque (note 4) que le pape a répété la môme chose dans une lettre adressée, le 
24 novembre L.uivant, à l'archevêque de Lyon et ses suflPragrants. Mais Arnaud de 
Cervole n'avait pas eu besoin de cela pour se mettre en campagne, puisqu'il était 
parti avec ses routiers dans le courant du mois de mai. Le 19 juillet, le pape savait 
encore que cette armée était arrivée devant Strasbourg le 5, peut-être même avait-il 
appris que le passage du Rhin lui était refusé et qu'elle abandonnait son projet de 
croisade. D'ailleurs, ce qui prouve bien que cette dîme était destinée à Du Guesclin, 
c'est simplement le fait qu'elle lui fut payée. 

(I) Chronique de Bertrand du Guesclîn, par Cuvelier, vers 722.'^-7a26. 7371-7273, 7^83- 
7a85. 73o4,73a>73ai. 



48 MÉMOIRES 

Eustache d*Auberchicourt, accompagnaient aussi du Guesclin. 
Mais de quel exemple devaient être pour elles Tavidité et la 
cruauté qui distinguaient les routiers de Robert Briquet, de 
Jean Creswey, de Naudon de Bageran, du Petit Meschin, de 
Perrin de Savoie, de Bertucat d'Albret, de Bernard de la Salle (i) 
et de tant d'autres ! 

Le rendez-vous de tous ceux qui devaient prendre part à l'expé- 
dition avait été donné à Perpignan pour la fin de Tannée i365. 
Dès le mois de septembre, des détachements d'avant-garde entre- 
prenaient leur marche dans la direction du midi (2), mais du 
Guesclin lui-même, dont le passage était signalé par le bailli 
d'Auxois dans les derniers jours du même mois (3) ; ne se mit 
guère en mouvement avec ses troupes que dans le courant d'oc- 
tobre (4). Pendant qu'Arnaud de Cervole continuait à négocier 
avec les chefs de routiers restés en Bourgogne pour les envoyer 
derrière lui, il dirigea son armée sur la rive droite du Rhône et 
vint établir son quartier général à Villeneuve, en face d'Avignon. 
Son arrivée, ou du moins l'approche des socieiates qui l'accom- 
pagnaient, était déjà signalée le 5 novembre par le recteur du 
Comtat aux gens du pays [b]. A Carpentras, notamment, les syn- 
dics de la ville recevaient l'ordre de mettre en état leurs rem- 
parts et de restaurer les bretèches au-dessus de leurs murailles 
ou d'en construire de nouvelles ; comme ils n'avaient pas d'ar- 
gent, ils empruntaient 200 florins (6). Les archives de la capi- 
tale du Comtat, assez complètes pour cette période, donnent une 
idée suffisante de l'agitation dans laquelle la crainte des compa- 
gnies mit la population. On peut donc considérer ce qui se passa 
là comme un exemple de ce qui se fit dans tout le Venaissin à 
cette époque. 

Quelques jours avant l'annonce de cette grave nouvelle, le 

(i) Pour tous ces noms, cf. Froissarl, Chroniques (éd. Luce), l. VI, p. i88 et suiv. ; 
Ayala, Cronicas de los reyes de CasUllas, t. I, p 399 et suiv. ; Cuvelier. vers 7418 et 
suiv. ; Le Prince noir, poème du héraut d'armes Chandos, publié par Francisque 
Michel, vers 1668 et suiv. 

(q) Histoire générale de Languedoc, t. IX, p. 777. note de M. A. Molinier. 

(3) Chérest, p. 334. 

(4) Il était encore à Auxerre le 10 octobre : E. Molinier. op. cit., p. 170; H. Dcnifle, 
t. II. p. 485. 

(5) Aux environs de Montpellier, les compagnies de bretons étaient signalées les 
!•', 5 et i3 novembre. Le 5, c'était Robert Briquet, le capitaine de routiers bien connu, 
qui prenait le fort de i Bel Esgan.où il resta jusqu'au 8 décembre. {Petit Thalamus, 
édition de la Société archéologique de Montpellier, p. 369.) 

(6) Arch. municipales de Carpentras, BB 6, fol. 4a, 43. ia5; BB 7, fol. 3v'. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 49 

27 octobre,, les syndics avaient passé en revue tout le matériel 
d'artillerie qui leur appartenait en propre, logé dans différentes 
maisons ou dans des tournelles : ils avaient constaté la présence 
dans leur arsenal de trois grandes arbalètes et de 46 autres plus 
petites, de 25 canons de garrots, près de 25o « stralhons » ou traits 
de garrots, ferrés ou non, empennés ou non, de 333 plommées ou 
masses plombées, de 3,63o viretons ferrés, de 280 non ferrés, 
d'un demi-quintal de plomb, de plusieurs pannes de fer, de 
crocs, etc. (i). Dès le i3 novembre, ils se préoccupèrent d'aug- 
menter cette artillerie, sur Tordre du trésorier du Comtat 



(i) Arch. communales de Carpentras, BB 6, fol. 38 v*. 

Voici cet inventaire des biens de la ville de Carpentras, que je crois devoir 
donner ici ; la lecture en est assez difficile dans Torigrinal : il y aura donc dans ma 
transcription des mots douteux. De plus, le scribe a dû employer des expressions 
tout à fait locales pour désigner certains appareils et je ne suis pas arrivé à en 
connaître la signification exacte. D'autres seront plus heureux que moi. 

[Fol. 38 v.) c Primo, III magnas balistas de buxo de gazauca. Item, XLVI alias 
balistas. Item, X baudrerios. Item, XIIII canonos garrotorum, minuta {sic) seponi (?). 
Item, VIII* clavcs garrotorum. Item. CXVIII stralhonos garrotorum cum ferro. 
Item, II stralhonos sine ferro. Item, V stralhonos sine ferro fractos. Item, XXXV plum- 
batas cum hasta. Item, LXXIIII plumbatas sine hasta. Item, VlII'fundas (?) mas- 
sieyas. Item, MIX verratonos ferratos. Item,CXXV verratonos sine ferro. Item, unam 
crozilham. Item, unam cledam fusteam ad ingénia. Que omnia erant in hospicio mei 
Bertrandi Pauli, notarii. 

t Dicta die, in tornella régis : Item, unum cannonum garroti cum futa {sic). Item, 
alium cannonum garroti sine fusta. Item, duas cavilhas fereas magnas. [Fol. 39.] 
Item, unum anulum ferreum cum alio anulo concathenato. Item, CCXXV plumbatas 
minutas garrotorum. Item, unum goffenum ferreum (?), ruptum ad opus. 

c In tornella ante hospicium Melheni Veyrerii : Item, XXXVII stralhonos empenatos 
et Inseratos garroto. Item, XX stralhonos garrotorum non pennatos. Item, XVI 
stralhonos enferratos et pennatos de papiro. Item, I stralhonum sine ferro et pennis. 
Item, XXXII stralhonos minutos ferro sine pennis. Item, XIII stralhonos fusteos sine 
ferris et pennis. Item, II cavilhas ferreas. Item, VI medios anulos de ferro. Item, VIII 
bendas ferreas pontls levatici. Item, unam platam ferri. Item, XXI pannas crocs. 
Item, III goffonos. Item, duos versatorios pontis levaticii ferreos, minutos cavilhis. 
Item, VII anulos ferreos. Item, unum serrum garroti fractum, minutum fusta. 
Item, IX canonnos garrotorum minutum {sic) fusta. Item, VIII* pannas ferreas ad 
opus cancelli {àis). Item, II magnas ferreas pannas. Item, VIII* claves garrotorum. 
Item, I messetam plumbi. Item, II pecias fractas ferri parvas. Item, unam fundam (?) 
massieyam. 

€ In tornella mûri ante hospicium Rixendis Brunelle : Item, VII«XXIveratonoscum 
ferro. Item, VI"IÏII veratonos sine ferro. Item, duas parvas caxas fusteas. Item, 
XXV plumbatas. Item, VI tornos balistarum. Item, II tenditoria. Item, VIII pannas 
ferreas magnas. Item, una {sic) ayssadam fractam. Item, III pecias fractas ferri 
veteris. 

[Fol. 39 V*.] t In tornella ante hospicium G. Symeonis : Item, XIX«^ veratonos 
minutos ferris. Item,XIII tabulas. Item, II cabasses. 

« Item, in hospicio universitatis : Item, veratonum sine ferro. Item, V veratonos 
sine ferro. Item, I tascellum (?) de ferro. Item, médium quintale plumbi vcl circa. 
Item, unam caxam fractam.» 



?(> MKMÔIWES 

et du juge-mage de Carpentras \i) ; ils remboursèrent iPerrot 
Maynard, qui pour des réparations faites jadis, avait conservé en 
gage trois canons de garrots ; ils achetèrent quatre nouvelles 
arbalètes, dont trois en corne, à un italien Nicolas de Palhesio, 
ils en firent réparer d'autres, se munirent d'accessoires, chevilles, 
clefs, pour leurs garrots, etc. (2). 

D'autre part, sur mandement de Pons Bermond, capitaine de 
Carpentras, dont la ville avait eu à préparer le logement et celui 
de ses gens (3;, on paya, le 12 novembre, 3 livres 10 sous aux 
hommes, qui pendant deux jours avaient ramassé des pierres 
pour les porter sur le sommet des remparts, où elles devaient 
servir de projectiles (4^. Jour par jour, on suit encore le travail des 
carriers, qui avec leurs chariots amenaient des pierres auprès 
des fossés, et des manœuvres qui les montaient sur les bretè- 
ches et sur les coursières des murailles. 

Les remparts eux-mêmes étaient loin d'être achevés et de se 
trouver en état de résister à une attaque habilement conduite. On 
dut alors se livrer à un travail fébrile : établissement de planchers 
dans les tours défensives des portes et réparation des anciens, con- 
struction de bretèches en bois soit au-dessus des murs, soit plus 
simplement au-dessus des fossés, fermeture des passages jusque- 
là conservés dans Tenceinte, curage et agrandissement des fossés, 
ferrage des portes, réfection des portails de Mazan et d'Orange, 
réfection ou consolidation des ponts-levis, élévation rapide de 
murs provisoires en pierre et en terre là où les nouveaux rem- 
parts n'étaient pas encore bâtis, tout se faisait à la fois, pendant 
que les entrepreneurs de nouvelles courtines ou de nouvelles 
tours recevaient l'ordre de se hâter (5). Même, pour activer la 
construction du portail de Monteux, les syndics se chargeaient 
de l'achat des matériaux (6). 

Ce ne fut pas tout : comme on se l'imagine, le capitaine Pons 
Bermond et le juge-mage Rostang Artaud établirent des gardes 

(i) Cet ordre fut donné le 9 novembre : Arch. de Carpentras, BB 6, fol. 4a v». 

(2) Idem, BB 7, fol. 39 v : « Expense... in aptando et refficiendo ac emendo arthel- 
hariam... » Les sommes dépensées à cet efifet se retrouvent encore à leur date dans le 
compte journalier qui forme une partie du regristre BB6. 

(3) Idem, BB 7. fol. 53 y : • Expense... facte pro lectis majoris capitanei et sue 
gentis. • 

(4) Idem, BB 7, fol. 84 : « Expense... facte in agrgregando et faciando portare lapides 
pro deffensione et tuicione fossatorum, portalium et verdescarum. » 

(5) Idem, BB 6. fol. 57 et suiv. 

(6) Idem, BB 6, fol. 48 V. 



DE L* ACADÉMIE DE VAUCLUSE 5l 

sur les remparts et des sentinelles aux portes et en divers 
endroits de la ville, sans préjudice des deux guetteurs, loués à 
Tannée, qui se tenaient constamment sur le sommet du clocher 
de Saint-Siffrein ; deux notaires furent chargés de les surveiller, 
d*en passer la revue matin et soir et de faire leur rapport au 
recteur (i). On envoya aussi des explorateurs ou espions pour 
savoir ce que devenaient les hommes d'armes de du Guesclin, 
s'ils franchissaient le Rhône et s'ils se montraient dans les envi- 
rons : le i6 novembre, Raymond de Gigondas était ainsi expédié 
en éclaireur ; le 28, c'était Pierre Astier, qui devait aller jusqu'à 
Mornas, etc. {2). 

Une chose que l'on ignore c'est quelles furent l'importance et la 
composition de la garnison, qui sous les ordres de Pons Ber- 
mond, se préparait à repousser l'ennemi. On sait cependant que 
la solde de ces gens d'armes était payée par le trésorier du pape 
ou du comté Venaissin (3) : nous n'avons malheureusement pas 
les comptes relatifs à cette année. 

En la cité d'Avignon, le pape ne se contenta pas de la garde 
habituelle qu'il entretenait autour de son palais et aux portes 
de la ville (4;. Il fit venir des renforts de Marseille : cent arbalé- 
triers conduits par le damoiseau Pierre de Langres. Il ne lui en 
coûta que 80 florins (5). 

Par bonheur, on n'eut pas à employer la force contre les 
Compagnies ; il est probable d'ailleurs que le recours à ce moyen 
extrême n'aurait pas été à l'avantage de leurs adversaires. Mais 
elles ne se montrèrent môme pas dans le comté Venaissin, ou si 



(i) Arch. de Carpentras, BB 6, fol. 43, ordonnance du 16 novembre, 
(a) Idem, BB 6, fol. 69 et 79; BB 7, fol. 54: cExpense... soluté exploratoribus qui 
ibant explorare de mandato dominorum. » 

(3) En i358-i359, la solde des soldats employés par le pape pour la défense du 
Comtat fut payée par le trésorier pontifical (Arch. du Vatican. Collectorie, n* 262, 
fol. 173); en 1375, les garnisons établies dans les châteaux et forteresses du comté 
Venaissin furent payées au moyen d'une taille de 8,000 florins consentie par les 
États du pays. (Arch. dép. de Vaucluse. C i3o, fol. 19.) On verra plus loin ce qui se 
passa en i368. 

(4) Nous n'avons pas les comptes de la garde d'Avignon pour cette année, mais 
i'ai relevé aux archives du Vatican [Collectorie, n* 265) ceux qui sont relatifs à la solde 
de la garnison établie en novembre et décembre i373, époque peut-être un peu 
moins troublée que celle qui nous intéresse actuellement : 55 personnes étaient com- 
mises À la garde des différentes portes ou au guet du haut du clocher de Notre-Dame 
des Doms, sans compter les visiteurs des portes, les préposés à la garde des clefs, le 
^'.irde de rartillerie. etc. 

p) Arch. du Vatican, Introitus et exitus, reg. 3i5, cité par M. Prou, Étude,,., p. 58, 
note 4. 



."^2 MEMOIRES 

quelques détachements isolés y firent des incursions, ce fut, 
paraît-il, sans conséquence grave. Elles se contentèrent, comme 
on le verra plus loin, de menacer le pays d'un pillage en règle, 
besogne pour laquelle elles étaient trop bien préparées; mais les 
arrangements conclus par Bertrand du Guesclin avec le pape et 
les représentants d^Avignon ou du Comtat, épargnèrent ce 
malheur au pays. 

Les négociations qui aboutirent à ces accords ont été racon- 
tées, d'une façon plus amusante que véridique, par Cuvelier, 
l'auteur de la Chronique rimée de Bertrand du Guesclin. Selon lui, 
lorsque le pape Urbain V apprit l'arrivée des routiers, il délégua 
auprès d'eux un cardinal chargé de leur commander de s'éloi- 
gner: 

c Escommenierai toute la compaignie, 

Si ne s'en vont de ci sans faire nul detrie (i). » 

Bien à contre-cœur, le cardinal se dirige vers le camp ; mais la 
première parole qu'il entend d'un anglais interrogé, lui explique 
les intentions de l'ennemi : 

c Bien soiez-vous venus, aportez-vous argent? 
Avoir nous en convient ains no département (a). > 

A peine est-il introduit devant le conseil de guerre, que le 
maréchal d'Audrehem lui explique qu'ils allaient en croisade 
contre le roi de Grenade et qu'ils demandaient au pape l'absolu- 
tion de leurs péchés, plus 200,000 besants ou florins d'or pour les 
frais du voyage (3). Mais du Guesclin plus franc déclare que de 
l'absolution ils ne sont guère soucieux : 

c Ils ameroient mieulx a avoir de l'argent... 
Dites a Tapostole ce fait entièrement, 
Car nous ne les porroiens emmener autrement. 
Encor, quant il aront de l'avoir largement. ' 
Se tenront il envis de mal faire souvent (4). » 

Le cardinal retourne dolent auprès du pape. Ces compagnons 
si nombreux vont combattre les infidèles en Espagne, dit-il, pour 
sauver leurs âmes, et voici que je vous apporte leur confession : 



(I) Vers 74«9 et 7490. 
(a) Vers 7510 et 75ii. 

(3) Vers 7540 a 7571. 

(4) Vers 7577 A 7584. 



DE l'académie de vaucluse 53 

€ Il ont ars maint moustier, mainte belle maison, 

Occiz famés, enfans a grant destruction, 

Pucelles violées et dames de grand non. 

Robes vaches, chevaux et pillié maint chappon, 

Et beu vin sans paier et robe maint mouton. 

Et emblé maint joiel a tort et sans raison, 

Calices de moustiers, argent, cuivre, laiton, 

Ditte mainte parole plaine de maliçon; 

Tous les maulz c'on puet faire plains de malefaçon, 

Plus c'on ne porroit dire en livre n'en chançon (i). • 

Donnez-leur donc non seulement l'absolution, mais encore 
200,000 francs. Et le pape se lamente : 

c On nous donne, dit-il, de l'argent et maint don 

Pour assouldre les gens en cité d'Avignon. 

Et il nous fault assouldre a lor division 

Et si nous fault donner I C'est bien contre raison (s). > 

Avec le collège des cardinaux il se résout cependant à imposer 
les bourgeois d'Avignon et obtient de du Guesclin que les 
200,000 francs soient réduits de moitié. Celui-ci vient se loger à 
Villeneuve, où de son palais le pape peut voir les routiers : 

€ Amener en lor ost vaches, moutons, brebis. 
Oies, poucins, chappons et le pain blanc et bis. 
Les viandes, les vins qu'ils ont trouvez et quis (3). • 

Il s'empresse alors de lever sur les Avignonais la rançon pro- 
mise,, mais du Guesclin le sait, il s'en irrite, il crie contre l'ava- 
rice et l'orgueil des gens d'église et il termine ses imprécations 
par ces paroles, que la postérité a retenues et dont elle lui a fait 
un titre de gloire, sans même se demander si elles ont été vrai- 
ment prononcées : 

c Mais ja n'en prendrai i. denier monnoié 
De ce que povre gent y aront ordené. 
Se le pape du sien ne le m'a délivré (4). » 

Il renvoie donc noblement le prévôt d'Avignon qui lui appor- 
tait l'argent de la taille : 



(I) Vers 7618 À 7627. 

(a) Vers 7637 à 7640. 

(3) Vers 7656 à 7658. 

(4) Vers 7686 à 7688. 



54 MÉMOIRES 

« Prévost, je vous afie, 
Ja n'en arons denier de nostre vie, 
Se ce n'est de l'avoir venant de la clergie ; 
Et volons que tuit cil que. la taille ont paiée 
Aient tout lor argent sans perdre (i) une mailliela). » 

Et le pape est obligé de s'exécuter; après quoi, du Guesclin 
lève le camp et s'en va retrouver le duc d'Anjou à Toulouse, 
avant de prendre la route d'Espagne. 

Ce. récit est très pittoresque et fort honorable pour le chef de 
l'expédition, mais Thistoire ne se contente pas de pittoresque et 
de poésie, elle veut connaître la réalité. Or, celle-ci fut très diffé- 
rente de la légende. 

Voyons d'abord ce qui se passa pour le comté Venaissin. Dès 
le i3 décembre, les habitants de la ville de Carpentras, déjà fort 
appauvris par les dépenses faites pour leurs remparts, avaient à 
se préoccuper de payer leur part de la taille montant à 5,ooo 
florins, que le Comtat devait verser entre les mains de Bertrand 
du Guesclin (3). Celui-ci ignorait-il que cette contribution pesait 
sur la population ? Lisons la bulle que le pape Urbain V adressa 
le 23 novembre au cardinal Raymond de Canillac, évèque de 
Préneste : « D'innombrables gens d'armes, écrivait-il, appelés 
Compagnons, sortant du royaume de France et partant en guerre, 
disent-ils, contre les Infidèles, ont envahi la sénéchaussée de 
Beaucaire et menacé d'entrer en ennemis dans le Venaissin, ce 
qui leur était facile, si les habitants de ce comté ne leur versaient 
pas un subside. Pour éviter de très graves périls et de très gros 
dommages, nous t'avons donné mission d'emprunter, au nom 
desdits habitants, la somme de 5,ooo florins d'or et de la remet- 
tre à ces routiers, ainsi que l'ont déjà fait les habitants des pays 
voisins (4). » Ainsi donc, c'était une habitude pour les compa- 
gnons de du Guesclin de forcer les gens d'un pays à se racheter du 
pillage : je dirai plus loin ce à quoi la Provence et certaines villes 
du Languedoc durent se résoudre. 11 faut encore observer qu'à 
cette date du 23 novembre, des arrangements étaient pris pour la 
remise de la subvention du Comtat : ce fut grâce au pape que, 

(i) Le texte donne « sans prendre ». Je propose la correction t sans perdre » qui 
donne plus de sens. 
(a) Vers 7704 à 7708. 

(3) Arch. de Carpentras. BB 6, fol. 44. 

(4) Cette bulle qui a été transcrite dans le registre B7 (fol. 36 v) des archives 
départementales de Vaucluse, a été publiée par extraits par le R. P. H. Denifle, t. II. 
p. 487, note I. 



DE l'académie de vaucluse 55 

moyennant un emprunt, les gens du Venaissin eurent du temps 
pour s'acquitter de leur dette. La bulle du. 23 novembre i365 
n^avait d'ailleurs pas d^autre but que d'obliger le clergé à contri- 
buer au paiement des 5,ooo florins. Les habitants de Carpentras 
semblent avoir abusé de la permission de retarder le versement 
auquel ils furent astreints : le i8 mai i366, ils en donnaient seu- 
lement le premier à-compte, s'élevant à la somme de loo florins(i). 
Même, à cause, sans doute, de leur négligence, ils encoururent 
Texcommunication : ils en obtinrent l'absolution du recteur du 
Comtat, le 25 août i366(2). 

La ville d'Avignon constituait, à elle seule, on le sait, un État 
particulier, dont les intérêts financiers étaient tout à fait distincts 
de ceux du Venaissin. Elle n'eut donc pas à contribuer au 
paiement de cette taille ; mais cela ne veut pas dire qu'elle fut 
épargnée. On ignore cependant quelles charges elle dut sup- 
porter en cette occasion : aucun document ne paraît avoir 
subsisté qui permettrait de le savoir. Mérimée (3), il est vrai, a 
prétendu, d'après un document à lui communiqué par M. Paul 
Achard, que les Avignonais furent obligés de payer i,5oo flo- 
rins; mais il a mal interprété son document, qui se rapporte à des 
faits de date postérieure (4). 

La Provence elle-même fut mise à contribution. Sous peine de 
la voir ravagée par les brigands logés dans la sénéchaussée de 
Beaucaire, le sénéchal, les officiers de la reine Jeanne et les 
nobles des communautés durent, sur le conseil du pape, leur 
promettre 3o,ooo florins d'or, au paiement desquels Urbain V, 
par une bulle adressée à Philippe de Cabassolc, patriarche de 
Jérusalem, obligea le clergé p(jur sa quote-part (20 novembre 
i365) (5). Mais les Provençaux, ne s'attendant pas à de telles 

(1) Arch. de Carpentras, BB6, fol. 10.2 v ; BB 7, fol. 46 v : « Soluciones per me factc 
pro subsidio. * 

(a) Idem, BB7, fol. 46 V : « Solvi pro littera absolucionîs emanata a domino rectore, 
ut absolveremus ab excommunicationis sentencia qua iigati eramus propter subsi- 
dium, V solidos. • 

(3) Histoire de don Pèdre P%roi de CastiUe (1848, in-8*;, p. 435, note i. Le document 
forme à la page 582 l'appendice 1. 

(4) Il concerne, en effet, les sommes versées par Philippe do Cabassole A du 
Guesclin au mois de mars i368. 

(5) Archives départ, de Vaucluse. B 7, fui. 'X< ; if. Denitle. t. H, p. 486, note 2. — Le 
clergé des comtes de Provence et de Forcalquier fit des difficultés pour s'exécuter : 
il fallut encore la bulle du 21 mars i36G, expliquant que tous les domaines des 
églises et monastères (château de Salon à l'archevêque d'Arles, de Lure à l'évoque de 
Sisteron, ville de Gap â Tévêque du lieu, etc.), devaient être soumis à l'impôt destiné 



56 MÉMOIRES 

exigences, étaient loin d'avoir tout l'argent qui leur était réclamé : 
ils demandèrent au pape de les aider. Celui-ci s'empressa d'accéder 
à leur requête et leur avança, le 17 novembre, 12,000 florins d'or, 
qu'ils promirent de restituer dans les trois mois. Ce furent des 
changeurs qui les fournirent : la banque Luc degli Abbati et C** 
donna 6,000 francs, Michel Baroncelli (i) 1,600 francs, son frère 
Jean 400, le florentin Jacques Buonacursi 400, etc. Les 12,000 fr. 
furent longs à rentrer dans le trésor pontifical : le premier 
à-compte fut donné seulement le 22 juin i366 par Jean Baroncelli, 
sergent d'armes du pape, et le 8 avril i368, un reliquat figurait 
encore dans les finances restituées par les Provençaux à 
Urbain V (2). 

Quant au pape lui-même, on n'a relevé dans les registres de 
ses dépenses aucune, somme qu'il ait versée pour son propre 
compte aux troupes de du Guesclin. Voilà qui contredit singu- 
lièrement le récit de Cuvelier. On vient de voir qu'il s'était borné 
à intervenir auprès des routiers pour le rachat des pays menacés 
et qu'il avait seulement facilité les opérations financières avec les 
riches banquiers italiens qui suivaient sa cour. Mais, d'autre 
part, il est certain qu'il fit arriver entre les mains de du Guesclin 
d'autres finances. Les Grandes Chroniques de France (3), assez 
bien informées, disent qu'il lui donna de l'argent (4) et qu'il lui 
accorda le produit de deux décimes à lever sur le clergé de 
France. Werner de Liège, l'auteur d'une de ses vies (5), prétend 
de son côté que Urbain V lui promit une grosse somme et im- 
posa pour cela des décimes sur le clergé de France. Il faut cepen- 
dant observer qu'il ne fit pas cette promesse sous la pression des 
menaces qu'auraient pu lui faire les routiers. Le 19 juillet i365, je 



À payer les 3o,ooo florins. (Arch. départ, de Vaucluse, B 7. fol. 34). — Voir encore le 
€ processus» d'exécution de cette bulle • super contributione ». du 26 juin i366 : 
Ibidem, fol. 35. 

(i) Ce Michel Baroncelli, banquier florentin, habitant Avignon, eut plus tard 
(3 mars 1369), la recommandation expresse du pape Urbain V pour obtenir de Philippe 
de Cabassole, recteur d'Avignon et du Comtat, l'office de monnayeur d'Avignon» 
vacant par la mort d'Hugues Michel, également banquier. (Arch. départ, de Vau- 
cluse, B 7, fol. 56.) Il est donc probable qu'il y fut nommé. 

(a) Pour tous ces détails, cf. les documents extraits des registres du Vatican et 
publiés par M. Prou, p. 140 à 144. 

(3) Ed. Paulin Paris, t. VI, p. 238. 

(4) Peut-ôtre est-ce une allusion aux sommes avancées aux Provençaux pour leur 
rachat ou aux 5,ooo florins qu'il fit payer aux Comtadins. 

(5) Secunda vita Urbani V, publiée par Albanès et Chevalier, Actes anciens et doeih- 
ments concernant le bienheureux Urbain V» i. I, p. 39. 



DE l'académie de vaucluse Sy 

rai déjà dit, il donnait des ordres aux archevêques et évèques de 
France pour faire percevoir pendant deux ans sur le clergé sécu- 
lier et régulier de leurs diocèses, la décime que Charles V lui avait 
demandée pour aider au départ des Compagnies (i). Il en avait 
môme fixé les termes du paiement : le premier devait avoir lieu au 
!•' novembre i365, le second à Pâques de Tannée i366, le troisième 
à la Toussaint suivante et le dernier encore à Pâques i362 (2). 

Mais le temps pressait. Sur les instances du roi de France et 
des habitants des trois sénéchaussées de Languedoc, Urbain V 
avait, dans le but de contenter plus tôt l'avidité des compagnons 
de du Guesclin, permis que certaines personnes leur fissent 
l'avance du produit de cette double décime. Lui-même fut peut- 
être une de celles-ci : c'est ainsi du moins que je m'explique les 
4,000 francs d'or, que le 22 novembre il fit remettre à Pierre Mau- 
salan, sacriste de l'église de Carpentras et associé au cardinal 
Raymond de Canillac, délégué à la collecte générale de la décime 
et commissaire aux négociations avec du Guesclin. Pour être en 
mesure de les donner, il avait dû les empruntera des changeurs 
ou banquiers qui suivaient la cour romaine : Paul Mathei (3), de 
Florence, lui en avait procuré la moitié, les frères Jean et Michel 
Baroncelli, le reste. Ces 4,000 francs furent d'ailleurs restitués 
plus tard (4). 

Quoi qu'il en soit, à la date du 23 novembre i365, la moitié 
des sommes promises sur la décime avait déjà été payée aux rou- 
tiers, bien que plusieurs archevêques et évèques n'aient pas été 
informés assez à temps pour faire à la Toussaint le premier ver- 
sement prescrit. Des dispositions avaient été encore prises pour 
que la seconde moitié fût bientôt remise aux troupes partant 
pour l'Espagne ; aussi le pape se crut-il obligé, tout en reportant 
les termes des versements au i*"" mars et au i"août des années 
i366et 1367, de demander aux prélats d'expédier, avec le moins 
de frais possible, au cardinal de Préneste dans le mois qui suivrait 
chacun de ces termes, tout l'argent qu'il aurait ramassé (5). En 
définitive, le pape n'eut, je le répète, absolument rien à tirer de 

(i) L'imposition de cette décime a évidemment créé la légende d'après laquelle du 
Guesclin aurait refusé l'argent des bourgeois d'Avignon pour ne vouloir que celui 
du clergé. 

(a) Cf. la bulle du 19 juillet i365 publiée par M. Prou. p. i33. 

(3) Ce banquier était déjà établi à Avignon en 1344; cf. VInventaire des archives de 
Montpellier, publié par J. Berthelé, 1. 1, p. 363, n** 4070 à 4072. 

(4) Cf. M. Prou, p. 140. 

(5) Bulle du a3 novembre i365, publiée par M. Prou, p. 144. 



58 MÉMOIRES 

sa caisse particulière et c'est tout au plus si Ton serait en droit de 
prétendre qu'il abandonna certaines décimes de la province de 
Tours que peut-être il s'était réservées (i). 

A quel chiffre se monta cette contribution du clergé de France ? 
Nous ne pouvons le savoir. Pourtant on se doute bien qu'il fut 
fort élevé, car le 26 janvier i366, le procureur de Bertrand du 
Guesclin, Pierre de Villiers, grand-maître de la maison du roi, 
donna quittance au cardinal de Préneste pour les 32,ooo francs d'or 
qui lui étaient encore dus sur l'argent à lui concédé par le pape (2). 

Le comté Venaissin, la ville d'Avignon et la Provence ne se 
trouvaient pas sur le chemin direct de l'Espagne. Si leurs habi- 
tants cependant furent tellement éprouvés par le passage des 
routiers sur la rive droite du Rhône, que ne devaient donc pas 
supporter ceux du pays qu'ils traversaient (3) ? On en a une idée 
par la contribution qu'ils imposèrent à la ville de Montpellier : 
ils n'en voulurent partir qu'après avoir reçu 10,000 francs (4). Il 
est encore à supposer que les 4,000 francs 'd'or prêtés par 
Urbain V, le 16 janvier i366, au cardinal Gui de Boulogne, 
évêque de Porto, Gilles Aycelin de Montaigu, dit le cardinal de 

(i) Et encore cela n*est-ii pas certain : le texte sur lequel on se base (procuration 
donnée par du Guesclin à Pierre de Villiers le 22 novembre i365, publiée par H. 
Denifle, t. II. p. 775), n'est pas très explicite; il ne dit pas si les décimes de la province 
de Tours qui restent encore dues font partie de la levée grénérale. Pour mon compte, 
je le croirais assez volontiers, car les bulles des 19 juillet et 23 novembre i365 furent 
adressées au métropolitain de Tours (Prou, p. i36 et 144, note i). Je ne suis pas du 
tout du même avis, en effet, que le R. P. H. Denifle qui déclare (t. II, p. 487) que le 
pape consentit à se dessaisir en faveur de du Guesclin des décimes de la province de 
Tours et paya en outre une énorme somme, en vue de l'expulsion des Compagnies. » 
Je ne vois pas quelle est cette t énorme somme » exigrée du pape lui-môme : y avait- 
il une allusion dans cette phrase de la procuration de du Guesclin : t et aussi la reste 
que nostredit Saint Père nous peut devoir » > Mais ce reste peut concerner la contri- 
bution du comté Venaissin (la bulle annonçant qu*il a fait payer les5,ooo florins d*or 
est du lendemain 23 novembre) ou celle de la Provence pour laquelle le pape avait 
' sans doute répondu (son prêt de 12,000 francs d'or aux Provençaux n'eut lieu que le 
27 novembre). Par conséquent, la part personnelle d'Urbain V reste encore à déter- 
miner. 

(2) H. Denifle, t. II, p. 77^. Remarquer que le cardinal de Préneste avait été 
chargé de centraliser le produit de la décime biennale. 

(3) A la rigueur, on pourrait remarquer que ni la Provence, ni la ville d'Avignon, 
ni le comté Venaissin ne faisaient partie du royaume de France et n'étaient" pas 
compris dans la promesse faite par du Guesclin à Charles V de n'exiger aucune 
finance de ses sujets ou bonnes villes. En droit, Montpellier n'était plus aussi au 
roi de France, puisque cette ville et sa baronnie, lors du traité de Paris (6 mars 
i365), avaient été cédées à Charles le Mauvais en échange des villes de Meulan et du 
comté de Longueville; mais, en fait, elle faisait encore partie du domaine français, 
puisque le captai de Buch n'en prit possession au nom du roi de Navarre que le 
17 février i366 {Histoire générale Je Languedoc, t IX, p. 779) 

(4) Petit Thalamus, p. 369. 



DE l'académie de vaucluse Sç 

Thérouanne, à Pierre de Villiers et à Gui de Prohins, sénéchal de 
Beaucaire et de Nimes (i), avaient été donnés pour satisfaire 
Tappétit insatiable des Compagnies et empêcher le pillage de la 
sénéchaussée. 

Le gros de l'armée conduit par du Guesclin, qui, on se le rap- 
pelle, s'était approché du comté Venaissin et d'Avignon dès le 
5 novembre, s'était remis en route avant la fin du même mois. 
Le 29, Bertrand était à Montpellier et levait la contribution que 
j'ai dite, puis le 3 décembre il se dirigeait vers Perpignan (2), 
où le roi d'Aragon .devait donner un premier à-compte sur les 
100,000 florins qu'il avait promis pour l'expédition contre don 
Pèdre, son ennemi. Mais là, des bandes de routiers, satisfaites 
de tout l'argent reçu, peu désireuses de passer les Pyrénées et 
d'affronter les hasards de la guerre dans un pays inconnu, résolu- 
rent de retourner en Languedoc, où le duc d'Anjou, lieutenant gé- 
néral pour le roi de France, les signalait dès le 19 décembre, en 
prescrivant de veiller à la sûreté du pays (3). Ils s'y rencontrèrent 
avec d'autres détachements retardataires, qui poursuivaient leur 
marche vers l'Espagne et qui jusqu'au mois de février i366, 
devaient défiler sous les murs de Montpellier (4). Même, ce flux 
incessant de compagnons toujours disposés au pillage avait néces- 
sité de la part des habitants du Venaissin la continuation de 
leurs préparatifs de défense. Nous ne voyons pas, en eflfet, qu'après 
Téloignement de du Guesclin, les travaux exécutés par les 
syndics de Carpentras aient subi un ralentissement (5). Bien leur 
en prit, car l'été de i366 leur apporta de nouvelles alarmes (6) : 
en mai, juin et juillet, des societates de Bretons étaient signa- 
lées sur les bords du Rhône et le recteur du Comtat ordonnait 
d'aller prendre de leurs nouvelles au Pont-Saint-Esprit (7). On 
dut même à leur occasion lever sur le pays une nouvelle taille 
de 2,5oo florins, dont il fallut leur remettre le produit pour les 
obliger à s'éloigner (8). 

(i) M. Prou, p. 60, note 4. 
(a) Pttit Thalamus, p. 369. 

(3) Histoire générale de Languedoc, t. X, p. 108. 

(4) Petit Thalamus, p. 369 à 371. 

(5) Voir dans les comptes BB6 et 7 aux archives de Carpentras les sommes payées 
en décembre et janvier (les mois suivants furent moins chargés) pour Tartillerie, la 
construction ou réparation des bretèches, les fossés, les remparts, etc. 

(6) Le II avril i366, on devait garder les portes de la ville c propter gentes Nor- 
mannias extraneas que erant in Carpentoracte ». (Arch. de Carpentras. BB7, fol. i5). 

(7) Idem, ibidem, fol. 64 V. — Sur les routiers restés en Languedoc en i366. voir la 
note 6 d'Auguste Molinier, p. 781 du t. IX de VHistoire générale de Languedoc. 

(8) Idem, ibidem, fol. 46 V, a5 août : c Solvi Petro Riqucli, de Carpentoracte, col- 



60 MÉMOIRES 



II. 



La campagne de du Guesclin fut en effet, pour le malheur du 
Languedoc, trop rapidement achevée. On en connaît les résul- 
tats : rentrée sans coup férir en Castille, le couronnement de 
don Enrique à Burgos, la reculade puis la fuite de don Pèdre, 
abandonné de presque tous ses sujets, la prise de son trésor à 
Séville et le partage de l'énorme butin entre tous les capitaines et 
gens d'armes qui avaient suivi le nouveau roi. Dès la fin du mois 
de mai i366, don Enrique, conservant auprès de lui du Guesclin 
et une élite de Bretons, le maréchal Arnoul d'Audrehem et ses 
Français, Hugh de Calverly et Eustache d'Auberchicourt avec leurs 
Anglais, en tout seulement i.Soo lances, congédia le reste de ses 
troupes (i). Celles-ci n'eurent pas un seul instant la pensée d'aller 
combattre les Maures de Grenade : elles reprirent la route du 
Languedoc. 

On sait qu'elles furent enrôlées par le priiice de Galles, qui 
sur les instances de don Pèdre, entreprit, l'hiver suivant, le passage 
des Pyrénées pour une expédition qui devait jeter don Enrique 
au bas du trône de Castille et y rétablir don Pèdre. La bataille de 
Navarrete, livrée le 3 avril iSéy, fut on ne peut plus désastreuse 
pour le premier, qui, complètement défait, fut réduit à se sauver 
précipitamment : du Guesclin, Arnoul d'Audrehem et les plus 
vaillants capitaines français restèrent prisonniers entre les mains 
du vainqueur. Quant à celles des Compagnies, pour la plupart 
Bretonnes, qui avaient pris part au combat sous leur direction (2), 
elles quittèrent également en hâte le sol espagnol et repassèrent 
les Pyrénées. Le pape Urbain V n'avait pas attendu leur retour : 
il avait profité de l'accalmie relative dont jouissaient la Provence 



lectori tallie ii"v* florenorum in dicto Comitatu ultimo imposite pro expellendis 
societatibus bellicis de comitatu predicto, pro complemento solucionis partis nobilis 
et innobilis dicte civitatis de dicta tallia competentis... lxxxxvi Ib. x s. > 

(i) Ayala, 1. 1, p. 423; S. Luce, Froissart, t. VI, p. lxxxvii ; E. Molinier, p. 174. 

(a) Elles étaient tout à fait distinctes de celles qui avaient combattu sous les ordres 
du prince de Galles et qui se composaient surtout de Gascons, Flamands et Anglais. 
Leurs éléments principaux étaient constitués par ces corps de Bretons, qui étaient 
restés en Espagne avec du Guesclin ou que celui-ci, apprenant les préparatifs du 
prince Noir, avait fait venir du Languedoc vers la fin de Tannée i366. Aussi, lors- 
qu'elles apparurent en 1 368 en Provence et dans le Venaissin, les connut-on sous le 
oom de Compagnies bretonnes. 



DE l'académie de vaucluse 6i 

et le Languedoc pour faire le voyage de Montpellier, puis se 
diriger sur Marseille et prendre la mer pour retourner en Italie 
(9 janvier-19 mai). Mais, avant de s'embarquer, par sa bulle du 
9 mai 1867 il avait renouvelé ses anathèmes contre les routiers et 
leurs fauteurs (i). 

La ville d'Avignon et le comté Venaissin avaient été laissés 
sous la garde vigilante de Philippe de Cabassole, patriarche de 
Jérusalem, qui depuis le 17 novembre i362, exerçait les fonctions 
de recteur du Comtat (2). La bulle du r3 avril 1367 avait donné à 
ce prélat le gouvernement d'Avignon (3), et comme l'évêché de 
cette cité, par la vacance du siège épiscopal, était administré 
directement par le pape, Urbain V lui en avait encore conféré le 
vicariat au spirituel et au temporel (4). Tous les pouvoirs se 
trouvèrent donc réunis entre ses mains ; de plus, la nomination 
et la destitution des officiers lui appartinrent en propre par une 
délégation spéciale (5). Pour la défense du pays, il fut secondé, 
comme on le verra plus loin, par un chevalier tarasconnais, 
Jacques Albe, seigneur de Roquemartine (6), qui reçut du pape 
le titre de capitaine général d'Avignon et du Venaissin. Eux 
seuls furent chargés officiellement d'assurer la protection des 
États pontificaux et les sujets du pape reçurent Tordre de leur 
obéir en toutes circonstances (7). 

Dès le mois de juin (8), le Comtat ne se sentait plus en sûreté : 
le 29 de ce mois, Pons Bermond, le capitaine de Carpentras, mis 
en éveil par certaines rumeurs inquiétantes, ordonnait de faire le 
recensement des personnes portant les armes et du matériel de 
guerre qu'on pourrait au besoin se procurer dans la ville (9). 
Aussi les travaux de fortification et de défense, qui ne s'étaient 



(I) Pour ces voyages et la bulle d'Urbain V. que je dois résumer ici très briève- 
ment, cf. H. Denifle, t. II, p. 499, 5oo. 

(a) Sa bulle de nomination est conservée aux A.rch. départ, de Vaucluse, B 7, fol. 1. 
— Elle a été connue de Cottier, Notes historiques concernant les recteurs du comté 
Venaissin, p. 70. 

(3) Idem, 87, fol. 38; Cottier, p. 75. 

I4) Idem, B 7, fol. 39 V, bulle du i3 avril i367 ; Cottier, toc. cit. 

(5) Idem, B 7, fol. 38 V, bulle du i5 avril i367. 

(6) Bouches-du-Rhône, c- d*Eygruières. chef-lieu de cant. de Tarr. d* Arles. 

(7) Bulle du 5 février i368 adressée aux habitants d'Avignon et du Comtat (Arch. 
départ, de Vaucluse, B 7> fol- 44) • 

(8) Déjà m6me le 29 avril, on disait à Carpentras que des gens d'armes se réunis- 
saient du côté de Bonnieux. (Arch. de Carpentras, BB 7 bis, compte, fol. 169.) Il était 
encore trop tôt pour ce ftissent des troupes revenant d'Espagne. 

(9) Arch. de Carpentras, BB 7, délibérations, fol. 35. 



62 MÉMOIRES 

jamais beaucoup ralentis depuis le premier passage de du 
Guesclin, reprirent-ils avec une certaine activité : dans les pre- 
miers jours de juillet, on bâtit dans les murs de terre élevés sur 
le bord des fossés, là où le rempart de pierre n'était pas construit, 
des espèces de réduits où Ton tixa deux grosses arbalètes (i). 

Il n'était que temps de prendre ces mesures, car le ii juillet, le 
recteur du Comtat annonçait que les societates du Languedoc 
voulaient traverser le Rhône ; il ordonnait en conséquence à 
Pons Bermond de faire bonne garde jour et nuit, de fermer les 
passages dans les remparts et d'élever des murs de terre ou tapie 
depuis le quartier de Serre jusqu'à la porte d'Orange (2). Quel- 
ques jours plus tard (18 juillet), le conseil de ville carpentrassien 
décidait d'envoyer acquérir à Gènes, au meilleur marché possi- 
ble, des viretons, arbalètes et autres instruments de guerre (3). 

Si l'on prenait toutes ces précautions, c'est qu'il était bruit 
d'une guerre qui allait être dirigée contre la Provence et la reine 
Jeanne. Sans aucun doute, le duc d'Anjou manifestait déjà les 
intentions qu'il mit à exécution quelques mois plus tard et l'on 
craignait qu'il n'eût recpurs pour cette besogne à toutes les 
troupes de routiers revenues en Languedoc. Philippe de Cabas- 
sole crut devoir en avertir le pape, qui lui ordonna aussitôt de 
veiller à la garde des pays à lui confiés, d'assister de ses conseils, 
de sa bienveillance et de ses secours les Provençaux menacés, de 
solliciter d'eux une aide pour lui-même dans la défense des États 
pontificaux en cas d'invasion et surtout de leur recommander de 
rester fidèles à leur souveraine (.'^o juillet i367)(4). Quinze jours 



(i) Arch. de Carpentras, BB 7 bis, compte, fol. 147 V : c Sequntur expense per me 
dictum sindicum persolute in faciendo fieri balesterias gipeas in tapiis fossatorum, 
tam pro gipo quam pro magistris et manobis (sic), t \^ première dépense fut payée 
le 5 juillet, la dernière le i5 novembre. 

(2) Idem, BB7, fol. a5 v. — Les dépenses relatives â ces tapie, où travaillèrent des 
équipes d*hommes et de femmes el qui furent élevées depuis la porte de Mazan 
jusqu'à celle d'Orange, sont consignées dans le compte BB 7 bis, du fol. 126 v* au 
fol. 147. 

(3) Idem, BB 7. fol. 26. 

(4) Voici cette bulle qui était restée inconnue jusqu'ici et qui jette un jour curieux 
sur les dangers qui menaçaient la Provence et le comté Venaissin : c Urbanus... 
Philippo... Admodum displicenter audivimus nova que de inferenda guerra Pro- 
vincialibus reserasti et circa hoc de remediis nobis possibilibus, que opportuna cre- 
didimus, incepimus providere. Volumus igitur et tue fraternitati mandamus quod 
circa custodiam terrarum tuesolicitudini commissarumdiligenter intendas ac eisdem 
Provincialibus assistas consiliis, favori bu s et auxiliis opportunis, eosque ex parte 
nostra sepius horteris quod ad deflfensionem nostram contra invasores viriliter se 
accingant et tanquam fidelissimi, suorum majorum sectantes vestigia, carissime in 



DE l'académie de vaucluse 63 

auparavant, Urbain V avait même obligé, par une première bulle 
adressée à son représentant avignonais, les prélats et le clergé 
de Provence à contribuer aux dépenses que les nobles et les 
communautés devaient faire pour se mettre en état de résister à 
Tennemi (r). 

Cette fois cependant, on en fut seulement pour l'appréhension. 
Si le 3 1 août, les syndics de Carpentras furent encore obligés 
d'envoyer au Pont-Saint-Esprit pour savoir si les gens de Compa- 
gnies ne mettaient pas à exécution leur projet de franchir le 
Rhône {2), de nouvelles alarmes ne paraissent plus avoir inquiété 
la population comtadine dans les derniers mois de Tannée 1367. 
Les Bretons et autres routiers s'étaient décidés à rester en Lan- 
guedoc; ainsi, par exemple, le 14 septembre, celui qu'on appe- 
lait le Limousin, Arnaud du Solier, passait à Montpellier avec une 
grande « route » et allait camper à Montferrier (3) et aux envi- 
rons (4). Le lendemain, Perrin de Savoie, capitaine d'une autre 
forte Compagnie, allait se logera Vauvert ;r>). Le surlendemain, 
Yves de Groeslon avec ses Bretons s'établissait à Mudaison (G), et 
la campagne devenait si peu sûre que les Montpelliérains 
devaient faire protéger leurs vendangeurs par une escorte fournie 
par le Limousin lui-môme (7). Knfin, le 2S septembre, on signalait 
le passage d'Olivier de Mauny, qui, délivré de prison, allait à 
Beaucaire à la suite du duc d'Anjou ',8). 

Ce dernier fait est l'indice que le frère de Charles V n'avait pas 
abandonné le projet, qui, dévoilé quelques mois plus tôt, avait 
causé les frayeurs d'Urbain V. Il ne se décidait pourtant pas à 
agir et il attendait celui qu'il espérait mettre à la tête de ses 
troupes : Bertrand du Guesclin lui-même. Mais celui-ci, retenu 
captif à Bordeaux par le prince de Galles, n'obtint sa libération 
que le 27 décembre 1367. Aussitôt qu'il le put, il vint donc retrou- 



Christo filie nostrc Johanne, regine Sicilie, illustri comitatuum Provincic et Porcal- 
querii comitisse. eorum naturali domine, firmiter adhereant, nullis adversancium 
vexacionibus a fidelitate solita et débita separandi, quibus tanquam devotis nostris 
proponimus assistere favoribus opportunis. Datum Viterbii. ini kalendas augusti, 
pontificatus nostri anno quinto. » (Arch. départ, de Vaucluse, B 7, fol. 41 v-.; 
(i) Idem, B7>fol. 4a- 

(2) Archives de Carpentras, BB7 bis, fol. 169. 

(3) Hérault, arr. et cant. de Montpellier. 

(4) Petit Thalamus^ p. 38i. 

(5) Gard, arr. de Nimes, clief-lieu de cant. 

(6) Commune de Mauguio Hérault), arr. de Montpellier, chef-lieu de cant. 

(7) Petit Thalamus» p. 38t. 

(8) Idem, p. 38a. 



64 MÉMOIRES 

ver le duc à Nimes : le 7 février i368, son passage et celui du 
maréchal Arnoul d'Audrehem étaient notés à Montpellier (i). 

L'expédition qu'avait résolue le peu scrupuleux duc d*Anjou, 
n*était en somme qu'un acte de haut brigandage. Le riche comté 
de Provence, qui avoisinait son gouvernement du Languedoc, 
tentait sa cupidité. Prendre occasion de Tabsence de la reine 
Jeanne, souveraine de ce pays, de l'incapacité de son sénéchal 
Raymond d'Agout (2) et de Téloignement du pape, qui aurait, 
cela est certain, mis de sérieuses entraves à l'exécution de ses 
desseins, nouer de louches et criminelles relations avec des sei- 
gneurs mécontents, les exciter à la révolte ou à la trahison, se 
jeter lui-même sur la province et s'en emparer par un audacieux 
coup de main au mépris de tout droit, tel était le plan qu'il rêvait 
de réaliser i3). 

L'entente avec du Guesclin, étant déjà préparée par des négo- 
ciations antérieures, fut vite conclue. Le futur connétable de 
France, décoré depuis i366, par la reconnaissance de don Enri- 
que, du titre de duc de Trastamare, se mit aussitôt à l'œuvre et 
eut rapidement fait de réunir une armée de routiers. Le 26 février 
i3o8, en effet, il repassait à Montpellier avec le bâtard de l'isle, 
Perrin de Savoie, le Petit Meschin, Noli Pavalhon, Amanieu 
d'Ortigue et d'autres capitaines conduisant leurs nombreux 
compagnons d'aventures (4) ; après s'y être reposé, il partait 
dans la direction de la Provence ^51. La plupart des gens qu'il 
emmenait étaient les Bretons qui, en 1 367, étaient revenus d'Es- 
pagne en Languedoc, où ils avaient passé Thiver. Le 10 février, 

(I) PitU TkaUmus. p. 38a. 

{%) Dès le II décembre 1387, Urbain V con5;eillait A la reine Jeanne de remplacer 
ce sénéchal par Guillaume Gaugié. de Forcalquier. |H. Denifle^t. II. p.5ii.) 

(3) Il n*est aucun compte à tenir, ainsi que Ta fait remarquer le R. P. H. Denifle 
(t. II, p. 5uV, d*apn^s Winckelmann (OiV Bisiehungen Kaiser Karls IV. sum Koenig- 
nick Aretil. p. 5a et Paul Fournier 7^ Royaume d'Arles, p. 476» de la fable col- 
portée par Thierry de Niem, d'après laquelle Tempereur Charles IV, se trouvant a 
Avignon en i365, aurait cédé au duc d*Aniou ses droits sur le royaume d'Arles. 

U* Perrin de Sa\*oie a été mentionné à Tara<c«>n par du Guesclin lui-même dans 
sa lettre au sieur de la Voulte qui sera indiquée ci-apres. Cuve lier le cite ,vers 
i3ï»7' avec le Petit Meschin «vers i38î>9": mais à ces capitaines signalés par les pièces 
d'archives, il aioute, sans que nvvj> a\vn> la preuve de son exactitude, le frère de 
Bertrand du Guesclin, Olivier, qui. quelques annc^< plus tard, viendra rava^jer le 
Venaissin ; Olivier. Hervé et Alain de Mauny. Petit de Cambrai. Alain et Tristan de 
la Houssaye, Robert le Comte, le l>'urc de Bierne. Jacque> de Bray, Alain Papillon, 
etc. Il est à remarquer qu'en :3ôt. 0'.iv;er de Majrry ^îaii capiiair.e ««u -^ .uvenieur de 
Castelsarrasin yHistyi^^ Se LimgMeJoc^ i ÎX. p -y : lî '^e s^raii d«»nc pas impossible 
quHI tût venu au siège de Tarascon. 

t51 FHit ThilMmui. p. 3&i 



DE l'académie de vaucluse 6S 

Amanieu d'Ortigue et Noli Pavalhon s'étaient même rendus 
maîtres d'un petit fort de la ville de Montolieu (i), dans les envi- 
rons de Carcassonne ; d'autres, neuf jours après, s'étaient empa- 
rés de Pomerols (2)' en Agadois (3). 

Les préparatifs et la marche de du Guesclin furent aussitôt 
annoncés au pape, qui ignorant quels étaient les véritables des- 
seins du duc d'Anjou, prit tout de suite peur pour ses États. Il 
craignit une attaque contre la ville d'Avignon et le Venais- 
sin ; aussi promulgua-t-il en hâte une bulle solennelle, faisant 
défense à toutes personnes et à toutes communautés d'envahir 
les territoires qui lui appartenaient et d'enrôler dans ce but des 
gens d'armes, prohibant expressément d'accorder des secours 
soit en argent, soit en soldats, soit en vaisseaux à ceux qui ten- 
teraient une entreprise contre la cité avignonaise et le Comtat, et 
excommuniant d'une façon formelle tous ceux qui contrevien- 
draient à ces défenses (4). 

Mais l'armée du duc d'Anjou avait un autre objectif que celui 
qui était redouté par Urbain V : le samedi 4 mars i368, elle 
paraissait devant Tarascon et mettait le siège devant cette 

(i) Aude, arr. de Carcassonne. cant. d'Alzonne. 
(3) Hérault, arr. de Béziers, cant. de Florensac. 

(3) Petit Thalamus, p. 38a. 

(4) Voici cette bulle, dont une copie assez défectueuse se trouve aux Archives 
départ, de Vaucluse (B 7. fol. 45) et qui n'avait pas encore été signalée : c Ad perpe- 
tuam rei memoriam. Humani generis Redemptoris... Sane nuper ad aures nostras 
relatio fide digna perduxit quod nonnulli. ambicionis et avaricie vicio obsecati.bllicos 
{sic pour bellicos) fecerunt et faciunt apparatus et quod ex ipsorum certis conjecturis 
et signis probabilis est exorta suspicio quod se parant ad civitatem Avinionensem 
et comltatum Venayssini, ad nos et eamdem Romanam Ecclesiam nullo medio per- 
tinentes, invadendos et etiam ofTendendos. Nos igitur, Ecclesie, civitati et comitatui 
prefatis super hoc de cong^uo remedio providere et occurere talium conatibus mali- 
gnorum et animarum periculis. corporum detrimentis, bonorum et rerum dispendiis 
ac scandalis et incomodis gravissimis et irreparabilibus. que si invasio et ofîensio 
predicte, quod absit. contingerint, possunt ex eis verisimiliter formidari, volentes 
salubriter obviare, universis et singulis clericis et laycis, cujuscumque condicionis, 
status, ordinis. dignitatis vel preheminencie fuerint. etiam si pontificali seu quavis 
alla ecclesiastica vel mundana dignitate prefulgeant, universitatibus quoque, com- 
munitatibus et civitatibus quibuscunque, auctoritate aposlolica, prohibemus et man- 
damus expresse ne per se vel alios civitatem vel comitatum predictos, seu partem 
vel castra aut aliqua loca ipsorum aut alterius eorumdcm, quovis colore requisito. 
invadere, impugnare vel offendere, seu propter hoc recipere vel exhibere gentes, 
stipendia sive galeas vel alia vasa maritima vel fluvialia dare, locare, comodare, aut 
titulo quocumque concedere seu conducere vel remigare (51c) in eis quovismodo 
présumant, aut super hiis presumptoribus ipsîs prestare publiée vel occulte, directe 
vel indirecte, consilium, aLxilium vel favorem. Nos enim in omnes et singulos, qui 
contra inhabiiacionem (sic) et mandatum hujusmodi venire présument, etiam si, ut 
predicitur, pontificali vel quavis alia ecclesiastica vel mundana dignitate prehemi- 



(Ai 



MI-MOIRES 



place (i). Avec la ville voisine de Beaucaire comme point d'app 
elle pensait sans doute s'en emparera bref délai et de lu. pénétr 
rapidement au C(eur de la Provence; mais, contre son attont 
Tarascon lit une longue résistance (2). Elle dut rester sous se 
murs jusqu'au '2-2 mai, date ù laquelle la ville, peut-être a/îamée 
consentit :\ ouvrir ses portes (3). Kn attendant, sa présence ei 
son slalioiincment dàJis un pays qui Ihisail partie du dif^ce.-.e 
d'Avignon ( 4), constituaient un grave danger pr>ur Jes sujtfis 
dlabatn V, MOme, poui achever de terroriser la populatirjn. dvs 
délachemenls vinrent établir leur camp sur le territoire de Iti citv 
avignonaise (S\ Aussi, Philippe de Oibassole, vicaire de Vé^lisc 
d'Avignon, recteur de cette ville cl du Comtat. et Jacques Albc. 
capitaine gOnérat dans les Klals ponlitlcaux de l^^rance. enirèrcnî- 
ÎU en négiKiâtionsavec Bertrand du Guesohn et ses principauv 
capitaines. N*>li Pavalhon. le Petit Meschin. Bosonet de Pau vi 
PciTHi do i^avoie. 

(tes négociatiiMis son! bien connues depuis que le R. P. DeniflL 
a publié les actes qui y soiu relalifs, mais on ne savait pas tout : 
i»n ignorail iusqu'auiourdluii qu'elles avaient eie engagées a la 
,suUc de menacvH faile> pai du (îuesclin et ses gens dVmahir vl 
de piller les Icrrtlojrcîî d'Avignon el du Venaissîn si on ne hur 
donniiil fuis d'argent ;i>>. tycUiii de leur part le renouvellement d; 




nf^i'k.HUi^M de t* «^j^cluItlcT Cl c^pfTri^m optirterii facerv mcncionrm, Je fratrum 
i^c, exv'i'mnryulcaCH^niH, i^uim c^^^ incurrene v«'»lumu^, ïi^ntertiam p^mulga- 

illcUs cl c«H cl ï|\^>r%iiii ?»in|fuU*«i iMnnibaH prixilepi^. mJut^ncit^. iibfnâdèijs. 

^t%:iH Cl itnmuniUllbu^ ivâïibiiv t'^t^^tidlibus^uç ab edUcm Eccïcsia ein^em 

<*.«..-^v4* ntfvucMi Cl fcw*lotutii. t>onor%étii. tHWi**rym. t4Bv*ît3fynî «t mnixm quf «t 

^cle«»4 oblâncnu de frmtrum prediciorum ctiûsilu^, cadem tuctontatc pn- 

Cri\* :- I i- fi'tM p** ^tee; elle c^h tmtiscntc liân^ i-* ic^i^ïtrc K* tnirt â*ê\3irf* 
te s>î^ ii> i^r-' ' ' "'■■' '■■'.e eia ccflAiii^î^înent aJùéneurr 4 \a J*ie .^ h pipe if>pr>î 

* 4#» trè« ittAl rçQ$eif[tié s^t t*^ d^T^oeœcnts tî c^iTîm^lt une quicur^* 

- t Çl *uivj n ^i it^utti€ Je 1^* relevEf i^ 
"r^y «ctuei, dil «lu "4 RéHC, ^'âvâupiî eoccft *(c 
é ^^ K i r ; on sait 4tiii ne i^t c\^mmtvtzî qu'in J#4iï J^ 

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t ai ce âioo^ê 

^ ^ rifie GNbfa^^ tX pAT les 4t>tiJâAiâi t! ^e^v^ 



xv^ 






DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



67 






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Ses 

.sa/e/s 
^ des 

/bc. 



jui leur avait bien réussi au mois de novembre i365 

lit cette fois encore être couronnée de succès : ils 

icn que le pays n*était pas en état de leur résister, ils 

^ien en particulier que les remparts d* Avignon (i) et de 

as, pour ne citer que ces deux villes, étaient loin d'être 

Choisissant le moindre mal, Philippe de Cabassole et 

Albe se décidèrent à passer par leurs exigences et à 

a un traité avec eux : ils obtinrent que Tarmée s'éloigne- 

respecterait la cité d'Avignon, le comté Venaissin et lieux 

nts appartenant au pape et à TÉglise romaine, les terres et 

.es de Téglise d'Avignon, même celles qui se trouvaient en 

mce, les habitants de ces pays et leurs biens. Si d'autres 

pes venaient rejoindre celles qui se trouvaient déjà devant 

iscon, elles observeraient le même pacte; de plus, si les 

agements ainsi contractés étaient violés, tous les dommages 

aient amendés et restitués. Ce serment fut juré par du Guesclin 

ses compagnons le 23 mars. 

La procuration que Philippe de Cabassole et le seigneur de 
.oquemartine avaient fait passer, deux jours auparavant, à leur 
•gent, Pierre Beth (2), archidiacre d'Aure en l'église de Commin- 
ges, porte qu'il devait être donné sans aucune promesse ou 
offrande de la part de l'Église romaine et de ses représentants. 
C'était trop ménager les susceptibilités des contractants, car à 
défaut de la bulle du 18 janvier 1869, à laquelle je viens de faire 
allusion, bien des indices marquent d'une façon non équivoque 
la façon dont il fut obtenu et dévoilent le sens des conventions en 
langue française, précédemment acceptées par l'une et l'autre 
partie : on remit en effet, dans le même temps, au duc de Trasta- 
mare un à-compte de 5,ooo florins sur les 87,000 réclamés par lui 
au pape. Évidemment, c'était la rançon qu'il prélevait sur les 
États pontificaux. Le patriarche de Jérusalem et Jacques Albe 
avaient été obligés d'en emprunter la moitié au banquier avigno- 
nais Michel Baroncelli et ils avaient fait verser le tout entre les 



(1) Je renvoie pour les remparts d'Avignon aux diverses monographies qui les 
concernent, mais je crois devoir signaler ici deux bulles d'Urbain V des v décembre 
1:^67 et 6 février 1 368 relatives à leur continuation et à la démolition de la maison 
habitée par le cardinal Gui de Boulogne et de toutes les autres qui gênaient leur 
construction. (Arch. départ, de Vaucluse, B 7, fol. 41 v et 44 V.) 

(2) C'était sans doute un parent d'Ambroise Beth, de Carcassonne, trésorier des 
finances royales en Languedoc, signalé de i377 à i38o par l'Inventaire dés archivt 
de Montpellier, publié par mon excellent confrère M. Joseph Berthelê, i ï. p. |3 
n" 4182 et 4183. 



(j6 Mb'MOIRES 

place (i). Avec la ville voisine de Beaucaire comme point d appui, 
-elle pensait sans doute s'en emparer à bref délai et de là pénétrer 
rapidement au cœur de la Provence; mais, contre son attente, 
Tarascon fit une longue résistance (2). Elle dut rester sous ses 
murs jusqu'au 22 mai, date à laquelle la ville, peut-être alTamée, 
consentit à ouvrir ses portes (3). En attendant, sa présence et 
son stationnement dans un pays qui faisait partie du diocèse 
d'Avignon ( 4), constituaient un grave danger pour les sujets 
d'Urbain V. Môme, pour achever de terroriser la population, des 
détachements vinrent établir leur camp sur le territoire de la cité 
avignonaise (S;. Aussi, Philippe de Cabassole, vicaire de Téglise 
d'Avignon, recteur de cette ville et du Comtat, et Jacques Albe, 
capitaine général dans les États pontificaux de France, entrèrent- 
ils en négociations avec Bertrand du Guesclin et ses principaux 
capitaines, Noli Pavalhon, le Petit Meschin, Bosonet de Pau et 
Perrin de Savoie. 

Ces négociations sont bien connues depuis que le R. P. Denifle 
a publié les actes qui y sont relatifs, mais on ne savait pas tout : 
on ignorait jusqu'aujourd'hui qu'elles avaient été engagées à la 
suite de 'menaces faites par du Guesclin et ses gens d'envahir et 
de piller les territoires d'Avignon et du Venaissin si on ne leur 
donnait pas d'argent (6). C'était de leur part le renouvellement de 

nencie.ctiamsi de ea specialiter et expressam oporterit facere mencionem, de fratrum 
consilio. cxcommunicacionis, quam eos incurrere volumus, sententiam prûmulgra- 
miis, ipsorumque terras et loca, allasque comunitates et universitates ac civitates 
contra premissa vel premissorum aliquod actentantes ecclesiastico subicimus inter- 
dicio, et eos et ipsorum sin^ulos omnibus privilegiis, indulgenciis, libcrtaiibus. 
graciis et immunitatibus realibus, personalibusque ab eadem Ecclesia eisdem 
concessis, necnon et feudorum, bonorum, honorum, officiorum et jurium que a 
prefata Ecclesia obtinent, de fratrum prediciorum consilio, eadem auctoritate pri- 
vamus... • 

Cette bulle n'est pas datée; elle est transcrite dans le registre B7 entre d'autres 
des i3et 18 mars i368. Elle est certainement antérieure à la date où le pape apprit 
l'arrivée de du Guesclin devant Tarascon. 

(i) Petit Thalamus, p. 38a. — Cuvelier, l'auteur de la Chronique rimée de Bertrand 
du Guesclin, a été très mal renseigné sur ces événements et entremêle une quantité 
d'erreurs à son récit (vers i38oi et suiv.). Il est inutile de les relever ici. 

(a) A remarquer que le château actuel, dit du roi René, n'avait pas encore été 
reconstruit sur le bord du Rhône ; on sait qu'il ne fut commencé qu'au début du 
XV siècle par Louis H d'Anjou. 

(3) Petit Thalamus, p. 383. — Cf. H. Denifle, t. II, p. 5io. 

(4) Tarascon. rappelons-le. était de l'évôché d'Avignon; l'église Sainte-Marthe était 
le siège d'un archidiacre de ce diocèse. 

(5) Cf. la supplique adressée au pape Grégoire XI par les Avignonais et publiée 
par P. Mérimée, Histoire de don Pèdre /", p. SSa, 

^6) Voir la bulle du i8 janvier iSôg qui sera transcrite ci-après. 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE 67 

la tactique qui leur avait bien réussi au mois de novembre i365 
et qui devait cette fois encore être couronnée de succès : ils 
savaient bien que le pays n'était pas en état de leur résister, ils 
savaient bien en particulier que les remparts d'Avignon (i) et de 
Carpentras, pour ne citer que ces deux villes, étaient loin d'être 
achevés. Choisissant le moindre mal, Philippe de Cabassole et 
Jacques Albe se décidèrent à passer par leurs exigences et à 
conclure un traité avec eux : ils obtinrent que Tarmée s'éloigne- 
rait et respecterait la cité d'Avignon, le comté Venaissin et lieux 
adjacents appartenant au pape et à l'Église romaine, les terres et 
localités de l'église d'Avignon, même celles qui se trouvaient en 
Provence, les habitants de ces pays et leurs biens. Si d'autres 
troupes venaient rejoindre celles qui se trouvaient déjà devant 
Tarascon, elles observeraient le même pacte; de plus, si les 
engagements ainsi contractés étaient violés, tous les dommages 
seraient amendés et restitués. Ce serment fut juré par du Guesclin 
et ses compagnons le 23 mars. 

La procuration que Philippe de Cabassole et le seigneur de 
Roquemartine avaient fait passer, deux jours auparavant, à leur 
agent, Pierre Beth (2), archidiacre d'Aure en l'église de Commin- 
ges, porte qu'il devait être donné sans aucune promesse ou 
olfrande de la part de l'Église romaine et de ses représentants. 
C'était trop ménager les susceptibilités des contractants, car à 
défaut de la bulle du 18 janvier 1869, à laquelle je viens de faire 
allusion, bien des indices marquent d'une façon non équivoque 
la façon dont il fut obtenu et dévoilent le sens des conventions en 
langue française, précédemment acceptées par l'une et Vautre 
partie : on remit en effet, dans le même temps, au duc de Trasta- 
mare un à-compte de 5, 000 florins sur les 87,000 réclamés par lui 
au pape. Évidemment, c'était la rançon qu/il prélevait sur les 
États pontificaux. Le patriarche de Jérusalem et Jacques Albe 
avaient été obligés d'en emprunter la moitié au banquier avigno- 
nais Michel Baroncelli et ils avaient fait verser le tout entre les 

II) Je renvoie pour les remparts d'Avignon aux diverses monographies qui les 
concernent, mais je crois devoir signaler ici deux bulles d'Urbain V des 7 décembre 
1:^7 et 6 février 1 368 relatives à leur continuation et à la démolition de la maison 
habitée par le cardinal Gui de Boulogne et de toutes les autres qui gênaient leur 
construction. (Arch. départ, de Vaucluse, B7. fol. 41 v* et 44 v.) 

(a) C'était sans doute un parent d'Ambroise Beth, de Carcassonne, trésorier des 
finances royales en Languedoc, signalé de i377 à i38o par l'Inventaire des archives 
Je Montpellier, publié par mon excellent confrère M. Joseph Berthelé, 1. 1, p. i32 
n«* 418a et 4t83. 



r)8 MÉMOIRES 

mains d'un autre banquier de la môme ville, André Tichi, chez 
lequel du Guesclin fit prendre la somme par l'anglais Janequin 
Le Clerc, son procureur (24 mars) (i). 

Cet accord, porté à la connaissance du pape Urbain V, fut 
approuvé par lui, mais bien à contre-cœur. En définitive, décla- 
rera-t-il plus tard, c'était agir avec circonspection que de détour- 
ner par un sacrifice d'argent un aussi grand fléau que celui dont 
on était menacé (2). 

Aussitôt qu'il sut à Rome la nouvelle de l'attaque de la Pro- 
vence, il manifesta ses sympathies pour ceux qui étaient si injus- 
tement opprimés. Mieux même, il ordonna à son représentant 
Philippe de Cabassole de veillera leur sûreté, de les défendre et 
de les aider, absolument comme il le ferait pour les Avignonais 
et les Comtadins (25 mars i368 (3). Puis, quelques jours après, 
il intervint auprès du roi de France et lui écrivit son amer 
chagrin d'apprendre que des gens de son royaume, munis d'ar- 
mes, de vivres et de vaisseaux, eussent envahi le comté de Pro- 
vence, fief d'empire, sans motif légitime et sans déclaration de 
guerre ; il lui demanda en conséquence de faire cesser la détes- 
table entreprise de son frère contre sa parente la reine Jeanne et 
lui fit entrevoir que celle-ci, par représailles, pourrait appeler à 
son secours un prince étranger qui porterait les hostilités dans 
la sénéchaussée de Beaucaire et le Dauphiné (3 avril i368) (4). En 
même temps que cette bulle, fut expédiée une protestation en 
règle auprès de l'empereur (5). 

Étant aussi favorablement disposé en faveur des Proven- 
çaux, le pape ne manqua pas, sur les plaintes que lui en adressa 
la reine Jeanne, de blâmer très vivement la conduite des Avigno- 
nais et des Comtadins, qui par peur sans doute et pour achever 
de se rendre favorables les routiers à la solde du duc d'Anjou, 



(I) Tout ceci est extrait des sept documents, datés des 31-24 mars i368, conservés 
aux Archives du Vatican et publiés par le R. P. H. Denifle, t. II, p. 778 et suiv. 
(a) Voir la bulle du 18 janvier 1369, qui sera rapportée ci-après. 

(3) Voici l'essentiel de cette bulle inédite: t Urbanus .. Phllipo... Terras Provincie 
in statu prospero et tranquillo observari cordiali affectione, propter raciones multi- 
plices quas tue circonspectioni notas esse credimus, cupientes, fraternitati tue man- 
dam us quathinus circa conservacionem et deffencionem ipsorum ita solerte invigiles 
et favoribus opportunis insistas, sicut facis et faceres pro conservacione et deffen- 
cione civitatis Avenionensis et comitatus Venayssini... Datum Rome apud Sanctum 
Petrum, viii kalendas aprilis, pontificatus nostri anno sexto.» (Arch. départ. deVau- 
cluse, B7, fol. 46.) 

(4) Prou, op. CI/., p. 69 et i57, pièce justif. n* lxxviii. 

(5) Idem, p. 70. 



DE l'académie de VAUCLUSE 69 

leur faisaient passer des vivres et des armes à leur camp devant 
Tarascon (î8 avril) (i). Un fait môme lui fut dénoncé qui lui 
déplut extrêmement : une galère des Grimaldi, de Gênes, venue 
pour porter secours aux assiégés, pressée par les gens de du 
Guesclin, s'était rendue à Avignon avec un sauf-conduit pour y 
prendre des vivres ; moins heureux que ses adversaires, à qui 
rien n*était refusé, l'équipage n'avait pu obtenir quoi que ce soit; 
faute de secours, les hommes avaient péri ou avaient été faits 
prisonniers. Aussi, Urbain V recommanda-t-il à Philippe de 
Cabassole, à la date du 3o mai, d'agir d'une façon toute diffé- 
rente : il voulait que ses sujets compatissent aux malheurs des 
Provençaux et leur prêtassent un secours qu'il fallait absolu- 
ment refuser aux gens des Compagnies y2). 

Cette partialité des Avignonais et des Comtadins pour les 
routiers ne devait pas leur porter bonheur ni les mettre à l'abri 
des pillages et des atrocités que ces gens de guerre avaient 
l'habitude de commettre : même avant la fin du siège de 
Tarascon, des bandes de brigands entrèrent dans le Venaissin 
qu'ils ravagèrent, et les représentants du pape durent ordonner 
à tous ceux qui devaient le service militaire de faire des che- 
vauchées et de se mettre à leur disposition pour repousser l'en- 
nemi. Cela ne fut pas du goût de tous : il y eut des réfractaires, 
qui, ne voulant pas obéir, crurent pouvoir se dispenser de leurs 
obligations en adressant un appel au pape. Celui-ci répondit par 
la bulle du 26 mai : il s'éleva contre de tels procédés et ordonna 
à Philippe de Cabassole et à Jacques Albe de contraindre 
les récalcitrants par des peines temporelles ou des censures 
spirituelles (3). Les gens de Carpentras durent être touchés par 
cette bulle ; pendant tout le mois de juin, on les voit, en effet, 
très affairés pour faire révoquer les lettres sur les gages de leur 
capitaine Pons Bermond, accordées par le patriarche de Jéru- 
salem et le capitaine général du Comtat et contre lesquelles ils 
procédaient en justice. Leurs syndics s'agitaient fort aussi à cause 
du gage de 200 florins qu'ils avaient dû donner sur leurs biens : 
le trésorier du Comtat avait réclamé cette somme pour ceux qui 
servaient en armes à Carpentras (4). 

(1} Arch. départ, de Vaucluse, B 7, fol. 46 v» ; H. Denifle, t. II, p. 5ii, note 5, avec 
la date du 19 avril. La bulle, dans le registre B 7, porte bien comme date le 14 des 
calendes de mai. 

(a) H. Denifle, t. II, p 5ii, note 6. 

(3) Arch. départ, de Vaucluse. B 7. fol. 47 ; H. Denifle. t. II. p. 5i.*^. note i. 

(4) Arch. de Carpentras. CC 154, fol. a v*. 



yO MÉMOIRES 

En conséquence des ordres donnés, les villes et places fortes 
durent se mettre en état de défense : on constate, par exemple, 
que la capitale du Venaissin, à la date du i5 mai, fut obligée de 
commander pour son artillerie un millier de carreaux ou de 
viretons d'acier (i). 

C'est surtout lorsque Tarascon eut ouvert ses portes aux assié- 
geants et lorsque les routiers se répandirent comme un torrent 
dévastateur dans la Provence (2), que le comté Venaissin eut à 
redouter leurs excès. Dès le i5 juin, les Carpentrassiens en- 
voyaient des messagers à Gigondas et à Sablet pour avoir nou- 
velles des socieiates qui devaient passer par là (3). Deux jours 
après, ils prenaient à Avignon les ordres du recteur pour savoir 
s'ils pouvaient leur donner les vivres, ainsi qu'on avait fait précé- 
demment pour les compagnons de du Guesclin. On leur répondit 
par la négative, conformément aux instructions données par le 
pape (4). Peut-être est-ce ce changement de procédés qui déchaîna 
un peu plus la colère des gens de Compagnies, habitués à être 
mieux traités. Mais tout d'abord les routiers ne firent que passer : 
ils étaient trop occupés par leurs courses en Provence et par la 
querelle qui, à cause d'eux, s'était élevée entre les Dauphinois et 
les Provençaux ; les premiers, hostiles pour commencer aux 
soldats de du Guesclin, s'étaient cependant servis des Bretons 
pour venger l'exécution d'un noble clerc dauphinois par le capi- 
taine provençal de Sisteron ; avec eux ils avaient envahi la Pro- 
vence, surtout dans la partie située au nord et à l'est du comté 
Venaissin, et c'était entre les uns et les autres une suite d'escar- 
mouches ou une série de représailles violentes (5). 

C'est pour cela que, le 28 juin, on envoyait à Malaucène, pays 
rapproché du théâtre de cette guerre, demander au viguier où se 
trouvaient les gens de Compagnies (6). Ils ne tardèrent pas à 
arriver dans le Venaissin : les messagers que Pons Bermond et les 

(i) Arch. de Carpentras. CC i53, fol. 53 V. 

(a) Je ne parlerai pas du prétendu siège d'Arles, que du Guesclin aurait entrepris 
après celui de Tarascon; je nie contente de renvoyer pour ce sujet au R. P. H. 
Denifle. t. II. p. Sia (voir surtout la note 2). Cuvelier est de ceux qui ont parlé de ce 
siège (vers 14040 et 14041'; mais son récit est tellement fantaisiste, môme en ce qui 
concerne la prise de Tarascon, que son témoignage est très suspect. 

(3) Arch. de Carpentras, CC i53, fol. 74; CC i54. fol. i v. 

(4| Idem, CC 154. fol. i V. 

(5) Sur cette guerre entre le Dauphiné et la Provence, voir surtout H. Deniae, 
t. II. p. 5i5 et suiv.. p. 788 et suiv. Je ne puis faire que résumer ce qui est utile à 
savoir pour le comté Venaissin. 

(6) Arch. de Carpentras, CC i53, fol. 74 v ; CC 154, fol. 2. 



DE l'académie de vaucluse 7î 

syndics de Carpentras expédièrent dans la soirée du 8 juillet à. 
Caromb, Grillon et Bedoin, revinrent le lendemain matin annoncer, 
qu'il y en avait de logés dans le prieuré de Bedoin (i) ; le 9 juillet 
cependant, ils en étaient repartis (2). C'était le prélude d'une inva- 
sion complète du pays, et elle fut si rapide que, le 18 du même 
mois, Tarchevêque d'Embrun pouvait écrire au cardinal Gilles 
Aycelin de Montaigu que tous les chemins du Dauphiné et de la 
Provence jusqu'à Avignon étaient occupés par les Bretons (3). 
Cependant du Guesclin lui-même s'était en allé depuis les pre- 
miers jours de juillet (4); mais les troupes qu'il avait laissées dans 
le Gomtat et dans les paya voisins étaient toujours réputées être 
à lui et l'on verra plus loin que lorsque le pape crut devoir sévir 
contre elles, il s'en prit directement au duc de Trastamare, qu'il 
rendit responsable de leurs excès. 
L'occupation et la dévastation du territoire avignonais et du 
. Venaissin eurent lieu surtout à la fin de juillet et pendant le mois 
d'août i368 : le pillage, l'incendie, le meurtre, tels furent les prin- 
cipaux exploits des routiers contre la malheureuse population (5). 
On voit s'ils s'entendaient à garder la foi des traités conclus 
précédemment et quelle idée singulière ils avaient de la protec- 
tion qu'ils avaient jurée de donner aux sujets du pape. Grâce 
cependant aux niesures prises par Philippe de Cabassole et 
Jacques Albe, ils ne purent que ravager la campagne, sans pou- 
voir occuper des forteresses d'où il aurait été difficile de les 
déloger. Mais, pour comble de malheur, les paysans, ainsi mal- 
traités et aussi peu défendus, se révoltèrent et joignirent leurs 
excès à ceux des Bretons (G). Ce fut comme une espèce de petite 
Jacquerie, qui était restée inconnue jusqu'ici et sur laquelle on 
manque malheureusement de renseignements. 
Les villes et places fortes, ainsi que la campagne, étaient gar- 

(i) Arch. de Carpentras, CC i53, fol. 77 v ; CC 154, fol. a. 

(2) Idem, ibidem. 

(3) H. Denifle. t. II, p. 789. 

(4) Le 5, il se trouvait déjà à t Maillonne », non loin de Montbrison, quand il 
écrivit au sieur de la Voulte une lettre des plus fiOrcs qu'a publiées M. L. Delisle 
[Deux Lettres de Bertrand du Guesclin et de Jean le Bon, comte d'Angouléme, dans la 
Bibliothèque de l* École des chartes, t. XLV, p. 3oa.) 

(5) Voir la bulle d'excommunication du i"' septembre i368, publiée par M. Prou, 
p. 161. 

(6) Arch. de Carpentras, CC 154, fol. 3 : « Item, anno [i368] et die quinta mensis 
augusti, solvi Matheo Mercerii qui. die sabbati proxime preterita, portavit litteras ad 
dominum rcctorem, ex parte domini judicis et sindicorum, pro rebellione quam 
Jaciebant laboratores... > 



/ 



'2 MÉMOIRES 



dées par les garnisons que le capitaine général y avaient mises, 
plies y étaient à la solde des habitants du pays, qu'Urbain V pria, 
le 8 août i368, de verser la contribution nécessaire à leur 
paiement (i). Mais comme il se défiait, et pour cause, de la bonne 
volonté des communautés à supporter cette dépense, il donna 
en même temps pouvoir au recteur Philippe de Cabassole 
de contraindre par les rigueurs de droit celles qui s'y refuse- 
raient (2). A cette date, le pape ignorait encore la gravité de la 
situation et croyait que les Compagnies ne dévastaient que les 
comtés de Provence et de Forcalquier ; il ne pensait donc pres- 
crire que des mesures de prévoyance. Cependant, il redoutait 
vivement une invasion dans ses domaines : aussi écrivit-il, le 
même jour, à Tarchevéque de Lyon, à Tévèque de Valence et au 
comte de Valentinois pour leur demander d'accéder à la requête 
de Philippe de Cabassole et de lui envoyer les soldats et les 
vivres dont il pourrait avoir besoin pour la défense de ses 



(i) Bulle adressée aux habitants d*Avi^on et aux communautés du Comtat : Arch. 
départ, de Vaucluse. B 7, fol. 5o; M. Prou, p. iSg. n» lxxxi. 

(3) Cette bulle, restée inconnue, est assez intéressante pour qu'elle soit rapportée 
ici. En voici le texte : 

• Urbanus... Philipo, patriarche Jerosolimitano, salutem... Percepto nuper quod 
gencium sodetatis pestiféré filiorum Satané rabies in Provincie et Forcalquerii 
comitatibus, qui civitati nostre Avinionensi et comitatui Venaysini ad nos et 
Romanam Ecclesiam spectantibus. quorum es reclor, vicinl existunt. hiis diebus 
deseviens, terras depopuletur comitatuum eorumdem, sicque verisimiliter formi- 
dandum quod gentes pestiféré seviciis imbute, iniquitati laxatis habenis, non ponent 
insolencie terminum. sed terris predictis seva eorum depopulacione vastatis, fines 
dictorum civitatis et comitatus ingredi molientur, fidèles nostros civitatis et comi- 
tatus Venayssini predictorum cives et incolas universos requirimus per alias 
nostras licteras et hortamur, eis districte mandantes ut secundum ordinacionem 
tuam, quam tua fraternitas et dilectus filius nobilis vir Jacobus Albe, miles, 
dictorum civitatis et comitatus Venayssini capitaneus, duxeritis faciendam, ipsi 
incole contribucionem peccuniarum dandam stipendiariis pro tuicione civitatis 
et comitatus Venayssini predictorum, magrnis obviaturi periculis, facere non omictant. 
Verum, quia, prout audivimus, universitates civitatis et comitatus Venayssini pre- 
dictorum sein facienda contribucione hujusmodi difficiles et renitentes reddiderunt 
hactenus atque reddunt, nos considérantes tantis obviari periculis fore nullathenus 
negligendum, licet ex parte tui officii rectoriatus possis eosdem universitates. cives, 
incolas et habitatores ad hoc compellere, nichilominus tamen eidem fraternitati tue 
super modo et forma contribucionis hujusmodi libère disponendi ac universitates, 
cives, incolas et habitatores supradictos et aliosde terris Romane Ecclesie subjectis. 
sub tuo regimine consistentes, ad contribucionem ipsam faciendam. auctoritate 
nostra, per censuram ecclesiastlcam et etiam alias, prout ex potestate officii tempo- 
ralis tibi commissi potes et poteris. appellacione postposita, compellendi, non obstan- 
tibus... facultatem concedimus. Datum apud Montemflasconem. vi idus augusti, 
pontificatus nostri anno sexto. • (Arch. départ, de Vaucluse, B 7, fol. 49 V.) 



xm l'académie de vaucluse yS 

États (i). Déjà môme, le !•' août précédent, en prévision de l'ar- 
rivée des ennemis dans les territoires d'Avignon et du Comtat^ il 
avait adressé au patriarche de Jérusalem une bulle pour obliger 
le clergé à contribuer aux dépenses que les nobles et les commu- 
nautés devaient faire pour la construction de leurs remparts, la 
fortification des localités utiles à garder et la solde des gens 
d'armes (2). 

Les habitants de Carpentras, dont nous connaissons déjà les 
préparatifs pour se mettre à Tabri d'une attaque de l'ennemi, ne 
s'étaient pas laissés prendre au dépourvu. Avec activité ils 
avaient continué leurs travaux, mais c'est surtout en juillet et 
août, pendant la période qui correspond aux plus grands ravages 
des gens de Compagnies, qu'ils augmentèrent leur matériel d'ar- 
tillerie : dès le 4 juillet, les syndics commençaient à payer de 
nouvelles armes ; le 5, ils donnaient un à-compte à l'industriel 
qui leur confectionnait des «stralhons»; le i5, ils dépensaient 
pour les accessoires de leurs grosses arbalètes ; au mois d'août, 
ils faisaient faire du charbon, sans doute pour leurs canons de 
garrots et brûlaient ainsi jusqu'à 32 quintaux de bois (3) ; ils 
achetaient 63o viretons et finissaient de payer 12 nouvelles arba- 
lètes (4). En même temps, ils faisaient charger les pierres de 
Notre-Dame du Grès, malgré l'opposition des chanoines de ce 
monastère qu'on fit tenir en respect par.des hommes d'armes, et 
on les porta à l'intérieur de la ville pour les employer à la défense 
des remparts (5). 

(I) Bulle publiée par M. Prou. p. iSg, n* lxxx. 

(a) Voici quelques extraits de cette bulle encore inédite : « Ad nostri pervenit apos- 
tolatus noticiam quod dilecti filii nobiles et universitates civitatis Avinionensis ac 
eciam civitatum, castrorum et locorum comitatus Venayssini et quorumdam aliorum 
locorum solitorum per rectorem dicti comitatus. qui est pro tempore, grubernari, ad 
nos et Romanam Ecclesiam pleno jure spectancium. nonnullis personalibus reali- 
busque periculis metu potenti cadere inconstantes, personis clericalibus et laycalibus 
dictorum civitatum, castrorum et locorum probabiliter venturis de proximo. merito 
formidandis, disponupt. Deo adjutore. resistere. seque pro posse viriliter deffendere, 
ac muros dictorum civitatum, castrorum et locorum compleri et reparari facere, 
prout fuit opportunum, quodque ad hujusmodi resistencie ac deffensionis faciende 
per stipendiarios conducendos, apparatum et fabricam murorum, non médiocres 
expense ipsi incumbunt... t (Arch. départ, de Vaucluse, B 7. fol. 48 v).— C'est  peu 
près la répétition de la bulle du i5 juillet 1367. adressée à Philippe de Cabassole 
pour le clergé de Provence. 

(3) f Solvi... in diminucionem carbonis quod fecerunt in domo Fratrum ad opus 
arthelharie... — Solvi... pro precio xxxii quintalium lignorum... pro faciendo car- 
bonem ad opus artelharie. • 

(4) Arch. de Carpentras, CC 154, fol. 9 v* et 10. 

|5) Idtm, CC 154. fol 1 14. — L'opposition des chanoines suscita des rixes : un 
homme fut blessé par Jacques Robert et soigné aux frais de la municipalité de 
Carpentras. {Idem, CC i53, fol. 94 v*; GC 154» fol. iiS et aaa v«.) 



*' X. > .* r' 



\. Vyi.'. 













T^ ^t f»4 connu cotts 




lei geps 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 77 

d'Orange de leur prochain passage, on est en droit de supposer 
qu'ils s'acheminaient dans la direction du pont du Saint-Esprit, 
pour repasser le Rhône et retourner en Languedoc (i). C'était 
sans doute là le commencenîent de l'exode obtenu à prix d'ar- 
gent. L'hypothèse ici présentée n'est pas sans quelque vraisem- 
blance : les auteurs du Petit r/ia/^mi/5 de Montpellier ont signalé, 
en effet, à l'époque des vendanges, le retour des Compagnies 
qui avaient assiégé Tarascon : elles se rendaient alors dans les 
environs de Toulouse (i). C'était la fin de l'expédition du duc 
d'Anjou en Provence, que clôtura le traité passé à Toulouse, au 
mois de novembre suivant, avec Roger de Saint-Sé vérin, comte 
de Mileto, représentant de la reine Jeanne [2); mais, hélas! ce 
n'était pas la fin des malheurs des Provençaux et Dauphinois, 
qui allaient reprendre leur querelle sanglante. Les Avignonais 
et Comtadins ne devaient pas non plus rester longtemps sans 
voir revenir sur leurs terres ces Bretons et autres gens de guerre 
dont ils avaient tant à redouter. 

En attendant, il leur restait à payer les dépenses occasionnées 
par cette dernière invasion ; il leur fallut surtout rembourser les 
sommes versées pour eux à deux reprises différentes, dans le 
courant de Tannée i368, à Bertrand du Guesclin et aux capitaines 
de son armée. L'établissement d'une taille, portant d'une part 
sur les habitants d'Avignon, d'autre part sur ceux du Venaissin, 
fut donc décidé; mais elle fut loin d'être acceptée sans difficulté 
par les intéressés. Elle donna même lieu à de vives protestations 
contre le recteur Philippe de Cabassole ; on lui reprocha d'avoir 
inutilement traité une première fois avec les routiers et de leur 
avoir donné de l'argent pour une sauvegarde qui n'avait pas été 
observée, on refusa de contribuer au remboursement des cinq 
mille florins versés au mois de mars i368, etc. La querelle vint à 
un tel point que le pape fut obligé d'intervenir : il couvrit com- 



(I) Perrin de Savoie, le Petit Meschin, Amanieu d'Ortigue, Bosonet de Pau et Nolt 
Pavalhon, les anciens compag^nons de du Guesclin devant Tarascon, furent encore 
enrôlés à Tautomne de id68 par le duc d'Anjou, pour la guerre contre les .'.nglais en 
Guyenne, Agenais. Rouergue et Quercy ; mais ils se rendirent tellement suspects par 
leur conduite équivoque que le duc les fit noyer ou exécuter le 11 mai i369. (Petit 
Thalamus» p. 384.) 

(f) € Jtem, en vendimias, totz losdichs capitanis foron entorn Montpeller am lurs 
Companhas, tornan de Tarascon et anan vers Tholosa, per que foron gardas de la 
vendimiade Montpeller... » [Petit Thalamus, p. 383.) 

(3) Petit Thalamus, p. 383. — Le chAteau de Tarascon ne fut rendu a la reine 
Jeanne que le 3o novembre 1369. (Idem, p. 384.) 



74 MÉMOIRES 

La principauté voisine d*Orange ne se crut pas non plus en 
sûreté. Le 9 août, le prince rappelait aux conseillers de sa ville 
capitale que lorsqu'on voit brûler la maison de son voisin, on 
doit craindre pour soi-même ; et comme les Bretons dévastaient 
alors le comté Venaissin, il était à redouter qu'ils n'étendissent 
leurs ravages. Il fit donc prendre certaines mesures de protection 
et pour commencer nommer un capitaine chargé de la défense(i). 
On organisa ensuite la garde des remparts et on y obligea les 
riches qui, à l'indignation des petites gens, voulaient s'en dispen- 
ser (2). Mais la principauté semble n'avoir pas eu le même traite- 
ment que le pays voisin : Perrin de Savoie et le bâtard de Com- 
minges, qui, le 20 août, prenaient soin d'avertir le prince de leur 
passage (3), ne témoignaient certainement pas l'intention de se 
conduire en ennemis. 

Ce qu'il y a de remarquable c'est que le gouvernement du duc 
d'Anjou, le Languedoc lui-même, eut à souffrir de cet état de 
choses. A la faveur des troubles qui étaient la conséquence de 
la guerre de Provence et des événements qui avaient suivi, des 
bandes de voleurs et de pillards s'étaient répandues dans la 
sénéchaussée de Beaucaire. Sur la plainte des communautés 
foulées et oppressées, le roi de France dut, le 6 août i368, abolir 
un subside de 12 deniers pour livre qui avait été décrété en Lan- 
guedoc (4). La désolation était donc générale. 

L'indignation d'Urbain V ne se contint plus : le i*' septembre, 
après avoir rappelé les conventions passées devant Tarascon, 
au mois de mars précédent, entre ses représentants, Bertrand du 
Guesclin et ses capitaines, après avoir rappelé leur serment 
solennellement prêté de respecter la personne et les biens de ses 
sujets, après avoir signalé au monde chrétien les excès dont ils 
s'étaient rendus coupables, il lança l'excommunication contre du 



(i) Arch. d'Orange, BB a, fol. 60 v* : « P^uit propositum in dicto conscilio pcr domi- 
num nostrum principem quod societates Britonorum sunt et currunt in comitatu 
V^enaycini. et qui vidit {sic) combruere hospicium sui vicini débet timere, et ideo 
consllium débet providere de remedio et specialiter de capitaneo... » Il est curieux 
d'observer que, les Set 9 août, le pape et le prince d'Orange, très éloignés l'un de 
l'autre, employaient les mêmes expressions pour obliger leurs sujets à se garder. 
Le pape disait, en efifet. dans sa bulle aux gens d'Avignon et du Comtat : t Prudentis 
est consilii pericula ne noceant precavere et cum proximi paries uratur, antequam 
ignis vicinus in flamraam Iranseat, domus proprie destruclivam, oportuna remédia 
providere. » 

(a) I<Um, BBa. fol. 6a. 

(3) Idem, ibidem. 

(4) Histoire générale de Languedoc» t. X, col. i389, n* 538. 



DE l'académie de VAUCLUSE 76 

Guesclin et tous ses complices, mit en interdit les cités, châteaux, 
villes, lieux et territoires où ils se trouvaient et où ils pourraient 
séjourner, les fit sommer de rendre dans le plus bref délai tous 
les biens dont ils s'étaient emparés appartenant aux Avignonais, 
Comtadins et fidèles de l'église d'Avignon, et défendit enfin à 
toutes personnes, princes, ducs, marquis, comtes, barons, séné- 
chaux, etc., d'entretenir commerce ou d'avoir des relations avec 
eux, de leur fournir des vivres ou autres secours, de les recevoir, 
de conclure alliance avec eux, etc. (i). 

A vrai dire, l'excommunication était peu redoutée des brigands 
qui s'étaient mis au-dessus de toutes les lois divines et humaines; 
mais elle avait quelquefois pour effet de les exaspérer et de les 
pousser à de nouveaux crimes. Malgré son indignation, Urbain V, 
dans l'intérêt de ses sujets, se crut donc obligé d'user de cir- 
conspection : il avait d'abord pris soin de ne pas mettre dans 
l'adresse de sa bulle le nom de Philippe de Cabassole, à qui il 
voulait réserver tous ses moyens d'action et ne pas créer d'ini- 
mitiés, mais seulement celui de l'official d'Avignon. Puis, il 
attendit quelques jours avant de promulguer l'anathème : il ne 
se décida que le 14 septembre à faire expédier la bulle du i*', et 
encore il s'en rapporta à l'expérience et à l'habileté de son repré- 
sentant pour la mettre à exécution (2). Elle fut cependant commu- 
niquée aux villes et communautés et il est probable que les 
dispositions en furent publiées. 

Mais déjà, pour faire cesser les déprédations et pour éloigner 
l'ennemi, on avait eu recours à d'autres mesures, dont l'emploi 
réussissait toujours : on avait acheté à prix d'argent le départ 
des Compagnies. Bien que les documents de cette époque aient 
subsisté en petit nombre et seulement d'une façon fragmentaire, 
on sait que des tailles furent imposées sur le clergé, les barons 



(0 Cette bulle, dont des exemplaires se trouvent aux Archives départementales de 
Vaucluse (B 7, fol. 5o V) et dans celles de la ville de Carpentras (EE i, n» i), a été 
publiée par M. Prou. p. iGi. Elle avait été connue par S. Luce, Froissart, t. Vn, 
p. XXVI, note i . 

(2) Ces appréhensions sont dévoilées par une lettre du camérier du pape adressée 
à Philippe de Cabassole, que l'on n'avait pas connue jusqu'ici. La voici en entier : 

t Reverendo patri in Christo domino Philippo, patriarche Jerosolimitano, rectori- 
que comitatus Venayssini et vicario Avinionis. Révérende pater et domine, micto 
vobis processus apostolicos in bulla alba interclusos, qui comictuntur officiali 
Avinionensi et non vobis, ne ipsos exequendo inimicicias acquiratis ; tamen non 
utatur eis, nisi vobis apparet expediens vel necesse. Altissimus vos conservet. 
Scriptum manu mea rudi apud novam civitatem Montisflaconis, die xiiii âieptembris.» 
(Arch. départ, de Vaucluse, By.fol. Sa.) 



76 MÉMOIRES 

OU nobles et les communautés du Venaissin pour rembourser les 
fraiç de la guerre et pour restituer à ceux qui les avaient avan- 
cées, non seulement les finances données à Bertrand du Guesclin 
devant Tarascon, mais encore celles qui furent versées à ses gens 
dans le but de leur faire évacuer le pays, traité inhumainement 
par eux (i). Les Avignonais, dans une supplique qu'ils adressèrent 
à Grégoire XI, parlèrent de la contribution de 5,ooo florins payée 
par Philippe de Cabassole au mois de mars i368, puis d'une 
seconde, dont le montant reste indéterminé et qui fut remise au 
môme du Guesclin en vertu d'un nouvel accord : ils avaient eu à 
payer leur part de Tune et de l'autre (2). Enfin, Urbain VI déclarera 
lui-même à la date du 18 janvier iSôg que les 5ociWa/e5, envahis- 
sant, au mépris de leur serment, les territoires d'Avignon et du 
Comtat, extorquèrent une forte somme d'argent (3). Voilà évidem- 
ment qui lève tous les doutes sur la réalité de la nouvelle rançon 
payée par les malheureux habitants de ces pays {4). 

Ce fut à Thabileté de Philippe de Cabassole que l'on dut d'ob- 
tenir Téloignement des routiers. Nul doute que pour se procurer 
l'argent comptant et pour traiter plus tôt avec les gens de Com- 
pagnies, il n'ait eu recours, comme on l'avait fait précédemment, 
aux riches banquiers avignonais. L'urgence des versements à 
eflectuer ne lui permettait guère d'agir autrement. En tout cas, 
il semble bien que les négociations entamées par lui avec les 
chefs de brigands déchaînés dans les États pontificaux, aient 
abouti vers le milieu d'août : si, en efiet, le 20 de ce mois, Perrin 
de Savoie et le bâtard de Comminges avertissaient le prince 

(i) < Pro solvenda et restituenda pecunia data domino Bertrando de Clequino. 
ejusque inquam societatibus, ut comitatum ipsum que[m] inhumaniter lacerabant. 
omnino dimiterent, et pro ali[i]s expensis factis in custodia et defensione dicti 
comitatus. » (Bibl. d'Avignon, ms. 2398, fol. 25 V.) 

(2) Mérimée, op. cit., p. 582 et 583. — La copie reproduite par cet auteur, qui la 
tenait de M. Paul Achard, est extrêmement défectueuse et par endroits tout à fait 
incompréhensible. Il est reg-rettable que la cote n'en ait pas été donnée pour qu'on 
en fasse la vérification. 

(3) Voir ci-après le texte de cette bulle. 

I4) L'auteur de la Chronique rimée de Bertrand du Guesclin, qui n'a pas connu tous 
ces événements, fait dire au duc d'Anjou, lorsque son héros le quitte (vers 14066 
A 14068) : 

€ ... Vous alez bien parlant. 
De moy emporterez .x. mile maintenant ; 
Et au pape de Romme irai si exploitant, 
Que .XX. mil en arez.... > 

Évidemment, c'est un écho des exactions de Bertrand du Gueschn et de ses gens 
dans le comté Venaissin. 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE 77 

d'Orange de leur prochain' passage, on est en droit de supposer 
qu'ils s'acheminaient dans la direction du pont du Saint-Esprit, 
pour repasser le Rhône et retourner en Languedoc (i). C'était 
sans doute là le commencement de l'exode obtenu à prix d'ar- 
gent. L'hypothèse ici présentée n'est pas sans quelque vraisem- 
blance : les auteurs du Petit rAa/^mw5 de Montpellier ont signalé, 
en effet, à l'époque des vendanges, le retour des Compagnies 
qui avaient assiégé Tarascon : elles se rendaient alors dans les 
environs de Toulouse (i). C'était la fin de l'expédition du duc 
d'Anjou en Provence, que clôtura le traité passé à Toulouse, au 
mois de novembre suivant, avec Roger de Saint-Sévérin, comte 
de Mileto, représentant de la reine Jeanne (2); mais, hélas! ce 
n'était pas la fin des malheurs des Provençaux et Dauphinois, 
qui allaient repi^endre leur querelle sanglante. Les Avignonais 
et Comtadins ne devaient pas non plus rester longtemps sans 
voir revenir sur leurs terres ces Bretons et autres gens de guerre 
dont ils avaient tant à redouter. 

En attendant, il leur restait à payer les dépenses occasionnées 
par cette dernière invasion ; il leur fallut surtout rembourser les 
sommes versées pour eux à deux reprises différentes, dans le 
courant de Tannée i368, à Bertrand du Guesclin et aux capitaines 
de son armée. L'établissement d'une taille, portant d'une part 
sur les habitants d'Avignon, d'autre part sur ceux du Venaissin, 
fut donc décidé; mais elle fut loin d'être acceptée sans difficulté 
par les intéressés. Elle donna même lieu à de vives protestations 
contre le recteur Philippe de Cabassole ; on lui reprocha d'avoir 
inutilement traité une première fois avec les routiers et de leur 
avoir donné de l'argent pour une sauvegarde qui n'avait pas été 
observôe, on refusa de contribuer au remboursement des cinq 
mille florins versés au mois de mars i368, etc. La querelle vint à 
un tel point que le pape fut obligé d'intervenir : il couvrit com- 



(I) Perrin de Savoie, le Petit Meschin, Amanieu d'Ortigue, Bosonet de Pau et Koll 
Pavalhon, les anciens compagnons de du Guesclin devant Tarascon, furent encore 
enrôlés à Tautomne de i368 par le duc d'Anjou, pour la guerre contre les Anglais en 
Guyenne, Agenais, Rouergue et Quercy; mais ils se rendirent tellement suspects par 
leur conduite équivoque que le duc les fit noyer ou exécuter le 11 mai i369. {Petit 
Thalamus, p. 384.) 

(t) c Item, en vendimias, totz losdlchs capitanis foron entorn Montpeller am lurs 
Companhas, tornan de Tarascon et anan vers Tholosa, per que foron gardas de la 
vendimia de Montpeller... » {Petit Thalamus, p. 38a.) 

(a) Petit Thalamus, p. 383. — Le chAteau de Tarascon ne fut rendu a la reine 
Jeanne que le 3o novembre 1369. {lOem, p. 384.) 



78 MÉMOIRES 

plètement son représentant, approuva tout ce qu*îl à^^ait fait 
dans rintérôt du pays (i) et obligea les récalcitrants à payer 
la quote-part qui leur revenait (î8 janvier iSôg) (2). La commu- 
nauté de Carpentras avait encore émis une autre prétention : 
celle de faire percevoir la taille à laquelle elle était taxée par des 
syndics à elle, qu'elle avait présentés à l'acceptation de Philippe 
de Cabassole. Elle fut déboutée elle aussi de sa demande et 
Urbain V défendit expressément au recteur d'y consentir (3). 
Pour briser toutes les résistances, le pape renvoya même à ce 
dernier toutes les appellations qu'on lui avait transmises, en lui 
donnant le pouvoir de les juger (4). 
On ignore cependant le montant exact des tailles levées sur le 

(1) Philippe de Cabassole avait, par sa conduite sage et prudente, si bien mérité la 
reconnaissance du pape que celui-ci le comprit dans la promotion de cardinaux qu*il 
fit le aa septembre i368. Deux jours après, il le confirma dans son office de recteur 
d'Avignon et du Comtat. (Arch. départ, de Vaucluse, B 7, fol. Sa V; Cottier, p. 76.) 

(a) Voici le texte de cette bulle, qu'on me permettra de transcrire ici presque en 
entier, en raison de l'intérêt qu'elle présente : 

c Urbanus... Philipo, sancte Romane Ecclesie presbiteri cardinali... rector^ 
salutem... Ad nostrum pervenit auditum quodcum dudum nonnulle gentes perverse 
appellate sociales, quas in unum sub ducatu illicito Bertrand! de Claqulno, comitis 
Transtamere, malignandi confederavit voluntas, comitatus Provincie et Forcalquerii 
invasissent et civitatem Avinionensem et comitatum Venayssini, nobis et Ecclesie 
Romane in médiate subjectos, minarentur invadere et predari. quod statim per eos 
âeri, nisi per cives et incolas dictorum civitatis et comitatus magna peccunie quan- 
titas daretur eisdem, probabiliter timebatur, tu, tamquam vir circumspectione pre- 
ditus, futuris volens obviare periculis atque dampnis, que ex ostilitate dictarum 
gencium erant verisimiliter secutura, consideransque quod pro deifensione patrie 
tibi et dictis civibus et incolis non audeat (sic pour erat) resistendi facultas. eligendo 
minus malum, pro redimendo pcriculosam nimium et damnosam vexaclonem 
ipsorum civitatis et comitatus, receptis ab ipsis Bertrando et gentibus suis iide ac 
promissionibus oportunis quod civitatem et comitatum eosdem non offenderent, eis 
quinque milia florenorum auri solvisti, de que luain circumspectam prudenciam 
coramendamus. Cum autem, sicut super audivimus, hujusmodi florenorum quanti- 
tatem inter cives civitatis et incolas comitatus prefatorum fîdeliter et provide duxeris 
dividendam, sed nonnuUi ex eis in ipsa quantitate florenorum. ut prefertur, soluta 
pru rata eos contingente ex eo coniribucre cuniradicunt. quod eidem Bertrandus et 
gentes sue, eadem quantitate recepta, contra premissam fidem venientes, dictos civi- 
tatem et comitatum, ut extorquèrent, prout extorserunl, a te ac civibus et incolis 
predlctis, majorem peccunie quantitatem, mullipliciter vexaverunt, nos considérantes 
quod in hoc nulla intervenit tua culpa, sed infidelitas iniquorum, circumspectioni 
tue per apostolica scripta mandamus, qualhinus prefatos cives et incolas ac alios 
contradictores ad contribuendum occasione predicta pro rata eos, ut predicilur, 
contingente, per censuram ecclesiaslicam et temporalem districtionem, auctoritate 
nostra, postposita interpellacione, compellas, non obstantibus.... 

« Datum Rome, apud Sanctum Petrum, xv kalendas februarii, pontificatus nostri 
anno septimo. » (Archives départ, de Vaucluse, H 7, fol. 54 v.) 

(3) Bulle du 18 ianvier 1369. [Idem, ibidem, loi. 53 v.) 

(4) Bulle du même jour. {Ibidem, fol. 64.) 



DE l'académie de VAUCLUSE . 79 

pays, tant pour obtenir l'éloignement des Bretons que pour 
solder les dépenses faites à leur occasion. Un débris de vérifica- 
tion des comptes de Raymond de Majorque, le collecteur général 
de ces impôts, daté du 22 mars iSôg, semblerait indiquer qu'ils 
s'élevèrent seulement à la somme de 6,200 florins environ (i). Mais 
il y eut certainement plus, si Ton remarque le total de la subven- 
tion fournie par la seule ville de Carpentras et la date de ses 
différents versements : le 20 janvier 1369, ^''^ donna en à-compte 
100 florins d'or; le 21 avril suivant, elle versa le double; le 
24 mai, 65 florins; le 8 juin, encore 200 florins (2). Et ce ne fut 
pas tout : les premières tailles imposées n'ayant pas suffi à 
rembourser les avances faites pour la libération du pays, il 
fallut en établir une dernière, pour laquelle la même commu- 
nauté de Carpentras versa, le 5 juin 1370, i3S livres, et le 
i3 novembre suivant 3o 3\ 



(1) « Et dicli domini auditores audiveruni et diligenter ovaminaverunt computum 
et rationem dictarum talliarum a dicto magistro Raimundo, quo audito, fecerunt 
eidem domino thesaurario relationem sicuti in dictis computis invenerunt, videlicet 
quod tallia dicto clero pro quinta parte iniposita ascendebat ad summam mille 
ducentorum trium n(>ien«)rum. De quibiis idem may'ister Rainuindus levavit mxxiii 
florenos. » (Bibl. d'Avignon, ms. 2^98, fol. 26.} 

(2) Je ne puis moins faire que de reproduire ce chapitre des comptes du syndic 
trésorier de Carpentras, pour l'année coinmençant en septembre 1 368 et finissant en 
octobre 1369: 

« Sequntur soluciones per me facte pro subsidio domini Bertrandi de Clequinis. 
tam nobilium, popularium, quam clericorum solutorum civitatis Carpentoractensis. 

« Et primo, anno Domini MCCCLXVIII et die xx januarii, solvi magistro Ray- 
mundo de Majoricis, exactori tallie imposite in comitatu Venaissini pro domino 
Bertrando de Clequinis, in diminucionem dicte tallie et eorum in quibus universitas 
Carpentoractensis extitit talliata, c flor. auri, valentes cxx Ib. 

c Item, anno Domini MCCCLXIX et die xx prima aprilis, solvi venerabill viro 
domino lUesaurario in diminucionem tallie subsidio domini Bertrandi de Clequinis... 
ce flor. auri, valentes ccxl Ib. 

< Item, anno quo supra et die xxim» maii, solvi domino thesaurario Venaissini, pro 
parte tangente clericos solutos civitatis Carpentoractensis de tallia imposita clero 
comitatus predicti pro solvenda redemptione data domino Bertrando de Clequinis et 
ejus societatibus, ut comitatum Venaissini, quem immaniter iacerabant, omnino 
dimittereni... lxv flor.. valentes lxxvui Ib. 

c Item, anno quo supra et die vui» mensis junii, solvi ego diclus Andréas [de 
Plana) magistro Raymundo de Majoricis. notario. collectori tallie indicte in comitatu 
Venaissini pro expellendo domino Bertrando de Clequinis et ejus societatibus, pro 
resta tallie in qua in dicto subsidio universitas Carpentoractensis extitit 

talliata "■ cclb. • 

(Arch. de Carpentras, CC i54. fol. 229 V et 23o.) 

(3) c Scquitur solucio per me facta pro tallia domini Bertrandi de Clequinis. 

fl Et primo, anno Domini MCCCLXX et die v junii. solvi domino Audoyno de Acra, 
thesaurario Venaissini, commissario ad infrascripta deputato una eu m revcrendo 
patrc domino Stephano, abbatc Sancii Victoris Massilie, régente comitatum Venais- 



8o MÉMOIRES DE L'aCADÉMIE DE VAUCLUSE 

Je n'irai pas plus loin : les quelques pages que je viens 
d'écrire (i) suffiront, je pense, pour donner une idée des cala- 
mités qui, de i365à i368, fondirent sur les États pontificaux de 
France. Elles corrigeront aussi et compléteront, du moins c'est 
mon ambition, les récits que l'on avait jusqu'ici donnés sur les 
deux passages ou les deux séjours de l'illustre Bertrand du 
Guesclin dans le voisinage de la ville d'Avignon et du comté 
Venaissin. La légende du héros populaire n'y paraît pas dans le 
jour flatteur où l'on est habitué à le considérer, mais à qui la 
faute ? Il ne faut d'ailleurs pas juger les hommes du XIV* 
siècle, fussent-ils des du Guesclin, avec les idées que nous avons 
actuellement. Les gens de guerre de cette époque oubliaient vite 
leurs serments et n'avaient guère l'habitude de respecter le bien 
d'autrui : ne les faisons donc pas «prudhommes malgré eux», 
ainsi qu'aurait dit Bertrand lui-même (2) et considérons-les tels 
qu'ils étaient, avec leur rudesse presque barbare, leur mépris de 
la vie humaine et leur àpreté au gain (3). 

L.-H. Labande. 



sini, a sede apostolica deputato ad exigendum talliam indictam noviter pro facto 
domini Bertrandi de Clequinis pro tailla noviter pro premissis in ipso comitatu 
indicta, in quibus nobiles et populares dicte civitatis talliati existunt et pro qua 
fueram monitus, solvi inquam pro premissa tailla cxxxv Ib. > (Arch. de Carpentras, 
ce i55, fol. 19 V.) 

i3 novembre : t Solvi domino Stephano Barnerii, presbitero et collectori cujusdam 
tallie pro clericis solutis pro subsidio occasione societatum domini Bertrandi de 
Cliquinis, videlicet pro parte tangente dictos clericos solutos hujus civitatis antedicte 
Carpentoractis, xxx'lb. • {Idem, CC i56, fol. 44) 

(1) Elles rentreront plus tard dans une histoire d'Avignon et du comté Venaissin 
aux XIV» et XV siècles que depuis longues années j'ai Tintention de rédiger. 

(a) C'est le mot que Cuvelier met dans sa bouche, lorsqu'il répondit en novembre 
1365 au cardinal délégué vers lui par Urbain V (vers 7578;. 

(3) En terminant, je ne veux pas manquer de remercier mon excellent collègue 
M. Liabastres, bibliothécaire et archiviste de Carpentras, qui m'a donné toutes 
facilités pour consulter le précieux dép<^t dont il a la garde. 



Séances de l'Académie. 



PROCÈS -VERBAUX. 



Janvier-Fêvrier-Mars. 

Séance du 7 janvier 1904. — Présidence de M. G. Bourges, président. 

Présents : MM. Bourges, Labande, Alphant. Tourtet, Remy Roux, Didiée, Mouzin, 
Biret, Poupart, abbé Aurouze, Victor Bonnet, de La Boulie, Nourry, Penne, Limasset, 
Capeau, Manlvct, abbéGrimaud. l'ayol, abbé Vallat, abbé Levezou. abbé Durand, 
Fichaux, Reboulct, Pansier, Châtelet. 
Le procés-verbal de la précédente séance est lu et adopté. 
Sont présentés aux suffrages de l'Académie comme membres titulaires : 
MM . G. de Manteyer, archiviste-paléographe, ancien élève de l'École française de 
Rome, à Manosque, par MM. l'abbé Requin, le marquis ' de Monclar et 
Labande ; 
le D' Antoine Sabatier, professeur agrégé à la Faculté de médecine de Lyon, 

officier de l'Instruction publique, par MM. Faure, Berger et Gourjon ; 
Boch, architecte à Avignon, par MM. Didiée, Châtelet et Labande. 
M. le Président annonce qu'il a reçu de M. le curé de Venasque une demande de 
subvention pour lui permettre de continuer ses fouilles archéologiques. Une subven- 
tion de 5o fr. lui est votée, à la condition que les objets trouvés soient déposés dans 
une collection publique. 

Lecture est donnée d'une lettre de M. Pellat, qui s'excuse de ne pouvoir assister à. 
la séance et se rappelle au souvenir de ses collègues. 

M. le Président fait connaître que M. Paul Geoffroy a découvert des antiquités 
à Fauconnette près Carpentras et demande que l'Académie envoie des délégués pour 
examiner ses trouvailles. 

Communication est donnée d'une circulaire de la Société des Antiquaires de 
France, relative aux fêtes qu'elle organise à l'occasion de son centenaire. L'Académie 
décide de s'y faire représenter par M. Labande. 

M. le Président dépose sur le bureau un volume de poésie {Fleurs dt mes jours) offert 
par l'auteur, M. le D' Sabatier, à la bibliothèque de l'Académie. 

En l'absence du trésorier, M. Labande donne lecture du compte des recettes et 
dépenses de l'Académie pendant l'exercice 1903 et du budget de 1904, reproduits ci- 
aprèb en annexe. 

Conformément aux statuts, une commission de trois membres est nommée pour la 
vérification de ces comptes : elle est composée de MM. Alphant, Laval et Poupart. 

On procède ensuite aux élections pour le renouvellement du Bureau. Aux termes 
du rvîglement, le président, les vice-présidents et les présidents de section ne sont 
pas rcéligibles dans la même charge. Le vote a lieu au scrutin secret. 



^<2 MKMrjiRES 

M. de Vissac esl élu président de TAcadémie, au premier tour de scrutin, par 
20 voix sur 25 votants. 

MM. Joleaud et Paul, par 22 voix, sont élus vice-présidents au premier tour de 
scrutin. 

MM. Pansier, de Terris et Remy Roux sont également élus au premier tour, prési- 
dents de section par 22, 19 et 18 voix. 

Par un assentiment oral et unanime, TAcadémie confirme la proposition du 
Bureau de maintenir MM. Labande et Bonnecaze daos leurs Ibac-tions de secrétaire 
général et de trésorier et nomme M. Chàtelet secrétaire des séances. 

M. Didiée est ensuite élu bibliothécaire-archiviste par 19 voix sur 23 votants. 

Le Bureau de l'Académie pour les années 1904 et 1905 est donc ainsi composé : 
Président : M. de Vissac. 

Vice-Présidents : MM. Joleaud et Paul. 

Présidents de section: M. Pansier, pour les sciences. 

M. de Terris, pour l'histoire. 
M. Remy Roux, pour les arts. 
Secrétaire général : M. Labande. 

Secrétaire : M. Chapelet. 

Trésorier : M. Bonnecaze. 

Bibliothécaire-archiviste: M. Didiée. 

I^ séance est terminée par la lecture du troisième acte de Cytharis. Les beaux vers 
de M. Mouzin recueillent les applaudissements unanimes de l'Académie. 

MM. de jManteyer, Sabatier et Boch sont élus membres de TAcadémie à Tunani- 
mité des membres présents. 



Annexc. 

1. — Compte des recettes et dépenses de F Académie pen4ant f année 1903. 

RECETTES. 

Solde en caisse au !•' janvier 1903 35 i^ 

190 cotisations à 1 2 francs 2 . 280 

2 cotisations à 6 francs c.«> 12 

I cotisation à 10 francs 10 

Timbres de quittance recouvrés 8 80 

Subvention de la ville d'Avignon 200 

Subvention du Conseil général de Vaucluse 100 

Subvention du Ministère de l'Instruction publique 5oo 

Rachat de cotisation de Miss Ou^en Sheakspeare i5o 

Rachat de cotisation de M. le docteur Pansier 200 

Remboursement de la contribution due par les auteurs pour frais des 

planches illustrant leurs travaux 181 

Ventes de fascicules 28 

— d'un catalogue Espérandieu 6 

Intérêts de 45 fr. 3 •/• legs Dufossé 45 

Total 3.755 41 



DE l'académie de vaucluse 83 



DÉPENSES. 

Impression et illustration des Mémoires 

ÉtreaUes 

Frais d'encaissement des cotisations 

Achat de timbres divers 

Loyer du local des réunions du Bureau 

Appointements de M. Binon 

Frais d'envoi des Mémoires ■» 

Frais de convocation 

PrixDufossé (au lycée) 

Drap aux obsèques de MM. Saunier et Laroche 

Achat de la table des Studj de TAccademia di conferenzc storico-giuri- 

dictie 

Note Noséda (un cadre) 

Frais de bureau et de correspondance de M. le Secrétaire général. 

Facture Armand, relieur 

Achat d'une obligation P.-L.-M. fusion ancienne n* 5.483.901 

Solde en caisse 

Total 3.755 41 



II. — Actif de V Académie au /"janvier 1904. 

Capital de 45 fr. 3 •/. legs Dufossé (n" des titres n- 973.453 (5 fr ). 870.488 

(10 fr.). 1.759.530 (3ofr.) 1.500 » 

Une obligation P.-L.-M. (n' 5.483.901) 462 65 

Livret de la Caisse d^épargne i .3o6 87 

5oIde en caisse 885 86 



,845 


55 


i5 


» 


45 


75 


33 


25 


200 


tt 


70 


» 


64 


75 


17 


65 


48 


50 


3 


» 


6 


25 


12 


» 


49 


70 


6 


5o 


463 


65 


885 


86 



Total 4.155 38 



m. — Budget pour 1904. 
RECETTES. 

Solde en caisse 885 86 

Quittances à recouvrer : 6 à 13 fr., 3 à 6 fr 84 » 

200 cotisations à 13 fr. et deux abonnements 2.424 » 

5 cotisations à 6 f r 3o » 

Subvention de la ville d'Avignon 200 » 

Subvention du Conseil général 100 » 

Intérêts du legs Dufossé 45 » 

Vente de fescicUles 200 » 

Intérêts de l'obligation P.-L.-M 14 40 

Intérêts des 45 francs de rente sur l'État 45 » 

Total 4.038 26 



84 



MEMOIRES 
DÉPENSES 



Étrennes ,5 

Frais d'impression des Mémoires i ,700 

Impression du Cartulaire de Richerenches 1 .300 

Frais d'envoi des Mémoires 80 

Frais d'encaissement des cotisations et timbres divers 90 

Loyer du local du Bureau aoo 

Appointements de M. Binon 70 

Frais de convocation 20 

Prix Dufossé ^ 

Prime d'assurance 6 

Frais de bureau de M. le Secrétaire général 60 

Dépôt À la Caisse d'épargne 100 

Accumulation des intérêts n'ayant aucune aflfectation spéciale 59 40 

Dépenses imprévues 100 » 

Solde en caisse i8a 76 



Total 4.oa8 a6 



Séance du 4 février 1904. — Présidence de M. Bourges, président. 

Présents : MM. Bourges, Labande, Pansier, Alphant, Laval, de Vissac, abbé Gri- 
maud, Larché, Michei-Béchet, Carre, de La Boulie, Limasset, Remy Roux, Réguis, 
Capeau, Joleaud, Duprat, Didiée, Bayol, Biret, Chobaul et Châtelet. — Excusés : 
MM. Henri Paul et de Terris. 

Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté. 

L'ordre du jour appelle l'installation du nouveau Bureau. M. Bourges, avant de 
céder le fauteuil de la présidence, fait connaître, dans une charmante improvisa- 
tion, combien il est heureux du choix fait par l'Académie qui a appelé à la prési- 
dence M. de Vissac. Il fait l'éloge des membres du nouveau Bureau et de notre 
Secrétaire général, dont le dévouement à l'Académie facilite considérablement la 
tâche du président. 

Il invite ensuite M. de Vissac 4 prendre place à la présidence. Notre nouveau 
Président remercie ses collègues de l'honneur qu'ils lui ont fait en le mettant à la 
tête de notre Société. Il les assure de son profond attachement à l'Académie. Il 
insiste sur l'utilité de multiplier les excursions et d'ouvrir ou tout au moins entrou- 
vrir nos séances au public. Il termine par l'éloge des membres du nouveau Bureau. 

Il donne ensuite la parole à M. Laval pour la lecture du rapport de la commis- 
sion de vérification sur l'état des finances de l'Académie. M. Laval est heureux de 
pouvoir annoncer à ses collègues que jamais notre état financier n'avait été aussi 
prospère. Indépendamment du capital de i,5oofr. légué par M. le D' Dufossé, nous 
possédons i obligation du chemin de fer de 5oofr. et i,5oo fr. à la Caisse d'épargne. 
Avec les cotisations et les subventions diverses, nous avons un revenu de 4,028 fr. 
pour l'année 1904. 

Il est ensuite décidé, sur la proposition de M. Laval, d'inscrire le n' des titres de 
rente sur les comptes et budgets publiés chaque année, et d'ajouter chaque année 
les i5 fr. que rapporte l'obligation du chemin de fer et les intérêts du livret de la 
Caisse d'épargne à la somme de 100 fr. destinée à la formation du fonds de réserve. 

Enfin, M. Laval fait connaître que la commission propose d'approuver les comptes 
financiers de l'Académie et de voter des félicitations à son trésorier. Cette proposi- 
tion est approuvée à l'unanimité. 

Sur la proposition du Bureau, l'Académie de Vaucluse, ayant à son fonds de 



DE l'académie de vAucluse 85 

réserve, avec le dépôt de 1904, une somme supérieure à i.5oo francs, donne pouvoir â 
M. le trésorier de retirer de la Caisse d'épargne les fonds nécessaires à l'acquisition 
d*un titre nominatif de 45 francs de rente 3*/* sur TÉtat français. 

M le Président fait ensuite connaître qu'il a reçu des lettres de remerciements de 
M. le D' Sabatier et M. de Manteyer, élus membres de l'Académie dans la précédente 
séance. M. le Secrétaire général annonce en outre que M. de Manteyer a racheté sa 
cotisation. 

M. le Président invite ensuite M. le D' Pansier à donner lecture de son étude bio- 
bibliographique sur Jean de Tournemire (1320-14 10). Notre collègue donne des détails 
très intéressants sur la vie de ce médecin qui honora la vieille Université de Mont- 
pellier. Il nous le montre dès 1348 pratiquant la médecine à. Montpellier, devenu déjà 
en i364 personnage important, soutenu par la Faculté lors de l'élection du chance- 
lier. Enfin, il nous le montre tour à tour médecin de Grégoire XI et de Clément VU 
et professeur à Montpellier. Il termine son étude par une analyse rapide des divers 
ouvrages de Jean de Tournemire et donne lecture d'un fragment de l'un d'eux qui 
contient le récit de la maladie dont fut atteinte sa fille. Il diagnostique un cancer et le 
juge incurable. M. le D' Pansier nous fait ainsi assistera un cours de médecine au 
XIV siècle. 

M. Joleaud prend ensuite la parole ; il remercie tout d'abord ses collègues de l'hon- 
neur qu'ils lui ont fait en l'élevant à la vice-présidence. Il rend compte ensuite de 
l'excursion géologique de l'Académie à Vaison. Il tient à dire que l'étude de la 
géologie mérite d'attirer l'attention des archéologues et des artistes, puisque les ma- 
nifestations artistiques d'un pays sont fonctions géologiques du sol. Il aborde ensuite 
son sujet, montre le grand intérêt que présente la géologie des environs de Vaison, 
où se rencontrent, ainsi que l'indique la direction des failles observées, les deux 
systèmes des plissements jurassiques et pyrénéens. Enfin, il dépeint rapidement 
l'aspect de la région durant les diverses transgressions de la Méditerranée néogène, 
et étudie les divers dépôts laissés par la mer burdigalienne, helvétienne et pliocène. 
M. Joleaud termine en manifestant le désir de voir devenir plus fréquentes les 
excursions qui permettent la discussion sur place des phénomènes géologiques. 

M. de Vissac remercie le conférencier et lui donne l'assurance que de nouvelles 
excursions auront lieu cette année. 

L'heure étant trop avancée, la lecture de M. le D' Réguis sur la Flore de Vaucluse 
est renvoyée à la prochaine séance. 



Séance du 3 mars igo4.— Présidence de M. de Vissac, président. 

Présents: MM. de Vissac, Labande, Pansier, Aurouze, Gouell, Limasset, Alphant, 
Michel-Béchet, de Terris, Didiée, Réguis, Larché, Joleaud, Naquet, abbé Trouillet et 
ChAtelet. 

Sont présentés aux suffrages de l'Académie pour être membres titulaires : 
MM. le D' Augros, à Lyon, par MM. Faure, Courjon et Berger; 

Alfred Blanc, professeur adjoint au Lycée d'Avignon, par MM. Bourges, Réguis 

et Châtelet; 
le D*^ Tallet, à L'Isle, par MM. Laval, Savournin et Laffont. 

M. le Secrétaire général donne lecture d'une circulaire annonçant l'ouverture à 
Athônes en igoS d'un congrès archéologique international et invitant les sociétés 
savantes françaises à s'y faire représenter. M. Labande ajoute qu'il a demandé à 
Athènes des renseignements complémentaires pour permettre à l'Académie de par- 
ticiper A ce congrès. 

M. le Président fait connaître qu'en juillet prochain tombera le 6oo* anniversaire 
de la naissance de Pétrarque. 

« Pétrarque, dit-il, appartient à l'histoire de l'humanité par ses œuvres immor- 



86 MÉMOmES DE l'aCADÂMIE DB VA4JCLUSB 

telifts. Il appartient à Phistoirâ de la civilisation italienne parce que, avec Dante et 
Boccace. il a été un des précurseurs de la Renaissance, un des créateurs de la litté- 
rature italienne. Mais il appartient aussi à notre histoire locale par un séjour pro- 
longsé, quoique intermittent» de aa ans parmi nous, par l'éclosion dé son génie, par la 
préparation de ses ouvragres; il nous appartient enfin par ses amours. • 

M. de Vissac rappelle que, sous l'empire de ces considérations, l'Athénée de Vau- 
cluse crut devoir, en 1804, réveiller à Avignon le souvenir un peu assoupi de l'illustre 
poète toscan devenu par Texil un iils de la Provence, célébra solennellemont le 
cinquième centenaire de sa naissance et érigea à Vaucluse un monument commèmo^ 
ratifv Plus tard, en 1874. des fêtes grandioses eurent lieu encore, en Avigpnon, à 
l'occasion du cinquième centenaire de la mort du canzoniere. Dèl'ensembtë deoes 
faits, ajoute le Président, résulte une tradition déjà séculaire, que le Bureau propose 
à l'Académie de perpétuer. 

Sans le cas où la proposition agréerait à l'assemblée, des fêtes littéraires seraient 
orj|pai)i8ées,.sur Tinitiative de l'Académie, le samedi 16 et le dimanche 17 juillet* pro* 
Chain, tant à Vaucluse qu'à Avignon, concordant avec celles qui se préparent è 
Arezzo et dans plusieurs autres villes d'Italie, à la même époque. Aces fêtes seraient 
conviés des délégués de toutes les sociétés littéraires et scientifiques de la région 
du Sud-Est. 

M. de Vissac met donc aux voix' la question suivante: c La. Société accepte- t^elle en 
principe Vidée de la célébration académique du 6~* centenaire de la nalBSftnoe de 
Pétrarque?» La proposition est acceptée à l'unanimité des membres présents: Il t&t 
décidé que le Bureau, auquel sont adjoints MM^ Bourges, Laval, Mou«in et Carre, 
anciens présidents, sera chargé de l'organisation des fêtes. 

L'ordre du jour appelle la lecture de M. Réguis sur la Flore de Provence. Notre 
collègue entretient l'Académie d'un groupe de champignons supérieurs (les Amanites), 
représenté en Provence par une quarantaine d'espèces, parmi lesquelles quelques- 
unes sont très vénéneuses. La grande confusion de formes qui règne dans ce 
groupe, du fait de leurs grandes ressemblances, a incité notre collègue à mettre un 
peu d'ordre dans ce genre. Il dépose sur le bureau son manuscrtt, résultat de trente 
années d^observations. M^ Réguis témoigne le désir de voir l'Académie tenter la 
vulgarisation de la flore mycologique de la région. 

Mi Labande donne ensuite lecture de son étude sur du Guesclin dans le comté 
Venaissin. Il fait le tableau du pays en i365 à la nouvelle de ^arrivée des gens 
conduits par du Guesclin, qui s'était engagé envers le roi de France à emmener hors 
de France ces' bandes de pillards. Avignon n'eut pourtant pas à supporter de siège, 
mais ses habitants et ceux du Comtat furent obligés de verser de grosses sommes. 
Les routiers demeurèrent encore de longues années dans la ré^on, pressurant les 
villes et les villages qu'ils menaçaient de leurs attaques. La campagne fut abandon- 
née et toutes les bourgades élevèrent des fortifications pour se mettre en sûreté ; 
c'est- là' que les paysans venaient se réfugier à la nouvelle de Tarrivée des routicrs^ 
dans le voisinage. 

A la fin de la séance, MM. Augros, blanc et Tallet sont proclamés sans opposition 
membres titulaires de l'Académie. 

Le Secrétaire, Le Prisi4€nt, 

C. Chatelet, Baron m. 06 Vi6«ac. 



Volumes et Fascicules 

RxBÇUS PAR L'ACADÉMIE 
Depuis la putHcation du dernier fascicule des Mémoires. 



I. — £Avoi» du SSiniatère de riastruotion p4abliq.tte 

I" Comité des travaux hisioriq-ues et sclenHfiques : Bulletin historique «tplwlote- 
g>iqiie, 1903, n*' ! et îï. — Recueil de documents relatifs k la convocation ées étwts 
généraux de 1789, •p»'' Armand Brctte, tome TII : Atlas des bailliages ou juridictions 
assimilées ayant formé unU^ élecloraie en 1789. - Bibliosrraphie des travaux histo- 
riques et archéologiques, publiés par les Sociétés savantes de la France, par Robert 
de Lasteyrie, t. IV, 3* livr. — 3- Bulletin archéologique du Comité des travaux 
historiques et scientifiques, 1903, 3* livr. 

II. — Dons des auteurs 

!• M. le D' p. Pansier, membre titulaire de TAcadémie : Collectio ophtnlmologica 
veterum auctorum, fasc. III; — La pratique de Tophthalmologie dans le moyen 
âge latin. ^ a* M. Antoine Sabatier, membre titulaire de l'Académie : Fleurs de mes 
jours ; Casques fleuris; Sonnets en lige ; La Maoola; Le Baiser de Jean. — 3» M. A. 
Caziot: Sur le genre Bauxia (Extrait du Journal de conchyliologie, vol. LI). — 4* M. le 
D' Florence, membre titulaire de TAcadémle : Histoire de la découverte de la circu- 
lation du saag& Lyon, par le D' Jacquinot.— 5* M. F.-N. Nicollet. professeur au Lycée 
d'Aix : Les derniers Membres de la famille d'Orange-Montpel lier et leurs possessions 
dans le (lapençais — 6* M. Alfred Picard, commissaire général de l'Exposition 
universelle de 1900 : Rapport général administratif et technique sur l'Exposition 
universelle internationale de 1900, t. I à VII et atlas de plans généraux. — 7* M. Gus- 
tave Naquet, membre titulaire de l'Académie : Développement et défense du com- 
merce extérieur de la France, programme de réformes. — 8« M. Destandau, membre 
titulaire de l'Académie : De l'Enseignement aux Baux avant 1789. 

III. — Envois des Sociétés correspondantes. 

Boletin del Museo National de Mexico, tom. I, n** 4 à 8. — Anales del Museo 
nacional de Mexico, tom. I, n" 3 et 4. — Société des Archives historiques de Sain- 
tonge et d'Aunis : Bulletin, t. XXIV. i" et s* livr. — Revue savoisien ne, 1903, 4* fasc; 
1904, i« fasc.— Société archéologique et historique de l'Orléanais: Bulletin, t. XIII, 
fasc. î à 4. — Revue des langues romanes, t. VII, n" i et 2. — Accademia di confe- 
renze storico-giuridiche, 1903, fasc. 3 et 4. ^ Société archéologique de Béziers 
Bulletin, lU* série, t. V |i9o3), i'* livr. — Académie de Lille : Bulletin de l'Université, 



88 MÉMOIRES DE l'aCADÉMIE DE VAUCLUSE 

1903, n*4; 1904, n* 1. — Revue d'Auvergne, igoS, n* 6 ; 1904, n» i. — Société littéraire 
historique et archéologique de Lyon : Mémoires, années 1898 à 1903. — Société 
archéologique et historique de la Charente : Bulletin et mémoires, t. III, années 
1903-1903. — Société savoisienne d'histoire et d'archéologie : Mémoires et documents» 
t. XVII. — Société des sciences naturelles de Saône-et-Loire, 1903, n- 11 et 12; 1904, 
no I et a. — Société scientifique et littéraire des Basses- Alpes : Bulletin, année 1903.— 
Bulletin du Comité de l'art chrétien, t. VII (1904), n* 48. — Revue du département du 
Tarn, 1903, n** 5 et 6. — Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Tou- 
louse : Mémoires, X* série, t. III. — Société des Amis des sciences naturelles de 
Vienne : Bulletin. 1. 1, 4' fasc. — Société d'études des Hautes-Alpes : Bulletin, 1904, 
I** fasc. — Revue horticole de Marseille, 1904, janvier k mars. — Académie des sciences 
et lettres de Montpellier : Mémoires de la section des lettres, 2' série, t. IV, n* 2. — 
Société languedocienne de géographie : Bulletin, t. XXVI, 4* fasc. — La Diana : 
Bulletin, t. XIII, n* ?• ^ Société des Antiquaires de la Morinie : Bulletin historique, 
t. XI, 4* fasc. — Annales de Saint-Louis-des-Français, t. VII, 2' et 3* fasc. — Société 
Les Amis des sciences et arts de Rochechouart : Bulletin, t. XIII, n*' 3 et 4. — Aca- 
démie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon : Mémoires, année 1903. — 
Société nationale des Antiquaires de France : Mémoires, 1901 ; — Recueil de mémoi- 
res pour le Centenaire. — Société des lettres, sciences et arts de la Corrèze : Bulletin, 
1903, 4» livr. — Bulletin historique du diocèse de Lyon, n* 26. — Annales de la 
Société d'études provençales, 1904, n' 2. — Société des sciences, lettres et arts de 
Pau, 2* série, t. 3i. — Société d'archéologie lorraine et du Musée historique lor- 
rain : Mémoires, t. LUI (1902). — Société archéologique du département de Constan- 
tine, année 1903. — Société départementale d'archéologie et de statistique de la 
Drôme, 149* livr. — Société des Antiquaires de Picardie : Uulletin, 1903. 4* trim. — 
Société éduenne : Mémoires, nouvelle série, t. 3i. 



ERRATA. 

La note de la page i3 doit être la r' de la page 14. 

P 16, l. 6 de la note, au lieu de : « Oberpingeau », lire : « Oberpinzgau ». 

— 1. 8, au lieu de : « San Danielle Ripa Po », lire : « San Daniele nel Friule ». 

— 1. 9, au lieu de € Crémone », lire : « Udine ». 




JEAN DE TOURNEIVURE 

(JOHANNES DE ToRNAMIRA) 
1 329-1 396. 



ÉTUDE BIO-BIBLIOGRAPHIQUE. 



Jean de Tournemire [Johannes de Tornamirà), fait partie de 
cette pléiade de brillants praticiens dont s'honore la vieille Faculté 
de médecine de Montpellier. 

Cette série débute au XIII* siècle avec Henri de Guintonia, 
Pierre Gazanhaire, Pierre d'Alais(i), Roger de Baron (2), Hugues 
de Montbuffier (3), Arnaud de Villeneuve (4) et Bernard de Gor- 
don (5). Elle se continue avec Henri de Mondeville (6), Guillaume 
et Raymond de Béziers (7), Guy de Chauliac (8), Raymond de 
Molières (9), Etienne fils d'Arnaud (lo), Bernard fils d'Albert (î i), 

(1) Henricus de Guintonia et Pelrus Gazanhaire, chanceliers l'un vers laSg, Tautrç 
vers 1260. Petrus de Alesto, médecin du pape Clément V (i3o3-i3i4). 

(2) Rogerius de Barone, vers la fin du XIII* siècle. 

(3) Hugo de Moniebtifferio était vice-chancelier en iSSg. Les oeuvres de H. de Guin- 
tonia, de P Gazanhaire, de P. d'Alais, de H. de Montbuffier sont perdues pour 
nous. Cependant elles existaient encore à Montpellier à la fin du XVIII' siècle au 
dire de Pélissier. (Appolinis Monspeliensis hiàliolheca, thèse de licence, 1765.) 

(4) Arnaldus de Villanova, mort vers i3i3. Il enseigna à Montpellier vers i389-i3oo, 

(5) Bernardus de Gordonio, vers 1 290-1318. 

(6) Henricus de Amondavilla, vers i3o4. 

(7) Raymundus de Biterris, vtrs i285-i3i3. Guillelmus de BiUrri$. vers i3i9. Leurs 
œuvres sont inédiles et encore inexplorées. 

(8) Guido a Cauliaco» vers 1348. 

(9) Raymundus de Moleriis» contemporain de Guy de Chauliac et chancelier de la 
Faculté. Nous possédons de lui un traité de impedimeniis conceptionis (Bibl. nat., lati 
6957). dont Pagel a commencé la publication (Cf. thèse d'Arll, Berlin, 1903). 

(10) Stephanus Arnaldi, contemporain de Guy de Chauliac. 

(11) Bernardus Alberti, decanus, vers i35o. J'ai retrouvé de lui un Traciaius dé 
febrlbus ou commentaire super primamfen quarti libri Avianne (BibL nat., lat. 7i3o- 
•t aouv« Acq. lat. i39i)s 



go MEMOIRÉiS 

Gérard de Solo (i), Jean fils de Jacques (2), pour s'éteindre 
avec Balescon de Tarare (3) dans le premier quart du XV 
siècle. 

De tous ces praticiens, Jean de Tournemire est un des plus mal 
connus. Il n'a d'autre histoire que quelques lignes d'Astruc(4), le 
faisant vivre entre 1400 et 1450, ou une courte note de Pélis- 
sier (5) nous le présentant comme un des médecins de Clé- 
ment VI. 

Aussi croyons-nous utile de compléter aujourd'hui sa biogra- 
phie à l'aide des documents trouvés dans les archives d'Avignon 
et des manuscrits explorés par nous. 



L 



Jean de Tournemire naquit à Pouzols, diocèse d'Albi, vers 
1829 (6). Il étudia la médecine à Montpellier et commença à prati- 
quer très jeune, vers 1848 (7). Cela ne doit pas nous étonner, car 
la pénurie des maîtres était telle que la Faculté avait été obligée 
de décréter qu'avant d'être reçu docteur, tout récipiendaire pren- 
drait l'engagement de légère per biennium. Or, légère c'était faire 
un cours : lire aux étudiants un auteur, en le faisant suivre par- 
fois de commentaires, dont quelques-uns sont parvenus jusqu'à 
nous. 

Jean de Tournemire quitta Montpellier pour occuper le poste 
plus lucratif de médecin des papes. A quelle époque vint-il se 
fixer à Avignon? En iSôg, il était encore à Montpellier. La bulle 



(i) Gerardus Bierne, alias de Solo : il composa son Exposilio in nonutn Altnansôrii 
vers 1371. 
(a) Johannes yacoW, chancelier vers 1364-1378. Ses œuvres sont inédites. 

(3) Valescus de Taranla, vers 1 382- 141 8. 

(4) Mémoires pour servir à l'histoire de la Faculté de médecine dû Montpellier, Paris, 
1767, p. 204. 

(5) Op, cit., p. 407. 

(6) Magister Johannes de Tomamira^ de Potolis, Albiensis diocesis, magister in 
midicina et domini nostre [pape démentis VII] medicus, etatis LX annorum vel circa, 
dans le Processus in causa canonisationis... Pétri de Lucemburgo, fol. 333 (Manuscrit 
n* 697 de la Bibliothèque d'Avignon). Ce manuscrit contient toute la procédure faite 
depuis le 18 juin i38g. C'est d'après lui que les Bollandistes ont publié le procès de 
canonisation du bienheureux Pierre de Luxembourg (Acta sanctorum, juillet, t. I, 
p« 463). — Jean de Tournemire avait donc 60 ans en 1389. 

(7) Dtxit \johanms de Tomamira] in foro consciencle sue quod quadraginta annis 
fracticayit.». [iMm), 



DE l'académie de vaucluse gr 

de fondation du collège de Mende, donnée par Urbain V à cette 
date, mentionne que la maison achetée pour fonder cet établisse- 
ment confrontait, d'une part Vhospitiutn Johannis Jacobi, in medù 
cina magistri ; et, d'autre part, Vhospitiutn dilecti filii Johannis de 
Tornamira, etiam in medicina magistri (i). Nous pensons donc 
que Jean de Tournemire ne quitta Montpellier que sous le ponti- 
ficat de Grégoire XI (i 370-1 SyS). 

En effet, dans la liste des bénéfices dont Grégoire XI s'était 
réservé la collation (2), nous trouvons deux bénéfices accordés à 
la demande de Jean de Tournemire : 

c Eadem die [vi kalendas januarii, an no secundo nostri pontificatus, id est 137a] 
duos canonicatus cum portionibus que primo vacabunt in ecclesia Carcaso- 
nensi, ad instantiam Magistri Johannis de Tornamira. 

• Eadem die [quarto die decembris, anno quarto pontificatus, id est 1374] prioratus 
Rupis Ulmensis, Mirapicensis [Mirpoix] diocesis, ad instantiam Magristri Johannis 
de Tornamira. > 

Quoique le texte ne le dise pas explicitement, il nous laisse 
supposer que Jean de Tournemire était devenu le physicus fami- 
liaris ou un des physici familiares de Grégoire XL Mais les 
textes nous disent expressément qu'il était medicus domini 
nostri pape Clementis, médecin de Robert de Genève, pape sous 
le nom de Clément VII (1378-1394). 

C'est un fait à remarquer que les professeurs célèbres aban- 
donnaient volontiers Montpellier après quelques années d'ensei- 
gnement. Dans une courte période, nous voyons, vers i3o5, 
Arnauld de Villeneuve quitter le professorat pour devenir, à 
Avignon, médecin du pape Clément V pour lequel il compile, en 
i3o8, un Libelliis regiminis de conjortatione visus (3). Jean d'Alais 
a précédé ou suivi son collègue dans sa fuite; Henri de Monde- 
ville, en i3o2, de professeur à Montpellier, devient médecin de 
Philippe le Bel. Guy de Chauliac, vers 1348, va à Lyon chercher 
un sort meilleur jusqu'à ce que, lui aussi, soit appelé à la cour 

(t) Cf. cette bulle dans Astruc, op. cit*,p, 49. Le collège de Mende était destiné à 
recevoir 13 étudiants en médecine. Il se trouvait sur l'emplacement actuel de l'écolo 
de pharmacie. 

(a| Archives do Vaucluse, D. 204, fol. i3 v* et 23- — La seconde partie de ce 
manuscrit, postérieure de près d'un siècle, contient aux fol. 37-66 : Inventarium bono^ 
rum domini mei cardinalis Hostiensis, sanU Romane EcCltsie cardinalis et vicecancel-^ 
larii, in domo iibraie sue... receptorum die guinta mensis mardi aniio a nativitaU milU-^ 
simo CCCOXXVP. 

(3) P. Pansler, ColUciio ophtalmologica veierum àutiorUM, fasc. L (Paris, Balliôrci 



92 MEMOIRES 

papale d'Avignon. Raymond Chalin de Vinario, nous paraît être 
aussi d'origine montpelliéraine : il est médecin du pape Clé- 
ment VI, en i34(>-i352. En 1372, nous le retrouvons à Avignon 
medicus cardmalis Albanensis (i). Jean de Tournemire n'a fait que 
suivre l'exemple de ses illustres devanciers. 

C'est que les fonctions de professeur à Técole de Montpellier 
étaient peu lucratives. Les trois professeurs institués par la bulle 
de 1220 n'avaient pas d'appointements fixes : ils étaient payés 
directement par les étudiants. A la fin du XV' siècle, Charles VIII 
semble faire une grande faveur aux maîtres de Montpellier, en 
leur donnant les appointements fixes de loo livres par an. A la 
même époque, les médecins d'Anne de Bretagne touchaient de 
400 a 7C0 livres par an. Aussi ne faut-il pas nous étonner de voir 
les maîtres de l'école se servir de leur charge pour acquérir 
renommée et accès à la cour des grands. 

Il est probable qu'à la mort de Grégoire XI, en 1376, Jean de 
Tournemire retourna à Montpellier. Cela concorderait avec la 
citation de Valescus de Taranta, qui raconte l'avoir eu comme 
maître vers i38o. Mais l'antipape Clément VII ayant fait son 
entrée à Avignon, Jean de Tournemire vint reprendre auprès de 
lui ses fonctions de medicus domini pape. 

En 1364, il devait être déjà un professeur renommé. En efiet, 
cette année-là, il se passa un grave événement dans la Faculté. 
Le chancelier Bernardus de Coloniis étant mort, l'évêque de 
Maguelone en profita pour nommer à ce poste Johannes Jacobi, 
Cette nomination était irrégulière, la Faculté ayant le droit de 
choisir et de présenter à la nomination de l'évêque son chancelier. 
Cependant il y avait eu un semblant d'élection; la bulle dit en 
effet: Magister Johannes Jacobi, nulla electione précédente sa Item 
valida, ad cancellariam exiiterat promotus. Or, d'après la bulle de 
Clément V, en i3o8, l'élu devait avoir obtenu au moins les deux 
tiers des sufi'rages. Dans l'élection de Johannes Jacobi,ce quorum 
n'avait pas dû être atteint, et l'évêque avait passé outre. Mais la 
Faculté protesta : le concurrent de Johannes Jacobi était précisé, 
ment Jean de Tournemire; on en appela au pape. Celui-ci commit 
Jean de Blandiac, cardinal au titre de Saint-Marc, pour régler 
le différent. Le i3 octobre 1364, Johannes Jacobi et Jean de 

(1) Bibliothèque de Chartres, ms. 4o3 (XIV siècle), fol. 8o-ia8 : Raymundi Chalin 
Ubif d€ p4sU...Huic tractatui Jinem impono composUo per me Raymundum Chalin de 
Vinario, magistrum in medicina ît in artitus.., medicum domini cardinalis Albanensis 
in Avinione, anno t372» 



DE l'académie de vaugluse 9^ 

Tournamire comparaissent devant le cardinal, quisque pro se et 
suis adhereniibus (î). Le cardinal, après avoir ouï les parties, 
donna raison aux adhérents de Jean de Tournemire et cassa 
Télection de son concurrent. Mais, touché de ses humbles sup- 
plications et en vertu des pouvoirs apostoliques dont il était 
muni, il renomma chancelier Johannes Jacobi, déclarant pour- 
tant qu'il ne prétendait point par là porter atteinte aux privilèges 
de la Faculté. Le cardinal, en cette affaire, avait ménagé la 
chèvre et le chou : c'est qu'en effet si la Faculté avait le droit 
pour elle, Johannes Jacobi était un personnage important. Non 
seulement il était médecin d'Urbain V (2), mais il était encore 
physicus régis (3), médecin, du roi. Ce qui ne l'empêchait pas 
d'omettre de payer ses tailles, puisque nous avons, du 7 septem- 
bre i382, un mandement de Charles VI au gouverneur de Mont- 
pellier lui ordonnant de contraindre au payement des impôts 
certains docteurs en droit et en médecine : parmi eux figure 
Johannes Jacobi (4^ 

Mais celui-ci étant mort en 1384, le 11 août de cette année, 
nous avons un mandement de Clément VII nommant aux hautes 
fonctions de chancelier Johannes de Tornamira, medicus et fami- 
liaris noster, Avinione commorans ^5;. 

En 1387, nous retrouvons encore ce personnage à Avignon 
dans l'exercice de ces fonctions. C'est là qu'il apprend que sa fille, 
atteinte d'un cancer au sein, vient d'avorter et se trouve au plus 
mal. Jean de Tournemire quitte précipitamment Avignon, cum 
licentia domini pape, le matin du i*' novembre : illa die equitavit 
undecim leucas; il n'arriva que le lendemain soir à Montpellier, 
où il nous apprend qu'il avait conservé sa maison. 

A la mort de Clément VII, en 1394, Avignon est dévasté par les 
guerres de Pierre de Luna. Aussi Jean de Tournemire est-il 
retourné à Montpellier, où il meurt en !3g6. Cette dernière date 
est donnée par Fournier (6). Elle concorde avec la citation de 
Valescus de Taranta, qui, en 1418, parle de lui comme de quel- 
qu'un décédé depuis peu : Johannes de Tornamira, cancellarius 
noster bone memorie. 

(i) Cartulaire de ^Université de Montpellier, 1. 1 ( Montpellier, 1890), n* ia3. 

(3) G. Marini, Degli archiatri Pontifici (Roma. 1784. 2 vol. in-4*). 

(3) Archives nationales, JJ. 112. charte n» 304, ex litteris anni 1378. 

(4) Cartulaire, W 171. 

(5) Cartulaire, n' 174. 

(6) Fournier, Us statuts et privilèges des Universités françaises, n' 1 107. (Paris 
1890-94* 4 vol. in-f*«) 



94 MEMOIRES 



II. 



Nous possédons de Jean de Tournemire les ouvrages sui- 
vants : 

i^ Introduciorium ad praticatn medicinae, imprimé avec le 
Philonium de Valescus de Taranta. 

2** Clarificatorium in Nonum ad Almansoretn, édité à Lyon, en 
1490, i5o6; à Venise, en iSoy et 1621. 

3° Tractatus de febribus (mêmes éditions). 

Le C/arr^ca/ormm aurait été composé à Montpellier en i365. 
Voici en efïet VIncipit du manuscrit de la Bibliothèque de TArse- 
nal (n" 1026, XV* siècle), contenant ce traité aux fol. 1-80 : 

« Clarificatio partis practice medicine de passionibus a capite usque ad pedes 
super Nono Almansoris, anno decimo septimo ordinarii mei Johannis de Tornamira, 
decani studii Montispessulani. Ego, Johannes de Tornamira, Nonum Almansoris 
tibi expono anno decimo septimo lecture mee ordinarie, tamen laude Dei, qui vir- 
tutem michi largiri dignatus est hoc opus expendi anno LXV... (r). > 

Le Clarificatorium, c'est le cours que Jean de Tournemire fai- 
sait à ses élèves en commentant l'ouvrage de Razès, intitulé 
Liber medicinalis ad Almansoretn, Razès avait résumé dans ce 
traité, dédié au calife Almansor, les notions contenues dans son 
volumineux Continent, 

Le Liber ad Almansorem, sous sa forme concise, était un traité 
complet de médecine en 10 livres. Voici le titre de chaque livre : 

I. Anatomia corporis et membrorum ejiis. 

II. Designis corporis humani et humanorum de signis phisio- 

nomie. 

III. De viribus medicinarum simplicium, 

IV. De conservatione sanitatis, 

V. De decoratione seu pulchritudine , 

VI. De preservatione iter agentium a nocumentis extrinsecis. 

(i) Les éditions du Clarificatorium, d'après Astruc (car la seule que j*ai à ma dispo- 
sition, celle de la Bibliothèque d'Avignon, Lugduni, 1490, est acéphale, et la 
Bibliothèque de récole de Montpellier- n'a pas encore trouvé des ressources suffi- 
santes pour se procurer un exemplaire des œuvres de Jean de Tournemire) portent : 
anno XIX mei ordinarii. J'adopte la date XVII donnée par le manuscrit de l'Arsenal : 
elle a l'avantage de concorder avec la déposition de Jean de Tournemire devant la 
commission d'enquête du procès de béatification de Pierre de Luxembourg. 

(2) Cet ouvrage avait été traduit au XU' siècle, de l'arabe en latin, par Gérard de 
Çrémonç. 



DE l'académib de vauclusb qS 

vil. De cyrurgia. 

VIII. De cura sive sanatione venenorum. 

IX. De omnibus egritudinibus que accidunt a capite usque ad 

pedes, 

X. De febribus et accidentibus. 

Le neuvième livre constitue le Nonum ad Almansorem, que 
commentait chaque année un professeur scholaribus ad practicam 
euntibus, aux écoliers qui, après avoir fini leur temps d^étude, 
allaient se livrer pendant deux ans à la pratique sous les auspices 
d'un magister quelconque, avant de recevoir eux-mêmes le titre 
de doctor ou magister, et, ajoutera Molière, jus occidendi impune 
per totam terram. 

Les commentaires de Jean de Tournemire sur le Nonum con- 
tiennent quelques faits intéressants. L'auteur ne se dissimule pas 
que le médecin est loin d'être infaillible : dans la dysuria, il 
il condamne l'emploi des medicamina aperitiva pororum. Il nous 
montre un médecin de Castres, venant de faire ses courses médi- 
cales et descendant de cheval, atteint de diîjîcultas mingendi. Il 
s'administre des aperitiva pororum, et meurt quelques heures 
après : istum errorem, ajoute Jean de Tournemire, tota die incur- 
runt medici. Deus misereatur nostri! Non sine causa populares 
dicunt nos homicidas. 

Jean de Tournemire nous indique encore que la pratique de la 
chirurgie à Montpellier, dès i365, était distincte et séparée de la 
pratique de la médecine. Même parmi les chirurgiens il y avait 
des spécialistes, les uns faisant la chirurgie des apostêmes, 
fractures et luxations ou grande chirurgie ; d'autres experti in 
chirurgia oculorum, d'autres dits herniarii. Certains patients 
étaient leurs propres chirurgiens et ponctionnaient eux-mêmes 
leur ascite : Vidi aliquos hydropicos multum inflatos, qui frica- 
bant et scalpebant se in umbilico usquequo aperiebant ipsum et 
urinabant per umbilicum et vivebant per tempus. 

Les auteurs que cite Jean de Tournemire sont, parmi les 
anciens : Hippocrate, Galien, Dioscoride, Paul d'Égine; parmi 
les arabes : Averroès, Razès in Continenti, Avicenne, Avenzoar, 
Sérapion, Raby-Moyses, Heben Mésué; parmi ceux qu'il appelle 
les moderni : Simo Januensis, Gerardus Cremonensis, Macer, 
Constantinus monachus. Tous ces auteurs sont bien connus. 

Parnii les moderni nostri Montispelienses, il citç ; 



gQ MÉMOIRES 

r Gordonius, Bernard de Gordon, personnalité bien connue. 

2" Gilbertus in Viattco, Jean de Tournemire indique là un 
commentaire de Gilbert sur le Viatique de Constantin. Quel est 
ce Gilbert ou Gilibert ? 

D'après Tétude de leurs manuscrits, j'admettrais quatre 
Gilbert : 

a) Gilbertus Anglicus, Gilbert l'Anglais : postérieur à Richard 
(commencement du XÎIV), antérieur à Jean Gaddesden (vers i320). 
Gilbert l'Anglais est Tauteur d'un Compendium de médecine en 
manuscrit à la Bibliothèque nationale (lat. 6955, 10289, 16194, 
nouv. acq. lat. 160), à la Bibliothèque de l'Arsenal (n'' 1028), aux 
Bibliothèques de Rouen (n**994), Vendôme (n"* 178 et 235), Cam- 
brai (n*** 906 et 909) ; d'une Expositio super librum aphorismorum 
et d'un Antidotarium détenus à l'abri des lecteurs dans les 
Bibliothèques d'Angleterre. 

b) Gillibertus, cancellarius Montispessulani, dont nous possé- 
dons un court Antidotaire que j'ai publié dans le Jantis (1). Je ne 
sais si c'est à lui ou à Gilbert l'Anglais qu'il faut rapporter le 
manuscrit latin 8654 B, de la Bibliothèque nationale, écrit en 
i3o6 et intitulé : Signa lèpre secundum Gilbertum, 

c) Gilbertus commentator Egidii, De celui-ci nous possédons 
un commentaire sur Gilles de Corbeil, en manuscrit aux Biblio- 
thèques Nationale (lat. 6988, 16186), d'Auxerre (n** 241), de Mou- 
lins (n'* 3o), de TArsenal à Paris (n° 1080). 

d) Un quatrième Gilbertus serait celui de Jean de Tournemire, 
auteur d'un Commentaire sur le Viatique de Constantin. 

Ces quatre personnages pourraient d'ailleurs se réduire à 
deux : Gilbertus Anglicus ou Gilbertus Cancellarius s'identifiant 
avec les auteurs du Commentarium Egidii et du Commentum in 
Viatico. 

3" Rogerius, Gest-à-dire Roger de Baron, personnage assez mal 
connu, qui paraît avoir enseigné à Montpellier et à Paris, auteur 
de deux traités de médecine intitulés, l'un : Practica ou Sunima 
ou Rogeria nuigna; l'autre, Summa Rogerii de exhibitione medi- 
cinarum laxativarum et opiatarum, ou Rogerina minor. Il aurait 
pratiqué vers la fin du XIII" siècle. Le manuscrit latin 7056 de la 
Bibliothèque nationale nous apprend qu'il 'était cancelUirius 
Montispessulanensis, Il a souvent été confondu avec Roger de 
Parme, et par suite de cette confusion quelques manuscrits nous 

(i) Janvier 1903 et suivants. 



DE l'académie de vaucluse 97 

donnent sa Practica sous le nom de Chirurgia, quoiqu'il ait été 
aussi étranger que possible aux choses de la chirurgie (i). 

4** Arnaldus de Villanova, le fameux Arnauld de Villeneuve, 
mort vers i3i3; il enseigna à Montpellier de 1289 a (3oo. 

5" Ga//^nw5. Cet auteur est qualifié de Salernitain dans un de 
ses manuscrits. Nous voyons que Jean de Tournemire en fait un 
Montpelliérain. Il est donc probable qu'il avait étudié ou professé 
d'abord à Salerne, ensuite à Montpellier. Il est postérieur à Gilles 
de Corbeil (vers 1 180-1 223), antérieur à Francisais de Pedemontio, 
qui était médecin du duc de Calabre en i3o5. Il appartiendrait 
donc au milieu du XIII* siècle. Nous avons de lui les ouvrages 
suivants : 

a] Un traité sur le pouls [ciim decem sunt gênera pulsuum) indi- 
qué par Littré, et que je n'ai pas retrouvé en France. 

b] Une Summa ou traité de médecine, en manuscrit latin, aux 
Bibliothèques Nationale (n"" 6897, 6954, 6976, 7o55), de l'Arsenal 
(n**" 1024 et 1025), de Vendôm.e (n° 246), et en traduction française 
au n** 1288 de la Bibliothèque Nationale. 

c] Un Tractatus de dosi medicinarum (Bibl. nat., lat. (yo/oj^, 7o5i, 
16191 ; Bibl. de Chartres, n** 398; Bibl. de l'Arsenal, n* I025). 

d] Un traité intitulé Compendium urinarum (Bibl. Nat., lat. 
15457). 

e] Un autre traité sur le même sujet intitulé : Contenta urina* 
mm (Bibl. nat., lat. 6976; Bibl. de Cambrai, n** 916). 

(f Peirus Hispanus. Pierre d'Espagne (Petrus Juiiani), plus tard 
le pape Jean XXI; auteur d'un Thésaurus pauperum, un des plus 
indigestes réceptaires de Tépoque et des plus célèbres; de quel- 
ques opuscules sur Toculistique, d'un Regimen sanitatis, de 
commentaires sur V Isjgoge Johannitii et les Dietae d'Isaac et d'un 
traité de Phlebotomia sous le nom de Petrusjuliani, Il mourut en 
1276. 

Mais les deux auteurs cités le plus souvent par Jean de Tour- 
nemire sont Gordonius et Gilbertus. 

Le Clar(fîcjtoriuin paraît avoir eu un grand renom du vivant 
même de l'auteur, puisque nous voyons en i3(V) le pape Urbain V 
en donner un exemplaire û son collège d'étudiants à Montpel- 
lier (2). 

(1) Littré {ffist. littéraire de la France, t. XXI, p. 538), a écrit sur cet auteur un 
article émaillé d'inexactitudes et de stupidités. 

(2) Dubouchet, rn collé f^e médical à Montpellier au moyen Af^e (Thèse. Montpellier, 
1889) ;.Cf. p. 63, catalogue des livres qui étaient à la bibliothèque du collège Urbain V 
en 1574. (Original, Bibl. nat., nouv. acq. franc. 4410.) 



9^ MÉMOIRES 



III. 



Il nous resterait de Jean de Tournemire trois ouvrages en 
manuscrit seulement : 

I" Un traité sur la peste (Bibl. nat., lat. 6967, fol. 123-126), sous 
ce titre : Preservatio et cura apostematum, andracum et pestilentia- 
rum secundum inteniionem magistri Johannis de Tornamira. Ce 
même ouvrage existe encore au n° iSgi des nouvelles acquisi- 
tions la même Bibliothèque, sous le titre de : Preservatio a pesti- 
lentia secundum magistrum Johannem de Tornamira, 

2" Parva practica bona et utilis edicta a magistro Johanne de 
Tornamira, quamfecit pro quodam bacchalerio eunte ad practicam 
(Bibl. nat., lat. 7061, fol. i-5). Cet opuscule ne serait peut-être que 
V Introductorium ad practicam medicine. 

3* Il est une autre œuvre de Jean de Tournemire que nous 
allons aujourd'hui sortir de son obscurité : c'est le récit de la 
maladie de sa fille. 

Jean de Tournemire était marié (i). En 1387, sa fille fut atteinte 
d'un cancer au sein, affection que le père jugea incurable dès le 
début. Mais elle fut délivrée de sa terrible maladie par l'interces- 
sion de Pierre de Luxembourg. En iSSg, Jean de Tournemire 
comparut comme témoin devant la commission ecclésiastique 
chargée du procès de béatification de ce cardinal (2), et sa déposi- 
tion fut une véritable leçon clinique sur le cas de sa fille. La voici 
textuellement reproduite d'après les manuscrits originaux et 
amputée seulement des détails extra-médicaux inutiles à notre 
étude : 

« (3) Déposition de maître Jean de Tournemire, médecin de N. S. 
le Pape, au sujet de sa fille Marguerite, demeurant à Montpel- 
lier, etc. 

« Au sujet du contenu de cet article, le témoin parlant, méde- 
cin de N. S. le Pape, raconte qu'en 1387 et au commencement du 
mois de septembre, il voulut aller voir sa maison à Montpellier. 



(1) Différant encore en cela de celle de Paris» la Faculté de médecine de Montpel- 
lier n'imposa jamais le célibat à ses membres. 

(a) Manuscrit cité. fol. 333-336. 

(3) Item, quod Margareta, fîlia Magistri Johannis de Tournumira {sic), medici 
domini nostri pape, in villa Montispessulani comorans, etc. 

Dixit se tantum scire de contentis in dicto articulo quod de anno Domini i387, et in 
priQcipio mensis septembris proxin^e lapsi, ipse qui lo<;[uitar niedicus D. N. pape, 



DE L^CADÉMIE DE VAUCLUSE 99 

Là, il trouva sa fllle Marguerite, âgée de i8 ans, et mariée à 
Pierre Saisse, atteinte à la mamelle gauche d'une tumeur, dure 
au toucher et douloureuse à la pression. Il interrogea sa fllle sur 
le début de TafTection. Elle répondit, en présence de sa mère, 
qu'il était apparu une nodosité semblable à une noisette, dure 
et douloureuse au toucher. Finalement, cette nodosité augmenta 
et envahit la plus grande partie du sein. En même temps, la 
jeune femme constatait qu'elle était enceinte. Le père dit à sa fllle 
que la grossesse était cause de cela. Mais la mère lui objecta : 
Pourquoi le même fait ne se produit-il pas dans l'autre mamelle? 
Le témoin usa de subterfuges tant qu'il put, mais il voyait bien 
qu'il s'agissait d'une afl'ection cancéreuse à issue fatale, qui, 
arrivant à se fendre et à s'Ouvrir, amène la mort en un an ou un 
an et demi, par suite de la corrosion lente de toute la chair de la 
mamelle. Il n'avait jamais vu survivre pendant un an et demi, ou 
deux ans au plus, une malade atteinte de pareille aflection. 
Malgré l'emploi des onguents que prescrivent les médecins, dans 
aucun cas il ne se rappelle que la survie ait été de plus de deux 
ans, car après ce laps de temps tout le sein est comme rongé. 
Cette maladie est appelée par quelques-uns noli me tangere, car 
plus on la médicamente plus elle fait de ravages, à moins qu'on 
n'emploie des onguents spéciaux choisis par un excellent maître. 
« Le témoin voyant cela fut profondément troublé, et il dit à la 
mère et à sa fille : Ne faites rien qu'éviter l'usage de certains 

stans in servicio suo, voluit visitare domum suam in Montepessulano. Et cum ibidem 
fuit, invenit Margaretam filiam suam, uxorem Pétri Saisse, XVIII annorum, gravatam 
in mamiUa sinistra cum tumore duro et dolore. Ipsamque interrogavit qualiter sibi 
evenit. Que sibi dixit et respondit, présente matre sua, quod sibi supervenit una 
nodulitas ad modum unius avellane, dura in tactu et cum dolore cum tangebatur. ' 
Finaliter illa nodulitas et duritia fuit augmentata in magno parte mamille. Ipsc 
autem vidit ipsam pregnantem, sibique dixit : Non dubites quod est ratione fétus. 
Mater vero sua sibi respondit iQuomodo est hoc quod non sit idem in alia mamilla? 
Ipse autem qui loquitur palliabat eis quantum poterat et videns ipse loquens ipsam 
passionem esse cancrosam, et esse cancrum absconditum, qui est morbus mortalis, 
ut plurimum : imo veniens ad aperturam etcrematuram in mamilla, moriuntur infra 
annum vel infra annum cum dimidio ex corrosione carnis, nam mamilla tota corro- 
ditur paulatim. Nec vidit aliquam viventem per annum cum dimidio vel duos annos 
ad plus, similem patientem infirmitatem, nam licet corrosio illa remittatur cum 
unguentis approximatis per medicum, non vidit aliquam transire per duos annos 
quin moriretur. Nam illa corrosio fortis est vehementissime fetida in processu. et 
quamquam alique mulieres sint fortes, communiter non transeunt secundum 
annum, nam infra illud tempus mamilla quasi corrosa est. Vocatur autem a quibus- 
dam illa infîrmitas noli me tangere, quia dum plus apponitur, deterioratur, nisi sit 
unguentum preelectum ab excellentissimo medico. 

Ipse autem hoc videns turbatus est usque ad viscera. Dixit matri dicte filie et sibi : 
Nihil faciatis nisi quod evitetis aliquas res, utpote carnes salsas,caseum, substc^ntiain 



fCk> MÉMOIRES 

aliments, tels que chairs salées, fromage, légumes, fruits de 
substance dure, tels que châtaignes, poires, et ayez une grande 
dévotion au glorieux Pierre de Luxembourg... » 

Rentré à Avignon, Jean de Tournemire se procure une relique 
de Pierre de Luxembourg et l'envoie à sa fille. 

«... Le jour de la fête de Tous les Saints, on vient annoncer au 
témoin que sa fille est au plus mal, ayant avorté. Le témoin très 
troublé, avec l'assentiment de N. S. le Pape, quitte précipitam- 
ment Avignon, et malgré la brièveté des jours, il fit à cheval, ce 
jour-là, onze lieues. Le lendemain, vers les quatre heures, il 
arriva chez lui, et trouva sa fille Marguerite très affaiblie. Mais 
il ne s'arrêta pas à cette faiblesse, et voulut plutôt voir la mamelle 
atteinte du cancer. 

« Il trouva qu'il s'en écoulait un pus louable, sans fétidité, ce 
qui n'est pas dans la nature du cancer. Il constata aussi que l'ou- 
verture n'en était pas rongée, comme cela arrive dans le cancer. 
A cette constation il voit là l'intercession divine... qu'en si peu 
de temps cette induration cancéreuse se soit résoute en pus 
louable, sans fétidité, et sans corrosion de l'orifice.... Et il se dit, 
dans le for de sa conscience, que depuis quarante ans qu'il pra- 
tiquait, il n'avait jamais vu guérir un cas semblable. Malgré les 
remèdes il avait toujours vu les patientes mourir après un an, ou 
un an et demi, ou deux ans au plus, avec écoulement d'un pus 
fétide, rongeant tout le sein. Ce laps de temps écoulé, la mamelle 
est complètement rongée et détruite, et cette action destructive 



leg^uminum. fructus dure substantie, castaneas. pira, et habeatis in devotione glorio- 
sissimum Petrum de Luxembourg.... 

Adveniente autem festo Omnium Sanctorum, fuit ipsi loquenti notificatum quod 
dicta ejus filia maie stabat quoniam abortaverat. Ipse autem turbatus, petita a D. N. 
[licentia], recessit de presenli civitate [Avenionensi], Et illa die, equitavit per 
undecim leucas, non obstantibus brevibus diebus. In crastinum vero, circa quartam 
horam, ad docnum suam applicuit et invenit dictam Margaritam Gliam valde debilem. 
et non stetit in debilitate, sed potius voluit videre illam mamillam cancrosam. 

Et invenit quod illasanies excolabatur in sanielaudabili non fetida, quod est contra 
naturam canceri. Et invenit quod illa mamilla ab illo foramine non corrodebatur» 
quod est etiam contra naturam canceri. Quibus visis et consideratis, hoc reputat a 
Deo esse factum... quod in tam modico tempore illa durilies cancrosa fuit excolata. 
in sanie laudabili, non fetida et sine corrosione in apertura... Et dixit, in foro 
consciencie sue, quod quadraginta annis praticavit et non vidit aliquam similem 
morbum patientem curari. Imo, non obstantibus remediisapplicatis, moriebatur infra 
annum vel annum cum dimidio vel infra duos annos ad longius, cum expulsione 
saniei fetidissime et corrosione ipsius mamille ; nam infra dictum tempus mamilla 
est corrosa, comesta, ex qua comestione et ejus fetore intollerabili moriuntur. 

Quapropier, quod quia ibidem non fuerit corrosio carnis que est de natyra cfincçrj 



ÔE L ACADEMIE DE VAUCLUSE lOï 

jointe à la fétidité du pus entraîne la mort des malades. C'est 
pourquoi voyant que chez sa fille, non seulement la corrosion de 
la chair, qui est la conséquence du cancer ulcéré, ne s'est pas 
produite, mais encore que la guérison s'est effectuée en moins de 
cinq semaines par l'application de remèdes anodins, il n'hésite 
pas à voir là l'intervention divine... 

« Interrogé pour savoir comment il s'est rendu compte qu'il 
s'agissait d'une affection cancéreuse ou apôstéme, dit cancer, le 
témoin a répondu que d'après la marche de l'affection il a jugé 
que cet apostême était un cancer profond pour deux raisons : 
premièrement, parce que l'induration avait seulement le volume 
d'une noisette ; secondement, parce qu'elle n'était douloureuse 
que lorsqu'on la palpait. Et ce sont les deux caractères propres 
qui ne se trouvent pas dans les autres apostêmes flegmatiques, 
sanguins ou cholériques. Mais ils se rencontrent spécialement 
dans les apostêmes mélancoliques, engendrés par une matière 
corrosive que les médecins nomment cancer. Ce cancer n'entraîne 
la mort que lorsqu'il s'ouvre à l'extérieur. C'est pour cela 
qu'Hippocrate a dit : « Il est préférable et plus sûr de n'user dans 
« le cancer caché d'aucun traitement autre que le régime. » La 
raison qui faisait ainsi parler Hippocrate, c'est qu'en traitant tels 
apostêmes cancéreux par des onguents résolutifs, on hâte leur 
ouverture et par conséquent la mort. Car une fois qu'il est 
ouvert, le cancer est incurable, surtout au sein et en tout lieu 
où il ne pourra être complètement excisé avec l'instrument tran- 
chant. Au contraire, en tout lieu où l'excision avec l'instrument 
tranchant pourra atteindre jusqu'à ses racines, le cancer est 
curable. 

ulcerati et fuerit curata infraquinque septimanas, applicandoaliqua remédia simplicia 
et vivando jam supradicta cibaria, reputat donum spéciale Dei... 

Interrogatus quomodo scit quod esset morbus cancrosus seu apostema dlctum 
cancer, dixit quod ex modo adventus judicatipsum apostema esse cancerum abscon- 
ditum ex duobus : primo ex duricie modica ad modum unius avelanne; secundo 
quod non dolebat, nisi cum tangebatur in loco. Et iste sunt due conditiones sibl 
proprie, que non sunt in aliis apostematibus flecmaticis, sanguineis et coloricis, sed 
proprie insunt apostemati melancolico generato de natura materie aduste, quod 
apostema cancer absconditus apud medicos dicitur. Talis cancer absconditus non 
esse mortalis, nec moriuntur nisi dum venit ad aperturam ulcerosam. Propter quod 
dixit Ypocrates : Melius est et tutius non curare cancerum absconditum quam 
curare : sufficiat sibi bonitas regiminis. 

Ratio Ypocratis fuit quod curando taie apostema cancerosum cum ungucntis 
resolutivis festinat Ipsum ad aperturam, et inde facta apertura per corrosionem de 
natura materie aduste, festinat ipsum ad mortem. 

Nam cancer postquam est u]ceratus« infirmitas est incurabilis omnino, presertim 
in mamilla et in omnl loco in quo non potest evelli radicitus cum rasorio. Nam in 
loco in quo potest c vclli radicitus cum rasorio tune est curabili»* 



XÙl MÉMOXRES DE l'aCADÉMIÉ DÉ VAITCLUSE 

« Ainsi Razès rapporte dans son Continent, qu'à son époque 
on tenta la cure d'un cancer ulcéré du sein. Il conseilla Texcision 
complète de la mamelle avec l'instrument tranchant. La douleur 
fut telle que la malade faillit en mourir. Mais comme elle était 
malgré tout condamnée, du consentement de l'entourage, on 
voulut tenter cette cure. Quelques ramifications du cancer exis- 
taient dans l'autre sein qui ne furent pas enlevées avec l'instru- 
ment tranchant. Aussi le cancer persévéra dans ce sein ; rapide- 
ment il arriva à s'ulcérer et la malade mourut en moins d'un an.» 

D' P. Pansier. 



Verum Rasis récitât in suo Continenti quod suo tempore tentaverit curare cance- 
rum ulceratum in mamilia et fuit consilium quod mamilla ex toto eradicaretur cum 
rasorio. Et mulier pre dolore fuit in periculo mortis. Sed quia in brevi tempore erat 
moritura, voluerunt tentare illam curam. de consensu amicorum. Et quia aliqua 
capita canceri subintrabant aliam mamillam et non fuerunt radicata cum rasorio, 
remansit dictus cancer in alia mamilla post paululum veniens ad corrosionem et inde 
mortua est infra annum. 




Les Amanites de la Provence. 



Argentum atque aurum facile est lenamque togamque 
Mittere ; boletos mittere difficile est. 
Martial, Êpigr,, xlviii. 

Les Amanites (du grec Amanos, montagne de Cilicie sur 
laquelle poussaient ces champignons), sont des agarics pourvus 
dans le jeune âge d'une enveloppe générale appelée volve, plus 
développée suivant les espèces, et qui a valu à ces cryptogames 
la dénomination d'agarics à bourse. Les enfants dans leur lan- 
gage imagé, les désignent souvent sous cet état par le nom 
significatif d'œuf dur. 

Lors de l'accroissement, cette volve, ne suivant pas le dévelop- 
pement du chapeau, se déchire et laisse des débris très visibles, 
soit à la surface supérieure du chapeau, en forme de verrues ou 
de plaques nettement distinctes de Tépiderme, et à la base du 
pied, sous celle de lambeaux membraneux ou écailleux, soit sur 
l'un de ces deux organes seulement. 

Chapeau charnu à chair tendre, orbiculaire, régulier, convexe. 
Il est tapissé, à la face supérieure, par une cuticule diversement 
colorée et plus ou moins facilement séparable, lisse ou verru- 
queuse, sèche, satinée, ou, au contraire, humide ou visqueuse, 
souvent élégamment striée vers la marge ; les stries étant ordi- 
nairement séparées par des sillons plus ou moins profonds. 

Feuillets nombreux, putrescents, aigus sur la tranche, inégaux, 
c*est-à-dire que deux lames entières sont séparées par un nombre 
variable de lamelles et de lamellules. Ils sont entiers et non divi- 
sés. Le plus souvent libres, rarement adnées, les lames sont 
exceptionnellement décurrentes. Les spores sont ovoïdes ou 
ellipsoïdes, grandes, hyalines, blanches* 

Pied central, ordinairement distinct de la chaîr du chapeau, 11 



104 MEMOIRES 

est allongé, souvent atténué supérieurement, plus ou moins renflé 
à la base, charnu ou farci d'une moelle soyeuse. Quelquefois nu, 
le pied est entouré dans le plus grand nombre des espèces par 
un anneau ou collier. 

Les Amanites sont considérées, à juste titre, comme présen- 
tant la culmination du type champignon. Elles sont terrestres et 
croissent de préférence, en été et en automne, dans, les endroits 
ombragés et les forêts humides ; plus rarement elles naissent sur 
les friches et dans les prairies. 

Il est aussi d'autres champignons munis d'une volve et qui 
mériteraient d'être rangés parmi les Amanites, s'ils ne se distin- 
guaient de ces dernières par des spores non blanches et diverse- 
sèment colorées. Ainsi les spores sont roses dans les Volvaria, 
rouilléesdans les Loçellina, noires, pourpres dans les Chitonia, 

Sur une quarantaine d'espèces d'Amanites que compte la flore 
française, trente se rencontrent en Provence. Leurs qualités bro- 
matologiques varient beaucoup ; il en est d'une innocuité parfaite 
et d'un goût exquis ; d'autres sont vénéneuses à un assez haut 
degré. On a donc intérêt à bien les connaître, car les caractères 
tirés de la chair, de la saveur ou de l'odeur varient suivant l'es- 
pèce considérée, et quelquefois même, dans une même espèce, 
suivant Tâge de l'individu. 

On peut, avec mes regrettés maîtres Quélet et Forquignon, 
diviser les Amanites en deux sections : Vaginaria et Peplophora^ 
suivant que l'anneau est oblitéré ou nul, ou qu'il persiste autour 
du pied. D'ailleurs la présence ou l'absence d'un voile partiel est 
un caractère de grande valeur par sa liaison intime avec le déve- 
loppement embryogèniquc du champignon. 

Il y aurait donc lieu d'établir aux dépens du genre Amanita un 
sous-genre Vaginata comprenant les Amanites à volve très dis- 
tincte, mais constamment privées d'anneau (Amanita vaginata, A. 
strangulata, A. leiocephala, A, baccata, etc.). C'est à ce sous-genre 
que correspondraient normalement les Volvaria parmi les Rho- 
dosporées, et le Chitonia coprinus parmi les Pratelles. Un autre 
sous-genre, celui des Peplophora, renfermerait les espèces ayant 
un anneau ou une collerette autour du pied. 

La table dichotomique des espèces de Provence peut s'écrire ; 



DE l'académie de VAUCLUSÈ 10^ 

r. Pied orné d'un collier a 

Pied nu, c'est-à-dire dépourvu de collier 25 

2. Volve persistante, ordinairement bulbiforme et figurant comme une sorte de 

petite coupe, du milieu de laquelle s'élôve le champignon. Dans ce cas le 
chapeau est le plus souvent libre de tout débris de volve 3 

Volve déhiscente circulairement près de sa base et ne laissant après sa chute 
qu'une trace annulaire, un rebord plus ou moins prononcé, qui se remarque 
au-dessus du renflement bulbeux terminant le pédoncule inférieurement. lo 

Volve très friable, très fugace, ne laissant que des écailles ou des squames à la 
base du pied. (Ici, comme dans le groupe précédent, le chapeau après la 
rupture de la volve, emporte la presque totalité de celle-ci qui, plus ou moins 
adhérente, est bientôt divisée par l'extension de l'hyménophore, en petites 
masses de formes différentes que l'on appelle verrues.) ai 

3. Chapeau toujours sensiblement strié à la marge 4 

Chapeau lisse à la marge ou légèrement strié étant vieux 6 

4. Feuillets d'un beau jaune d'or; chapeau cuivré ou jaune orangé, pied jon- 

quille A.caesarea. 

Feuillets blancs 5 

5. Chapeau épais lubréfié, floconneux et excorié au bord, se tachant de rougo 

vineux â l'air »... A. coccola. 

Chapeau aréole crevassé, couvert de mèches fauves A. lepiotoides. 

6. Chapeau diversement coloré 7 

Chapeau blanc g 

7. Chapeau gris bistré ou roux, jaunâtre, purpurin A. porphyria. 

Chapeau blanchâtre, jaune verdâtre ou olive A.virescens^ 

8. Chapeau conique campanule, jamais déprimé au centre; pied plus ou moins 

fortement squamuleux-écailleux ^. virasa. 

Chapeau hémisphérique, étalé ou déprimé au centre; pied glabre ou gla- 
briuscule g 

9. Chapeau très charnu, non visqueux, hémisphérique, sans odeur, saveur 

agréable ; pied plein A, ovoidea* 

Chapeau peu charnu, visqueux, odeur vireusc, saveur acre; pied farci, puis 
creux A. v$ma* 

lo. Chair jaune ou jaunâtre sous la cuticule du chapeaUi « . < < 4 ^ . « \\ 
Chair blanche sous la cuticule du chapeau. «.<«.<«< 4 < « . 16 

I. Chapeau oratigé ou rouge sanguin * . * é . . . . , , la 

Chapeau non orangé ni rouge sanguin^ 4 < « <«.....«< « i3 

J 



ro6 % MÉMomes 

12. Chapeau rouge sanguin A, muscaria' 

Chapeau jaune d'or ou orangé ; verrues nulles; espèce petite. . A. auréola. 

i3. Chapeau jaune cltrin ou jonquille 14 

Chapeau couleur feuille morte, gris souris, brun 16 

I4. Anneau caduc, blanc ou grisâtre ; marge striée i5 

Anneau persistant, jaune citrin; marge non striée. . . . * . A. ciirina. 

i5. Chapeau jonquille pAle ; pied floconneux A. junquilUa, 

Chapeau incarnat, purpurin, lilacin; pied strié au sommet. . . A. Eliat. 

16. Chapeau à marge striée, au moins étant adulte 17 

Chapeau À marge toujours lisse 18 

17. Volve rompue au-dessus du bulbe et paraissant former, à la base du pied, comme 

un deuxième collier; chapeau visqueux couvert de petites verrues blanches 
assez persistantes A. pantàertna. 

Volve ne laissant à la base du pied qu'un simple rebord membraneux nettement 
circonscrit; chapeau sec, couvert de verrues moins nombreuses. A recutita. 

Pied couvert, entre le bulbe et le collier, d'écaillés épaisses généralement dispo- 
sées en cercles concentriques (partie) A. ampia, 

18. Verrues fortes, peu nombreuses, dures, anguleuses et très adhérentes. 

A. strolHliJormis , 

Verrues petites, très nombreuses, aiguès À, echinocephala» 

Verrues membraneuses ou farineuses , -19 

19. Bulbe radiqueux; chapeau blanc, puis gris perle; pied pelucheux. A, solitària. 
« Bulbe non radiqueux 90 

30. Chapeau blanc, luisant, humide, souvent nu, ou avec la cuticule citrine ou 

blanc citrin marquée de plaques floconneuses d'un brun café. . A. mappa. 

Chapeau gris ou fuscescent (partie) «... A. antpla* 

31. Chair du chapeau et du pied rougissant au contact de Tair. ... A. rubenê* 
Chair ne rougissant pas étant brisée. 2a 

as. Chapeau plus ou moins strié à la marge; collier et feuillets ne se tachant pas de 
brunâtre étant blessé» (partie) A. ccriosa. 

Chapeau lisse À la marge • < • . a3 

33. Chair jaunissant oti brunissant sous l^épiderme du chapeau. . . A. aéperd. 
Chair blanche sous l'éplderme du chapeau. ..<...*.«. 34 

ft4. Verrues farineuses* chair molle (partie). .. i ..... . A, Cariosa»* 

Verrues fermes, petites^ adhérentes; chair ferme } chapeAu bruh. é , A. spissa. 



DÉ l'académie dé vaucluse 107 

liS. Chapeau lisse a6 

Chapeau plus ou moins strié 28 

06. Chapeau blanc A. leiocephala. 

Chapeau blanchâtre, lavé de fauve roussâtre 37 

27. Spore pruniforme, ellipsoïde (0—01 3-1 5) A.baccata, 

Spore pluç allongée A.Boudieri. 

38. Pied fistuleux 39 

Pied plein; chapeau orangé, jaune orangé ou rouge, moucheté de verrues flocon- 
neuses et blanches A. gemmata. 

39. Chapeau sans squames A.vagitïata: 

Chapeau squameux A.strangulata, 



I. Amanite oronge; Oronge vraie ; Amanita caesarea ScopoW, FI. 
Carn. II, p. 419; aureus G. Bauhin; aurantius Bulliard, 1. 120.— 
Nom prov. : Royal, Coucoun, à Nice; Dagourido, Toulon. 

Pied farci d'une moelle soyeuse, 
cotonneux, jonquille doré, ainsi 
que l'anneau large et strié. Voile 
membraneux, épais, tenace et 
blanc. Chapeau convexe, puis plan 
(0"oi-i5), nu, lubrifié, orangé, ç\us 
ou moins rouge ou jaune ; marge 
droite et striée. Chair ferme, jaune 
sous Tépiderme, parfumée et sa- 
pide. Lamelles libres, jonquille 
doré. Spore (o"»"o 12) ovoïde, ocel- 

Flg. I. — Amanite Oronge, lée. 

Été-automne. A terre dans les sols siliceux, surtout sous les 
châtaigners. Toute la Provence, mais rare. Comestible très 
estimé, bien supérieur à TAmanite ovoïde. Ses qualités bromato- 
logiques étaient connues des anciens. On Ta appelé avec raison 
le meilleur des champignons : on sait que Tempereur Claude Tai- 
mait avec passion, et qu'Agrippine causa sa mort en versant du 
poison dans un plat de ces Amanites. Jamais d'ailleurs cette 




idS MÉMOfRÉS' 

espèce n'a causé aucun accident et elle est appréciée de touS 
comme un mets délicat, « un mets des dieux » comme l'appelait 
Néron. Les botanistes ont consacré ces souvenirs par le nom 
donné à ce champignon : Amanite des Césars. 



2. Amanite Coccola; Amanita coccola Scopoli, Carn. II, p. 429; 
regia Pries. — Nom prov. : Lera, à Nice. 

Blanc. Pied long [©""i-iS), épais, farci d'une moelle cotonneuse, 
strié au-dessus d'un anneau floconneux, souvent oblitéré et fur- 
furacé floconneux en dessous ; bulbe napiforme radicant. Voile 
ample, épais, villeux, blanchâtre, puis chamois. Chapeau convexe 
{o"o6-io), épais, lubrifié ; floconneux et excorié au bord, se tachant 
à l'air de rose vineux. Chair compacte, sapide, blanche, rougis- 
sant à Vair. Lamelles libres, farineuses au bord, blanc crème, à 
reflet verdâtre (couleur de cire pâle) et rougissant au toucher. 
Spore ovoïde ou ellipsoïde (o*"oi-ï4), guttulée blanc hyalin. 

Été-automne. Terrains secs et arides des bois, surtout de 
chênes, dans toute la région méditerranéenne, dont elle est 
caractéristique. A les mêmes propriétés alimentaires que l'Ama- 
nite ovoïde, à laquelle elle ressemble beaucoup et dont elle 
diflfere surtout par les fines stries qui se remarquent sur les bords 
du chapeau, par le pied farci au lieu d'être plein, par la nuance 
des lamelles et surtout par la teinte rosée qu'il prend à l'air. 
Quélet [Assoc. franc., 1886, p. i, pi. IX, fig. i) décrit une forme de 
ce champignon sous le nom de Am. Coccola Scop., var. Barlae. 
Toute la Provence, mais généralement plus rare que A. ovoïdea. 



3. AmamiTS lêwote ; Amanita lepiotoides Barla, Fl. myc.,t. VIII, 
f. 1-8. 

Chapeau aféolé crevaâsé, couvert de mèches jaures formées aux 
dépens de la couche Inférieure du voile et adhérentes à la cuticule 
par tirte dessicatlon rapide qui a empêché le glissetnent du volva 
et â produit à la fin des aréoles cfevassées ofi'rant l'aspect d'un 
chapeau de lepiotai 



DE l'académie de VAUCLUSE fO^^* 

Printemps. Alpes-Maritîmes; sur les terrains siliceux : Mont- 
daour. N'est pour Quélet qu'un lusus de coccola. Beaucoup d'autres 
espèces offrent ces formes curieuses ou lusus météoriques sous 
l'influence des changements brusques de température. 

Barla dit : « Ce champignon a toujours été récolté au môme 
endroit. » Cette particularité expliquerait la constance des carac- 
tères qui ont motivé son élévation au rang d'espèce, mais ce fait 
viendrait à l'appui de la thèse de Quélet qui voit là une forme 
anormale, due à des influences météoriques. 



4. Amanite porphyre ou pourprée ; Amanita porphyria Albertini 
et Schweinitz; Agaricus bulbosus Mb. et Sch.,t. II, f. i. 

Pied grêle, farci, puis creux, villeux et blanc, légèrement chiné 
de gris violacé, à bulbe globuleux et petit; anneau espacé, ténu, 
blanc, transformé de bonne heure en une pellicule bistre noirâtre, 
appliquée sur le pied. Voile mince, marginé, blanc ou roussàtre. 
Chapeau campanule, puis plan (o^oS-yj, humide, gris bistré avec 
un reflet lilacin, quelquefois roux, jaunâtre, purpurin, nu; marge 
unie, rarement substriée. Chair mince, tendre, blanche, à odeur 
vireuse. Lamelles adnées, serrées, molles, ténues et blanches. 
Spore sphérique (o""oi) ocellée. 

Juillet-août. Alpes-Maritimes, régions montagneuse et alpine : 
bois du Ferguet, Cairos. Rare. Est suspecte. Sans l'anneau elle 
pourrait être confondue avec quelques-unes des nombreuses 
variétés de vaginata. 



5. Amanite verdatre ; Amanita virescens Vaillant. Bot., t. 14, f. 5; 
bulbosus Bulliard, t. 2; viridis Persoon; Wro5W5 Vittadini ; 
phalloides Pries, var. pileo-pallide-viridi ; Saccardo, V, p. 9. — 
Nom prov. : Lera verda, Lera verda picoutada à Nice. 

Pied farci d*une moelle soyeuse, bulbeux, floconneux et blanc ; 
anneau ample, mince, blanc verdoyant ou bistré. Voile mem- 
braneux, blanchâtre, jaunâtre ou verdatre en dedans. Cha- 
peau ovoïde, puis étalé (o*"!), finement rayé par des fibrilles 
soyeuses innées, un peu visqueux, blanchâtre, jaune verdatre ou 



1 10 MEMOIRES 

olive, rarement recouvert de larges lambeaux membraneux; 
marge unie. Chair blanchâtre, insipide, à odeur vireuse pronon- 
cée. Lamelles libres, ventrues, blanches avec une teinte verdâtre. 
Spore sphérique (o""©!). 

Été-automne. Bois humide de nos montagnes. Alpes-Mariti- 
mes : Le Ferghet, la Maïris, Tende, etc. Vénéneux. 

L'Amanite verdâtre, A. phalloïde, Oronge ciguë verte pour- 
rait être confondue avec les Russules vertes, telles que les Russula 
virescens, R, heterophylla, qui sont des espèces comestibles des 
plus recommandables. La distinction est importante au point de 
vue bromatologique, car TAmanite verdâtre est, avec V Amanite 
citrine, le plus redoutable des champignons. La distinction sera 
facile si Ton se rappelle queTAmanite verdâtre a un anneau et un 
étui à la base du pied, pièces qui manquent aux Russules vertes. 

Cette espèce présente un certain nombre de variétés basées 
suftout sur le changement de teinte du chapeau. J'ai observé en 
Provence la variété blanche [alba, assez rare. Var ; Entrecosteaux) 
et la variété fauve {fulva, bois de Pichauris). 



6. Amanite vireuse; Amanita virosa Pries. — Nom prov. : Lera 
b lança picoutada, Nice. 

Pied blanc, plein, atténué de bas en haut, couvert au-dessous 
du collier depeluchures plus ou moins fortes. Collier blanc, fine- 
ment strié supérieurement, lâche, frangé sur les bords. Chapeau 
charnu pointu-conique, puis un peu étalé (o^oS-S), jamais déprimé 
au centre, humide et môme visqueux ou glutineux, luisant, blanc 
parfois gris-jaunâtre au sommet, couvert dans la jeunesse des 
débris de la volve. Chair blanche ; odeur forte, vireuse. Lamelles 
blanches, libres, assez nombreuses, linéaires-lancéolées. 

Printemps-été. Dans les bois. Solitaire. Alpes-Maritimes, régions 
montagneuse et alpine : Mont,daour, la Bollène, etc. Très 
vénéneuse. Quélet en fait un synonyme de verna. 



7. Amanite ovoïde ou Oronge blanche; Amanita ovoidea Bul- 
liard; Agaricus ovoideus-albus Bulliard, t. .%4; alba, Persoon. 
— Noms prov. : Lera blancoFarinet, èiNïce; Coucoumello, Apt; 
Coucoumèu, Lambesc; Pignendi blanc, Peynier; Farinouso, 
Fontvieille; Gros blanc, Pertuis, etc. 



DE L*ACADéMIE DE VAUCLUSE II f 

Tout blanc. Pied pleitij, gros, ferme, épaissi à la base, flocon- 
neux, farineux; anneau très ample, glabre en dessus, écailleux 
floconneux en dessous, se désagrégeant souvent en fragments 
floconneux. Voile membraneux, persistant et blanc. Chapeau 
convexe plan (o'"i-2), nu, humide; marge unie, floconneuse. Chair 
inodore, agréable au goût. Lamelles serrées, larges, libres, denti- 
culées,blanc hyalin, puis crème. Spore ovoïde (o~oi2-i5), allon- 
gée guttulée. 

Se montre communément après les premières pluies de Tété 
dans toute la Provence ; elle vit dans les clairières de nos bois 
de pins par petits groupes ; plus rarement elle est solitaire. 
On la mange partout. Elle constitue un aliment assez délicat, 
mais manquant un peu de parfum. L'anneau se résout en 
particules blanches, ce qui fait paraître le haut du pied comme 
farineux et justifie les qualificatifs de farinaccio et de farinouso 
donnés en Toscane et dans certaines communes de la Provence. 
i Bien prendre garde de ne pas récolter parmi les petits individus 
de cette grosse espèce, — qui par son pied d'au moins de deux à 
trois centimètres est toujours facilement reconnaissable, — 
l'Amanite vireuse que Ton pourrait peut-être confondre avec 
elle. 



8. Amanite printanière ; Oronge printanière. Oronge blanche ; 
Atnanita verna Lamarck; bubosusvernus Bulliard,t. io8; Atn, 
bulboza alba Pers.; Am. venenatus Roques; Wro5M5 Pries ; 
vernus De Candolle ; bulbosa alba Persoon ; venenatus Roques; 
Am, vernalis Roum. et Gillet. — Nom prov. : Leva blanca 
picoutada, à Nice. 

Blanc. Pied farci, puis creux, ovoïde à la base, floconneux; 
anneau strié en dessus, farineux en dessous. Voile membraneux, 
mince, en fourreau et blanchâtre. Chapeau convexe, puis étalé, 
légèrement déprimé, un peu visqueux, nu, blanc de neige, pre- 
nant une teinte ocracée au centre. Chair mince, humide et acre, à 
odeur de safran (Vittadini). Lamelles libres, élargies en avant, 
blanc crème, pulvérulentes sur Tarète. Spore ovoïde (o""oi2), 
ponctuée. 

Printemps-été. Bois arénacés et humides. Alpes-Maritimes, 
région montagneuse : Montdaour, bois de la Maïris, etc. Très 
VÉNÉNEUSE. Ressemble à Amanita junquillea. Pour Gillot et 
Lucand Amanita verna et Amanita junquillea seraient peut-être 
des races régionales d'une même espèce. 



112 



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DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



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Gard (MM. de Seynes et Planchon). Les Sœurs de charité de 
Thospice de Saint-Germain-en-Laye en mangent une grande 
quantité (Eloffe). Mérat a vu des soldats en consommer beau- 
coup sans être incommodés. 

En Provence, la fausse Oronge est fort rare, et on ne Ta guère 
signalée que sur quelques points des Alpes-Maritimes et de 
Vaucluse. Prise en assez grande quantité, elle agit sur le sys- 
tème nerveux en produisant le plus souvent une sorte d'ébriété. 
Les Kamtschadales en retirent une boisson fermentée avec 
laquelle ils se grisent, et comme les propriétés enivrantes sont 
transmises à Turine de Tivrogne, il en résulte que celle-ci est 
précieusement recueillie et peut servir ainsi plusieurs fois à pro- 
duire rivresse convoitée. 

Comme il est très important de ne point confondre la fausse 
Oronge [vénéneuse] avec TOronge vraie [comestible excellent), voici 
les caractères distinctifs : 



La fausse Oronge est d'abord 
renfermée dans une sorte de 
bourse ou volve incomplète qui 
se crevasse en polygones sur 
toute sa surface ; 

Le chapeau est d'un rouge 
vermillon, humide, un peu vis- 
queux, à bords striés, et le plus 
souvent parsemé à sa surface de 
verrues blanches ou jaunâtres ; 



Les lamelles sont blanches; 

Le pied est blanc cylindrique, 
terminé à sa base par un bulbe 
plus ou moins gros qui con- 
serve des débris de la volve en 
forme d'écaillés disposées cir- 
culairement; 

L'anneau est blanc, large, ra- 
battu et finement strié ; 

L'odeur est légèrement vi- 
reuse ou nulle. 



L'Oronge vraie est d'abord 
renfermée dans une sorte de 
sac membraneux ou volve corn- 
plète ; 

Le chapeau est d'un rouge 
orangé, à surface sèche, lisse, 
satinée, à bords striés, à épi- 
derme dépourvu de verrues, 
mais conservant quelquefois 
des débris de la volve sous for- 
me de plaques blanches et irré- 
gulières ; 

Les lamelles sont d*un jaune 
doré ; 

Le pied est jaune, cylindri- 
drique,unpeu aminci en pointe 
à sa base et entouré d'une volve 
ample, blanche, entière; 



L'anneau est yawfie, large, ra- 
battu et strié. 
L'odeur est agréable, 



ÎM MÉMOIRES 

Cette espèce comporte plusieurs variétés : 

Puella : plante ordinairement plus petite; chapeau nu. 

Sanguinea : chapeau rouge sanguin ; verrues blanches, assez 
régulières. 

Formosa Persoon ; Royal rçuge, à Nice : pied long, floconneux, 
jaunissant. Chapeau orangé fauve, moucheté de verrues crème 
citrin. Bois des Alpes-Maritimes. 

Tomentosa : pied plus ou moins tomenteux ou peluché au- 
dessous du collier. 

Ces variétés sont vénéneuses comme le type. 



10. Amanite jaune d*or; Amanita auréola Kalchbrenner ; musca- 
rius, var. puella Persoon. —Nom prov. : Lera roussa, Nice. 

Pied élancé, long de 0,10-12 cent., épais de 9-i5"", cylindrique, 
plus ou moins allongé, grêle, squamuleux, floconneux, plein puis 
creux blanc jaunâtre. Chapeau peu charnu, campanule, étalé, 
visqueux (o"o6^), jaune d or ou orangé, nu ou parsemé de quel- 
ques fragments de volve ; marge plus claire ou jonquille, striolée. 
Anneau membraneux, rupère concolore au pied. Lamelles libres, 
arrondies à la marge, blanches. Volve adnée à limbe plus ou 
moins libre, fugace. Odeur et saveur faibles. Spore sphérique. 

Automne. Dans les bois humides et ombragés, surtout ceux 
de conifères. Alpes-Maritimes, région montagneuse : Montdaour, 
la BoUène, sous les sapins. Claus. la Mains, le Ferguet, San- 
Romolo. Ceriana près San-Remo. Rare. Vénéneuse. 

N*est probablement qu*une forme de muscaria. 



II. A.manite citrine; Amanita citrinj Schasfler: fw/fro^i/sBulliard, 
t. 577. f. G. H. M. ; citrinoalhus Viltadini : stramineus Scopoli ; 
mappa Pries, Vittadini, t. II ; venenosa Persoon ; phalloUes 
Fries> var. pileo-Jlavo, — Nom. prov. : Lera rot^ssa picoutada, 
à Nice. 

Pied farci d'une moelle, ferme, blanc, lavé de citrin : bulbe 
globuleux; anneau ample, mince, fmement strie, blanc, citrin 
pâle en dessous. Voile margine membraneux, floconneux, fugace, 



DE l'académie de vaucluse ii5 

blanc, citrin ou fuligineux. Chapeau hémisphérique puis étalé 
(o"!), glabre, luisant, humide, jaune serin ou blanc à reflet citrin, 
recouvert de flocons blancs ou citrins ; marge unie. Chair blan- 
che, citrine sous la cuticule, amère, nauséeuse ; odeur de rave. 
Lamelles serrées, blanches avec Varéte citrine. Spore sphérique 
(o-^ooS). 

Automne. Bois sablonneux. Alpes-Maritimes, région monta- 
gneuse : Braus, le Ferghet, Berra, la Mairis, Montdaour, etc. 
Très vénéneux. 



12 



Amanite jonquille; Amanita junquillea Quélet, BulL soc, bot, 
de France, 1876, p. 824, t. 3, f. 10 et FI. mycol., p. 3o8. 

Pied farci d'une moelle soyeuse, floconneux, blanc, à bulbe 
ovoïde ; anneau blanc, caduc, ordinairement déchiré et suspendu 
à la marge. Voile mou, déchiré, plus ou moins marginé, blanc. 
Chapeau campanule convexe (o^oS-ô), un peu visqueux, jonquille 
pâle, parsemé de plaques floconneuses d'un blanc de neige ou 
plus rarement nu ; marge striée sillonnée, blanc crème. Chair 
molle, humide, douceâtre, blanche, jaunâtre sous la cuticule 
séparable. Lamelles serrées, décurrentes en filet, élargies en 
avant, blanches ou blanc crème. Spore ovoïde sphérique (o^^oi -12). 

Été-automne. Bois sablonneux. Alpe3-Maritimes, régions mon- 
tagneuse et alpine : bois de la Fraccha. Rare. Comestible. 

Pour Barla cette espèce ressemble beaucoup à la forme grêle 
de V Amanita auréola et aussi à Am, citrina. D'après Gillot et 
Lucand, A. junquillea et A. verna seraient peut-être deux races 
régionales d'une même espèce. 



i3. Amanite d'Elias ; Amanita Eliae Quélet, Jura et Vosges, t. 23, 
f. I. 

Pied farci d'une moelle soyeuse, grêle, floconneux, strié au 
sommet et anneau mince, plissé, blancs de neige. Voile en four- 
reau étroit, floconneux farineux, /z/^wzc^, grisâtre. Chapeau cam- 
panule, puis plan (o°'o5-6), rarement couvert de lambeaux flocon- 
neux et gris chocolat, humide, satiné, incarnat purpurin ou lila- 



j 



112 



MEMOIRES 



9. Amanite tue-mouches ou Fausse Oronge (Amanita muscaria 
Linné); Agaricus nobilis Boit: Ag. psetido-^iurantiacus Bul- 
liard, t. 122 ; Amanita Jormosa Gonn. Rab. ; A, puella Gonn. 
Rab. — Nom prov.: Faus coucoun. Royal picotitai, Royal rouge, 
Real velenous, à Nice. 

Pied gros, â moelle soyeuse, strié au sommet, blanc ou teinté 
de citrin, à bulbe entourée d'une marge floconneuse et zonée ; 
anneau lâche, substrié, blanc, floconneux et teinté de citrin en 
dessous. Chapeau convexe plan (o'"i2;, visqueux, nacarat, orangé ; 
plus rarement jaune d'or ou rouge vif et parfois fauve ou brun, 
brillant, parsemé de flocons membraneux, épais, blancs ou citrin 
pâle ; marge finement striée. Chair blanche, jaune clair sous la 
cuticule, douceâtre ou insipide, salée (Bertillon), inodore. La- 
melles libres, épaisses, finement denticulées, blanches ou un peu 
jaunâtres. Spore ovoïde sphérique (o^^ooy^. 

Été-automne. Solitaire, dans les bois montueux. Alpes-Mariti- 
mes, régions montagneuse et alpine : les bois de Lamaïris, du 
Ferguet, de Clans, à Tende, Mondaour. Très vénéneuse. On ne 
pourrait la confondre qu'avec Caesarea, mais son chapeau est 
verruqueux, ses lames et son pied blancs et il n'y a pas de volve 
en forme de bourse. 

Cette magnifique espèce doit 
son nom spécifique à l'action 
funeste qu'elle exerce sur les 
mouches. Ces insectes vont se 
poser sur ce champignon, dont 
l'odeur les attire, mais ils n'ont 
souvent pas le temps de s'en- 
voler et meurent sur place. Cette 
propriété est utilisée en Russie. 
Son action sur l'homme et sur 
les vertébrés supérieurs est na- 
turellement moins prononcée, 
c'est ainsi que Bulliard a pu 
manger deux onces de cet Aga- 
ric sans inconvénient. L'ébuUi- 
tion prolongée fait disparaître 




Fig. a. — Amanite tue-mouches. 



le principe nocif, aussi l'Amanite tue-mouches est-elle consommée 
en Russie et dans certaines communes de la Lozère et du 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



Il3 



Gard (MM. de Seynes et Planchon). Les Sœurs de charité de 
l'hospice de Saint-Germain-en-Laye en mangent une grande 
quantité (ElolTe). Mérat a vu des soldats en consommer beau- 
coup sans être incommodés. 

En Provence, la fausse Oronge est fort rare, et on ne Ta guère 
signalée que sur quelques points des Alpes-Maritimes et de 
Vaucluse. Prise en assez grande quantité, elle agit sur le sys- 
tème nerveux en produisant le plus souvent une sorte d'ébriété. 
Les Kamtschadales en retirent une boisson fermentée avec 
laquelle ils se grisent, et comme les propriétés enivrantes sont 
transmises à l'urine de Tivrogne, il en résulte que celle-ci est 
précieusement recueillie et peut servir ainsi plusieurs fois à pro- 
duire rivresse convoitée. 

Comme il est très important de ne point confondre la fausse 
Oronge (vénéneuse) avec TOronge vraie (comestible excellent), voici 
les caractères distinctifs : 



La fausse Oronge est d'abord 
renfermée dans une sorte de 
bourse ou volve incomplète qui 
se crevasse en polygones sur 
toute sa surface ; 

Le chapeau est d'un rouge 
vermillon, humide, un peu vis- 
queux, à bords striés, et le plus 
souvent parsemé à sa surface de 
verrues blanches ou jaunâtres ; 



Les lamelles sont blanches; 

Le pied est blanc cylindrique, 
terminé à sa base par un bulbe 
plus ou moins gros qui con- 
ser\'e des débris de la volve en 
forme d'écaillés disposées cir- 
culairement; 

L'anneau est blanc, large, ra- 
battu et finement strié ; 

L'odeur est légèrement vi- 
reuse ou nulle. 



L'Oronge vraie est d'abord 
renfermée dans une sorte de 
sac membraneux ou volve com- 
plétez- 
Le chapeau est d'un rouge 
orangé, à surface sèche, lisse, 
satinée, à bords striés, à épi- 
derme dépourvu de verrues, 
mais conservant quelquefois 
des débris de la volve sous for- 
me de plaques blanches et irré- 
gulières ; 

Les lamelles sont d'un jaune 
doré ; 

Le pied est jaune, cylindri- 
drique, unpeu aminci en pointe 
à sa base et entouré d'une volve 
ample, blanche, entière ; 



L'anneau est jaune, large, ra- 
battu et strié. 
L'odeur est agréable. 



ÏÎ4 MEMOIRES 

Cette espèce comporte plusieurs variétés : 

Puella : plante ordinairement plus petite; chapeau nu. 

Sanguinea : chapeau rouge sanguin ; verrues blanches, assez 
régulières. 

Formosa Persoon ; Royal rçuge, à Nice : pied long, floconneux, 
jaunissant. Chapeau orangé fauve, moucheté de verrues crème 
citrin. Bois des Alpes-Maritimes. 

Tomentosa : pied plus ou moins tomenteux ou peluché au- 
dessous du collier. 

Ces variétés sont vénéneuses comme le type. 



lo. Amanite jaune d*or; Amanita auréola Kalchbrenner ; tnusca- 
rius, var. puella Persoon. —Nom prov. : Lera roussa, Nice. 

Pied élancé, long de 0,10-12 cent., épais de g-iS""", cylindrique, 
plus ou moins allongé, grêle, squamuleux, floconneux, plein puis 
creux blanc jaunâtre. Chapeau peu charnu, campanule, étalé, 
visqueux (o"o6^), jaune d'or ou orangé, nu ou parsemé de quel- 
ques fragments de volve ; marge plus claire ou jonquille, striolée. 
Anneau membraneux, rupère concolore au pied. Lamelles libres, 
arrondies à la marge, blanches. Volve adnée à limbe plus ou 
moins libre, fugace. Odeur et saveur faibles. Spore sphérique. 

Automne. Dans les bois humides et ombragés, surtout ceux 
de conifères. Alpes-Maritimes, région montagneuse : Montdaour, 
la BoUène, sous les sapins. Claus, la Maïris, le Ferguet, San- 
Romolo, Cerianaprès San-Remo. Rare. Vénéneuse. 

N'est probablement qu'une forme de muscaria. 



II. Amanite citrine; Amanita citrina Schaefler; ftt//fto5W5Bulliard, 
t. 577, f. G. H. M. ; citrinoalbus Vittadini ; stramineus Scopoli ; 
mappa Pries, Vittadini, t. II; venenosa Persoon; phalloïdes 
Pries, var. pileo-flavo. — Nom. prov. : Lera roussa picoutada, 
à Nice. 

Pied farci d'une moelle, ferme, blanc, lavé de citrin ; bulbe 
globuleux; anneau ample, mince, finement strié, blanc, citrin 
pâle en deçsous. Voile marginé membraneux, floconneux, fugace, 



DE l'académie de vaucluse ii5 

blanc, citrin ou fuligineux. Chapeau hémisphérique puis étalé 
(o"!), glabre, luisant, humide, jaune serin ou blanc à reflet citrin, 
recouvert de flocons blancs ou citrins ; marge unie. Chair blan- 
che, citrine sous la cuticule, amère, nauséeuse; odeur de rave. 
Lamelles serrées, blanches avec V arête citrine. Spore sphérique 
{©""ooS). 

Automne. Bois sablonneux. Alpes-Maritimes, région monta- 
gneuse : Braus, le Ferghet, Berra, la Mairis, Montdaour, etc. 
Très vénéneux. 



12. Amanite jonquille; Amanita junquillea Quélet, Bull. soc. bot. 
de France, 1876, p. 824, t. 3, f. 10 et FI. mycoL, p. 3o8. 

Pied farci d'une moelle soyeuse, floconneux, blanc, à bulbe 
ovoïde ; anneau blanc, caduc, ordinairement déchiré et suspendu 
à la marge. Voile mou, déchiré, plus ou moins marginé, blanc. 
Chapeau campanule convexe (o^oS-ô), un peu visqueux, jonquille 
pâle, parsemé de plaques floconneuses d'un blanc de neige ou 
plus rarement nu ; marge striée sillonnée, blanc crème. Chair 
molle, humide, douceâtre, blanche, jaunâtre sous la cuticule 
séparable. Lamelles serrées, décurrentes en filet, élargies en 
avant, blanchesou blanc crème. Spore ovoïde sphérique (o""oi -12). 

Été-automne. Bois sablonneux. Alpes-Maritimes, régions mon- 
tagneuse et alpine : bois de la Fraccha. Rare. Comestible. 

Pour Barla cette espèce ressemble beaucoup à la forme grêle 
de V Amanita auréola et aussi à Am. citrina. D'après Gillot et 
Lucand, A. junquillea ei A. verna seraient peut-être deux races 
régionales d'une même espèce. 



i3. Amanite d'Elias ; Amanita Eliae Quélet, Jura et Vosges, t. 23, 
f. I. 

Pied farci d'une moelle soyeuse, grêle, floconneux, strié au 
sommet et anneau mince, plissé, blancs de neige. Voile en four- 
reau étroit, floconneux farineux, fugace, grisâtre. Chapeau cam- 
panule, puis plan (^"oS-ô), rarement couvert de lambeaux flocon- 
neux et gris chocolat, humide, satiné, incarnat purpurin ou lila- 



ij6 



MÉMOIRES 



cin; marge sillonnée et blanche. Chair tendre, sapide et blanche. 
Lamelles atténuées adnées, blanches. Spore ovoïde (o—oiS), 
ponctuée. 

Été-automne. Bois sablonneux et ombragés. Vaucluse, vallon 
de Regallon, dans le Luberon. Alpes-Maritimes, région monta- 
gneuse : Montdaour. Rare. Comestible ? 



14. Amanite panthère ; Anuznita pantherina de Candolle, FI. fr., 
VI, p. 52; Vittadini, Fung. mang., t. Sg; macwte/w5 Schœffer, 
t. 90; cinereuSj Juliginosus et herpeticm Roques; verrucosus et 
umbrina Persoon ; cinerea Krombh. — Nom prov. : Lera 
negra, Lera bruna picoutada, à Nice. 



Pied à moelle soyeuse, blanc, 
à bulbe globuleux, glabre, en- 
touré d'une marge membra- 
neuse, étroite, blanche et sou- 
vent d'un bracelet très rappro- 
ché ; anneau mince, strié et 
blanc. Chapeau convexe plan 
(o^i), visqueux, puis lustré, gris 
bistré clair, blanchâtre, paille, 
fuligineux ou olivâtre, plus 
foncé au centre, quelquefois 
brun ou châtain, orné de flocons 
farineux, serrés et blancs; marge 
profondément sillonnée, canne- 
lée. Chair mince, humide, blan- 
che, insipide, odeur vireuse. La- 
melles arrondies vers la marge, 
adnées en fllet. Spore ovoïde 
allongée (o'"'"oi-i2). 




Fig. 3. — Amanite panthère. 



Été-automne. Bois montueux. Assez rare. Alpes-Maritimes, 
régions littorale et montagneuse : Cagnes, Villeneuve, bois de 
TEstérel et de la Fraccha, Campargen, Saint-Colomban, etc. Var : 
Entrecasteaux. Très vénéneuse. 



bÊ l'académie DE' VAUCLUSE Xtf 

i5. Amanite déchirée; Amanita reculiia Fries, Hym. Europ., 
p. 19; bulbosus Bulliard, t. 577, f. E. F. ; gracilis Schum ; 
phalloïdes Secretan ; tomentella Krombh. 

Pied atténué en haut, soyeux, blanc chiné de gris, lilacin, à 
bulbe arrondi et gros ; anneau distant et blanc. Voile grisâtre 
bistré, à peine marginé. Chapeau convexe puis plan (o""!), soyeux, 
bistre violacé, le plus souvent tacheté par des lambeaux farineux 
et blanchâtres. Chair blanche, peu épaisse; odeur désagréable; 
saveur d*abord douceâtre, puis acre. Lamelles décurrentes en 
filet, blanches. Spore sphérique (o^^oi). 

Été-automne. Bois de conifères sablonneux. Alpes-Maritimes, 
région alpine : Borrometta. Très vénéneuse. 

Quélet voit dans cette espèce une simple variété d'Amanita 
porphyria. 



16. Amanite ample; Oronge élancée; Amanita amp la Persoon, 
Syn, p. 255; excelsus Fries ; pustulatus Scopoli. — Nom prov. : 
Lera bruna picoutada, à Nice. 

Pied farci d'une moelle soyeuse, épais, long, grisâtre, à bulbe 
déprimé, globuleux, entouré de zones floconneuses ; anneau 
ample, déchiré et blanc. Chapeau globuleux, puis plan (0"i5), 
ondulé, rugueux, visqueux, gris roux ou bistre, finement rayé 
par un chevelu inné, bistré noirâtre, tacheté de plaques farineuses 
grisâtres et très caduques ; marge lisse, puis sillonnée et plus 
claire. Chair molle, blanche; saveur agréable, odeur vireuse. 
Lamelles libres, très larges et blanches. Spore ovoïde sphérique 

(G""©!). 

Automne. Bois montueux. Alpes-Maritimes, région monta- 
gneuse : Berra, Luceram, bois de la Maîris, etc. Vénéneuse. 

Voisin de pantherina, le chapeau a la môme couleur, mais il 
n'est pas strié, il est finement rayé par un chevelu inné. Les 
lames sont libres, très larges, elles sont adnées dans pantherina, 
qui a en outre le pied glabre, tandis qu'il est écailleux, flocon- 
neux dans ampla. Les verrues grisâtres et farineuses sont extrê- 
mement caduques. 

Est à pantherina ce qUe Lepiota procerj est à graciletitaé 



ïr8 MÉMOIRES 

17. Amanite POMME DE PIN ; Amanita strobiliformis, Paulet, Champ., 
t. 162, f. I ; solitarius Bulliard, t. SgS; ampla Vittadini, t. 9. 

Pied plein, ferme, épais, blanchâtre', couvert de flocons grisâ- 
tres, à bulbe ovoïde, souterrain, orné de deux ou trois bourrelets 
épais et crénelés; anneau mince, large, tombant du sommet du 
pied, strié et blanc. Chapeau hémisphérique, puis plan (o"i), 
blanc grisonnant, couvert de verrues floconneuses, pyramidales et 
grises. Chair compacte, blanche, sapide. Lamelles libres et 
arrondies, décurrentes en filet, blanches. Spore ovoïde (o"™oi), 
subsphérique ou ellipsoïde. 

Été-automne. Bois montueux. Alpes-Maritimes, région litto- 
rale : Drap, localité dite la Bauma. Rare. Comestible délicat, 
selon Vittadini. Ressemble à spissa. 



î 8. Amanite a tête hérissée; Amanita echinocephala Vittadini, 
Fung. Mang., p. 846; Fries, Hym. Europ.,p. 22; tricuspidata 
Paulet, t. i63, f. 3; Lepicta echinocephala Gillet, p. 69. 

Pied allongé, floconneux, plein, puis creux présentant à la 
base un bulbe couvert d'écaillés plus ou moins fortes et terminé 
par une forte pointe qui s'enfonce en terre. Collier blanc, descen- 
dant, se détruisant assez promptement et ne persistant guère 
que sous forme de débris; il est strié supérieurement. Chapeau 
charnu, d'abord hémisphérique, puis convexe, ensuite plan 
(o"o5-7), les bords souvent relevés, blanchâtre ou gris, luisant et 
recouvert de verrues aciculées et grises qui disparaissent plus ou 
moins à la fin. Lamelles nombreuses, plus larges au sommet, 
aiguës à la base et adhérentes, blanches, jaunâtres ou verdàtres 
à la fin. Chair ferme, roussâtre, blanche à la base du pédicule ; 
odeur de champignon ; saveur nulle. 

Automne. Ça et là dans les bois argilo-calcaires. Alpes-Mari- 
times, région montagneuse : Berra. Rare. Je le cueille assez 
souvent après les pluies de l'été entre Saint-Privat et le Pont-du- 
Gard, sous les chênes verts où M. de Seynes l'avait déjà indiqué* 
Gillet donne cette espèce comme très vénéneuse* 

Est assez semblable à solitaria, dont il n'est peut-être pas spéci- 
fiquement distinct (Quélet). Le port et les caractères de l'anneau 



riÉ L^ACADÉMIE DE VAUCLUSE IÏ^ 

ie rapprochent bien plus des Amanites que des Lépiotes, parmi 
lesquels Pries Ta rangé dans son Epicrisis. 



19. Amanite solitaire; Amanita solitaria BuUiard, t. 48, SgS; 
adamantina Paulet, t. 162, f. 2 ; strobiliformis Vittadini ; pellita 
Secretan ; nitidus Pries ; albellus Scopoli. 

Blanc. Pied plein, épais, peluché, floconneux, à bulbe turbiné 
conique, radicant, entouré de zones floconneuses épaisses ; 
anneau ample, épais, floconneux et strié. Chapeau convexe 
plan (o"i), humide, blanc, puis gris perle, parsemé d'épaisses 
plaques, floconneuses et blanches, puis indurées et grisâtres ; 
marge lisse, frangée, floconneuse. Chair tendre, blanche, agréable 
au goût et à Todorat. Lamelles libres à fllet décurrent, ventruesi 
finement crénelées, blanc de neige. Spore ovoïde (o""!), ponctuée. 

Été-automne. Dans les clairières et à Torée des bois. Toute la 
Provence, mais partout assez rare. Alpes-Maritimes, région 
littorale : environs de Nice, Cimiez, Saint-André, etc. Comes'tible, 
quoique Barla la donne comme suspecte. 



20. Amanite carte géographique ou Amanite vénéneuse ; 
Amanita mappa Pries; Agaricus bulbosu^ Bulliard, tab. 677, 
flg. D, G, H, M; Ag, citrin(Hilbus Vittadini; Ag. stramineus 
Scopoli; Amanita citrina Persoon, var. P; A, venenosa Per- 
soon. — Nom prov. : Lero rousso picoutado, à Nice. 

Pied glabre, blanc, droit, cylindrique, finement strié au-dessus 
du collier, un peu aminci supérieurement, muni d'un bulbe 
globuleux à la base, plein, puis fistuleux, plus long que le 
diamètre du chapeau. Collier étroit, un peu rabattu, blanc ou 
pâle, persistant. Volve blanc sale ou grisâtre, caduque, mais 
laissant une marge plate à la partie supérieure du bulbe. Cha- 
peau charnu (o^oS-ô), convexe, puis dilaté, plan, sec, blanchâtre, 
blanc jaunâtre, jaune citron ou jaune de soufre, parfois légère- 
ment teinté de verdâtre ou de fauvâtre, luisant, lisse, ordinaire- 
ment parsemé de plaques irrégulières d'un blanc sale, grisâtres, 
roussâtres ou café au lait. Lamelles blanches ou pâles, nom- 
breuses, finement denticulées sur les bords, inégales, libres ou 



120 MEMOIRES 

subadhérentes, larges et obtuses au sommet, atténuées et obtuse^ 
à la base. Chair peu épaisse, blanche et molle. Odeur nulle ou 
vireuse. Saveur désagréable, à la fin acre et styptique. 

Été-automne. Solitaire. Sur la terre, dans les bois sablonneux. 
Alpes-Maritimes, région montagneuse : Montdaour, bois de la 
Maïris, Moulinet, bois deMandina, Saorge, etc. Très vénéneuse. 
N'est pour Quélet qu'une variété de Amanita citrina Schaefler. 

Offre des variétés nombreuses jadis admises comme espèces 
distinctes et dont les caractères différentiels les plus marquants 
sont : la couleur du chapeau variant du blanc au vert, passant 
par tous les verts et jaune paille, et l'absence ou la présence de 
verrues sur le chapeau. 

Cette Amanite fait chaque année de nombreuses victimes; elle 
occasionne des angoisses et des souffrances indicibles aux im- 
prudents qui la mangent, et souvent même elle cause leur mort. 
Au moyen âge, où l'on n'en connaissait déjà que trop les pro- 
priétés toxiques, les maléficiers et les empoisonneurs s'en ser- 
vaient pour désoler les étables, décimer les troupeaux et commet- 
tre impunément des assassinats. Les premiers hachaient l'Ama- 
nite vénéneuse et la mélangeaient à la nourriture des bestiaux ; 
les seconds extrayaient le suc du redoutable champignon, le 
condensaient à l'air libre sur un feu doux et en oignaient tantôt 
entièrement, tantôt d'un seul côté, les lames ciselées et chargées 
d'ornements en creux des couteaux de l'époque. On pouvait par 
ces abominables procédés se servir d'un de ces couteaux pour 
partager en deux un fruit, en manger impunément une moitié, et 
en offrant l'autre à son ennemi, lui donner la mort. S'il faut en 
croire les traditions, le jeune époux de Marie Stuart, le roi Fran- 
çois II, et la mère de Henri IV, la reine de Navarre, auraient été 
les victimes de ce lâche moyen d'assassinat. 



ai* Amanite rougeatre ou vineuse; Afnanita rubens Scopoli ; 
Agaricus rubescens Persoon, Syn., p. 264 ; Vittadini ; Ag. pus- 
tulaius Schaeffer; Ag. margaritijerus Batsch ; Ag. verrucosus 
BuUiard, t* 3i6; H. vinosum Paulet. — Nom prov* : Leva 
bruna, Leva vinoua picoutada, à Nice* 

Blanchâtre, prenant une teinte vineuse générale, plus intense 
dans le bulbe. Pied farci puis creux, bulbeux, floconneux, strié 



DE L*ACADÉMIE I>E VAUCLUSE t^\ 

au sommet, fauve rosé ; anneau ample, strié. Chapeau convexe 
(C"!), humide, tacheté, couvert de flocons farineux, mucronéspar 
le sec, gris. Chair humide, fragile, d'abord amère, puis sapide. 
Lamelles décurrentes en filet, serrées, molles, blanches, puis 
rosées. Spore (©"'•"ooS) ellipsoïde. 

Été-automne. A terre dans les bois ombragés. Alpes-Mariti- 
mes, région montagneuse et alpine : forêt de Clans, la Gordo- 
lasca, bois de la Fraccha, Couraze, etc. Comestible délicat ; mais 
ainsi que le fait judicieusement observer Barla, les habitants des 
montagnes ne récoltent pas cette espèce, surtout à cause des 
verrues du chapeau, qui lui donnent Taspect d'une Amanite 
vénéneuse. 

D'ailleurs, Taspect varie avec le milieu : dans les prés, il est 
d'un rouge vineux plus ou moins accentué, souvent nu ; dans les 
bois, il prend une teinte feuille morte, est très verruqueux ; cette 
variété sylvestre est connue des forestiers des Vosges sous le 
nom de Gourmelle des bois. 



22. Amanite cariée; Amanita cariosa F ries. 

Pied farci, puis creux, tendre, fragile, villeux et anneau caduc, 
blancs. Chapeau convexe plan (o'"i2), imi, brun bistre, parsemé de 
rares flocons farineux et blancs ; marge striolée et cendrée. Chair 
fragile, blanche, acidulé. Lamelles libres, blanches. Spore 
ovoïde (0'""oi), granuleuse. 

Été. A terre, sous les hêtres. J'ai trouvé cette espèce, le 8 août 
1903, dans la partie basse de la Lozère, aux Usufruits, commune 
de Saint-Maurice de Ventalon. A rechercher pour la région. Est 

SUSPECTE. 



23. Amanite rude; Amanita aspera Pries; virescens f Persoon ; 
myodes Boit; scandicinus Scopoli ; a^p^r Vittadini. Saccardo, 
V, p. 19. 

Voile sulfurin ou jonquifle, parfois verdoyant. Pied farci, flne- 
ment floconneux et blanc ; bulbe arrondi et bord de l'anneau 
ornés de flocons suljurins. Chapeau convexe plan (o"o5-8), paille, 

3 



122 MÉMOIRES 

gris, bistré ou olive, argenté par le sec, parsemé de petits flocons 
sulfurins, mucronés et bruns par le sec. Chair compacte, blanche, 
jaunissant ou brunissant sous la cuticule; odeur et saveur 
agréables. Lamelles arrondies, décurrentes en filet et blanches 
avec une légère teinte sulfurine. Spore ovoïde (o'""'oi), ocellée. 

Été-automne. Sur la terre dans les bois humides et ombragés. 
Alpes-Maritimes, région montagneuse. Rare. Vénéneux. Gillet y 
établit deux variétés basées sur la coloration du chapeau : brun 
ou fuligineux-roussàtre (fusca) ; fuligineux olivacé [olivacea). 



24. Amanite épaisse ; Oronge perlée ; Amanita spissa Pries ; 
cinereus Kromb. ; Strobiliformis Gonn., t. 7, f. 3. — Nom 
prov. : Lera bruna picoutada, Nice. 

Pied plein, trapu, atténué en haut, bulbeux, radicant, finement 
peluché, floconneux et blanc ; anneau très ample strié, blanc. 
Chapeau épais, convexe (o'"i-2), humide, visqueux, gris de souris, 
bistre cuivré, brunissant, tacheté de larges verrues farineuses 
puis mucronées ; marge striée. Chair ferme, humide, blanche, 
fade et inodore. Lamelles décurrentes en filet, serrées, blanchâ- 
tres. Spore ellipsoïde (o"*"*oo9-oi), ocellée. 

Été-automne. Bois humides. Alpes-Maritimes, régions monta- 
gneuse et alpine : Coaraze, Montdaour, Campargen, bois de 
Mandina, territoire du Moulinet, Lagastel près de Saorge. Comes- 
tible ? Barla dit : « Suspect. » Plus massif, plus tendre que ses 
voisins. Autrefois confondu avec pantherina. 



25. Amanite a tête lisse ; Amanita lejocephala De CandoUe. — 
Nom prov. : Lera blanca, à Nice ; Pignen-di-blanc, environs de 
Marseille. 

Pied non farineux, ferme, court, charnu, épais à la base, long 
de 8 à 10 cent. ; volve ample, blanche. Chapeau charnu, blanc, 
lisse, sec, comme satiné, soyeux, muni de quelques squames, 
convexe puis plan (o"o8-i2). Lamelles blanches, nombreuses, 
libres. Chair épaisse, ferme, blanche, rougissant légèrement au 
contact de l'air ; odeur et saveur agréables. 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE 123 

Automne. Bois de pins par groupes de 5 ou 6 individus. Toute 
la Provence. Assez commune dans les Bouches-du-Rhône ; Vau- 
cluse; Var ; Alpes-Maritimes, régions montagneuse et subalpine : 
la Bollène, Lucéram, Plan Peilhasc, territoire de Lantosque; 
bois et campagnes du Var. Comestible, mais peu recherchée. 

Ressemble à ovoidea, dont elle diffère surtout par le pédicule 
épais à la base, court, charnu, sans collier farineux. Avait été 
classé par Duby, Pries, etc., parmi les Volvaria, je ne sais pour 
quelle raison. 



26. Amanite a verrues arrondies; Amanita baccata Pries ; pan- 
therinus Bot. gai. — Nom prov. : Lera blanca picoutada, Nice. 

Blanc. Pied plein, napiforme, radicant, dilaté en haut, flocon- 
neux ; anneau oblitéré. Voile formant un léger bourrelet flocon- 
neux à la base du pied. Chapeau convexe plan (o^oS-y), uni, 
floconneux, farineux. Chair tendre, douce et sapide. Lamelles 
rétrécies adnées, serrées, molles, floconneuses, blanc crème. 
Spore pruniforme ellipsoïde (o"""oi3-i5), guttulée. 

Printemps-été. Nos bois. Alpes-Maritimes, région montagneuse: 
Cairos, Montdaour. Comestible. Quélet dit qu'on pourrait consi- 
dérer cette espèce comme une forme de solitaria à anneau 
oblitéré, comme il arrive souvent dans Am. ovoidea et jonquillea. 



27. Amanite de Boudier : Amanita Boudieri Barla, PI. myc, t. 6, 

f. IO-I2. 

Pied plein, solide, trapu dans la jeunesse, puis allongé sub- 
cylindrique, d'un blanc jaunâtre furfuracé à la partie supérieure, 
s'élargissant à la base en un bulbe napiforme plus ou moins 
aminci inférieurement, recouvert d'une volve oblitérée, fauve 
roussâtre, formant un bourrelet lacéré autour du pied, souvent 
peu apparente à l'âge adulte. Anneau mince, floconneux, mou, 
blanc, visible seulement dans la jeunesse. Chapeau d'abord 
globuleux-arrondi, puis convexe-plan, enfin plus ou moins 
déprimé, lisse, comme satiné, un peu hygrophane, blanc, légère- 
ment lavé de fauve-roussâtre au centre, couvert de verrues petites, 



1 24 MÉMOIRES 

inégales, floconneuses, rapprochées, blanchâtres, puis d'un fauve 
clair, à marge lisse, blanche. Lamelles larges ventrues, rappro- 
chées du pied, blanches, puis pâles. Chair tendre, blanche ; odeur 
et saveur faibles, agréables. Spore grande, ovoïde, ellipsoïde, 
allongée, blanche, hyaline. 

Mai 1 88 1. Alpes-Maritimes, région montagneuse: Montdaour. 
Ressemble à baccata, mais en diffère surtout par la forme plus 
allongée de la spore. 



28. Amanite perlée ; Amanita gemmata Pries. 

Pied bulbeux, plein, droit, légèrement atténué supérieurement, 
blanc, glabre. Anneau fugace. Chapeau charnu, convexe, puis 
étalé, plan (o"o6-8), orangé, moucheté de verrues floconneuses et 
blanches, strié sur les bords. Volve petite, blanche, se brisant 
promptement. Chair blanche, ferme ; odeur et saveur non désa- 
gréables. Lamelles blanches, libres, nombreuses. 

Automne. Les bois. Vaucluse, bois de Cassagne près d'Avignon ; 
Alpes-Maritimes, région montagneuse. Comestible d'après Paulet. 
Quélet en fait une variété de muscaria à chapeau fugace. Gillet y 
décrit une variété pallida à chapeau blanc-jaunâtre, à disque plus 
obscur. 



29. Amanite vaginée, engainée, grisette ; Amanita vaginata 
Bulliard, t. 98, 5i2; lividus Persoon; plumbeus Schaeffer : 
irilobus Boit ; nivalis Grev. — Nom prov. : Leva caniglia ou 
canilha picoutada, Madalena, environs de Clans; Coucoumèu, 
Lambesc , Carcès , etc . 

Pied farci, puis creux, fragile, orné de flocons appliqués prove- 
nant d'un anneau avorté, formant souvent un ou deux bracelets à 
la base, blanchâtre ou concolore. Voile en fourreau ou lobé, 
membraneux, tendre et friable. Chapeau campanule, puis plan 
(o^oS-iS), lubrifié puis satiné; marge cannelée. Chair molle, blan- 
che, douce. Lamelles libres, blanches, souvent liserées de la 
couleur du pied. Spore ovoïde ou sphérique (o"""oi2), ocellée. 



DE l'académie de VAUCLUSE 125 

Été-automne. Assez commune. Sous les pins des bois mon- 
tueux et dans les friches des montagnes. Toute la Provence. 
Alpes-Maritimes : Montgros, Saint-Isidore, Berra, Luceram, 
Utelle, Clans, bois du Fcrguet, bois de l'Esterel, etc. Bouches- 
du-Rhône : Pichauris, etc. Vaucluse : Avignon, bois de Jouve 
(7 septembre 1897), etc. Var : Carcès; La Garde : la Colle Noire ; 
Pierrefeu ; la Seyne-sur-Mer:boisde Janon; Pignan :Notre-Dame- 
des-Anges ; Toulon : Siblas, Cap-Brun, etc. Comestible dont on 
fait un grand usage dans tout le Midi. Des sept variétés qu'elle 
présente, la grise est surtout estimée et Badham assure que peu 
d'Agarics la surpassent en parfum. Elle est de beaucoup supé- 
rieure à rOronge blanche, sa proche voisine. La variété fauve, 
qui n'est pas rare dans les bois de Pichauris, serait un peu indi- 
geste. 



3o. Amanite étranglée; Amanita strangulata Pries; inaurata 
Secretan; Saccardo, V, p. 23. — Nom prov. : Lera canilha 
picoutada, Madalena, Nice. 

Pied fistuleux, épais, élancé, concolore, fragile, orné vers le 
bas de un ou deux épais bracelets floconneux formés par la 
volve. Chapeau (o" 10- 1 5), fragile, fauve grisâtre ou fauve brun, 
recouvert d'épaisses écailles membraneuses gris fauve; marge 
fortement sillonnée, chair ferme, tendre, fragile, blanche ; odeur 
faible ; saveur agréable de noix fraîche. Lamelles libres, serrées, 
blanches. Spore ovoïde, ocellée. 

Été-automne. Prés, bords des champs et bois humides. Toute 
la Provence. N'est pas rare à Avignon. Alpes-Maritimes, régions 
littorale et montagneuse : Montgros, Vinaigrié, Drap, Bendejeun, 
Berra, etc. Comestible. 

Est pour Quélet une forme luxuriante de vaginata. Secretan 
y décrit une variété umbrino-lidea, caractérisée par le chapeau 
jaune bistré clair, centre plus foncé ; pied blanc, pelucheux. 



Barla mentionne encore deux espèces : l'Amanite brillante 
'Amanita nitida Frics) et l'Amanite adnée [Amanita adnata Pries), 
qu'il n a vues qu'une seule fois. La première n'est pas distincte 



126 



MEMOIRES DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



de A. solitaria; quant à la seconde, il est difficile de se prononcer 
sur sa valeur spécifique, car mon regretté maître ne Ta pas 
figurée. 

Docteur Ré(iUis. 





^ /laine» du f*rt 



ver5u«ft 



Rtitnn </e S^Gtrmëin 

Fort de BUOUX. . . 
ft^n^ Lc9cndc 

1 ferlin d« Bcliu3U«t 
t Oppidum de Merlibso* 
S GroHt 4« Bu*u)i 

4 Meulm C(o% 

5 Rcfu^t 
«« CtrcuciU 
il A Cuv«A vîntiMC 

L E B C RO N •o<iClâyon«â3«» 



Carte de la ré^oty d'Apt faisatyt robjet de cette étude. 



La Région Aptésienne. 



ÉTUDES D'HISTOIRE ET D'ARCHÉOLOGIE. 



INTRODUCTION. 

La plupart des monuments anciens,, des cathédrales et des 
églises les plus remarquables de la Provence et du comté 
Venaissin ont été, au moins sommairement, décrits et à peu après 
datés (i). Certains édifices ont été Tobjet de travaux définitifs (2), 
mais les plus beaux monuments de l'architecture vauclusienne 
attendent encore leur rtionographie (3). 

Quant aux constructions religieuses, publiques et privées, 
situées en dehors des centres parfaitement desservis par les voies 
de communication, on peut dire qu'elles sont à peu près incon^ 



(i) Sur Tarchéologie vauclusienne, cf. les ouvrages généraux (VioUet-le-Duc, Millin, 
Mérimée, de Caumont) et notamment; C. Enlart, Manuel d'archéologie française, t. I 
I1902) et t. II (19^4), qui donne une bibliographie assez coi5ieuse des études les plus 
importantes. On trouvera de précieux renseignements, point encore trop vieillis, dans 
J. Courtet, Dictionnaire des communes de Vaucluse, Avignon, 1877. in-8' (utile k 
consulter pour les édifices ruraux). Révoil, Archéologie romane du midi de la France, 
Paris, 1873. 3 vil. in-fol., a vu et décrit un certain nombre d'édifices religieux de 
Vaucluse; mais il faut utiliser cette œuvre avec prudence en ce qui concerne Tâge 
des monuments publiés. 

On peut en outre consulter : la collection des Annuaires du département, les Guides 
de Vaucluse; le Voyage en France d'Ardouin Dumazet; Lavallée, Voyage dans le 
département de Vaucluse, Paris, an VIII, in-8*, illust. ; David Macgibbon, The Archi- 
tecture 0/ Provence and Riviera, Edimbourg, 1888, in-8' ; Harr-Ferree, Cathedral 
Churches of France (Architecture record, 1894 et années suivantes). 

(2) R. de Lasteyrie, Saint-Quinin et la cathédrale de Vaison (Mémoires de la Société 
des antiquaires de France, t. 49, 1888); Andréoli et Lambert, La cathédrale de Saint- 
SiJrein de Carpentras, Paris, 1862, in-8» ; Labande, Saint-Symphorien de Caumont, 
Avignr.n. 190 j, in-8\ etc. 

'M D'importantes études de détail ont été publiées sur le Palais des papes, par 
Canron, Muntz, Duhamel, Ehrle, etc. ; sur la cathédrale d'Avignon, l'abbaye de 
Scnanque cl quelques-uns dos châteaux du Comtat. 



128 MÉMOIRES 

nues, quelle que soit leur importance au point de vue de Thistoire 
du développement de Tart dans la haute Provence; en ce qui 
concerne spécialement la région aptésicnnc, le bagage bibliogra- 
phique est à peu près nul ( i ). 

Il ne faut pas s*étonner trop de cet oubli, car de nombreuses 
régions, plus riches que celle-ci en monuments, n'ont pas encore 
été étudiées d'une manière rigoureusement scientifique (2) ; des 
publications, excellentes sous tous les rapports, ont cependant 
montré tout le parti que Thistoire de Tart du Midi de la France 
peut tirer de travaux de ce genre (3). 

. Importante cité gallo-romaine, centre d'une région féodale très 
peuplée, siège d'un très ancien évèché, d'un bailliage et plus tard 
d'une viguerie, et placée dans le voisinage immédiat du Leberon, 
le territoire d'Àpt vit s'édifier, selon les époques, un grand nom- 
bre de villas gallo-romaines, de mansi, de châteaux et de fortins, 
d'églises et de chapelles rurales. 

A tous égards, la région d'Apt mérite donc l'attention de l'his- 
torien et de l'archéologue; c'est dans le but de la faire mieux 
connaître que j'ai entrepris ces Études, au cours desquelles aucun 
des vestiges qui parsèment le sol ne sera .passé sous silence ; à 
quelque période qu'ils appartiennent, les monuments, les églises 
et chapelles, les édifices publics et privés seront étudiés et repro- 
duits graphiquement. 

L'habitation humaine, avant l'invasion celte et la conquête 
romaine, a laissé sur certains points du terroir, notamment à 
Buoux, Gargas, Saint-Saturnin, Bonnieux, des traces trop nom- 
breuses pour qu'on néglige de les mentionner ; des chercheurs 
locaux, aussi modestes que consciencieux, ont étudié, sous le 

(1) Pour certaines d'en tr'el les, quelques hâtives tentatives ont été faites ; elles sont 
parfois insuffisantes (Chan. Jouve, Notice sur la cathédrale d'Apt, Paris, i859, in-8' ; 
de Saint-Andéol, .Vo/ice sur l'ancienne cathédrale d'Apt, Marseille, 1864, in-4*), souvent 
enfantines et naïvement grotesques (Gay, Histoire du village et du fort de Buoux, 
Forcalquier, 1866, in-8* ; Histoire de Castellet-les-Luberon, Forcalquier. 1866, in-8', par 
le même); je fais exception pour les monogrraphies de G. Moirenc {Promenades aux 
environs d'Apt), qui a vu les monuments décrits. 

(a) La Provence est cependant fort en retard sur la plupart des provinces françaises 
en ce qui concerne la publication des Répertoires archéologiques. 

(3) Les recherches si intéressantes de M. Brutails sur l'archéologie du moyen Age 
dans le S.-O.; la Statistique monumentale de ta Drôme (Valence, 1869, in-8") du cha- 
noine Jouve; les travaux de J. de Lahondès {Pavs de Foix, Ariège) de Renouvier et 
Thomassy (Languedoc), de Révoil {op. cit.). etc., sont à citer; le travail récent de 
M. LabATïde {Études d'histoire et d'archéologie romane; Provence et Bas- Languedoc, 
t. I, 1901. in-8»), serre de très près tous les détails et constitue un modèle pour ce 
genre de recherches. 



DE L*ACADÉM1E DE VAUCLUSE I29 

s 

rapport préhistorique, à peu près tous les quartiers voisins d'Apt 
et ont formé des collections bien connues de certains savants qui 
les ont plus ou moins utilisées (i) ; sans m'interdire l'indication 
très exacte des gisements reconnus et des résultats constatés, je 
ne m'étendrai pas sur cette partie de l'archéologie locale; je 
n'ignore pas, en effet, qu'un travail considérable fera connaître 
bientôt le Vaucluse oriental de la préhistoire (2I. 

L'occupation romaine dans la Civitas Aptenshim est mieux 
connue; mais on est loin d'avoir signalé toutes les ruines gallo- 
romaines, les découvertes de tombes, d'inscriptions et d'objets 
divers : la contribution de ces Éludes sera, je l'espère, assez fruc- 
tueuse dans ce sens. 

C'est l'archéologie religieuse du moyen âge qui doit fournir la 
plus grande partie de ce travail ; si les édifices de l'antiquité — 
exception faite des villas — n'ont pas été très multipliés dans le 
territoire montagneux d'Apta Julia, il n'en est pas de même des 
cellae, des chapelles et des églises rurales qui furent élevées, dès 
le haut moyen âge, sur tous les points, aussi bien dans les forêts 
qui couvraient les collines reculées que dans les plaines fertiles et 
les vallons voisins de la cité (3). 

Dans les seules communes limitrophes d'Apt, plus de quatre- 
vingts édifices religieux sont à mentionner et à étudier; il ne faut 
pas s'attendre à rencontrer, sinon exceptionnellement, des con- 
structions antérieures à l'an mil : des causes diverses,— le peu de 
solidité des bâtiments et les inv^asions successives dont la haute 
Provence eut à souffrir avant le XI" siècle, sont les principales — 

(i) Les personnes qui sont attirées de plus en plus fréquemment dans les environs 
d*Apt«par leurs richesses palethnologriques, se contentent, en général, de consacrer 
quelques heures à l'examen de ces collections et au parcours des terrains qui les ont 
fournies : rentrées chez elles, elles s'empressent de rédiger et de publier un mémoire 
sur leurs découvertes ; le fonds de ces publications est tiré en entier — moins les 
erreurs — des explications bénévolement données par les travailleurs locaux. 

Il existe un autre groupe de chercheurs particulièrement malfaisants : ce sont ceux 
qui fouillent sans but historique en vue de la seule formation d'une collection quel- 
conque; ceux-ci font un tort immense aux études sérieuses en abolissant définitive- 
ment les habitats et les sépultures préhistoriques. 

|2) M. Deydier, notaire à Cucuron, membre de l'Académie de Vaucluse, nous fait 
espérer comme assez prochaine la publication d'un Corpus raisonné des trouvailles 
relatives à la préhistoire faites dans les arrondissements d'Apt et de Carpentras î 
nous souhaitons vivement qu'il soit aidé dans la plus large mesure par les nom- 
breux amateurs de la région. 

(3) Nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer, pour l'origine de ces chapelles, 
au travail considérable de M. Imbard de La Tour, Les paroisses rurales dans l'an- 
cienne France du IV' au XP siècle {Revue historique, t. 60. 61, ^. 67 et 68), dont les 
conclusions sont résumées par M. Labande [op. cit., p. 9). 



l3o MÉMOIRES 

ont contribué à leur disparition ; d'autre part, quelques-unes des 
églises primitives ont été remplacées au moyen âge même par 
des édifices plus solides et mieux appropriés aux besoins des 
fidèles. Mais aux XI" et XII" siècles, ce fut comme une floraison de 
chapelles rurales dans tout le Midi. C'est, en effet, à cette période 
qu'appartiennent la plupart des monuments, grands et petits, qui 
subsistent encore comme une preuve de Thabileté des construc- 
teurs de l'époque romane. 

Il ne nous sera permis de dresser une synthèse de l'archéologie 
aptésienne que lorsque ces Études seront terminées ; mais d'ores 
et déjà, un premier examen nous permet d'affirmer que s'il a 
existé une École provençale de l'art roman, on peut de même 
grouper en faisceau les règles les plus ordinairement suivies 
par les maîtres d'œuvre de la région ; l'abondance de la pierre, 
la facilité qu'elle présentait au travail, en même temps que Tex- 
tréme pauvreté des populations, ont contribué à donner aux 
églises du diocèse d'Apt un caractère spécial : on pourra consta- 
ter spécialement l'adoption d'un plan à peu près uniforme ainsi 
que l'absence générale de décoration, sauf dans quelques-uns 
des édifices les mieux construits (i). 

Placée d'une façon exceptionnelle auprès du Leberon, limite de 
la haute et de la basse Provence, la ville d'Apt fut contrainte, à 
toutes les époques, surtout pendant le moyen âge et jusqu'au 
XVII* siècle, de faire garder ses abords et les voies qui la faisaient 
communiquer avec Marseille et Avignon. Aussi trouverons-nous, 
au cours de ce travail, de fréquentes occasions de nous occuper 
du système de défense employé parles habitants de la région. 
Depuis la Combe de Lourmarin jusqu'à Apt, l'ancienne route de 
Marseille, fréquentée encore au milieu du XIX* siècle, était •flan- 
quée de forts, de fortins, d'ouvrages de tous genres et même de 
chapelles fortifiées ; or, malgré les récentes publications relatives 
à l'archéologie militaire, on peut dire que ce système de défense 
est à peine connu (2) ; nous nous attacherons donc à préciser les 



(i| Les eruerres incessantes du XUl'et du XIV' siècle ont fait disparaître un certain 
nombre d'édifices religieux ; le Cartulairc de l'ég-lise d'Apt en cite notamment plu- 
sieurs antérieures à l'époque carolingienne : lorsque les textes et la toponymie 
locale nous le permettront, l'emplacement de ces cclîae sera identifié. 

(a) Le seul essai local qui mérite une mention est l'étude de M. C. Moirenc sur la 
Combe de Lourmarin ; nous aurons à signaler souvent la rectitude des idées émises 
par cet érudil. Le Manuel de M. Enlart, qui ne néf?lige rien de ce qui louche aux 
châteaux-forts du moyen âge, passe à peu aprùs sous silence les constructions mili- 
taires destinées, non à V habitation fortifiée, mais â la simple défense des routes et 
défilés (op. cit., t. n, p. 545 et pas.). 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE l3l 

emplacements adoptés pour les ouvrages de protection, en 
étudiant chaque partie du territoire. 

D'autres objets doivent attirer une égale attention, car rien 
n'est à négliger dans le domaine archéologique : les bâtiments 
publics, l'architecture privée, les anciennes boutiques, les vieux 
moulins, les constructions annexes de l'exploitation rurale (i), 
les bornes-limites, les puits, etc., projettent fréquemment quel- 
que lumière sur la vie privée et la vie sociale, sinon sur l'histoire 
de l'art. 

Il ne sera de même pas inutile de montrer comment les popu- 
lations se sont groupées dans la région, de signaler à quelles 
influences elles ont obéi en choisissant tel ou tel point du terroir 
pour édifier leurs demeures et leurs églises; nous dirons les 
motifs qui ont fait abandonner l'exploitation de parcelles dont 
la culture suffisait jadis à l'existence de nombreuses familles. 

Revenant sans cesse jusqu'au XIX* siècle habiter les mêmes 
lieux, les mêmes vallons, les mêmes collines, malgré les inva- 
sions, les guerres civiles et les persécutions religieuses, l'habitant 
des pays accidentés a subi, plus qu'on ne le pense, l'influence de 
la route qui lui permettait d'accéder aux agglomérations plus 
importantes de la région (2) ; nous donnerons donc à l'étude de 
sa viabilité ancienne une sérieuse attention. 

Au cours de cette enquête, on ne saurait négliger, à côté des 
textes déjà publiés et de ceux plus faciles à consulter que renfer- 
ment les grands dépôts, les documents des archives locales ; 
ceux-ci éclairent d'abord d'un jour particulier l'histoire de la 
commune où ils sont rassemblés ; je considère enfin comme 
indispensable de signaler les textes les plus importants, de 
publier même ceux qui présentent un caractère exceptionnel 
d'intérêt : ceux-là, du moins, seront préservés, car si l'organisa- 
tion des archives n'est pas très promptement modifiée, dans un 
sens rigoureux pour les communes, il ne sera plus possible 
dans un demi-siècle d'étudier les sources de l'histoire commu- 
nale : rignorance, la moisissure et les rongeurs auront terminé 
leur œuvre de destruction commencée depuis longtemps. 

(i) A ce point de vue spécial, les cuves vinaires de Buoux et de Sivergues sont 
particulièrement intéressantes. 

(2) La route d'Apt à Marseille, par exemple, ne paraît pas avoir été sensiblement 
modifiée dans son assiette depuis l'occupation romaine ; je ne suis même pas éloigné 
de penser que son emplacement— à l'état rudimen taire— fut déjà le môme avant la 
conquête ; cette constatation est intéressante pour l'histoire de l'habitat humain 
dans la région. 



l32 MÉMOIRES 

Le rôle de la documentation graphique est de venir en aide à la 
description toujours insuffisante ; nous ne l'oublierons pas ; il ne 
s'agit plus, en effet, de signaler des monuments, de copier plus 
ou moins correctem^^nt des inscriptions, il importe que les 
constructions, les objets d'art, les documents épigraphiques 
soient exactement reproduits, de façon à permettre l'exercice de 
la critique lorsque les objets auront disparu. 

Sans oublier ce qui a pu être publié ou écrit avant ces Études, 
je ne me suis fié ni aux affirmations ni aux racontars ; j'ai tenu à 
me rendre compte de visu de tout ce dont j'avais à parler ; ce 
travail ne sera donc point autre chose que le résultat d'une fré- 
quentation prolongée des lieux, des hommes et des choses. J'es- 
time en effet que ce n'est que par une sorte de cohabitation avec 
les textes et les monuments qu'il est possible de formuler des 
conclusions solides et sérieuses ; les erreurs que j'ai pu com- 
mettre n'entacheront donc pas ma bonne foi. 

Je souhaite, en terminant, que dans les centres d'une certaine 
importance historique, d'autres enquêtes de ce genre soient 
entreprises ; ce n'est qu'après la publication de tous les monu- 
ments, de tous les vestiges anciens, que l'on pourra dégager 
définitivement les éléments de l'archéologie nationale. Le grand 
essor donné par de Caumont à l'étude de nos édifices à abouti, 
ces temps derniers, à la publication d'un ouvrage aussi impor- 
tant que celui de M. Enlart ; son Manuel a été mon guide : je le 
recommande à tous ceux qui veulent avoir un conseiller exact 
dans leurs études archéologiques. 



DE L^ACADÉMIE DE VAUCLCSE |33 



I. 

Le Vallon de TAiguebrun. 
BUOUX 

Le Village et l'ancien Fort. — Saint-Symphorien. 



SOURCES et bibliographie (I). 

Archives communales de Buoux. — Des archives antérieures à 1790, des documents 
révolutionnaires et même de ceux du XIX* siècle, antérieurs à i83o,il ne subsiste que 
quelques papiers qui ont échappé, par hasard, à un acte de vandalisme relativement 
récent : en 1S48, le maire delà commune, ignorant et inconscient, fit un auto-da-fé de 
tous les documents quMl trouva à la mairie, « ces paperasses n*étant bonnes, dit-il, 
qu'à engendrer la poussière • ; deux registres de Tétat-civil trouvèrent grâce, ainsi 
que le cadastre et les états de sections ; parmi les rares liasses oubliées, se trouvent 
trois comptes du trésorier communal, des circulaires imprimées, des quittances de 
paiement des tailles (XVII" et XVIII* siècles). 

Tout ce qui pouvait éclairer l'histoire de Buoux, comptes, délibérations, titres du 
moyen âge, pièces relatives au Fort, tout est anéanti ; les registres d'état religieux 
(baptêmes, mariages et décès) commencent au i" janvier 1637 et vont jusqu'au 
3o décembre 1792(2); la série CC ne comprend que deux terriers dressés, l'un en 
1665 par deux notaires (in*fol. de 129 p., incomplet) et le second en 1718(3). 

Archives de la ville d'Apt. — Directement intéressée au sort de l'ancien Fort de 
Buoux, la ville d'Apt s'est trop préoccupée à toutes les époques de la défense de ce 
point et de sa garnison, pour que les documents aptésiens n'en aient pas conservé de 
fréquentes traces ; les délibérations depuis le XIV siècle jusqu'au milieu du XVII'. 
les comptes trésoraires, les pièces relatives aux dépenses des guerres de religion ont 
fourni la plus grande partie des renseignements sur l'histoire du Fort consignés dans 
cette partie des Études. 

Les Archives des Bouches-du-Rhône contiennent quelques documents intéressant 
Buoux, surtout après le XV siècle ; ils ont été employés. 

VHisloire de la ville d'Api de Rémerville, sans donner des renseignements précis 
sur le rôle du fort de Buoux, n'était pas À négliger; nous avons pu nous rendre 
compte par la comparaison de son récit avec les documents qu'il avait consultés, du 
scrupule apporté par cet érudit à la rédaction de son œuvre. 

(i) Nous ne mentionnerons pas, dans les bibliographies de ces études, les gr^ds 
ouvrages utilisés pour tout le territoire, par exemple : Papon {Histoire dt Provence) ; 
Bouche, Id Gallia Christiana, le Corpus inscriptionum latinarum, t. XII, etc. 

(a) a vol. in-4* reliés, en assez bon état. 

(3) L'inventaire des vestigia des archives de Buoux, par Achard, existe sur fiches 
à la Bibliothèque d'Avignon, ms. n* i588. 



l34 MÉMOIRES 



BIBLIOGRAPHIE. 

C. Moirenc, La Combe de Lourmarin, étude de stratégie ancienne et de fortification . 
Marseille. 1876, in-8*. 

J. de Terris, VHermitage de ^aint-Symphorient dans le Bulletin historique et archéo- 
logique de Vaucluse, t. IV, 1882, p. i. 

Généalogie historique de la famille de Sabran-Pontevès. Paris. Didot. 1897, in-fol. 

Abbé Gay, Histoire du village, du château et du fort de Buoux. Forcalquier. 1866, in-8*. 

Nicolas, Une Excursion à Bonnieux et à Buoux^ dans les Mémoires de l'Académie de 
Vaucluse» i885, p. 3i4-2a3, i pi.» 7 figr* 

l^ochtiiTi^ Archéologie vauclusiennc : La Vallée de l'Aiguebrun, le Rocher du Fort de 
Buoux, dans les Mémoires de l'Académie de Vaucluse, 1894, p. 125-162 (1). 

F. Moulin, La Beaume des Peyrards, dans les Annales de l'Académie du Var, 1902» 
I planche. 

E. Arnaud, Études préhistoriques sur les premiers vestiges de l'industrie humaine dans 
le Sud-Est de Vaucluse, dans les Annales de la Société littéraire d'Apt, 1866, i pi. 

G. Tardieu, A travers les Alpes. Le vallon de VAiguebrun et le vieux Fort de Buoux, 
Forcalquier, 1895, in-8* de i3 p. (récit d'excursion). 

Ce m'estun devoir agréable à remplir que d'adresser ici mes remerciements à tous 
ceux qui m'ont aidé dans mes excursions et qui ont facilité mes recherches ; M. Garcin 
dont la riche collection est bien connue de tous les travailleurs provençaux, m'a 
obligeamment communiqué tous les documents qu'il possède sur Buoux et les 
familles de Pontevès et de Gallifet ; je ne dois pas oublier de dire que c'est grâce à 
une copie prise par cet aimable érudit en 1859, que nous connaissons l'inscription 
du XII* siècle, jadis gravée sur trois claveaux de la porte de l'église du Fort, 
inscription aujourd'hui perdue. 

M. F. Lazard a mis à ma disposition ses collections préhistoriques et sa parfaite 
connaissance des régions visitées ; c'est à son expérience de pilote que je dois de 
n'avoir rien omis dans le présent travail. 



(i) Le travail de M. Rochetin est le plus exact et le plus considérable qui ait été 
publié sur la région de Buoux; il ne nous a pas été inutile au cours des recherches 
sur les lieux. 



DE l'académie de VAUCLUSE 1 3?» 

1. 

Topographie. 
Les anciennes Routes. 

Le Leberon a formé, probablement dès l'époque pré-romaine, 
une limite naturelle, presque infranchissable, en tous cas très 
aisée à défendre près de ses ouvertures, entre les peuples celtes 
qui occupaient la Provence. Plus tard, cette chaîne de montagnes 
forma la démarcation des cités d'Aix et d'Apt (i), des diocèses 
ayant ces deux villes pour chef-lieu, et enfin des vigueries d'Apt 
et de Pertuis. 

La région qui fait Tobjet de cette étude est limitée au sud par 
le Leberon, sur toute sa longueur ; les cols qui en permettent le 
passage sont au nombre de deux seulement : le premier, dont il 
sera question d'une façon détaillée dans une autre partie, a 
constitué à toutes les époques une route naturelle suivie pour les 
communications entre la vallée du Caulon et la basse Provence : 
c'est la Combe de Lourmarin ; le deuxième, connu sous le nom 
de Col des Granons, s'ouvre bien loin de là, près du village de 
Villemus (Basses-Alpes). Entre ces deux cols, on ne peut effectuer 
la traversée du Leberon qu'à pied, non sans difficulté, par des 
sentiers étroits, notamment au Castellas de Sivergues et près du 
fort de Buoux. 

Parallèlement au Leberon et depuis le village d'Auribeau jus- 
qu'à Bonnieux, un immense plateau incliné de Test à l'ouest, 
sépare le vallon de l'Aiguebrun de la vallée du Caulon ; c'est le 
plateau de Claparèdes, l'une des plus vastes stations préhistori- 
ques de la Provence. Ses abords sont en grande partie entière- 
ment abrupts, surtout du côté de TAiguebrun ; il n'est accessible 
d'une façon aisée que près du château de Buoux, précisément là 
où dès l'antiquité fut tracée la voie d'Apt à Marseille; sur d'autres 
points, vers le village, près de Marenon, à la Baume-de-l'Eau et à 
côté de la Brémonde, des chemins de piétons ont en outre existé 



(I) Cette assertion, contraire aux indications d'Hirschfeld, dans le Corpus inscrip^ 
tionum latinarum, t. XII, est appuyée sur des données précises ; celles-ci seront 
exposées dans une Histoire d'Apt en préparation. 



ï36 



MEMOIRES 



depuis le moyen âge pour desservir les villages de Sivergues et 
de Buoux, ainsi que les campagnes situées dans le vallon. 

On comprend de quelle importance était la garde de cette 
région, et avec quelle facilité le relief du sol se prêtait à cette 
défense. 

La voie principale, celle qui traverse la Combe, était déjà, 
avant la conquête romaine, flanquée près de Lourmarin par un 
oppidum, celui de Castellar, étudié et décrit par M. Sagnier (i) ; à 
la Roche d'Espeil, un fort gardait la sortie du col ; la route sui- 
vait ensuite le torrent jusqu'au vallon du château, avec, soit sur 
parcours, soit dans ses environs immédiats, les fortins de Bellu- 
guet, l'église fortifiée de Saint-Symphorien et surtout l'énorme 
masse du Fort proprement dit, véritable clef du passage, où une 
garnison pouvait soutenir des sièges en règle et rayonner dans la 
vallée et sur le Leberon. 

Dans le vallon qui s'ouvre près de Saint-Symphorien, la route 
montait directement vers le plateau (2), passant au-dessous du 
château seigneurial, dont les constructions modernes sont édifiées 
sur l'emplacement d'une villa ou peut-être d'un fortin gallo- 
romain (3. ; au-delà, sur Claparèdeset dans le territoire d'Apt, les 
forts de Clermont, des Tourrettes et de Mauragne arrêtaient 



encore les envahisseurs. \ 

Dès son arrivée à Claparèdes, la voie principale formait plu- J 

sieurs embranchements, dont nous n'avons pas à nous occuper 
ici (4) ; le principal se détachait près de l'ancienne église de 
Buoux, passait au Pré-des-Masques et descendait vers Apt par 
Rocsalière, défendue partout où existait un passage difficile ou 
une éminence. Deux autres chemins secondaires se dirigeaient, le 
premier par le fortin et la chapelle de la Roche vers le fort de 
Buoux (5), le deuxième vers Bonnieux et le Pontjulien. 

L'ancien chemin de Sivergues, réparé et en partie déplacé 
plusieurs fois, même au XVIII* siècle, traversait en ligne droite le 

(i) Mémoires de V Académie de Vauctuse, 1884, p. iS. 

(a) Voppidum de Mortisson, dont il sera question ci-après, dominait précisément la 
naissance du vallon du château. 

(3) Des antiquités et une inscription ont été trouvées sur l'emplacement du châ- 
teau ; des tombes gallo-romaines ont été de même découvertes au quartier de Mor- 
tisson, au bord de la route. 

(4) Cf. sur ce point Rochetin, op. cit., p. 154. 

(5) Rochetin. op. c«7., p. i58; je n'ai pu vérifier cette assertion qui paraît vraisem- 
blable; j'aurai l'occasion de revenir sur ce point, lorsqu'il sera question de la 
Combe de Lourmarin. 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE iSy 

plateau de Claparèdes et dévalait de même sa pente qui aboutis- 
sait à TAiguebrun. Routes et chemins anciens, dont la largeur 
variait entre deux et quatre mètres au plus, ne permettaient 
qu'avec peine le passage des véhicules, surtout des véhicules 
chargés ; ce n'est pas que leur assiette ne fût solidement établie, 
pavés qu'ils étaient avec des matériaux allongés, fichés debout et 
transversalement à Taxe de la voie (i), mais les voyers de Pro- 
vence coupaient au plus court et ne regardaient pas à la pente et 
aux contours, lorsqu'il s'agissait de gagner quelques toises ; 
aussi les chemins n'étaient-ils guère fréquentés que par des 
mulets chargés à bâts et par des cavaliers (2). 

Malgré la construction des routes et des chemins vicinaux et 
jusqu'au milieu du siècle dernier, les anciennes voies pavées ont 
été fréquentées par les piétons ; elles le sont d'ailleurs encore, 
parce qu'elles raccourcissent d'un tiers au moins les distances 
officielles. Elles disparaîtront cependant peu à peu, soit qu'elles 
soient envahies par la végétation sauvage, soit que les proprié- 
taires voisins empiètent sur leur emplacement ; il en résulte que 
l'abandon dont elles sont l'objet s'étend aussi aux parcelles de 
terre dont la culture, déjà peu rémunératrice, est rendue impos- 
sible par les difficultés d'accès. 

(1) J'ai pu me rendre compte de la solidité de ces pavages plus que séculaires 
cur des tronçons de route en grande pente, recevant des torrents d'eaux pluviales et 
où des générations d'hommes ont circulé, tout a parfaitement résisté : nos routes 
modernes se seraient-elles aussi bien comportées? Notons enfin que depuis plus 
d'un demi-siécle, ces anciens chemins ne sont plus entretenus. 

(a) Il est cependant indiscutable qu'à une époque fort reculée, les chemins les plus 
escarpés ont été utilisés par des chariots, l'usure de pavage aux points de contact 
avec les roues le démontre ; d'autre part, sur des voies très anciennes, ayant précédé 
celles qui ont été construites au XVII' siècle, et recouvertes aujourd'hui par la terre 
végétale, on retrouve encore les traces du passage des %'éhicules. Sur les chemins très 
fréquentés les constructeurs avaient eu soin d-i placer les pavés longitudinalement 
sur la partie où les roues devaient passer. 



l38 MÉMOIRES 



II. 



D'Apt a Buoux. 
Le village de Buoux. — L*Êglise. 

Le chemin vicinal d'Apt à Buoux, après avoir gravi les pentes 
des Agnels, traverse diagonalement le plateau de Claparèdes ; 
cette vaste superficie de terrain sans relief est couverte d'une 
couche de terre végétale peu épaisse, n'atteignant sur aucun 
point plus de cinquante centimètres, provenant de la désagréga- 
tion des couches rocheuses supérieures et de la décomposition 
des végétaux qui y croissent ; le plateau a été autrefois couvert 
de bois, dont il ne subsiste actuellement que quelques rares et 
maigres bouquets. 

Depuis le déboisement, la mince couche cultivable a été sou- 
mise à une production continue ; aussi ne produit-elle que quel- 
ques maigres céréales, l'engrais, de transport coûteux, lui faisant 
à peu près défaut. Insensiblement les propriétaires abandonnent 
sa culture et avant peu la plaine ne sera plus qu'un pâturage 
aride, à moins que la trufficulture ne s'en empare (i). 

Sur toute son étendue, Claparèdes est jonché d'une multitude 
de tas de pierres, de clapiers qui ont donné son nom à ce quar- 
tier; la plupart ont été formés depuis que l'agriculture a pris 
possession du sol : les exploitants amoncellent en effet sur quel- 
ques points sacrifiés, les pierres qui se détachent de la croûte du 
plateau ; mais il est certain que quelques-uns de ces clapiers 
cachent des ruines de cabanes en pierres sèches, antérieures à la 
conquête romaine, édifiées par des peuples ligures ou celtes. 
Cette certitude est tirée, en dehors des affirmations verbales(2], 
de ce fait que le plateau a été pendant longtemps un habitat 
préhistorique important, qui a livré aux collectionneurs locaux 



(i) Quelques essais satisfaisants ont été tentés dans ce sens depuis une vingtaine | 

d*années. ! 

(a) Cf. à ce sujet Taffirmation de Gay {op. cit., p. 87), qui déclare que des proprié- | 

taires ayant démoli quelques clapiers, ont découvert sur leur emplacement des 1 

foyers, des poteries et des menus objets ; nous avons nous-môme recueilli des décla- ! 
rations semblables. La vérification du fait pourrait être entreprise avec quelque 
argent, de la patience et du temps. 



DE l'académie de VAUCLUSE 189 

un nombre très considérable d'objets appartenant à toutes les 
époques du néolithique et Tâge du bronze (i). 

Après avoir traversé Claparèdes, la route suit à mi-côte les 
bords du plateau, profondément découpé par des vallons secon- 
daires; elle domine le vallon du village, dont le fond seul, ou à 
peu près, est cultivé (2) ; à droite de la route, Tescarpement est 
presque nu ou couvert d'une maigre végétation de thym et de 
lavande (3). 

Quelques centaines de mètres avant d'arriver au village et au- 
dessus de la route, près du hameau de Respessat, une touffe 
phénoménale de buis attire le regard ; formée d'un groupe de 
pieds placés circulairement, elle atteint plus de sept mètres de 
diamètre à un mètre du sol et va s'amincissant en cône jusqu'à six 
à sept mètres de hauteur ; l'intérieur de la touffe abrite aisément 
une dizaine de personnes. Tout à côté, des infiltrations d'eau 
sourdent du rocher ; la citerne qui les recueille dessert une petite 
agglomération de maisons dont la construction date, d'après le 
style des ouvertures, du XVII* siècle au plus tard (4). 

Une dépendance de ces maisons est à signaler: c'est une cuve 
vinaire située en plein champ ; d'un plan assez semblable à 
celles qui existent en grand nombre dans le vallon de TAigue- 
brun, elle présente cette particularité d'avoir été utilisé au XVIII' 
siècle et d'avoir été abritée par un petit édifice; partout ailleurs 
où se trouvent des cuves, on n'aperçoit aucune trace de con- 
struction : loin de là, les encoches pratiquées sur les parois pour 
recevoir une couverture mobile prouvent qu'elles n'étaient pas 

(i) M. Lazard, véritable explorateur du plateau, a formé une collection, très bien 
classée, d'instruments et d'armes provenant de ce quartier; parmi les autres collec- 
tions, il faut citer celles de M. Brunel, de Rocsaliùre; de M. Garcin, d'Apt; de 
MM. Bonnet et Moirencv de Bonnieux. 

(2» Toutes les découpures du plateau voient jaillir à leur naissance une ou plu- 
sieurs sources intarissables; c'est toujours auprès de ces sources que l'en rencontre 
les stations préhistoriques de Claparèdes. 

(3) Mettons au point une fantaisie de Gay [op. cit., p. 97), au sujet de la haute anti- 
quité d'une cabane ou liory, peu éloignée du village ; vérification faite, il s'agit sim- 
plement d'une de ces nombreuses constructions rudimentaires, élevées de la base au 
sommet avec les matériaux recueillis sur le plateau ; ces édicules, assez solides, 
quoique dépourvus de toute liaison au mortier, ont été créés un peu partout dans la 
région par des cultivateurs désireux de se ménager un abri contre les intempéries : 
leur forme est généralement carrée ou rectangulaire, surmontée d'un toit conique ou 
à deux pentes; celle décrite par Gay est seulement plus vaste que les autres et se 
trouve divisée en plusieurs compartiments. 

4^ A l'est des habitations, sous un abri, on remarque, â moitié enfouie dans le 
M>1, une tombe creusée dans le roc, semblable à celles qui jonchent les environs du 
fort de Buoux. Voir ci-dessous : Le cimetière de Saint-Germain, 



140 MÉMOIRES 

autrement abritées ; il est à remarquer, en outre, que la situation 
de la plupart de ces cuves sur des rochers isolés et émergeant 
de terre ne se prêtait pas à Tédification d'un abri. 

La construction dont il s'agit ici, en partie ruinée, mesure 
4 mètres de longueur sur 2 mètres 5ode largeur; elle est voûtée 
en plein cintre et couverte en dalles brutes ; une porte, ouverte 
au sud, donnait accès au cuvier; ses piédroits sont en bel 
appareil moyen et l'ouverture est amortie par un linteau mono- 
litre, portant le millésime : 1707; à Test, était ménagée une fenê- 
tre de quelques centimètres de largeur. 

Dans les environs du village, les cuves vinaires, au nombre de 
quatre, sont semblables à celles du vallon : elles sont disséminées 
sur le talus et taillées à môme le roc ; sur leurs bords est creusée 
une rainure longitudinale pour la déviation des eaux de pluie. 
Toutes ont deux compartiments, le supérieur plus grand, de 
I mètre à i mètre 5o de côté en moyenne, Tinférieur plus petit, 
muni dans le bas d'une bonde ; les deux parties sont séparées 
par une paroi ménagée dans le rocher (dans aucune cuve vinaire, 
on ne trouve trace de maçonnerie) ; le tout suit la pente du sol. 
La profondeur moyenne des récipients du village est de 2 mètres 
autant qu'on peut en juger, remplis qu'ils sont d'arbustes et de 
cailloux. Les uns et les autres étaient disposés pour recevoir un 
couvercle qui s'emboîtait dans des encoches creusées par deux ou 
trois paires sur leurs bords (i). 

Quelle est la date de ces cuves? Cette question sera examinée 
plus loin à propos de celles du vallon ; quoi qu'il en soit, le petit 
édifice de Buoux prouve qu'au XVIII' siècle les habitants de la 
région continuaient soit à creuser de nouveaux vaisseaux de ce 
genre, soit plus vraisemblablement à utiliser des cuves anciennes 
pour des motifs qu'il serait difficile de déterminer (2). 

L'agglomération principale de Buoux est située à 8 kilomètres 
d'Apt et 10 de Bonnieux, à cheval sur le chemin qui conduit au 
vallon ; elle ne se compose que de l'église, du presbytère, de la 
mairie-maison d'école et d'une douzaine de maisons. La popula- 
tion totale de la commune est de i55 habitants (3), disséminés sur 



(i) Unou deux exemplaires de ces cuves existent près du château de Buoux L'un 
d'eux est mentionné dans le procès-verbal d'estimation des biens du marquis de 
Galliffet (an II) dont nous nous occuperons plus loin. 

(a) Voir ci -dessous : Les cuves vinaires. 

(3) Recensement de 1901 ; le chiffre de la population décroît depuis le milieu du 
siècle dernier; on comptait 201 habitants en 1860. En 1540, d'après la déclaration faite 



DE l'académie de VAUCLUSE 14! 

un terroir de 1,764 hectares (i) dans une cinquantaine de fer- 
mes (2). 

Le village n'est pas ancien, il n'existe que depuis la seconde 
moitié du XVIP siècle et toutes les maisons qui n'ont pas été 
reconstruites ou réparées ont gardé dans la forme et l'appareil 
de leurs ouvertures, le caractère des constructions de cette 
époque. A Buoux, comme à Sivergues, village limitrophe, les 
fenêtres sont en général rectangulaires ou même carrées, avec 
.un appui et un linteau monolithes, séparés par des piédroits 
appareillés ; le linteau monolithe est d'un emploi constant dans 
la région, tant pour les portes que pour les fenêtres ; lorsqu'il est 
cintré, Tévidement est découpé à même la pierre (3). Parfois 
(cette remarque est surtout applicable à Sivergues) la date de 
construction de l'immeuble est gravée sur le haut de la porte (4). 

L'église de Buoux est moderne ; d'après une pièce des archives 
du pays, elle était à peine commencée en 1706; sa nef unique 
dépourvue d'abside est assez comparable à une vaste grange : 
c'est le type parfait de l'église pauvre du XVIIP siècle ; elle n'est 
pas voûtée, mais seulement plafonnée ; un faux arc triomphal de 
mauvais goût et très surbaissé se dresse sur de simili-pilastres et 
sépare la nef du sanctuaire, relevé de deux marches ; au fond est 
un autel insignifiant ; le tout est recouvert d'un badigeon quel- 
conque. 

Attenante au presbytère, l'église n'a qu'une porte peu appa- 
rente, ouverte à l'est, dans le bas de la nef, et au-dessus de 
laquelle s'élève un clocher-arcade à deux baies (5), qui n'a d'ail- 

par le syndic au commissaire chargé de faire une enquête sur les lieux non affouages, 
il n*y avait à Buoux que 21 bastides, ce qui porte la population de cette époque à 
lao habitants, en comptant six habitants en moyenne par bastide (Archives des 
Bouches-du-Rhûne, B aoi). Notons qu'à ce moment l'expédition contre les Vaudois 
n'avait pas encore dépeuplé le pays. 

(i) La déclaration de 1540 (/oc. cit.), porte que le terroir c est peu fertile, maigre et 
montueux, produisant peu de bon blé, quasi tout seigle et autres gros blési; en 
1698, le cadastre évaluait les biens de Buoux (roturiers) à 826 florins (Archives des 
Pouches-du-Rhône. C i3o, fol. 67 v). Les bois occupaient, en i83o,8oo hectares et les 
terres labourables 700; le restant du terroir était inculte ; ces chiffres ne sont natu- 
rellement plus exacts. 

(2) 21 bastides en 1460; 55 immeubles en i83o, d'après le cadastre. 

(3) Un de ces linteaux, à Buoux, mesure dans l'évidement i mètre 25 de largeur sur 
o môlre 5o de hauteur. 

(4) La plus ancienne date relevée à Buoux est 1708; mais la plupart des inscriptions 
ont disparu par suite de reconstructions. 

(5) Le constructeur a pris pour modèle le clocher-arcade de l'église primitive décrite 
ci-après. 



142 xMÉMOlRES 

leurs été construit qu'en 1778, ainsi qu'en fait foi Tinscription 
gravée sur la première rangée d'appareil : 

F. LE II MARS 1778. C. L. B. G. U). 

A côté de la porte existe au dehors un bénitier fort simple, en 
cul-de-lampe, qui n'est plus utilisé (2). 

Le bénitier intérieur est le seul objet remarquable de l'église de 
Buoux : il est placé sur un support moderne, derrière la porte 
d'entrée, et en partie encastré dans le mur; ce monument n'est 
autre chose que Tancien autel d'une chapelle primitive, dite de 
Saint-Germain, édifiée avant le X* siècle au pied du Fort (3). 

La table, en pierre très fine et dure, a i mètre 70 de longueur, 
et un mètre de largeur ; le creux ménagé à sa surface n'a pas plus 
de 2 centimètres et est dépourvu d'ornement. Sur les trois faces 
visibles, épaisses de 8 centimètres, entre deux faibles saillies, 
court un rinceau dans les contours duquel sont enfermés, alter- 
nativement, une grappe de raisins et une feuille de vigne, d'une 
facture assez souple, sculptées en méplat. 

Cet autel est carolingien. Sa décoration est, à peu de chose 
près, celle de l'autel antique de la cathédrale de Vaison (4) ; mais 
les motifs sont plus stylisés et le bord de la cuvette est uni, 
alors que celui de Vaison est orné de sculptures (5). Les sup- 
ports anciens ont disparu ; d'après Gay, ils auraient été trans- 
portés à Buoux en même temps que l'autel proprement dit. En 
classant cet intéressant spécimen de l'art carolingien comme 
monument historique, le Ministère de l'Instruction publique 
obligerait la fabrique de Buoux à le placer d'une façon plus 
convenable et moins dangereuse pour sa conservation ; c'est le 
vœu que nous exprimons. 

(i) Vraisemblablement les initiales du nom du constructeur. 

(2) Je crois que c'est un des rares exemples qu'ofifre la régrion, de bénitier extérieur. 
Enlart [op. cit., t. I, p. 784), a remarqué cette forme et cette position, surtout en 
Bretagne. 

(3) D'après Gay (op. cit., p.g^ qui donne le nom de la personne qui l'a fait porter à 
Buoux en 1840. 

(4) Dessiné et publié par Enlart {op. cit., t. I, p. 739. fig. 365). 

(5) L'abbé Gay. dont les travaux sont le plus souvent fantaisistes, a probablement 
rêvé en décrivant cet autel. « On y voit, dit-il, des animaux symboliques et d'oiseaux 
(51c) mystérieux prosternés devant la croix ■; rien de tout cela n'existe. Ce détail no'js 
donne une idée de la confiance que méritent les affirmations de la littérature histo- 
rique locale. 






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DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



143 



III. 

L'Église primitive. 

Nous avons vu qu'au XVI* siècle, il n'y avait pas à Buoux 
d'agglomération ; cependant, afin de desservir la population dis- 
séminée, une église avait été de bonne heure édifiée sur le plateau 
de Claparèdes, à 7 ou 800 mètres du village actuel et non loin du 
château seigneurial. Cette église est absolument isolée et paraît 
ravoir toujours été ; elle est abandonnée depuis le XVIP siècle et 
se trouve aujourd'hui enclavée et à moitié enfouie dans le cime- 
tière communal (i). 
Elle se compose d'une nef en berceau, mesurant 11 mètres 20 

de longueur sur 6 mètres de largeur 
dans œuvre, divisée en deux travées 
par un arc doubleau, et d'une abside 
de 3 mètres de profondeur sur plan 
circulaire, voûtée en cul de four. A 
l'intérieur règne une imposte formée 
d'un bandeau et d'un chanfrein, en 
bel appareil taillé au ciseau, qui se 
poursuit autour de l'abside, mais à 
un niveau inférieur, celle-ci étant 
beaucoup moins élevée que la nef; 
l'imposte contourne les pilastres 
engagés qui supportaient la retom- 
bée des doubleaux : ceux-ci sont au 
nombre de trois, correspondant aux 
contreforts. Ils sont carrés, avec 

Plan de l'ancienne kglise . . _, i.*.,^^ ^4. -.»^^4. ^^^ -.1 ^ 

DE Buorx. arêtes abattues et n ont, pas plus 

Échelle de 1/2 cent, par métré, que Timposte, reçu de décoration. 
Il n'en est pas de même des angles du mur triomphal qui ont été 
décorés, peut-être au XIII* siècle, de minces colonnettes aux deux 
tiers engagées, reposant sur un socle rudimentaire et n'ayant pas 
eu jadis, à ce qu'il semble, de chapiteau. 




{i) Le cimetière est du XIX* siècle; il n*en existait pas à Buoux antérieurement à 
celui-ci ; les inhumations se faisaient soit dans Téglise soit dans les propriétés pri- 
vées. 



144 MÉMOIRES 

La porte principale s'ouvre à Touest ; elle est à plein cintre, à 
claveaux bien appareillés; une deuxième porte existait dans le 
mur méridional ; son ouverture, en anse de panier à Tintérieur, 
est fermée carrément par un linteau d'une seule pièce, chanfreiné 
à Textérieur. Cette porte est murée depuis que |j cimetière a 
entouré l'église. 

Trois fenêtres actuellement maçonnées éclairaient Tune l'ab- 
side, les deux autres la nef; la première, détail assez curieux, ne 
s'ouvrait pas dans l'axe de l'édifice, mais sur le côté sud-est, 
contrairement à la règle générale, et cette exception s'explique 
difficilement sur ce plateau que balaie furieusement le vent du 
nord; une des deux autres était ouverte au nord, près du mur de 
façade. L'ouverture de celle de l'abside est ébrasée au dehors et au 
dedans ; le talus extérieur est formé par de minces dalles bien 
taillées; elle est amortie dans le haut par un linteau monolithe 
évidé en demi-cercle avec chanfrein, afin d'admettre le plus de 
lumière possible. Les deux autres fenêtres sont ébrasées exté- 
rieurement; leur partie supérieure est à plein cintre appareillé 
à rintérieur et à linteau chanfreiné au dehors. 

Un autel, formé d'une pierre très simple reposant sur un bâti 
en maçonnerie, occupe toute l'abside; il est surmonté d'un afireux 
retable dans le plus mauvais goût du XVII* siècle, badigeonné 
d'ocre jaune : cet autel en a vraisemblablement remplacé un 
autre plus petit, s'harmonisant mieux avec l'édifice. A droite, le 
mur est creusé d'un petit réduit parallèlipipédique de 40 centi- 
mètres de côté sur 3o de profondeur, destiné au dépôt des 
objets du culte (i). 

Au nord et au sud trois contreforts de faible épaisseur, contre- 
butent insuffisamment la poussée des doubleaux, car ils n'attei- 
gnent pas même la hauteur du mur; la largeur de celui qui se 
trouve en face de l'arc triomphal a 12 centimètres de plus que celle 
des deux autres qui n'en ont que 60. Tous sont couronnés d'une 
façon assez bizarre par un appareil triangulaire posé sur la 
maçonnerie de manière à former talus. 

A l'extérieur, l'abside a conservé la forme circulaire ; elle est 
couverte, de même que la nef, au moyen de dalles très soigneuse- 
ment taillées, pourvues d'encoches permettant une parfaite im- 
brication sur tous les côtés. Au-dessus de l'arc triomphal s'élève 



(i) Toutes les chapelles et les églises rurales de la région sont pourvues de cette 
annexe ; nous aurons l'occasion de le constater. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



145 



un clocher-arcade en bel appareil irrégulier ; il mesure 3 mètres 55 
de largeur sur 75 centimètres d'épaisseur; les deux baies dont 
il est percé sont d'inégale hauteur, avec une largeur de yS centi- 
mètres; les cloches sont depuis longtemps absentes. Autour du 
clocher règne une imposte très simple. 

L'appareil des murs est formé, aussi bien à l'extérieur qu'à 
l'intérieur, de moellons grossiers, de toutes dimensions, cueillis 
sur place, à peine cassés au marteau, et assemblés à gros 
joints. Pour les voûtes de la nef et de l'abside, on a employé des 
matériaux du même genre, mais plus petits, mieux choisis et 
noyés dans un mortier abondant. Cette maçonnerie contraste 
avec l'appareil soigné des arcs doubleaux, des portes, des fenê- 
tres et du clocher, ainsi qu'avec la toiture et le dallage, qui, 
d'après ce qui en subsiste, était assez régulier; il faut donc se 
garder de vieillir trop délibérément l'édifice. Si Ton se rend 
compte sur les lieux des moyens dont disposaient les construc- 
teurs et des ressources de la population, on s'aperçoit bien vite 
que l'appareil ne peut pas toujours constituer un critérium assuré 
de l'âge d'un monument. Ainsi, sur ce point aride et désolé du 
plateau de Claparèdes, on n'avait apporté que les matériaux 
taillés destinés aux ouvertures et aux arcs; quant aux ordinaires, 
ils étaient trop abondants sur place pour qu'on songeât à les 
prendre ailleurs; or, ces pierres ne se prêtent aucunement à une 
taille soignée. 

L'église ancienne est datée, mais de telle façon qu'il est bien 
difficile de se servir de la date, tant le lapicide a embrouillé son 
monogramme ; sur le côté droit du mur triomphal, une des 
pierres porte l'inscription suivante en caractères de 10 à 17 cen- 
timètres de hauteur : 




Je propose, sans insister autrement, la lecture : 



A DNl M& 
« Anno Domini Millesimo f » 



146 MÉMOIRES 

Est-ce là la date de la construction ? Les caractères — et c'est 
ravis qu'a bien voulu exprimer M. Labande — appartiennent à 
un gothique assez avancé; or, Texamen de Tédiflce ne permet 
pas cette concordance ; je supposerais plutôt que l'église ayant 
reçu quelque aménagement (peut-être les colonnettes qui déco- 
rent les angles de Tabside), on aura voulu soit inscrire la date de 
cette décoration, soit rappeler vaguement, d'après la tradition, 
celle de la construction primitive. 

Quoi qu'il en soit, malgré le caractère général de la maçonnerie 
et en présence de l'appareillage parfait des doubleaux, de la 
porte et de la couverture, je ne crois pas que l'église primitive 
de Buoux soit antérieure à la première moitié du XIP siècle. 




fMOToryni A. BKMtKT 4C!. I 



CHAPELLE SAINT-SYMPHORIHN 

(XI h siècle) 



DE l'académie de VAUCLUSE I47 



IV. 



Le Vallon de l^Aiguebrun. 
Saint-Symphorien . 

Après la traversée du village, le chemin d*Apt à Buoux, 
côtoyant à droite les falaises éboulées, à gauche un petit affluent 
de TAiguebrun perdu au fond d'un pli de terrain garni d'une 
végétation intense, se joint à la route de Bonnieux, qui va elle- 
même, au-delà de Saint-Symphorien, couper la grande voie de 
Marseille avant son entrée dans la Combe de Lourmarin. Nous 
ne nous occuperons pas ici des deux vallons secondaires, qui 
s'ouvrent presque en face de Saint-Symphorien et à l'extré- 
mité desquels se trouvent le château d'Aurons(i) et celui de 
Buoux (2). 

Le premier monument qui frappe le regard en arrivant par la 
route de Marseille, c'est le campanile élancé de la chapelle Saint- 
Symphorien, qui se détache, chaudement coloré parle soleil, sur 
le vert sombre des pentes du Leberon et de la Roche d'Espeil. 

Les constructions que nous voyons aujourd'hui comprennent 
des bâtiments du XII* siècle et d'autres du XVIIP ; eux-mêmes 
ont remplacé une cella et un petit monastère, bien antérieurs 
au XIP siècle. On a dit, en effet, sans en fournir la preuve, 
que Saint-Symphorien fut fondé et doté en 1064 par des mem- 
bres de la famille de Simiane (3) : cette assertion ne peut s'ap- 
puyer sur aucun texte; bien au contraire, c'est parce que ceux 
qui l'ont émise ne connaissaient pas les documents à utiliser 
qu'ils ont cru aisé d'inventer un fait et une date. Cependant, ceux 

(i) Le château d'Aurons, appartenant à M. Guillibert, est très pittoresquement 
situé dans une gorge ombreuse, sur remplacement d'une villa gallo-romaine ; on a 
exhumé sur ce point des débris antiques, notamment un fragment de buste et une 
inscription. Il en sera question, ainsi que du château de Buoux, dans une autre 
partie de ces Études. 

(3) Le château seigneurial de Buoux. après avoir appartenu à la famille de Pontevès 
et ensuite aux marquis de Galliffet est aujourd'hui la propriété de M"* veuve d'An- 
selme; là. comme à Aurons, les découvertes d'antiquités prouvent qu'une habitation 
gallo-romaine a précédé l'édifice du moyen âge. 

(3) Cf. notamment: Courlet [op. cit., v* Bonnieux), ainsi que Gay {op. cit., p. a5-29), 
qui échafaude là-dessus des hypothèses plus fantaisistes les unes que les autres. 



148 MÉMOIRES 

que nous possédons jettent quelque lumière sur Thistoire de la 
chapelle. 

La première mention faite dans les textes provençaux se trouve 
dans une charte de Tabbaye de Saint-Victor de Marseille (i). En 
1043, Pons Farald (2) donna à Saint-Victor et au monastère de 
Saint-Symphorien tout ce qu'il possédait dans le territoire de 
Buoux (3) ; en reconnaissance, Inguimbert, prieur de Saint-Sym- 
phorien, fît don à Pons Farald d'une mule valant quatre livres ; 
par une deuxième clause du contrat, Pons donna au monastère 
un jardin situé dans le territoire de Clermont (4). sous la fontaine 
Saint-Laurent et reçut en retour dix sols du prieur Inguilbert. 
Voilà donc parfaitement établie Texistence de Saint-Symphorien 
dès la première moitié du XI* siècle; cette chapelle dépendait 
même déjà de Saint-Victor, malgré la contradiction apparente du 
texte suivant. 

Par acte du 28 février io53 (5), Pons et Ripert, « germani 
fratres>i, donnèrent à Tabbaye Saint-Victor l'église de Saint- 
Symphorien, avec tout ce que leur père Pierre lui avait déjà 
octroyé, ainsi que les habitants du lieu et les dîmes qu'ils y perce- 
vaient ; après la date et les souscriptions, est mentionné le don 
en pleine propriété à l'abbaye marseillaise de divers immeubles, 
notamment d'un manse, près de Clermont, cédé par leur mère 
Ingilrada. On pourrait croire, d'après cet acte, que la donation de 
Saint-Symphorien à Saint-Victor ne date que de io53 ; or, nous 
avons vu que dix ans avant, cette donation était déjà un fait accom- 
pli ; nous nous trouvons donc en présence d'une confirmation 
avec augmentation de don, sans que la teneur de l'acte mentionne 
les textes antérieurs, ce qui se présente assez fréquemment au 
moyen âge. 

(i) Cartulaire de Saintr Victor, 1. 1, p. 482. 

(2) Il est inutile de chercher à identifier le nom de ce donateur, de môme que ceux 
qui sont mentionnés dans les documents postérieurs ; on s'est hâté, au siècle dernier, 
de trouver sous les noms révélés par les textes et les inscriptions du moyen âge, des 
personnalités définies que l'on rattachait sans scrupule à des familles féodales 
connues; pas plus pour Pons Farald que pour bien d'autres, l'identification n'est 
possible : on n'a, pour se rendre compte de cette impossibilité, qu'à compulser les 
tables copieuses du Cartulaire de Saint- Victor ; on verra combien sont nombreux et 
impersonnels les Pons, les Rostang, les Guillaume, etc., des XP et XII' siècles. 

(3) Voy. ci-dessous, Miettes d'histoire, les noms des divers quartiers de Buoux cités 
dans cette charte. 

(4) Clermont : Castrum et ecclesia de Clarimonte ; les ruines de la chapelle et du 
fort couronnent un mamelon au bord de Claparèdes sur le passage de la route 
ancienne de Marseille, à la limite des territoires d'Apt et de Buoux. 

^5) Cartulaire de Saint-Victor, 1. 1, p. 439. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



149 



La possession de Saint-Symphorien fut confirmée à Saint- 
Victor successivement par Grégoire VII, le 4 juillet 1079 (0 î P^^ 
Pascal II, le 23 avril 1 1 13 (2) ; et par Innocent II, le 18 juin 1 135 (3) ; 
dans les bulles, Saint-Symphorien est indifféremment qualifié de 
cella ou d'ecclesia, mais il n'y est plus fait mention de monastère. 

Une dernière charte de Saint-Victor, écrite entre 1129 et 
1 163(4\ simple rappel d'une convention antérieure, dit que Tabbé 
de Saint-Victor et les religieux ont établi que le prieur dq Saint- 
Symphorien devait payer annuellement à Tabbaye, à titre de 
pension ou de redevance viginti quatuor ciatos vitreos, c'est-à- 
dire vingt-quatre verres à boire (5) pour les besoins du réfec- 
toire. 

Au milieu du XII' siècle, Saint-Symphorien n'était donc plus 
qu'un simple prieuré ; les constructions primitives ayant disparu, 
par suite, soit de vétusté, soit de guerres locales, la réédiflcation 



TFVT6CRT\/4 



AJLALD 



flQSTAfVtj/V 



P0i^£ 






SANTrys 



row 




Inscription de Saint-Stmphoribn (6). 



(I) Cariulaire de Saint-Victor, t. H, p. 843. 
(a) Idem, t. II, p. 848. 

(3) Idem, t. II, p. 844- 

(4) Idem, t. I, p. 435. 

(5) Cette redevance en verres, mise à la charge d'un prieur logé dans un vallon 
solitaire et éloigné des centres commerciaux paraît singulière ; n'auralt-il pas existé 
dans les environs de Buoux une verrerie? 

(6} Le dessin de cette inscription a été relevé par D.-V.-H. Chambaud (ms. de la 
Bibliothèque d'Avignon, aSon, fol. 34a et 347); c'est cette copie que nous reprodui- 
sons ici. 



l5o MÉMOIRES 

de la chapelle actuelle et des annexes et la construction du cam- 
panile furent commencées peu avant 1200 : une inscription, 
encastrée aujourd'hui dans le mur d'une annexe, au-dessus de la 
porte située au nord, nous a conservé les noms, que j'ai vaine- 
ment cherché à identifier, des personnes notables qui fournirent 
les fonds nécessaires pour les travaux. 

Un examen attentif et minutieux de Saint-Symphorien m'a 
permis d'arriver à cette conclusion que les bâtiments, commen- 
cés avec un certain luxe architectural, furent hâtivement termi- 
nés et que certaines parties projetées ne furent jamais construi- 
tes ; nous n'en voulons pour preuves que le remplissage en 
moellons grossièrement cassés d'une partie des murs des étages 
du campanile, l'emploi dans deux baies supérieures de celui-ci de 
piliers ébauchés au lieu de colonnettes, la forme bizarre de la 
chapelle, ainsi que les amorces des arcs latéraux d'un bâtiment 
situé au nord, amorces qui ne portent pas trace d'un travail 
accompli et démoli plus tard. Les ressources auraient-elles 
manqué vers la fin des travaux, ou bien quelque guerre a-t-elle 
compromis et entravé l'achèvement de l'édifice? Il est difficile de 
se prononcer, mais l'impression signalée est certainement 
exacte. 

Après le XIII* siècle, nous trouvons encore Saint-Symphorien 
mentionné dans le rôle des décimes prélevés sur le clergé du 
diocèse d'Apt ; il y est porté pour xii sols vu deniers (i). 

Les annexes de la chapelle ont été démolies depuis longtemps, 
peut-être au cours des guerres de religion, alors que les troupes 
de tous les partis circulaient de la vallée de la Durance dans 
celle du Calavon ; les murs d'enceinte ont également disparu (2). 
Déjà, au XVIIP siècle, Saint-Symphorien n'était plus « depuis 
longtemps qu'un hermitage sans revenus, où l'on dit la messe 
les fêtes et les dimanches pour la commodité du canton (3). » 

Depuis, les bâtiments ont encore souiïert des injures des 
hommes et du temps : la chapelle menace ruine, les murs sont 
cachés sous une triple épaisseur de plâtre et on avait même 
établi, au siècle dernier, un pigeonnier dans l'étage supérieur du 
campanile, non sans mutiler la décoration. Mais tel qu'il est, ce 

(i) Albanès, Gallia christiana novissima. Province d*Aix, diocèse d'Apt, Instrumenta 
n- XV, col. i38 (XIV siècle). 

(2) Ils sont encore visibles en partie sur une photographie qui date de 35 ans 
environ. 

(3) H. du Temps, Le clergé de France, 1774. t. I, diocèse d'Apt, p. 68. (Collection 
Garcin.) 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



l5l 



charmant spécimen de Tart roman mérite l'attention de la com- 
mission des monuments historiques, au même titre que Tautel 
de Buoux(i). 

L'appareil allongé et régulier de la voûte et d'une partie du 
.campanile, les décorations des impostes de l'abside, la forme et 
l'ornementation des colonnettes et des linteaux des baies, les 
tailles décoratives et en feuilles de fougère (2) des matériaux 




T 

1 1 i\* 



V 




Chapelle de Saint-Symphorikn. 
Tailles de l*appareil. 

datent jsuffisamment l'édifice ; le |plan ci-joint permettra de 
distinguer les bâtiments du XIP siècle de ceux qui ont été 

édifiés sur 
l'emplace- 
ment du 
prieuré 
avec ces 
matériaux 
anciens. La 
chapelle 
est de for- 
me assez étrange et je n'en connais 
aucune, même par description, qui 
ait été élevée sur ce plan ; sa 
nef est voûtée en berceau avec un 
appareil allongé très soigné ; mais, 
comme dans ce cas défectueux la nef 
se dirigeait du nord au sud, l'abside 
a été placée, non à l'extrémité, mais 
au milieu de Tédifice, en face de la 
CHAPELLE DE Smnt-Symphor,en. Porte. En présence d'un plan aussi 
Plan. inusité, on pouvait songer à 1 exis- 

(lî Saint-Symphorien appartient à M. Mille, négociant à Apt. qui. pcnsons-nous. 
ne se refuserait pas au classement de sa propriété. 

(2) La taiUe en feuUles de fougère est surtout remarquable dans Tappareil du bas 
du campanile. 




1-2 MEMOfRES 

tence primitive d'une nef. dont la chapelle actuclîe n'aurait formé 
que le transept; une dernière \i5ite m'a prouve qu'il n'en était 
rien et que le plan actuel est bien celui des o>nstructeurs i . 

A rintérieur, nulle autre décoration visible que les deux par- 
ties d'imposte qui régnent aux angles de l'abside a la naissance 
de la voûte : ces imp^jstes s*>nt tV»rmes d'un bandeau et d'un 
chanfrein, décorés le premier de fleurs stylisées, d'un beau et 
ferme dessin, encloses dans de petits compartiments limités par 
deux Lignes verticales ; te deuxième, d'un rinceau enserrant dans 
ses volutes des fleurs du mèm.e genre. 

L'abside, sur plan demi-circulaire, est prise dans un fort massif 

irregulier au-dehors: l'autel primitif 
est disparu. s*:»n support était peut-être 
celui de l'autel mj.»deme. 

Cinq ouvertures éclairaient timide- 
ment la chapelle: elles sc»nt ébrasees au 
dedans et s*ou\Tent au dehors comme 
des meurtrières. La toiture primitive, 
en dalles taillées, a fait place a un 
recouvrement en tuiles. 

L'appareil des murs à l'extérieur, 
très régulier autL~>ur des ouvertures et 
des contreforts, est en matériaux pres- 
que bruts dans toutes les autres par- 

ChaPKLLE DE SAiNT-SYMPHORIEN. .- ^ , . ^ T-^,,>^^r ^.:^ - ^«f «^f'^r-^o «^., 

^ . 4. . , ties .2 ; a l oue^t. ae^ contreiorts peu 

Support d autel. '^ 

saillants contrebutent la voûte. 
Au nord, la chapelle se termine par un arc doubleau à deux 
ressauts, retombant sur des pilastres rectangulaires : accolés à 
ces pilastres, d'autres supports s«:kuiiennent les premiers claveaux 
d'arcs latéraux d'une construction annexe, jadis voûtée, ainsi 
que le prouve le contrefort placé a cOte de la p:»rte septentrio- 
nale, au-dessus de laquelle est placée, a l intérieur, l'inscription 
déjà signalée ^3.. 

î La disposition des lieux repv.^ndsiit si peu aux besoirrs du culte, que plus tard 
^iî^^id^ fjt abandonne^î et que Tautel fut place au sud, elive de deux marches au- 
dcsfus du sel. Les a-n ;^rces d>i vodtes que I-^n remarque <ur îa tVi^ade ouesi à un 
zi^ta,^ pcj él;:vr son: pv^:erieures du Xll' sioclc;. car les piirris des contreforts ont 
tLi i:l-_2_l:-r^^ p». ur Cette r.ojvells: c^nstructi ^p. : celle-ci ne poia:: pas avoir été 1er- 

1 Les rrus de îrculir.s ont e:e Cv\nserves ddrs :v us le< n^.urs. 

2 Ceci rorte es: c. nte-npora-ne de la chirelle: ses p.ed'^'its sont largement 
^cacL't..-^ : 3^:i ^.'«ertcre î^: a-i: .ne par un L::;edu mocioli'Jie. surmonté dîme 




DE L*ACADÉMtE DE VaUCLUSE 






A Touest, une porte donne accès dans un compartiment voûté 
en bel appareil, qui n'a d'autre issue qu'un trou rectangulaire 
percé au nord,' d'où part un boyau contournant dans l'épaisseur 
du mur et aboutissant au rez-de-chaussée du campanile, qui n'a 
pas d'entrée extérieure. 

Le campanile, rectangulaire et de forme élancée, comprend 
quatre étages intérieurs, actuellement dépourvus d'escalier, et 
dont les deux supérieurs seulement sont indiqués au dehors ; 
sa hauteur totale est d'environ 23 mètres ; il est terminé par une 
toiture pyramidale écrasée, en dalles taillées. Le troisième étage 
est ouvert sur les quatre côtés de baies dont l'ordonnance est 
indiquée dans nos planches; chaque baie est ornée de trois 
colonnettes (i) supportant des chapiteaux tous dissemblables, au- 
dessus desquels deux linteaux monolithes accolés forment tym- 





Plan de baies du clocher de Saint-Symphorien. 

pans ; ceux-ci ont chacun une décoration particulière : un seul 
porte sculptée une figure de Christ posée au centre d'une croix . 
les autres sont ornés de figures et de lignes géométriques, 
denticules, oves, feuilles, roses, inscrites dans un demi-cercle. Le 
quatrième étage est séparé du précédent par une petite corniche 
ornée de denticules ; il est éclairé par quatre baies coupées en 
deux, au sud et à l'ouest, par des colonnettes, au nord et à l'est, 
par des piliers carrés à chapiteaux cubiques dégrossis. 

Si Saint-Symphorien n est pas, à vrai dire, une église fortifiée 
dans le sens strict du mot, on ne peut nier que le campanile ait 
été construit pour surveiller le vallon du Buoux ; son emplace- 
ment sur la route de Marseille lui permettait de communiquer 
avec les forts de Buoux, de Sivergues, d'Auribeau et de Cler- 
mont : c'est donc plutôt une tour de guet qu'un édifice religieux. 



(i) La colonnette du milieu de la baie du sud manque ; celle du milieu de la baie 
à l'ouest est entièrement mutilée. 



1D4 MEMOlKEb 

L'absence d'ouverture à l'extérieur de la tour, la forme et l'épais- 
seur des murs de la chapelle, les fenêtres semblables à des 
meurtrières, la position du monument sur urr petit plateau 
démontrent que les constructeurs avaient songé à la défense de 
Saint-Symphorien ; le merveilleux est que le campanile n'ait 
subi aucune détérioration au cours des guerres des XIV* et 
XVI- siècles. 

Presque en face de Saint-Symphorien, sur la rive gauche de 
TAiguebrun, un fortin, fondé sur un rocher isolé et dont les 
les murs sont percés d'étroites et longues archères avait été 
construit au XIV* siècle, si l'on en juge d'après l'appareil de la 
construction ; sur un autre roc, peu éloigné de là, on voit encore 
trois silos qui ont pu servir à une autre défense aujourd'hui 
disparue. 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE \h? 



Sépultures néolithiques. 
Cuves vinaires. 

Au-delà de Saint-Symphorien, la route du Fort a été tmcée 
dans un terrain où abondent, à des profondeurs variables, de 
nombreux débris de poteries néolithiques, disséminés dans un 
conglomérat formé de terre et de cailloutis éboulés des falaises ; 
ils sont malheureusement très fragmentés; mais il suffirait de 
fouiller sous les abris naturels formés par des rochers écroulés 
sur les pentes pour trouver des témoignages plus importants de 
rhabitation préhistorique du vallon de l'Aiguebrun. Ces abris 
sous roches ont servi de foyers et enfin de grottes sépulcrales : 
ils sont nombreux à partir de Saint-Symphorien jusqu'aux 
Séguins; quelques-uns ont été fouillés au siècle dernier, on ne 
sait par qui; un seul Ta été scientifiquement, en i885, par 
M. Louis Julien, de Marseille. 

Cet abri, de grandes dimensions, a son ouverture au sud, au 
bord du chemin. M. Julien en a extrait onze squelettes humains, 
des poteries en grand nombre, des ossements d'animaux, des 
instruments en silex, des haches, des poinçons et des aiguilles 
en os, des polissoirs, etc. (i). 

La grotte de Buoux est formée de trois rochers qui en s arcbou- 
tant mutuellement, ont laissé entr'eux un couloir à plusieurs 
branches, dont la principale se dirige du sud au nord ; ainsi que 
nous le verrons, ce n est pas là le seul habitat préhistorique du 
vallon de l'Aiguebrun. 

Une catégorie de monuments pré-romains attire particulière- 
ment l'attention : il s'agit des cuves vinaires, au nombre de 
quatorze au moins (i), que Ton peut voir ou visiter en allant de 
Saint-Symphorien au pied du Fort. La forme générale des cuves 
du vallon est la suivante : elles sont creusées soit dans un rocher 
éboulé, soit à la surface même du sol, toujours sur une partie en 
pente; toutes, à l'exception de deux, se composent de deux réci- 
pients; le premier, plus vaste, rectangulaire, s'écoulant par une 

(i) Cf. pour les détails: Nicolas. Une excursion à Buoux, loc. cit., p. 316-233. 
{2) Rochetin. op, cil,, n'en mentionne que six. 



I5() 



xMEMOlRES 



bonde percée au bas de la paroi qui le limite, dans un deuxième, 
plus petit et affectant des formes assez variées ; lorsque le petit 
récipient manque, la cuvée était reçue dans des vases de grandes 
dimensions. 

La construction des cuves vinaires a exigé évidemment l'em- 
ploi d'outils solides en fer ; ceux en bronze n'auraient pas permis 
un travail aussi important. Cette constatation, jointe à la régula- 
rité des formes et à la connaissance que nous avons de l'époque 
de l'introduction de la vigne dans la région, ne permettent pas de 
faire remonter ces monuments au-delà du VI' ou V* siècle, au 
plus tard, avant l'ère chrétienne (i). 

Toutes les cuves sont situées en rase campagne (2), surtout 
aux abords des cabanes en clayonnages dont il sera question 
plus loin et qui nous paraissent contemporaines; la plupart 
n'avaient qu'une couverture en dalles; les plus soignées portent 
sur leurs bords des encoches, qui recevaient les poutrelles formant 
sommier pour une couverture en pierres ou en bois. Quelques- 
unes ne sont plus dans leur position primitive : par suite de bou- 
leversements elles gisent, parfois renversées, tel le spécimen 
situé à gauche du chemin, à côté de la Tuilière, prés du raidillon 
qui conduit au chemin du village. 




Vue perspective d'une cuve vinaire. 



La plus vaste de toutes était creusée sur un grand bloc, près,de 
la Tuilière; elle mesurait, d'après Rochetin (3), 3 mètres 86 de 
longueur, 2 mètres 18 de largeur, i mètre 26 de profondeur dans 



(1) Il y a d'ailleurs entre les cuves les plus rudimentaires et quelques-unes très 
bien taillées une distance peut-être considérable dans le temps. 

(2) Nous jugeons inutile de donner une nomenclature des cuves du vallon ; on les 
retrouvera aisément sur le plan, où elles sont indiquées par un signe spécial. 

,:<) Qp. cit.f p. 141. M. Rochetin a minutieusement décrit ce vaisseau. 



DE l'académie de vaucluse i?7 

le haut eto mètre 76 dans le bas; elle est à peu près détruite 
depuis quelques années (i). Ne pouvant la publier comme type, 
nous avons choisi celle qui gît non loin et en face de la grotte de 
Buoux ; ses parois bien dressées, la recherche qui a présidé à sa 
confection, pourraient la faire attribuer à une période plus récente 
que les autres (2). 

Si Tépoque de la construction des cuves est antérieure à l'occu- 
pation romaine, on ne peut cependant douter, par l'exemple de 
celle que nous avons décrite plus haut, que quelques-unes aient 
été utilisées jusqu'au XVIII* siècle ; il est certain qu'une fois 
recouverte, l'ancienne cuve était on ne peut mieux conçue et 
qu'elle valait tout autant que la plupart de celles que Ton place 
dans les caves des campagnes ; il est enfin probable que les habi- 
tants de Buoux ont préféré utiliser ces annexes situées en plein 
air, par crainte des émanations de lacide carbonique et des 
accidents qui en sont si souvent la conséquence. 



.1) La campagne de la Tuilière est située à gauche du pont sur l'Aiguebrun; sa 
récente reconstruction a fait disparaître la plus belle cuve du vallon. Au cours des 
récents travaux exécutés sur ce point, les ouvriers ont découvert deux fours, emplis 
de tuiles calcinées, qui ont dû être abandonnés en pleine fabrication ; le quartier 
tire de là sa dénomination. 

{•2) Il faut citer une curieuse cuve miniature* qu'un habitant des maisons en 
clayonnages a creusée sur un petit bloc, près de la falaise du Moulin-Clos, comme en. 
s'amusant; cette réduction n*a pas plus de o"5o de longueur en tout. 



l58 MKMOIRES 



VI. 

« 

Ancien village de Saint-Germain. 

L'Église et le Cimetière. 

Le Moulin-Clos. 

Refuges et Cabanes en clayonnages. 

Du pont de la Tuilière, le chemin conduit d*abord au Moulin- 
Clos, puis directement à Tescalier du Fort ; en le parcourant, on 
renouvelle la constatation faite à propos des terres de Saint- 
Symphorien, qui recèlent de nombreux débris de poteries : sur 
une longueur de deux cents mètres, un peu avant le Moulin- 
Clos, le talus qui domine la route, à droite, formé d'un humus 
particulièrement noir et gras, renferme, non plus quelques 
débris de Tindustrie céramique, mais des monceaux de tessons 
de toutes les pâtes, depuis la terre rougeâtre mêlée à des cail- 
loux grossiers, jusqu'à Targile pure, façonnée avec quelque 
recherche, bien cuite, peu épaisse et décorée soit de points trian- 
gulaires irrégulièrement placés sur le col ou la panse des vases, 
soit de lignes plus ou moins parallèles et d'ornements géométri- 
ques simples. La quantité de ces débris est vraiment stupéfiante 
sur certains points (i). 

Là encore ont dû vivre plusieurs générations humaines, 
comme sur Claparèdes, à la Brémonde, aux Séguins, etc. ; on se 
rend compte que cette concentration de l'habitation de l'homme 
à tous les âges, a une cause directe : c'est le plateau du Fort, ce 
refuge merveilleusement surgi au milieu du vallon, qui a attiré 
près de lui d'abord les populations primitives, plus tard une 
agglomération chrétienne, et au moyen âge ceux que les inva- 
sions ou les guerres féodales contraignaient à la fuite. 

Entre le Moulin-Clos et le pied du Fort sont amoncelées les 
ruines méconnaissables d'un petit village, dont les maisons se 

(i) Immédiatement après le coude que fait le chemin près du Moulin-Clos, la 
construction de cette voie a fait découvrir des tombes à incinération en forme de 
silos, renfermant des cendres, quelques ossements et des poteries néolithiques frag- 
mentées iCf. Rochetin, op. cit., p. i33). Le fermier du moulin nous a déclaré avoir 
jadis exhume, près des bâtiments, des crânes appartenant â des squelettes, peut-être 
inhumés dans la position assise. 



DE l'académie de vaucluse 1^9 

pressaient autour d'une église très ancienne, village que Gay (i) 
dénomme Saint-Germain. D'après le même auteur (2), qui dit 
avoir vu, vers 1840, les ruines de l'église, celle-ci était orientée 
et mesurait i5 mètres de longueur, y compris une abside circu- 
laire; près de la porte se trouvaient les fonts (?), simple pierre 
ronde, creusée, d'un nriètre de diamètre. Trois autels furent trou- 
vés en 1843 dans les décombres; Tun d'eux est celui qui sert de 
bénitier à l'église moderne de Buoux (3), les deux autres, trans- 
portés dans les granges voisines, sont perdus. 

La présence des trois autels permet d'identifier cette église 
avec celle qui a été mentionnée par Boze (4) comme se trouvant 
« parmi les ruines du château de Buoux », contenant trois autels, 
et sur la porte de laquelle était gravée l'inscription suivante : 

SACRVM SANCTVARIVM ET DOMVS STORVM 
lOSEPHI ET PHOTINI ANNO 967 (sic!) 

Cette date correspond à peu près à Tâge de l'autel de Buoux ; 
c'est par ignorance des lieux ou par impropriété de termes que 
Boze parle ici des ruines du château : celui-ci n'était pas en 
ruines au début du siècle dernier; il ne veut pas désigner davan- 
tage l'église du Fort, dont l'inscription est connue (5) ; il s'agit 
donc bien de celle de Saint-Germain. 

On trouva, en 1843, les débris d'un petit monument en pierre, 
piscine ou bénitier, orné de figures ; après être demeurés sur 
place pendant longtemps, exposés à toutes les causes de dégra- 
dation, ils ont été perdus, à l'exception d'un fragment recueilli par 
M. Garcin. Le motif de décoration, sculpté sur le bord extérieur 
du monument, est l'un des plus fréquemment employés au moyen 
âge : il représente Daniel dans la fosse aux lions; le prophète, 
assis, est isolé dans un ovale, au-dessus duquel se lit la termi- 
naison de son nom : lEL. De chaque côté était sculpté un lion 
dressé ; ces dernières figures ont été égarées. 

Le village de Saint-Germain a dû se former après les grandes 
invasions, probablement au X* siècle, et disparaître pendant les 
guerres locales du moyen âge ; la plupart des objets trouvés sur 

(i) Op. cit., p. 67. 

(2) p. 68. 

(3) Cf. ci-dessus : L'église de Buoux. 

(4) Histoire de i* église d'Api, p. 437. 
{b) Voir ci-après : Le Fort. 



i6o 



MEMOIRES 



ce point ne sont pas postérieurs au XI* siècle, notamment les 
monnaies. 

Si les constructions ont péri, il n'en est pas de même des i5oà 
200 tombes creusées dans les rocs éboulés et à la surface même 
du sol, dans un rayon de plus de 5oo mètres autour du Fort, mais 
seulement à Touestet au nord de celui-ci (i). Ces cercueils sont, 
soit isolés, soit groupés par deux, trois, cinq et jusqu'à neuf 
ensemble sur un même bloc; leurs dimensions varient extrême- 
ment, depuis celles qui conviennent à un enfant de quelques 
jours (o'"72 de longueur, o"20 de largeur dans le haut et o"i3 
dans le bas), jusqu'à celles qui atteignent 2'"5o de longueur et 
o™58en largeur (2). Les cercueils moyens ont de i"5o à i"8ode 
long, o"40 de largeur à la tête et o"25 aux pieds ; le plus grand 
nombre sont simplement parallèlipipédiques ou plus étroits dans 
le bas que dans le haut, mais il en est très anthropoïdes, qui ont 
été taillés pour l'emboîtement des épaules et de la tête, avec 
parfois, mais très rarement, un petit coussinet en relief sous 
celle-ci. 

Tous les cercueils avaient dû recevoir, soit une couverture en 
dalles juxtaposées, recouvertes de terre, soit un couvercle d'une 
seule pièce (3) ; les plus soignées ont une rainure pour recevoir 
celui-ci. Sur le pourtour d'un certain nombre, une rigole a été 
creusée pour faciliter l'écoulement des eaux pluviales (4) ; mais 
un détail surprend : c'est la présence sur une moitié au moins 
des tombes, d'une petite rigole, soit naturelle, soit creusée inten- 
tionnellement, au point le plus bas, et qui paraît avoir été 
agrandie ou aménagée pour l'évacuation des eaux provenant du 
cercueil ; je n'insiste pas sur cette attribution, mais la fréquence 
de ce détail d'exécution est telle qu'il n'était pas inutile de là 
signaler. 

(i) Ce mode d'inhumation se rencontre ailleurs dans la région: on trouve des 
cercueils semblables à Sivergues. à Apt (Rocàalière et Tourrcttes). à Saignon. etc. 

(a) L'un des plus grands est taillé dans un bloc assez régulièrement dégrossi exté- 
rieurement et affecte grossièrement la forme d'un sarcophage ; nous l'avons trouvé 
près du chemin du Fort, à l'ouest, gisant renversé sur son couvercle monolithe plat ; 
les terres situées au-dessous ont fourni quelques ossements humains, mais aucun 
objet permettant de déterminer l'époque de sa construction ; cependant, il peut exister 
encore des tombes inviolées qui donneraient, si elles étaient fouillées scientifiquement, 
un résultat appréciable pour l'histoire. 

(?) Quelques-uns de ces couvercles gisent à côté de la tombe qu'ils fermaient. 

(4) Ces rigoles existent aussi autour des tombes du cimetière des Baux : des réci- 
pients étaient placés au-dessous des rigoles d'écoulement (>) Cf. Rochetin, Les Baux 
dans l'antiquité, dans les Mémoires de r Académie de Vaucluse, 1890, p. 10. 



DE l'académie de vaucluse i6i 

Il est enfin remarquable qu'aucune recherche d'orientation n'a 
dirigé le creusement des tombes ; sur un même bloc, où Ton eût 
pu les disposer dans un autre sens, les unes sont dirigées du 
nord au sud, de Testa Touest et vice-versa. 

On a signalé un groupement considérable de cercueils de ce 
genre, mais jamais anthropoides, dans les environs des Baux (i) ; 
M. Rochetin, qui avait vu ceux de Buoux, attribuait les uns et les 
autres à la période du Bas-Empire ; je pense que si Ton a com- 
mencé alors ce mode d'inhumatfon, le plus grand nombre des 
tombes appartient à une période s'étendant du VIP au X' siècle, 
notamment celles qui épousent la forme du corps ; il est même 
probable qu'elles ont été utilisées à des époques successives. En 
Tétat, et jusqu'à ce qu'une découverte de tombeau intact permette 
de dater le cimetière de Buoux, nous le considérons comme une 
nécropole carolingienne, contemporaine de Téglise construite au 
centre de l'agglomération principale des tombes (2). 

Derrière le Moulin-Clos, en face du Fort et sur la rive droite 
de l'Aiguebrun, une pente abrupte, semée de blocs détachés du 
plateau supérieur, conduit au pied d'une falaise à pic, très 
élevée, colorée par le soleil et percée vers sa mi-hauteur de 
grottes aujourd'hui inaccessibles ; cette falaise et les rochers qui 
la précèdent ont été occupés à deux époques différentes que nous 
chercherons à déterminer. 

A la première appartiennent les trous ayant servi de support 
aux poutrelles de cabanes en clayonnages, les rigoles creusées 
dans les rocs pour l'évacuation des eaux de pluie, les abris sous 
roche et les débris, assez nombreux, de poteries fort grossières, 
généralement en pâte rougeâtre, formées à la main, point ou peu 
cuites, et dépourvues d'ornement. A notre avis, et nous sommes 
d'accord là-dessus avec un précédent explorateur du vallon (3), 
ces traces d'habitations ne sont pas, à proprement dire, préhis- 
toriques, mais appartiennent à une époque où les habitants se 
servaient habilement d'outils résistants; il aurait été impossible 
d'obtenir les trous quadrangulaires des poutrelles avec les outils 

(i) Rochetin, ibidem. — Il existe encore de ces tombes auprès des églises ou 
chapelles de Saint- Pan taléon près de Gordes et de Sainte-Croix de Montmajour. 
Quelques-unes'de ces dernières sont anthropoïdes. 

(3) Rochetin, op. cU., p. 143. a cru, à tort, que certains objets en bronze trouvés à 
Mortisson, près de Saint-Symphorien, avaient été recueillis dans une tombe de 
Saint-Germain ; c'est ce que lui a fait supposer que ces tombes pouvaient être gallo^ 
romaines. 

(3) Rochetin, op, cii., p. 145. 



102 MÉMOIRES 

en bronze, encore moins avec des instruments en pierre ; il y a 
enfin dans la recherche des emplacements, dans la combinaison 
des toitures et l'adaptation des abris, une recherche qui n'est pas 
d'une population primitive. 

D'autre part, on voit que les habitants du Moulin-Clos n'avaient 
pas élevé des édifices maçonnés, mais qu'ils avaient simplement 
approprié des abris naturels; on ne rencontre, en efi^et, pas trace 
de murs dans les environs. Nous pensons donc que les cabanes 
en clayonnages sont contemporaines des cuves vinaireset qu'elles 
sont dues soit aux Ligures qui occupaient la région, soit aux 
Celto-ligures : elles seraient donc antérieures au II* siècle avant 
notre ère. 

Nous ne ferons pas une description des vestiges que nous 
avons relevés; il faut une visite des lieux pour se rendre compte 
sur une longueur de plus de 3oo mètres, de la manière dont 
toutes les aspérités du roc, tous les blocs, tous les abris ont 
été entaillés et adaptés aux besoins de l'habitation ; des lignes 
de trous de poutrelles indiquent la hauteur des toitures qui 
venaient reposer soit directement sur un rocher voisin, soit sur 
d'autres poutres plantées verticalement. 

Des habitats semblables ont été signalés et décrits, notamment 
ceux des Baux et de Lamanon (Bouches-du-Rhône) (i), où les 
habitations ont été créées comme à Buoux, dans la molasse 
coquillière, facile à travailler; toutes sont exposées au midi, 
abritées du vent et situées à proximité d'une source ou d'un 
cours d'eau. 

L'autre série de vestiges semble moins aisée à dater : il ne 
s'agit plus ici d'abris contre les intempéries, mais de refuges 
ménagés sur le flanc de la falaise à pic, à une grande hauteur, 
de façon à les mettre hors d'atteinte ; c'est donc à une époque de 
terreur et de danger permanent que ces refuges furent fondés, car 
les travaux entrepris, d'une exécution longue et pénible, excluent 
toute présomption en faveur d'un moment de simple frayeur, qui 
aurait fait l'homme se cacher, se terrer et non se créer une 
demeure imprenable. 

Sur quelques points, les habitants avaient d'abord aménagé 
les rochers qui formaient avec la falaise une sorte d'appartement 
long et étroit, pouvant être couvert avec des tuiles ou des lauses ; 

il) Rochctin, Les Baux dans l'antiquitèy p- -2- Cet érudit a constaté, dans les 
cabanes des Baux, une sorte de recherche dans l'appropriation des lieux (bancsi 
consoles, anneaux creusés dans le plafond, etc.). 




^40T0T»Fif A. BcHNWT ACS, I 



FALAISE DU MOULIN-CLOS 

Hscalier et Refuge 



DE l'académie de vaucluse i63 

ces retraites étaient barricadées à rentrée et sur leur parcours 
avec des poutres dont les encoches ont subsisté ; les traces lais- 
sées par la fumée sur les parois ne permettent pas de doute quant 
à la durée de l'occupation. Ailleurs, les grottes naturelles qui 
s'ouvrent dans la haute muraille du Moulin-Clos avaient été 
fermées très solidement et Tamorce des escaliers qui y aboutis- 
saient était dissimulée dans les éboulis et les broussailles. 

Mais, sur un point surtout, les travaux entrepris ont été consi- 
dérables ; c'est au milieu de la falaise où le mur vertical a été 
creusé d'une grande et haute niche, peu profonde, divisée en cinq 
ou six étages, indiqués par les trous qui recevaient les poutres 
des planchers. Afin d'éviter toute escalade, Tescalier qui y 
conduisait s'arrêtait à plus de dix mètres au-dessus du sol ; une 
sorte de passerelle volante jetée entre la dernière marche et un 
grand bloc écarté de plusieurs mètres permettait de descendre 
dans le vallon. 

A partir du premier étage, un mur dont" il reste quelques pans, 
construit en très bel appareil à joints fins, cachait la plateforme 
et formait les parois de l'habitation ; il ne peut donc être ques- 
tion, si l'on considère la régularité de la maçonnerie d'attribuer 
ces refuges à une population barbare ; ils ne sont pas dus davan- 
tage aux Vaudois pourchassés, qui n'auraient pu songer à s'y 
fixer; d'ailleurs les refuges auraient facilement succombé sous les 
efforts de l'artillerie. Nous voilà limités dans le temps entre le V* 
et le XIV* siècle ; or, l'appareil des murs ne peut appartenir qu'à 
une époque rapprochée de la fin de l'Empire ou au début de la 
féodalité ; nous ne pensons pas que les guerres locales aient été 
assez violentes aux XI* et XII* siècles, pour justifier la construc- 
tion des refuges, tandis que les invasions réitérées des barbares 
au V*, au moment où les villes et les villages étaient abandonnés, 
ont pu obliger les habitants de la contrée à se garder contre le 
passage des ennemis ; à ce moment, les Gallo-romains n'avaient 
pas encore perdu les notions de la taille des pierres et de l'art de 
bâtir ; d'autre part, la poterie en terre grise, bien cuite et faite au 
tour que l'on recueille sur ce point, se rapproche beaucoup de la 
poterie gallo-romaine par son galbe et sa contexiure. C'est donc 
au V* siècle au plus tôt que nous attribuerons les refuges du 
Moulin-Clos, desSéguinset du monolithe décrits ci-après. 



164 



MEMOIRES 



VII. 



Le Fort de Buoux. 



Dans la partie centrale du vallon, sur un point où celui-ci s'élar- 
git jusqu'aux pentes du Leberon, surgit, la base entourée d'une 
intense végétation, un vaste parallélogramme de molasse; au- 
dessus, s'étagent les défenses du Fort de Buoux, qui a joué un 
rôle important non seulement pendant le moyen âge, mais encore 
au cours des guerres religieuses et civiles du XVI' siècle. Le 
plateau fortifié se dirige du sud-est au nord-ouest avec une 
pente très accentuée, le point culminant se trouvant vers le 
Leberon ; sa longueur est de 55o mètres avec une largeur variant 
entre 40 mètres au centre et 100 aux extrémités. 

Ce bastion natu- 
Le Moulin Clos j-gl n'est abordable 

que sur trois 
points : ràTouest, 
par une pente assez 
douce que termine 
un chemin en par- 
tie taillé dans le 
roc, aboutissant à 
l'unique porte du 
Fort ; 2*» à Test, 
par un raidillon 
qui finit à quel- 
ques mètres du 
bord du plateau ; 
et 3"* au sud-est, 
par une première 
o ^ o esplanade desser- 

PLAN GENERAL DL FoRT DE BuOUX. ^ 

Échelle: o-i par mètre. '• ^ vie par un escalier 

secret. Nous verrons comment la défense avait été organisée 
près de ces accès. 

Le chemin de l'ouest passe, après le Moulin-Clos, sous le plus 
vaste abri qui soit probablement dans la région : cçt auven test 
constitué par un rocher formidable dont le bord s'avance à 
plus de 35 mètres de la paroi, abritant une aire de 800 mètres 




DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE l65 

carrés. Est-il nécessaire d'ajouter que cette baume exception- 
nelle a dû être habitée à toutes les époques ? Si les décou- 
vertes d'objets néolithiques n'ont pas été très nombreuses, 
c'est que la construction de la route a bouleversé le relief du sol 
et, d'autre part, que des fouilles méthodiques n'ont jamais été 
entreprises sur ce point. Les traces d'occupation postérieure sont 
autrement importantes : on retrouve ici des cabanes en clayon- 
nages, aussi bien sous l'abri qu'à ses abords ; elles étaient proté- 
gées contre le ruissellement des eaux par de longues rainures 
horizontales tracées avec un outil métallique, à 7 ou 8 mètres de 
hauteur. 

De part et d'autre, sur les parois de la baume et sur les rochers 
éboulés qu'elle surplombe, on aperçoit les trous destinés à 
l'établissement des poutrelles, plantées de façon à former de 
vastes appartements clos. La cuve vinaire à récipient unique, 
creusée dans le sol à l'ouest de l'abri, appartient à la même 
époque; enfin — et cette remarque vient à l'appui de notre thèse 
de la postériorité des inhumations, — de nombreuses tombes ont 
été façonnées à la surface des blocs, au travers des trous à pou- 
trelles, et dans l'enceinte des cabanes : Tune d'elles a été même 
ménagée au bord de la cuve : ceci démontre que cuves et 
constructions étaient abandonnées lors de l'établissement des 
cercueils (i). 

L'abri dépassé, le chemin contourne vers le Fort, tantôt en 
plan incliné, tantôt en large escalier et aboutit aux premiers 
ouvrages de défense. Avant la porte principale, un bastion (a) 
défendait le chemin ; bâti en murs épais, il avait comme annexe 
un corps de garde et des abris taillés dans le rocher, munis de 
bancs, de niches et de rigoles ingénieusement combinées pour 
l'évacuation des eaux (b) (2). 

La porte (c) écroulée et réédifiée en partie au siècle dernier, 
s'ouvre dans une courtine qui bordait le plateau au nord-ouest 
et à l'ouest ; cette courtine était défendue par des tours rondes. 
Les ruines de l'une d'elles, percée de longues archères, dominent 
encore l'escarpement (d) ; des meurtrières peu ébrasées s'ouvrent 
dans les murs d'enceinte (3), flanqués à l'intérieur de bastions 
rectangulaires (e). Transversalement, le plateau a été creusé sur 

(1) Un certain nombre ont disparu par suite de la construction du chemin. 
(a) A droite de la porte, nous avons relevé des traces de cabanes en clayonnages. 
(3) Les constructions du bas du plateau ont dû être démolies plusieurs fois ; celles 
que l'on voit aujourd'hui datent du XV* siècle ; leur appareil tst peu soigné. 



i66 



MKMOIRES 



5o mètres de longueur pour un chemin jadis couvert, ainsi qu'en 
témoignent les encoches taillées sur ses bords (ff), et qui, utili- 
sant comme débouché une anfractuosité naturelle, permettait 

aux assiégés de circu- 
ler à Tabri, en s'y in- 
troduisant par Tesca- 
lier (g) et d'attaquer 
les assaillants par 
derrière lorsque la 
porte était menacée, 
en descendant sur un 
étroit plateau en sail- 
lie hors de la cour- 
tine (i;.Un vaste bas- 
sin (H\ qui n'a pu 
servir que de citerne 
ou de magasin, autre- 
fois voûté, a été taillé 
à l'extrémité du 
fossé. 

A partir de ce point 
et jusque vers le mi- 
lieu du plateau, on ne 
rencontre plus au- 
jourd'hui de con- 
struction (2) ; mais 
les traces qui sil- 
maisons s'élevaient 
là où le sol est maintenant recouvert d'un humus épais, sur 
lequel végètent quelques bouquets d'arbres (:>). Le premier bâti- 
ment que l'on trouve est un bastion (i) voûté, aux murs épais, 
percé d'une seule porte, amortie carrément par un linteau mono- 
lithe et dont la destination est incertaine (4). Quelque 3o mètres 




Plan du Fort de Buoux : partie du Nord-Ouest. 
Échelle de i"- par mètre. 

lonnent le rocher démontrent que des 



(!) Ces chemins couverts, de formes variées, suivant les positions, ont été iris 
utilisés au moyen âge, dans les châteaux-forts. (Cf. Enlart. op. cit„ t. II, p. 47>48c.) 

(a) Les habitants du Fort avaient jugé inutile de couvrir de courtines tous les 
bords du plateau ; elles n'existaient que sur les points faibles. 

(3) Depuis le XVIII' siècle, l'esplanade du Fort a été livrée à la culture et au pâtu- 
rage ; le Procès-verbal d'estimation des biens du marquis de Galliffet, seigneur de 
Buoux (ventôse an 11), p. Sa, porte que le rocher du Fort contient 6,5o8 cannes carrées 
(a hectares 5? ares 40 centiares) de terres labourables. 

(4) C'est sans une ombre de vraisemblance que Gay {op. cil.) a restitué l'afTcctation 
précise de tous les bâtiments de la forteresse. 




FORT DE BUOUX - I.'ÉGLISE 




PMCTOTrPiC A BCMtWT ACÏ, NAi«:r. 



FORT DE BUOUX 

Appareil d'une enceinte 



bE L* ACADÉMIE DE VAUCLUSE 167 

au-dessus, un amoncellement de matériaux indique les ruines de 
l'église du Fort (j) ; n'étaient les arcs latéraux de la nef, solide- 
rnent établis, qui ont résisté à la poussée des pierres tassées 
contre lés parois, il serait impossible de discerner de quel édifice 
il s'agit : la porte, la voûte, l'abside et la façade sont complète- 
ment ruinées ; çà et là des matériaux de bel appareil gisent dans 
les décombres, indiquant le soin apporté à la construction. Le 
plan de l'église comportait, autant qu'on peut le restituer, une 
façade à Touest, percée d'une porte en plein cintre, non au 
milieu, mais dans l'angle sud-ouest, deux travées séparées par 
un doubleau, et une abside. 

Dans chaque travée un arc latéral en tiers point limitait la nef 
des deux côtés; nulle décoration sculpturale n'apparaît. A la 
naissance de la voûte régnait un cordon à relief méplat, contour- 
nant des pilastres de faible épaisseur qui soutenaient l'arc dou- 
bleau. Rien ne laisse supposer l'emplacement des fenêtres. Au 
dehors, trois contreforts soutenaient l'église au nord ; construits 
en appareil moins soigné que les autres parties de l'édifice, ils 
ont 2 mètres environ d'épaisseur. L'église bâtie en moellons par- 
faitement taillés, assez allongés et à joints minces, mesurait 
environ 12 mètres de long sur 7 de largeur ; elle était voûtée en 
berceau. 

Sur les trois claveaux formant le milieu du cintre de la porte, 
était gravée une inscription que je reproduis textuellement d'après 
le dessin qui m'a été communiqué : 




l68 MÉMOIRES 

« In nonis januarii, dedicatio [ist\ius ec(c)l[es)ie ; vos q(u)i 
« tra[n)sitis, q(u)i.... flere velitis, p[er] me transite, sutn janua 
« vie » (i). 

La graphie de Tinscription n'est pas reproduite dans la copie (2), 
mais bien seulement la disposition des mots et des lettres ; 
d'après les indications de M. Garcin, la forme de celles-ci est 
parfaitement semblable à celle des inscriptions de Tabbaye Saint- 
Eusèbe (inédite) et de la chapelle de Clermont (3) ; leur allure 
date suffisamment Téglise (4), qui doit avoir été construite vers 
le début du XIIP siècle (5). 

Non loin de Téglise, gisent les ruines d'un bâtiment à deux 
compartiments (l), soigneusement bâti, dont la porte à plein 
cintre est en claveaux appareillés en crossettes (XII* siècle?) 

Entre ces deux édifices et les fortifications se trouvaient des 
maisons ayant servi soit à une population sédentaire, soit au 

(I) Le mot laissé en blanc représente une erreur de copie irrestituable. 

(3) M. Chambaud, qui avait visité le Fort vers ia40, n'avait pu déchiffrer cette 
inscription ; Courtet n'avait pas été plus heureux et Gay la déclarait illisible ; 
en i859, M. Garcin. notre collègue, s'étant aperçu que la porte s'était effondrée, 
s'empressa de prendre la copie qu'il a mise k ma disposition ; malgré ses 
soins et ses recommandations, l'inscription a été perdue ; cette perte est d'autant 
plus regrettable que ce document est un curieux spécimen de l'épigraphie chrétienne 
du moyen âge. 

(3) Publiée par Moirenc, Tourrettes et Clermont, Apt, 1868, p. 3i. 

(4) Cf. À ce sujet le Bulletin archéologique du Comité des travaux historiques et 
scientifiques, iSgS, p. xx. 

(5) Mérimée, qui avait, en septembre 1834, visité le Fort de Buoux, raconte plaisam- 
ment par deux fois sa déconvenue, les Aptésiens l'ayant conduit aux ruines pour lui | 
montrer une inscription syriaque (sic) ; dans une lettre, publiée par la Revue de Paris 

(i5 mars 1898, p. 67), il se lamente auprès de Requien : 

«... Notre ami M. Rastoul m'a joué un tour, c'est de me dénoncer aux Aptésiens, 
lesquels m'ont circonvenu, m'ont donné un banquet comme à un député et m'ont 
fait boire en templier. Ce n'est pas tout. On m'a fait gravir des roches escarpées pour 
voir un monument druidique (lequel s'est trouvé un escalier qui peut bien être 
antérieur à la Révolution), gravir d'autres rochers et me macérer les fesses sur un 
méchant bidet pour lire une inscription syriaque au château de Buoux. Quel ! 

syriaque ! C'était une pierre toute rongée par le temps, je n'ai pu lire que SEMPER... ' 

NOS. » 

L'état d'esprit de Mérimée confinait plutôt à l'exaspération, suscitée par une trop 
chaleureuse réception : c'est d'ailleurs ce que trahit une deuxième lettre qu'il écrivait 
À Royer-Collard le 28 septembre, et dans laquelle, après lui avoir annoncé l'envoi 1 

des inscriptions de la crypte, il ajoute : « Apt est un trou abominable. Ses habitants 
m'ont fait une ovation.. Je suis paru, laissant un profond souvenir de mon aménité 
et de ma haute science dans la mémoire des Aptésiens. Hélas ! quelles gens ! Us 
m'ont mené voir un trou de renard comme un monument druidique et une inscrip- j 

tion syriaque, suivant eux, qui s'est trouvée n'être qu'en mauvais latin. » (F. Ghambon, 
Notes sur Prosper Mérimée, p. 66-67.) ! 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE l6g 

logement des garnisons ; leurs ruines ont servi à former des murs 
de retranchement qui coupaient le plateau de Test à l'ouest. Avant 

le premier fosse étaient 
réunies les dépendan- 
ces du donjon et des 
défenses secondaires. 
A l'est, le plateau, 
près du fossé, avait un 
point faible : l'assié- 
geant pouvait, en gra- 
vissant un quartier de 
roc, se dresser au ni- 
veau du sol ; aussi avait- 
on garni le bord du 
précipice d'une cour- 
tine de 5o mètres envi- 
ron de longueur, flan- 
quée d'ouvrages au- 
jourd'hui ruinés et 
percée obliquement de 
meurtrières battant effi 
cacement le point où 
l'assaut pouvait se pro- 
duire (i). Unefcjis pour 
toutes, il faut signaler 
les fréquentes traces de 
constructions, dont la 
base était entaillée dans 
le sol et auxquelles il 
est impossible d'assi- 
gner une destination. 
Deux excavations (mm) 
plus importantes sont 
demeurées ; l'une, sans 
voûte, mais couverte 
autrefois au moyen de 
poutres, forme un bciti- 
plw m i'\»i<r i)K Bi'oux : pointk dv Si t), ment Carré, entièrement 
Éjhciic de ." rar mètre. py'y^ j^ns le rocher et 




(i) Des tenlaiives d'escalade onl eu lieu de ce côlé, si l'un en juge d'après les débris 
d'armes et les pointes de javelots que l'on a trouvés au-dessous. (Cf. Moirenc, La 
Comte du Lourmarin,p. i5). 



1 70 MÉMOIRES 

percé d'une porte ménagée dans la paroi du nord; la seconde, peu 
éloignée, forme une double grotte, munie de réduits, de niches, 
de bancs, de consoles et de portes irrégulières. Une troisième 
baume plus petite est située à côté des précédentes (n). 

A Touest, une poterne en plein cintre (o), défendue par un pan 
de courtine et cachée autrefois à l'extérieur par des clayonnages, 
permettait à la garnison de descendre sur le plateau inférieur; 
en deçà, des bâtiments abritaient une agglomération de seize 
silos ; trois d'entr'eux percés dans le fond donnaient accès sur le 
même plateau dans une crevasse ; au-dessous des silos et de la 
poterne, un chemin dévalait, défendu par quelques guérites creu- 
sées dans le mur. Tous les silos sont taillés en forme de mar- 
mite ; leur ouverture, qui était obturée par des couvercles en 
pierre à double emboîtement (i), mesure de i mètre Soà2 mètres 25 
de diamètre; leur profondeur est peu supérieure en moyenne à 
deux mètres. L'usage auquel la plupart étaient destinés ne peut 
laisser de doute ; les uns ont servi de magasins alimentaires et 
sont entourés de rainures conduisant au loin les eaux pluviales ; 
d'autres, au contraire, recevaient la retombée des rigoles. Ont-ils 
servi de citernes? Je ne le pense pas, la surface réceptrice des 
pluies étant absolument négligeable; il y aurait lieu de pencher 
vers l'hypothèse de leur utilisation comme cuves à vin, qui 
auraient reçu le ^rioût écrasé dans une excavation en encoignure, 
munie d'un rebord et d'une bonde, située au-dessus des silos (p) ; 
l'hypothèse est cependant fragile, attendu qu'après la bonde, il 
n'existe aucune rigole d'écoulement ; il y a enfin peu d'apparence 
que l'on ait songé à fabriquer du vin sur le plateau. Le problême, 
pour l'instant, paraît insoluble. 

Après les silos, commencent à s'élever, par gradins superposés 
en forte déclivité, les fortifications proprement dites. Uneporte(Q), 
élevée intentionnellement au bord du précipice, à l'ouest (2) 
s ouvre dans une courtine de o m. 6o d'épaisseur ; elle est bâtie 
sur le roc en talus et munie de quinze archères très ébrasées 
dans le bas ; vient ensuite une terrasse, avec des bâtiments creu- 
sés dans le sol à l'ouest, bordée par un fossé profond que domine 

(0 Quelques rares spécimens de ces couvercles frisent sur le sol du plateau. 

{■2) Quelques mots sur le mode uniforme de construction des portes militaires du 
Fort : elles soil formées à l'extérieur d'une voussure en plein cintre, en bel appareil ; 
à l'intérieur, d'une deuxième voussure en anse de panier très accentuée, à o m. 5o 
au-dessus de la première ; cette ordonnance paraît avoir été adoptée pour gagner la 
différence de niveau existant entre deux travaux de défense. Les portes étaient barri- 
cadées à l'intérieur par des poutres glissant dans de profondes rainures. 



2 rn 



=• a 

i- S 




170 MÉMOIRES 

percé d'une porte ménagée dans la paroi du nord; la seconde, peu 
éloignée, forme une double grotte, munie de réduits, de niches, 
de bancs, de consoles et de portes irrégulières. Une troisième 
baume plus petite est située à coté des précédentes (n). 

A Touest, une poterne en plein cintre (o), défendue par un pan 
de courtine et cachée autrefois à l'extérieur par des clayonnages, 
permettait à la garnison de descendre sur le plateau inférieur; 
en deçà, des b:\timents abritaient une agglomération de seize 
silos ; trois d'entr'eux percés dans le fond donnaient accès sur le 
même plateau dans une crevasse ; au-dessous des silos et de la 
poterne, un chemin dévalait, défendu par quelques guérites creu- 
sées dans le mur. Tous les silos sont taillés en forme de mar- 
mite ; leur ouverture, qui était obturée par des couvercles en 
pierre à double emboîtement (i), mesure de i mètre 5oà 2 mètres 2?> 
de diamètre; leur profondeur est peu supérieure en moyenne à 
deux mètres. L'usage auquel la plupart étaient destinés ne peut 
laisser de doute ; les uns ont servi de magasins alimentaires et 
sont entourés de rainures conduisant au loin les eaux pluviales ; 
d'autres, au contraire, recevaient la retombée des rigoles. Ont-ils 
servi de citernes? Je ne le pense pas, la surface réceptrice des 
pluies étant absolument négligeable; il y aurait lieu de pencher 
vers l'hypothèse de leur utilisation comme cuves à vin, qui 
auraient reçu le uioût écrasé dans une excavation en encoignure, 
munie d'un rebord et d'une bonde, située au-dessus des silos (p) ; 
l'hypothèse est cependant fragile, attendu qu'après la bonde, il 
n'existe aucune rigole d'écoulement ; il y a enfin peu d'apparence 
que l'on ait songé à fabriquer du vin sur le plateau. Le problême, 
pour l'instant, paraît insoluble. 

Après les silos, commencent à s'élever, par gradins superposés 
en forte déclivité, les fortifications proprement dites. Uneporte(Q), 
élevée intentionnellement au bord du précipice, à l'ouest (2) 
s ouvre dans une courtine de o m. 60 d'épaisseur ; elle est bâtie 
sur le roc en talus et munie de quinze archères très ébrasées 
dans le bas ; vient ensuite une terrasse, avec des bâtiments creu- 
sés dans le sol à l'ouest, bordée par un fossé profond que domine 

(i) Quelques rares spécimens de ces couvercles grisent sur le sol du plateau. 

(•j) Quelque^ mots sur le mode uniforme de construction des portes militaires du 
Fort : ellci) soit formées à l'extérieur d'une voussure en plein cintre, en bel appareil ; 
à l'intérieur, d'une deuxième voussure en anse de panier très accentuée, à o m. 5o 
au-dessus de la première ; celte ordonnance paraît avoir été adoptée pour gagner la 
différence de niveau existant entre deux travaux de défense. Leb portes étaient barri- 
cadées à l'intérieur par des poutres glissant dans de profondes rainures. 



1 rn 
5. o 



r. D 

?r- O 

i- S 




DE l'académie de VAUCLUSE I7I 

un mur sans meurtrière, flanqué d'une tour carrée (r) à trois 
étages, dont les archères très ébrasées permettaient un tir plon- 
geant efficace. Dans l'angle oriental de la tour on arrivait à une 
poterne au moyen d'un pont-levis, dont les points d'appui sont 
visibles sur la façade septentrionale du mur. 

Après cette importante partie du Fort, se trouvaient dissémi- 
nées sur une esplanade de 5o mètres environ, en terrasses 
étagées, un certain nombre de constructions : à l'ouest, un 
bâtiment voûté (s) avec une porte au levant et une fenêtre très 
étroite au couchant, située à 3 mètres de hauteur ; l'épaisseur 
des murs(i m. 20 environ), la position de ce bâtiment et de sa 
fenêtre qui ouvrait sur le précipice, le désignent comme un 
Incal de discipline ou une prison ;'un banc régnait des deux côtés 
nord et sud de ce cachot ; plus haut, les ruines d'un magasin (?) 
taillé dans le plateau, avec, à sa partie inférieure, un silo muni 
d'une rigole en pierre t)., et enfin tout à côté, un vaste bastion 
de 70 mètres carrés, non voûté, avec porte unique à l'ouest, sans 
caractère spécial (u). 

Un troisième fossé précède une terrasse de 20 mètres; c'est là 
que profitant d'un retour accentué du bord du plateau, les 
constructeurs avaient établi, à l'ouest, une deuxième poterne 
ouvrant dans le vide, au-dessous du plateau inférieur, que l'on 
pouvait atteindre au moyen d'une échelle (v). Sur cette même 
terrasse se trouve une sorte de citerne (x; taillée dans le sol et 
dont la voûte seule émergeait ; il est à remarquer que cet édifice 
n'avait aucune ouverture (sinon probablement dans la partie 
supérieure;, et qu'il ne reste pas trace d'enduit sur ses parois. 

Insensiblement, on arrive au point le plus étranglé du pla- 
teau ; un remblai maçonné, sans parapet, fait communiquer au- 
dessus d'un fossé l'esplanade avec les dernières constructions ; 
le remblai aboutit à une porte percée dans un mur ruiné ayant 
encore 3 mètres de haut sur un talus de rocher de 4 mètres. Au 
nt>rd, des archères battaient le fossé et le remblai. 

Vient ensuite une terrasse découverte, précédant un retranche- 
ment démoli et une dernière esplanade de 20 mètres de largeur ; 
ici, le plateau ne forme plus qu'une langue étroite, à pic de tous 
côtés: c'est sur ce point culminant qu'est construit le donjon, 
entouré au nord et à l'ouest d'un fossé de 5» mètres de largeur (i) 

.1) Aucun des fossés du Fort n'a dû recevoir de l'eau ; il aurait été impossible de 
les alimenter et d'ailleurs la plupart des parois ne sont pas étanches. 



172 MHMOIRKS 

bordant exactement à Test TelTroyable précipice. Ce dernier 
refuge est construit en grand appareil régulier, avec des maté- 
riaux assemblés à gros joints, mesurant o"*40 x:o"'5o en moyenne ; 
en le démantelant, on ne lui a laissé qu'une hauteur de 6 à 

7 mètres, dont 4 de rocher en talus. Les murs, qui ont un mètre 
d'épaisseur, enclosent à Tintérieur un rectangle de 10 mètres du 
nord au sud et da 4 mètres 5o do Test à l'ouest ; la porte, située 
dans l'angle sud-ouest et à laquelle on aboutissait par un 
passage exigu entre le fossé et le vide, est disparue. 

Au-delà du donjon, le plateau se termine en pointe à 7 ou 

8 mètres; des constructions ont dû exister à cet endroit; parmi 
les traces qui subsistent, je signalerai comme particulièrement 
curieuse une excavation en forme de bol, prolongée par une 
rigole qui aboutit au bord occidental du plateau ; je crois fort que 
ce récipient a été créé pour recevoir de la poix ou de l'huile bouil- 
lante, qui allait ensuite se répandre surles assaillants qui auraient 
pu tenter une attaque sur ce point, peu élevé au-dessus du pla- 
teau inférieur. 

Du haut du donjon, le regard embrasse un immense horizon : 
à l'est, se dessinent nettement les plus hautes cimes des Alpes 
frontières, d'où se détachent les monts de Lure et la chaîne de 
Vaucluse, terminée par l'énorme masse du Ventoux; au cou- 
chant, s'étendent les plaines du sud-ouest de Vaucluse, limitées 
par le Rhône et la Durance, semblables à deux minces rubans 
argentés. Au-dessous, à plus de 80 mètres de profondeur, l'Ai- 
guebrun dissimule ses eaux limpides dans un fouillis de verdure, 
que jalonnent les rares fermes éparpillées sur les bords du ruis- 
seau. 

Somme toute, ainsi qu'on a pu s'en rendre compte, le Fort de 
de Buoux a constitué jusqu'au XVI* siècle une défense considé- 
rable pour la région (i) ; une garnison pouvait y soutenir de longs 
sièges et se retrancher, en cas de prise, derrière une série d'ou- 
vrages parfaitement défendus. Si, comme nous le pensons, les 

(i) Mérimée, abandonnant le ton de la plaisanterie, consacra une assez longue 
notice au Fort de Buoux dans son Voyas:d dans U Midi de la France (t. I, p. 219-223) ; 
la description qu'il fait des ruines du plateau est précise et démontre qu'en 1834 
l'état des bâtiments était à peu prCîs le môme que de nos jours ; le subtil archéologue 
pensait, avec raison, que celte position avait dû être appréciée avant le moyen âge : 
«Je ne serais pas étonné qu'une station romaine eût existé en ce lieu » ajoute-t-il, en 
faisant la remarque que des débris de tuiles paraissant antiques se trouvaient sur 
ce point. En ce qui concerne les tombeaux, MérimC'c ip. 222) pensait qu'ils pouvaient 
dater des premiers siècles du christianisme. 



173 

courtines du bas du plateau et leurs flanquements ont été recon- 
struits plusieurs fois et ont pu être transformés (légèrement) 
pour Tusage des armes à feu, les constructions supérieures sont 
demeurées telles qu'elles avaient été élevées au XII* siècle pour 
les armes de trait. D'ailleurs, l'artillerie au XVI* siècle eût été 
d*un secr)urs peu efficace pour les assiégeants et les assiégés ; 
il aurait été aussi difficile de traîner des pièces sur cette hauteur 
que de les utiliser contre le Fort ; seule, l'éminence de la Roche 
d'Espeil qui se trouve au niveau de celui-ci, à l'ouest, aurait pu 
servir de plateforme à l'artillerie; malheureusement, son accès 
était aussi difficile que celui du Fort même. 

Il a été question plusieurs fois, dans les pages qui précèdent, 
d'un plateau secondaire dominé parlée ouvrages du Fort; il 
s'étend du sud au nord sur une longueur de 3oo mètres environ, 
avec une largeur moyenne de 60; c'était là une première étape à 
franchir, si les assiégeants tentaient l'assaut de ce côté, en même 
temps qu'une sortie pour la garnison. L'esplanade est accessible 
au nord par une pente naturelle du terrain et au sud-ouest par un 
escalier dérobé ; partout ailleurs elle domine les abords du Fort. 
L'escalier dérobé avait son entrée dissimulée dans les rochers et 
les arbres en rase campagne; entièrement taillé dans le rocher, il 
est caché à la vue extérieure par une paroi peu épaisse ménagée 
très habilement dans la pierre, au bord des marches ; celles-ci, 
au nombre de 60 environ, permettent l'ascension à cinq hommes 
de front et sont divisées en deux séries par un palier, au delà 
duquel la volée fait un coude; pour atteindre le plateau, il faut 
franchir un étroit défilé et une porte bien défendue. 

Sur toute la surface du plateau étaient accumulés des obsta- 
cles, notamment des murs de retranchement, mais on n'y ren- 
contre guère de défenses militaires proprement dites ; les vestiges 
les plus nombreux appartiennent soit à l'habitation, soit à des 
abris pour la garnison (i). Deux silos, l'un taillé dans le roc, le 
second maçonné permettaient l'emmagasinement de provisions. 

Après avoir enlevé tous les obstacles, l'ennemi qui s'emparait 
de ce point se trouvait à découvert sous les murs du Fort, dont 
il devait tenter Tescalade, tandis que les défenseurs pouvaient se 
retirer vivement vers le donjon au moyen des poternes dont il a 
été question plus haut (2). 

(I) Presque tous les rochers ^)nt reçu des appentis ou ont été entaillés pour Tamorce 
de murN. 

i2i Des combats ont certainement eu lieu en cet endroit; on y recueille fréquem- 
m.ni de nun.s morceaux de 1er et de bron/e, provenant d'équipements ou d'armes 



174 MEMOIRES 



VII. 



Refugks des Seguins et de l'Ak;lu.m:. 

Baume des Peyrards. 

Grotte des Pigeons et Baume de l'Eau. 

Si Ton redescend du Fort par le chemin précédemment suivi, 
on abandonne celui-ci près du Moulin-Clos, pour prendre un 
sentier abrupt, qui, côtoyant TAiguebrun, aboutit d'abord au 
hameau des Seguins, prés duquel se trouvent, semblables à 
celles qui ont été déjà décrites, des cabanes en clayonnages et un 
refuge plus inaccessible encore que le précédent. 

Sur ce point, un groupe important de rochers éboulés forme 
avec le mur vertical de la falaise un retranchement facile à fermer 
et à défendre, à l'intérieur duquel nous retrouvons de nombreu- 
ses excavations pour l'appui des poutrelles et des abris sous 
roche. Le refuge proprement dit est établi sur une énorme masse 
rocheuse de 3oà 40 mètres de hauteur, qui ne laisse entre elle et 
le grand mur naturel qu'un interstice de un à deux mètres. 

Dans le bas, un sentier fort raide aboutit d'abord à un palier 
abrité par un renflement de la falaise, muni de diverses annexes : 
banc, consoles, niches, et d'une citerne rectangulaire, percée 
d'une bonde dans le bas, enduite intérieurement d'un ciment 
rougeâtre, assez dur, ressemblant au solide ciment de même 
couleur, composé de débris de tuiles et de chaux, que l'on 
rencontre dans les constructions gallo-romaines (i). 

A l'intérieur des appartenjents ménagés sur cet étage, prend 
naissance l'escalier de 80 marches, taillé régulièrement sur le 
flanc de la montagne, et qui, montant entre celle-ci et le rocher 
détaché, conduisait à la partie supérieure du refuge. Une partie 
des marches ayant été détruite, l'ascension en est aujourd'hui, 
sinon impossible, du moins fort dangereuse; cependant, nous 
tenons d'un témoin oculaire, habitant des Seguins, et dont la 
bonne foi ne peut être suspectée, qu'au dessus du bloc existent 
des traces de clayonnages et, à l'ouest, une citerne ronde assez 
vaste, recouverte d'un ciment semblable à celui qui enduit la 

(i) Nous rencontrerons le même mr)rticr emphtyc au quartier de Rocsalièrc, près 
des fortifications de Sainte-Marf^uerite. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



17^ 



citerne du premier palier. D'après les déclarations de ce témoin, 
la citerne aurait reçu les eaux pluviales ruisselant sur le rocher 
voisin, au moyen de rainures et de rigoles. 

Le refuge des Seguins a exigé de longs et pénibles travaux, ce 
qui prouve que comme celui du Moulin-Clos, il a été créé à 
une époque de terreur prolongée. Il en est de même d'un troi- 
sième, qui, si la version qui nous le fait connaître est exacte, 
appuie encore davantage notre thèse ; celui-ci est établi de façon 
à défier toute tentative. Il est au sommet d'une aiguille rocheuse, 
plus large dans le haut que dans le bas, élevée de 3o à 40 mètres 
environ au dessus d'un petit mamelon à l'est du Fort de Buoux ; 
d'après Gay(i), des escaliers courent sur la paroi à pic de ce 
monolithe et atteignent le sommet, à la surface duquel une 
citerne se trouve creusée, semblable à celle des Seguins. Ce détail 
est rapporté d'après la déclaration verbale d'un habitant de 
Buoux, qui, seul de tous ses contemporains, aurait eu au siècle 
dernier le courage de faire l'ascension : nous avouons n'avoir pas 
eu celui de le vérifier. 

A peu de distance du refuge des Seguins, se trouve la Bainne 





I^u^TF A c.rtw dî: i.\ 

Bai .mî; dfs Pkyrards. 

(O'ilection Lazard.) 



Pointe a main dk la Baime des Peyrards. 
[ Collection Lazard. — Grandeur naturelle. 



(îay. o;\ cil., p. 



176 MÉMOIRES 

des Peyrards (i , atelier et habitat de la fin de la période mousté- 
rienne (Mortilletj, signalé vers 1808 par Requien et plus ample- 
ment décrit en 1866 par M. Emile Arnaud, bibliothécaire d'Apt(2l 
On a trouvé dans cette station des foyers importants, auprès 
desquels gisaient, englobés dans un conglomérat dalluvions, 
de graviers et de débris calcaires, des os de bouquetins, de cerfs, 
de lièvres, de lapins, de chevaux, etc. Les instruments de silex, 
caractérisés surtout par la pointe à main retouchée généralement 
d'un seul côté (3), par quelques pointes à cran ou à deux bouts 
(assez rares) et par des grattoirs à bout carré, ont été recueillis 
en nombre considérable depuis un demi-siècle ; mais récemment, 
MM, Deydier et Lazard ont fouillé d'une manière méthodique 
toute Taire occupée et ont réuni de ce chef une belle collection 
de couteaux, de grattoirs et de lames variées, qui permettra de 
faire connaître en détail ce gisement préhistorique, Tun des plus 
intéressants du sud-est de la France (4). 

La Baume des Peyrards n'est pas la seule dans le vallon de 
TAiguebrun, qui fournisse des documents palethnologiques : à 
droite et à gauche du torrent, plusieurs grottes qui s'ouvrent au 
flanc des collines recèlent certainement des traces de l'habitation 
et de l'industrie primitives ; elles sont signalées aux explora 
teurs (5). 

Parmi ces dernières, la Grotte des Pigeons, anfractuosité de 
3o mètres environ de hauteur, située à 5o mètres de la Baume 
des Peyrards, mérite une mention spéciale ; pour y accéder, 
rascension n'est pas aisée ; à Tintérieur, elle se divise en trois 
chambres ou couloirs se dirigeant à l'est, au nord et à l'ouest ; 
des stalactites décorent une partie de ses voûtes et le sol est 
recouvert par «ne assez forte épaisseur de dépôt calcaire, au 
dessous duquel gisent apparemment des débris préhistoriques ; 
son exploration donnerait certainement des résultats. 

Au delà de cette grotte, le pittoresque vallon de l'Aiguebrun 

(i) La Baume des Peyrards n'est pas, à vrai dire, une f,nolte, comme son nom 
pourrait le faire supposer, mais un abri situé sous un avancement de la falaise, 
exposé au sud-ouest. Son étendue — couverte — n'atteint pas 5o m-. 

(2) E. Arnaud, op. cit. (Bibliogrraphie . 

(3) Celle que nous reproduisons est des plus caractéristiques. 

(4) M. Moulin a publié dans les Annales de l'Académie du Var, i<.^)j (il en existe un 
tirage à part), une notice sur cette station, d'après les renseijjnenients fournis par 
M. Deydier. 

(5) M. F. Lazard a visité rapidement deux ou trois de ces grottes ; il a pu se con- 
vaincre qu'elles avaient été occupées pendant les temps néolithiques. 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE ' I77 

va mourir vers les collines d'Auribeau ; nous terminerons cette 
étude à la Baume de l'Eau, vaste grotte voûtée, qui s'ouvre immé- 
diatement au-dessous du plateau de Claparèdes et sous laquelle 
on a capté les eaux qui s'échappent par les fissures du rocher. 
Sa largeur est de 14 mètres environ, sa profondeur de i5 et sa 
hauteur sous voûte environ de 10. La source de la Baume de 
TEau a eu une certaine importance à Tépoque préhistorique ; 
c'est non loin de là, sur le plateau que se trouve la station de la 
Brémonde, découverte et explorée par M. Lazard ; nous y 
reviendrons dans une autre partie des Études. 

En face de la Baume s'amorce un charmant vallon, d'aspect 
plus sauvage que celui de Buoux et au dessus duquel surgit au 
milieu des frondaisons la curieuse agglomération qui forme le 
village de Sivergues. 



lyS MÉMOIRES 

VIII. 

Miettes d'histoire. 

L'anéantissement des archives de Buoux en 1848 a fait dispa» 
raître les documents qui auraient pu jeter une vive lumière sur 
l'histoire du village et du Fort de Buoux ; néanmoins, il est 
possible, en réunissant les renseignements que nous ont fournis 
les archives des Bouches-du-Rhône, celles d'Apt, ainsi que les 
collections publiques et privées, de reconstituer en partie les 
annales de ce pays. 

« 

Préhistoire. — Nous avons vu que la Batime des Peyrards est 
le plus ancien habitat (fin de Tépoque moustérienne) du vallon 
de TAiguebrun ; il est à peu près certain que d'autres stations, 
sinon aussi anciennes, du moins assez rapprochées dans le temps, 
existent aux environs de Buoux ; depuis cette époque, l'homme 
n'a jamais cessé d'habiter ce quartier, où il était attiré par l'abon- 
dance des eaux. Le plateau du Fort se trouve dans les mêmes 
conditions : les pointes de flèches néolithiques recueillies sur ce 
point aussi bien que sur les pentes qui y conduisent ne laissent 
pas de doute à cet égard (i), alors surtout que l'occupation 
postérieure sur ce sol constitué par le rocher à peu près nu, a 
contribué à faire disparaître la plupart des traces d'habitation 
antérieure. Il en est de môme des débris de poteries (2), contem- 
poraines des flèches, ainsi que des éclats de silex et des haches 
en pierre polie (3;. 

(1) M. Lazard qui m'accompagrnait dans mes excursions a ramassé devant moi, 
immédiatement sous le donjon, une pointe de flèche, de facture parfaite, recouverte 
d'une belle patine blanche. Rappelons ici l'exceptionnelle pointe en silex de o"52 de 
long trouvée pendant la construction du chemin sous l'abri du Fort, et signalée par 
Rochetin [op. cit., p. i?3), d'après les renseignements de M. Garcin. Cet objet serait 
passé dans une collection marseillaise. 

(2) Poterie brun clair ou brun rouy:e foncé, mêlée à des cailloux assez forts, sem- 
blable à celle que l'on trouve dans le lalu'^ du Moulin-Clos. (Collection Granet, à 
Roquemaure.) 

(3) La collection Garcin en possède plusieurs trouvées dans le voisinage du Fort 
ou sur le Fort; J. Cr)urtet (op. cit., v Buoux). signale une hache en serpentine de 
même provenance; Gay iop cit., p. 8i), en mentionne d'autres; on a déjà cité 
(Rochetin, o;^. cit., p. i32), celles qui font partie de la collection Granet (Roquemaure) 
du D' Bonnet (Bonnieux). etc. 

M. Lazard a recueilli récemment, près des premiers pans de courtine, un morceau 
de polissoir en grès qui avait été englobé dans la maçonnerie. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



179 





Pointe de javelot 

a douille. 

(Collection Lazard. 

Grandeur naturelle.) 



A l'époque du bronze, le vallon et le Fort ont continué d'être 
habités ; il est probable que les occupants du sol avaient reçu ce 
métal par les routes se dirigeant vers la 
Durance; des pointes nombreuses en bronze 
ont été trouvées dans le vallon (i\ Le très 
beau fragment d'épéc que nous reprodui- 
sons et qui fait partie de la collection Lazard 
provient des bords de TAiguebrun ; il mesure 

(V"3i de longueur et 
3H millimètres de lar- 
geur dans le haut. 
Cette arme, de fa- 
brication parfaite et 
recouverte de la pa- 
tine verte bien con- 
nue des archéolo- 
gues, est surtout 

remarquable par la décoration de la lame, 
composée de cercles concentriques et de 
spirales accolés et se pénétrant, gravés 
au-dessous de la garde, de chaque côté de 
la nervure médiane ; celle-ci est accom- 
pagnée jusqu'au bas par des lignes con- 
vergentes parallèles. La garde, massive, 
a 7 centimètres de largeur : elle reçoit 
par une fente la soie aujourd'hui brisée 
et jadis fixée par des rivets; il est pro- 
bable que la fusée (absente) était fondue 
d'un seul jet avec la garde qu'elle conti- 
nuait. 
De la même époque datent les douze 
objets en bronze inscrits au Catalogue des antiquités du Musée 
Calvet (2), sous cette mention : « Trouvés près du Fort de Buoux 
en 1873 », comprenant huit bracelets ou fragments de bracelets, 
une armille, une plaque et deux coupes ornées de cercles concen- 
triques percées au centre et ayant été jadis réunies par des rivets 
(bâton de commandement?) et minutieusement décrits déjà (3). 



Kpke de bronze 
de la collection Lazard. 



(i) La figr. reproduit une des bclle*^ pointes de la collection Lazard : M. 
possède aussi quelques-une«-. 
(2) P. 379, n* 25o z. 
{'<) Rochctin.of. cit., p. i36. 



Garcin en 



l80 MÉMOIRES 

Les haches en bronze provenant de Buoux ne sont pas nombreu- 
ses ; on n'en a cité qu'une seule jusqu'ici (i). 

La sépulture découverte par M. Jullian appartient à l'époque 
du bronze, de même qu'un grand nombre de débris de poteries 
disséminés dans le vallon. On peut donc considérer comme à 
peu près certaine Texistence sur le fort d'un oppidum pré-romain. 
Gay (2) déclare qu'on y a trouve des monnaies gauloises (malheu- 
reusement égarées). Si cette preuve peut être douteuse, il n'en 
est pas de même des deux pièces de bronze celtibériennes, pro- 
bablement inédites, que renferme la collection Garcin. 

Un deuxième oppidum, constitué par des murs épais, jadis 
précédés de fossés (r , avait été établi à l'extrémité occidentale du 
mamelon de Mortisson, dominant le chemin de Marseille (3) ; les 
communications avec cette ville, ont laissé à Buoux, comme dans 
toute la région, des traces indiscutables : des monnaies massa- 
liotes en grand nombre ont été trouvées sur le plateau du Fort (4). 
Sans qu'on puisse préciser leur âge, les cuves vinaires et les 
cabanes en clayonnages sont certainement antérieures à l'occupa- 
tion romaine. 

Période gallo-romaine. — Elle a Isissé des vestiges dans toute 
la région de Buoux, localisés surtout : 

r Aux environs du Fort ; ce bastion naturel a été vraisembla- 
blement utilisé par les Gallo-romains, au moins vers la fin de 
l'Empire, au moment des invasions. On y a ramassé fréquemment 
des monnaies romaines ; citons un moyen bronze consulaire 
d'Auguste et un aureus de Valentinien 111 (5), des bronzes 
d'Hadrien, d'Antonin le Pieux, de Faustine sa femme, de Gordien, 
etc. (Collection Garcin.! 

Sur le Fort même ont été trouvés divers objets de la collection 
Garcin : perles de collier, manche de miroir, crochet de fer en 
forme d'ancre, ainsi qu'un anneau à cachet, en bronze, de fortes 
dimensions (21""" de diamètre intérieur, 3""" d'épaisseur), orné de 
traits horizontaux et de segments de cercles afirontés, et portant 
sur le chaton l'inscription suivante : 

(i) Collection Granet; cf. Rochetin, ibidem, 

(2) Op. cit., p 85. 

(3) Nous étudierons cet oppidum dans une autre partie des Éludes; les collections 
aptésiennes contiennent nombre d'instruments en silex provenant de ce quartier. 

(4) Collection Garcin, notamment. 

(5) Décrit par Cohen [Description générale des monnaies de la République romaine. 
p. 84, n* 25) ; l'aureus de Valentinien est inédit. 



DE L*ACADÉM1E DE VAUGLUSE l8l 



msii 



Par sa forme massive et le style de Tornementation, cette 
bague nous parait appartenir à la dernière période du Bas- 
Empire (i). 

2" A la campagne des Crottes, en face du village, construite 
sur remplacement d'une villa gallo-romaine. Quoique l'on ne 
voit pas sur ce point de bâtiments du II* et du III' siècle (2), il 
n'est pas moins vrai qu'on a relevé là des mosaïques et exhumé 
récemment encore des tuiles, des briques, delà poterie (notam- 
ment de grandes amphores;, ainsi que des tombes à incinération 
contenant le mobilier funéraire habituel (3). 

3** et 4" Aux châteaux d'Aurons et de Buoux (4). 

.V Au quartier de Mortisson, près de la villa Mille et au bord 
du chemin de Marseille, les découvertes de tombes ont été assez 
fréquentes ; l'une d'elles contenait avec les vases ordinaires un 
fer de javelot de o'"io de long (collection Granet) ; une autre a 
fourni quatre bracelets ronds en bronze, recouverts d'une belle 
patine yorte, ornés de losanges et de hachures, enclos dans des 
compartiments formés de lignes transversales (collection Garcin). 

Moyen âge. — Il est probable que les refuges signalés plus haut 
appartiennent à la dernière période du Bas-Empire et qu'ils ont 
été améiiagés au moment des invasions ; plus tard, la renais- 
sance carolingienne permit la construction d'une église (Saint- 
Germain), auprès de laquelle se groupa une agglomération, 
ayant comme annexe un cimetière important. En dehors des 
ruines du village, des tombes, de l'autel et du fragment de 

(1) La forme et rornementation de la bague ainsi que des bracelets dont il est 
question ci-après prouvent la persistance, tout au moins dans la région, de l'emploi 
des lignes giiométriqucs, (chevrons, hachures et losanges), circonscrites dans des 
cartouches, qui caractérisent les objets de l'âge du bronze ; les gravures de la bague 
et des brajilets sont d'un style parfaitement semblable à celui de plusieurs bijoux 
en bronze de l'époque mo^rin^Unm Chantre) et notamment du bracelet d-icouvert 
récemment dans le Gard, publié par M. P. Raymond, Tumulus de Vépoquc moerin- 
gienne ou laun^cUnm, dans le BuUeiin di la. Société préhistorique de France, 1904, 
p. 90 et pass. (fig. ai). 

(2) Gay. op. cit.. p. 84. 

(3) Citon ; particulièrement deux urnes en verre et un vase orné de feuilles de fou- 
gères, portant comme marque de fabrique, un monogramme dans un cartouche 
circulaire. 

(4) Voyez ci-dessus l'article concernant le vallon d'Aurons. 



l82 MEMOIRES 

piscine décrits, Thabitation sur ce point est prouvée par les débris 
de poteries du moyen âge qu'on y recueille, ainsi que par les 
monnaies (i). 

Un village ou un lieu-dit de Buoux se trouve mentionné pour 
la première fois dans la charte de donation à Tabbaye de Saint- 
Victor déjà citée {2), par laquelle Pons Farald donne des terres 
situées dans le vallon : ... de Cantadiix usque adpassum de Biol et 
usque a la Bocheta et usque ad podium de Furcas et usque ad 
podium de Martino. Biol est la plus ancienne forme du nom de 
ce lieu (3) ; quant au quartier de Cantadux, il est identifié à 
tort par les éditeurs du Cartulaire, avec la campagne de Chaix ; 
nous pensons qu'il s'agit de Chantebelle (V. la carte), la dénomi- 
nation de Chaix donnée à une campagne de Claparédes, n'est 
qu'un nom de famille relativement récent; les deux formes 
sont d'ailleurs très dissemblables. Podium de Furcas est 
identifié avec raison avec Fourcadure. 

Une bulle d'Adrien IV, confirmant les possessions de son église 
à Guillaume I", évêque d'Apt (i 5 avril ïi58j (4) mentionne entre 
autres l'église de Buoux : ecclesiam de Buolis. Au XIIP siècle, nous 
trouvons la même forme Buol, dans Tobituaire de l'église d'Apt (5), 
citée en même temps que l'Aiguebrun. 

En i326, des contestations s'étant élevées entre les habitants 
d'Apt, ayant à leur tète Foulques de Chartres et Pierre ..., syn- 
dics, et les habitants de Buoux soutenus par leur seigneur, 
[Guill]aume de Forcalquier, relativement au droit de ban, il fut 
convenu, par acte du 20 mars 1826 (6), dressé sur le chemin 
public, prope terminum positum in média via, devant le juge d'Apt, 
que Bertrand Bot, Bertrand Milon, Bertrand Amat de Saignon (7), 

(i) Une des plus remarquables est un denier d'argent de Louis le Débonnaire 
(collection Garcin), dont on ne connaît que deux exemplaires ; le second est au musée 
de Vienne Autriche). 

(2) Cartulaire de Saint-Victor, ch. 48a. 

(3) Un Lambertus de Biol figure au bas de la môme charte au nombre des témoins. 
Les mêmes formes se rencontrent dans d'autres documents; c'est ainsi que nous 
trouvons : c P. de biolis » dans le registre de la claverie d'Apt en i328 (Archives des 
Bouches-du-Rhône. B i683, fol. io5) ; — « P. Pelate de Uuolis » (Ibidem, fol. 5a v«) ; — 
c G. de Biolis » ylbidem, fol. 85) ; — « Pctro de Byolis > {Idem, B 1687, fol. 84 v) ; — 
< Byolis » {Ibidem, fol. 98). en 1345. 

(4) Galtia christiana novissima, province d'Aix, Instrumenta extraordinaria, p. 541, 
n' VIII. 

(5) € In anniversario G. de Claramonte et uxore ejus, vi d. Relhardus Grassi de 
Buol, de orto Ayguabronum. » (Archives de la fabrique d'Apt, fol. 5o v.) 

(6) Archives communales d'Apt, série AA. 

(7) Saignon, commune du canton d'Apt (Vaucluse), 



DE l\\cadémie de vaucluse i83 

Raymond Brevi de Rocsalière, Siméon Pons, Pierre Girard et 
Bertrand Vital de Buoux, Jacques Gautier de Saint-Martin de la 
Brasque (i), détermineraient les limites entre les deux territoires. 
Nous ne connaissons pas les suites de cette affaire, mais nous 
avons un autre document du lo avril 1872 (2), par lequel Jean 
Sabatier, commissaire réformateur des églises et monastères de 
la ville et du diocèse d'Apt, fixe les bases d'un accord entre 
Durand André, prévôt du chapitre (3), et les chanoines d'Apt au 
sujet des dîmes à percevoir dans le terroir ; dans cet acte, il est 
fait mention du chemin allant de Saignon ad locum de Diolis, et de 
quelques noms de quartier que nous renonçons à identifier. 

Il est probable qu'à cette époque Buoux n'était qu'un simple 
prieuré : c'est d'ailleurs sous ce titre qu'il est porté dans le 
rôle des décimes prélevés au XIV" siècle dans le diocèse d'Apt : 
Phor de Biolis : uni s, iiii d. (4). 

Ces exemples suffisent pour nous donner d'une façon certaine 
la forme primitive du nom de Buoux : Biol et Buol, à l'exclusion 
de celles, différentes, que Ion a cru rencontrer (5] ; plus tard, 
Biolis et Buolis dérivés de cette forme sont constamment en 
usage, dans les documents aptésiens, avec la forme Bieus (pro- 
vençal) (6) et Buoux, Buous, Buoulx (français). Nous n'essaierons 
pas de rechercher l'étymologie de ce nom, qui me parait remonter 
au delà de l'occupation gallo-romaine. 

La Seigneurie, — Il n'apparaît pas qu'une autre agglomération 
ait existé à Buoux en même temps que celle de Saint-Germain ; 
lorsque le village fut détruit, une église fut édifiée sur le plateau 



(i) Sain t-Marlin-de-la-Brasque, commune du canton de Pertuis (Vaucluse). 
ij) Archives communales d*Apt, série EE. 

(3) Prévôt du chapitre de i3d3 ù. 1379, Jate de sa mort, arrivée à Rome. 

(4) Gailia chrisiiana novissima, province d'Aix, instrumenta, p. i38, n» xv. 

(5) Il est inutile de réfuter les étymologies burlesques de Gay {op. ciL, p. 88) ; 
d'autre part, nous trouvons dans VEssai d'un dictionnaire philolof^igue des noms de 
tieu du département de Vaucluse, par Albert Maire (Annuaire de Vaucluse, 1886, 
p. ao-ai) certaines dénominations: Buxo (1348 , tirée de la Gallia christiana, t. I (sans 
autre référence); Conventus fratrum Predicalorum de Buxo, qui ne s'appliquent nulle- 
ment à Buoux, pas plus que la îovmc Eux edone, extraite des comptes du trésorier du 
Comtat (Archives de Vaucluse, C i363). 11 n'y a jamais eu de couvent de Dominicains 
â Puoux, et cette commune ne faisait pas partie du Comtat; nous en dirons autant 
de Buxedo, tiré du môme fonds (1402) et de Buxedone (i4i5), qui ont la même valeur. 
Quant à l'étymologie proposée par M. A. Maire (Boris? Buch. celtique : Buis, et 
Buxus, Buis), elle est trop en désaccord avec les régies de la formation des noms de 
lieux. 

(6) Archives communales d'Apt, CC, compte trésoraire de 1396. 



184 MÉMOIRES 

de Claparèdes, non loin du château seigneurial, pour Tusage de 
la population disséminée sur tout le terroir. 

Nous ignorons à quelle famille appartint cette terre avant 
i326, date de la délimitation des territoires d'Apt et de Buoux ; 
dans cette charte nous voyons Guillaume de Forcalquier, nommé 
en tête des habitants de ce derniefr lieu ; c'est bien celui-ci 
qui était alors seigneur de Buoux, puisque le château et le 
village, ainsi que la terre de la Roche d^Espeil furent donnés, le 
12 avril 1418, par Bérenger de Forcalquier à Lancelot de Ponte- 
vès, deuxième fils de Jean de Pontevès et de xMadeleine de Mar- 
seille, chambellan de Louis II de Provence (i). 

Lancelot, marié à Jeanne d'Agoult en premières noces, en 
deuxièmes à Marguerite Malabaille, et en troisièmes à Margue- 
rite de Pontevès, mourut vers 1450, laissant deux fils: Pierre, 
seigneur de la Roche d'Espeil, et Gaspard, seigneur de Buoux. 
La branche issue de celui-ci se fixa à Apt; Gaspard de Pon- 
tevès, marié avec Douceline de Bot, fut syndic d'Apt, viguier 
d'Arles en 1443 et mourut vers 1480. Ses deux fils, Guillaume et 
Balthazar, devinrent coseigneurs; le premier fut syndic d'Apt 
(1489 et i5o4) et décéda avant i5i3 ; Balthazar était mort en i5i 1 . 
L'un et Tautre ne laissant pas d'héritiers, leur frère Ange recueillit 
la seigneurie; il fut syndic d'Apt, gouverneur de Saignon (i5i5 
et iSig) et colonel d'infanterie. Il laissa de son mariage avec 
Marguerite de Simiane deux fils : Claude, mort vers 1541, et 
Gabriel, seigneur de Buoux, qui se distingua pendant les guerres 
de religion, fut gouverneur d'Apt (i56i) et épousa Anne de 
Sade (2). 

Son fils, Pompée, dit le Grand, acquit une grande renommée en 
Provence comme homme de guerre ; il se signala au long siège 
de Ménerbes (1577), reprit aux Réformés le Fort de Buoux (1577) 
et prit part avec éclat à diverses batailles, notamment à celle de 
' Vinon (iSgi). Il avait été gouverneur d'Apt (i586, capitaine des 
galères {1598), viguier de xMarseille (1601 lorsqu'il mourut (avant 
i6o5). Son fils Ange II, né en 1S9T, fut colonel d'infanterie et 
viguier de Marseille (1621). Louis, qui lui succéda dans les sei- 
gneuries de Saint-Martin de Castillon, du Boisset, d'Aurons et de 

(I) Généalogie p. 67. 

(a) Gabriel de Pontevès présenta à la cour le dénombrement de sa terre de Buoux 
le 27 novembre 1541 ; il en avait la haute, moyenne et basse juridiction et déclarait 
que le revenu de cette seigneurie, charges enlevées, s'élevait à cent livres tournois. 
(Archives des Bouches-du-Rhône, B 762, fol. 245 v".) 



DE l'académie DR VAUCLUSE l85 

Buoux, était né en i63i ; il devint gouverneur d'Apt et du Fort 
de Buoux (i652^ guidon des gens d'armes de la reine-mère (i6r»3), 
colonel du régiment d'infanterie de Messine, premier consul 
d'Aix (i66i) et lieutenant du roi en Provence. Il mourut à Apt le 
17 août 1708. 

Louis de Pontevès avait obtenu en récompense de ses services 
l'érection en marquisat de sa terre de Buoux (1). De sa femme, 
Barbe de la Croix de Chevriêres, il eut un fils, Jean-François- 
El^èar, époux d'Alexandrine-Cornélie du Puy-Montbrun, qui fut 
d'abord mousquetaire du roi (1693) et occupa ensuite les charges 
de gouverneur d'Apt (iGgS) et de lieutenant du roi en Provence 
(1704-1711); il mourut en 172S. Son testament (2) nous montre 
que les seigneurs de Buoux occupaient à cette époque une haute 
situation sociale et possédaient une fortune considérable ; par 
l'écrit signalé ci-dessus, il demande à être enseveli dans la tombe 
de ses ancêtres aux Cordeliers d'Apt, obligeant ses héritiers à 
faire dire 5oo messes de Requiem. Après divers legs particuliers, 
notamment en faveur de la Charité et de l'hôpital d'Apt, des 
pauvres d'Apt, de Buoux et de Sivergues, de ses secrétaire, 
maître d'hôtel, agent, officier, cuisinier, de ses laquais et de son 
cocher, il institue sa femme usufruitière de tous ses biens jusqu'à 
ce que son fils ait atteint 2.^ ans; il laissait en outre près de 
2(X),()00 livres à ses sept tilles. 

Son fils unique, Louis-Alexandre, né en 170(5, mort à Buoux en 
1762, après avoir rempli les charges de syndic de la noblesse de 
Provence et de premier consul d'Aix, fut le dernier possesseur de 
Buoux de la famille de Pontevès (3). 

Après son décès, le marquisat fut transporté dans la famille 
de GallilTet, originaire du Pauphiné et qui, établie à Aix au XVII* 
siècle, possédait déjà les seigneuries des Martigues et de Berre. 
L'acquéreur, Alexandre-Jean de GallilTet, marié à Laure de 
TEstang-Parade, était lieutenant-général ; il émigra dès les débuts 
de la Révolution (4). Ses biens, vendus par la Nation, compre- 



(1) Lettres patentes de Louis XIV (juillet i65o), publiée*; dans la Généalogie histo- 
rique de la famillt de Sa bran- Pontevès» p. 197-198. 
[-2) Notaire E. Forest.à Apt, 3i mars 1725 (d'aprùs une copie de la collection Garcin^ 

(3) Le dénombrement présente au roi par Louis- Alexandre en 1728 mentionne 
parmi ses propriétés 8 bastides et un moulin banal, situés à Buoux (Archives des 
Bouc hes-du- Rhône, C i3o. fol. 167 v). 

(4) Son fils, Alexandre -Justin-Marie, colonel du 4' régiment de dragons, fut le 
père de Gaston-Alexandre de Galliffet, né en iH:^o, ancien général commandant de 
corps d'armée et ministre de la guerre. 

7 



iWi MÉMlMRES 

naient comme domaine foncier un quart environ du terroir de 
Buoux, ainsi que toutes les campagnes importantes de cette 
commune (i). 

La Commune. — Dans les temps modernes, l'histoire de Buoux 
se confond avec celle de son Fort et de ses seigneurs. Les docu- 
ments relatifs à son existence propre sont trop peu nombreux 
pour qu'il soit possible de fixer l'époque à laquelle la commune 
prit naissance, c'est-à-dire eut des syndics (2); cependant, en 
ih^o, nous constatons son existence communale, puisque ce fut 
le syndic qui comparut devant le commissaire délégué pour le 
recensement des lieux non affouages (3). 

Les rares débris des archives communales nous apprennent 
qu'au début du XVII* siècle, Buoux était encadastré à un demi- 
feu, avec un budget de (.)(x) livres en recettes et en dépenses, dont 
68() pour les impôts royaux, ceux de la province et de la viguerie. 
11 n'y avait en 1541 qu'un consul qui remplissait en même temps 
les fonctions de trésorier [4). Les dépenses, dans la même année, 
comportent seulement les frais d'audition des comptes, l'achat 
d'un coffre pour tenir les archives et de fréquents présents au 
seigneur de Buoux (S). 

La construction de l'église et du presbytère, au commencement 
du XVII* siècle, avaient considérablement obéré les finances du 
village, dont les dettes s'élevaient à 2,000 livres en 1717 et à 
3,000 en 1780; le compte de cette dernière année mentionne 
notamment des réparations à la maison curiale (ii5 livres), des 

(I) Parmi les biens lui appartenant figurent la Bastide de Loube, la Montagne, le 
Moulin-Clos, le Petit-Moulin, le Fort, Serre, la TÛilière, le Jas, Mortisson, les CrottCb. 
la Brémonde, Salen, etc., en plus du château seigneurial et de ses dépendances. 
( Procès-verbal d'estimation des Mens de l'émigré Galliffet, par Vapaly et Rremondy. 
experts, et Jean Deyme, agent national d*Apt, dressé en ventôse an II. — Collection 
Garcin.) 

(3) Buoux faisait partie du bailliage d*Apt. 

(3) Archives des Bouches-du-Rhône, B aoi. 

(4) Archives communales de Buoux, série CC, compte trésoraire de 1641. 

(5) € Plus cinq livres que j'ay [données] pour le presan qu'avons pourté a madame 
[de Buoux] quand nous sommes allé voir de prandre du blé... 

a Plus 42 sous que je hais paie tan pour un presan a madame quan nous voulions 
que nous donnact un sargant. Plus je hay paie trois livres et demy tan pour 
4 dindons cl quatre pers de poules et heufs quand nous sommes allé voir madame 
au château.... 

i Plus je hay paie six livres et demy tant pour 4 dindons et quatre pers poules 
quand nous sommes aie voir monsieur le marquis au château quand vient de 
l'armée. « 



DE l'académie de vaucluse 187 

frais de fourniture d'un sixième de milicien (i), quelques répa- 
rations aux chemins et les gages des officiers communaux. 

En dehors des impôts royaux les habitants de Buoux payaiqjit 
encore la dime, due au prieur, prélevée à raison du quinzième de 
tous les produits du sol (2); ils avaient enfin à supporter les 
charges seigneuriales, savoir : la tasqiie, calculée au huitième de 
tous les grains ; trois sols annuels par Jochoyrade de pré (3) ; trois 
sols annuels par chaque jardin ; trois émines de blé par habita- 
tion ; une eymine pour chaque jas (4) et le neuvième du produit 
des vignes (5). 

C'est à peu près tout ce que nous apprennent les documents ; 
les archives de lyBc) à i83o ayant été brûlées avec les autres, 
nous n'avons aucun détail sur les événements de la période 
révolutionnaire. 

Le Fort. — La forteresse de Buoux a joué un rôle trop impor- 
tant dans rhistoire de la ville d'Apt pour qu'elle n'ait pas laissé 
de traces dans les documents aptésiens ; ce sont d'ailleurs à peu 
près les seuls qui donnent des renseignements à son sujet. 

Pendant les incursions des routiers ou des Bretons, c'est-à- 
dire dans la deuxième moitié du XIV* siècle, le Fort de Buoux 
dut être utilisé pour la défense régionale, car les constructions 
voisines du donjon sont, nous l'avons vu, antérieures à cette 
époque ; d'ailleurs, le grand nombre de débris d'armes, d'ar- 
mures, d'objets d'équipements, etc., découverts sur le Fort, 
appartenant au moyen âge prouvent l'occupation dès le XII* 
siècle au moins ((')). 

En 1392, au moment où Raymond de Turennè terrorisait la 
contrée et dévastait les campagnes de la haute Provence, le 
conseil d'Apt délibérait de secourir les châteaux de Saignon, de 
Huoux et de Lourmarin fy) ; le compte trésoraire de iSgô men- 

1) Avec Sivergues, Auribeau, Castclletci Roquefure (arrondissement d'AptI. 

(2) A Apt la dîme n'était prélevée qu'au i8* des (grains et raisins. 

(3) Etendue de terrain qu'un humme pouvait cultiver on un jour. 
4) Cabane en pierres sèches servant de bergerie. 

(5) Archives des Bouches-du-Khône, B 201, loi. xm v. 

(h) Deux «ornements de ceinturon, de la collection Garcin, nous paraissent appar- 
tenir â la fin du XII* siècle ; il s'ag^it de deux petites plaques en cuivre émaillé, sur 
lesquelles est représenté un cavalier muni de son bouclier, l'épée levée et combat- 
tant. 

'7) * Item, ordinaverunt quod ad hf«norem re«rium et conservalionem hujus patrie 
succuratur castris de Sanione.de Buolis, de Lucemarino et aliis castris vicinis de 
g-cntibus et victualibus et aliis nece<^<;ariis ut castra ipsa emulis patrie se deffendere 



l88 MÉMOIRES 

tionne au i" août l'envoi de Buoux à Apt d'un messager annon- 
çant rassemblée des gens d armes de Raymond (i). Des avis 
semblables parvenaient d'ailleurs sans cesse aux syndics d*Apt. 
qui durent en profiter pour défendre leur cité, qui résista vail- 
lamment aux entreprises directes de l'ennemi de la reine Marie 
de Blois (2). 

Au XV* siècle, le Fort parait avoir été délaissé, la paix régnant 
en Provence; mais les premières persécutions contre les prote- 
stants et les guerres qui suivirent obligèrent la ville à se préoccu- 
per de son principal ouvrage de défense. Déjà, en i53(), l'invasion 
de la Provence par les Impériaux avait menacé les environs d'Apt ; 
l'armée ennemie s'était emparée de Lourmarin, s'y était retran- 
chée et de là faisait de fréquentes incursions à Buoux, à Siver- 
gues et jusqu'à Rocsalière (3). Lourmarin ayant été repris par les 
Cavaillonnais, la région jouit d'une nouvelle tranquillité. 

Des terres qu'ils occupaient sur le versant méridional du 
L^beron quelques Vaudois étaient venus, dès le début du XV* 
siècle, se fixer à Buoux et à Sivergues ;4^ ; sans refaire ici l'his- 
toire de la Réforme en Provence, rappelons que le Fort, se trou- 
vant sur un passage important, ne pouvait éviter d'être l'objet 
des convoitises de tous les partis. On ignore certainement quel- 
ques-unes des péripéties qu'il eut à subir, mais nous savons que 
les Réformés de Buoux avaient été pourchassés dès ir^o, que 
leurs maisons avaient été brûlées et leurs biens confisqués. 

En i563, le Fort était cependant au pouvoir des protestants ; 
en 1573, les ravages d'P-stoublon et du baron d'Allemagne attei- 
gnirent Buoux et Lourmarin. Deux ans après, Buoux était repris 
par les catholiques (5\ lorsque les Calvinistes de Ménerbes vin- 
rent l'assiéger, le reprirent à Jean de Pontevès, qu'ils précipitè- 
rent du haut du donjon ;6,. En iryy, ils ne l'avaient pas encore 
abandonné, puisque les habitants de Buoux sont portés, dans un 
traité de protection mutuelle conclu entre la commune d'Apt et le 

valeant, et conservantur ad honoroin ret;ii domi cl conservalioncm et bonum statum 
dicte Provincie. » (Archives communales d'.Vpl. hB, rejr. de i38« à il^J. fol. xcvii V, 
délibération du 22 novembre i3y2. » 

(i) f Aldich jorn aver pagrat à un mes>afrier de Bieus que venié de Pertus que 
tolos los gens [de' mosen Raymon eran acampadas pcr venir melre lo fuoc els 
blatz, I pros. » (Archives communales d'Api, CC, compte Irésoraire de 139G.) 

(2) Archives communales d'Apt. Biî, rc^'. de r:vS8 A i.'^'^, fol. O4 v% délibération du 
14 juin 1396. 

(3) Remerville, Histoire ms. S Apt, p. ?t2. 

(4) Cf. Justin, Histoire Jes t^uerres c.vcttàes Jjh^ le cnmtc \'cn.iissin, 1782, t. I, p. :^8. 
^5) Remerville, op. cit., p. ^4'.*. 

(6) Idem, p. 544. 



DE l'académie de vaucluse ïSq 

capitaine Ferrier, de Ménerbes (i8 juin iSyy), comme des Réfor- 
més (i); mais la chute de Ménerbes permit bientôt après à 
Pompée de Pontevès d'attaquer vigoureusement le Fort, afin de 
venger son parent. Le siège se prolongeant au delà de son gré, 
(( il résolut de le terminer définitivement. Ayant attiré le gouver- 
neur du Fort, soubs prétexte de le régaler dans son chasteau 
avec tous les officiers de la garnison, il fust si inconsidéré de 
s'y rendre, suivy de ses meilleurs soldats. On Tarresta en mesme 
temps prisonnier et rayant attaché sur un asne, on le mena sur 
une hauteur voisine du Fort d'où il pouvoit estre aperceu de 
quelques soldats qui estoient dedans et en leur présence, on 
menaça de le poignarder s'ils ne se rendoient pas sur le champ: 
Le péril de leur gouverneur et le peu d'apparence qu'ils peussent 
résister longtemps leurfist ouvrir les portes, dont les catholiques 
se saisirent aussitost et l'on mit ensuite le gouverneur en liberté 
avec le reste des huguenots qu'on avoit arrestés avec luy. » 

(i577)(2). 

Peu à peu, le Fort et la garnison que la ville y entretenait 
devinrent une lourde charge pour les finances aptésiennes ; les 
États de i585 ayant prescrit de fournir 14 hommes pour la garde 
de Buoux à partir du 6 juillet, le conseil délibéra d'envoyer 
à AixM. du Canton, premier consul, pour demander l'annulation 
de cette décision (3). Malgré tout, les hommes furent équipés et 
expédiés par la commune dès le mois d'août suivant ; malheu- 
reusement, en octobre, on lui demanda un nouveau sacrifice : 
quarante hommes devaient aller rejoindre la garnison, « chose et 
despense a la ville insupportable », protesta l'administration (4) 
qui dut se soumettre, sans renoncer toutefois à réclamer le rem- 
boursement des sommes avancées (5). La garnison aptésienne 
demeura au Fort jusqu'au 5 novembre ï585 (6). Elle y retourna 

(1) Ce traité (dont l'original signé par le fameux Ferrier qui tint pendant si long- 
temps en échec les troupes pontificales et provençales réunies devant Ménerbes, est 
aux archives d'Apt, série A A), fut dressé pour éviter les déprédations des catholiques 
et des protestants, ainsi que les attaques à main armée sur les routes : c Soubs cette 
condition que allants et venantz ceulx desdits Ménerbes, Buoux et autres de la ses 
vallées qui sont de la relligion refourmée audict Apt, Saignon, ne seront aulcunc- 
ment offensés ne moUeslés. • 

(2) Remerville, p. 620. 

(3) Archives communales d'Apt, BB, reg. de i388 à 1396, fol. 278, délibération du 
18 juillet i585 ; fol. 281, délibération du 4 août. 

(4) Idem, fol. 281, délibération du 4 août. 

(5) Idem, fol. a88, délibération du 6 octobre. 

.6) fdem, fol. 294, délibération du 20 novembre. 



igi) MÉMOIRES 

d'ailleurs l'année suivante : c'est ce qui résulte d'un rôle de 
« la dispense faicte par 140 hommes, sçavoir cent hommes de la 
ville d'Apt et quarante pour le" Fort de Buoulx » (i). Ce fut cette 
même année, que Pompée de Pontevès ayant demandé 56 écus 
par mois pour la garde du Fort, le conseil délibéra de demander 
la démolition de cette place, ce que le crédit du seigneur de 
Buoux réussit à empêcher. 

Pendant une vingtaine d'années, les documents aptésiens sont 
muets au sujet de Buoux, probablement parce que le Fort avait 
été abandonné ; mais en 1626, les Calvinistes ayant fait de nou- 
velles tentatives contre quelques châteaux de la région, le Parle- 
ment demanda l'exécution immédiate des lettres patentes don- 
nées à Nantes le 3i juillet 1626, qui prescrivaient la démolition 
des fortifications inutiles, parmi lesquelles Buoux se trouvait 
compris. Cette fois, ce fut la ville, par l'intermédiaire de son 
consul, Barthélémy de Remerville, qui s'opposa à l'exécution de 
l'ordre royal. C'était, en réalité, pour éviter les dépenses qu'au- 
rait entraînées son exécution, mais elle donna le prétexte que le 
plateau par lui-même formait une position facile à défendre, alors 
même que les fortifications n'auraient pas existé (2). La ville eut 
certainement gain de cause, puisque en 1649, '^^ procureurs du 
pays l'obligeaient à placer vingt hommes de garde au Fort [3;. 

Après cette date, celui-ci ne se trouve plus mentionné nulle 
part; aussi faut-il, pour l'instant, renoncera connaître la date 
exacte de sa démolition ; Courtet donne assez vaguement celle 
de 1660, année qui vit la destruction de la citadelle d'Orange, 



(i) Archives d'Apt, série CC, compte trêsoraire de i586. 

(2) « Et parce qu'il y a plusieurs des plus entendus de ceste ville qui leur ont dict 
{aux consuls) ladicte desmolition seroit grandement préjudiciable au public et 
especiallement a ceulx de ceste ville et contrée, parce que ledit Fort se trouve au pied 
de la grand montagne du Leberon, environné des habitants dudict Buoux, 
de Sivergues, Lurmarin. Merindol, Lacoste, Gignac, toute la vallée d'Aiguës et 
plusieurs autres lieux qui sont tous de la religion pretandue reformée, lesquels aux 
premiers et seconds troubles de ce pais c'esioient saisis dudict Fort et c'estoient 
ramparés et barriques dans icellui avoient faict de grands dommages en ceste 
contrée, ce qui leur seroit encore facile a faire, quelle desmolition que feust faicte 
dudict Fort, d'aultant que le lieu est de soi mesme defTansable et ne pourroit estre 
destruit en fasson qu'en peu de temps il ne peult estre remis en defTanse. Consi- 
déré que de dix parts de ceulx de la religion pretandue reformée, les neuf se trouvent 
aux environs dudict Fort et de ceste ville, qui n'en e.si t^lojgnée que d'environ deux 
lieues et que le nombre d'iceulx est si grand que leur seroit facile de fere promtc- 
ment une levée de plus de mil hommes, etc. » (Archives communales d'Api, BB, 
reg. de 1620 a i63i, fol. an, délibération du 20 septembre 1626.) 

^3) Idem. BB, reg. de 1642 à i653. fol. ?y, délibération du 5 mars 1649- 



DK L*ACADÉM1E DE VAUCLUSE I9I 

mais il ne cite aucune référence. Il y a cependant apparence que 
la chute définitive du Fort n'est pas postérieure au XVIP siècle. 
Si quelque doute peut subsister à ce sujet, il n'en est pas de 
même en ce qui concerne le démantèlement voulu des fortifica- 
tions ; celles-ci sont certainement tombées sous la pioche des 
démolisseurs et non sous les atteintes que le temps et les hommes 
infligent à tous les vestiges du passé; d'ailleurs, les courtines, 
les tours et le donjon, construits dans les meilleures conditions, 
auraient pu défier pendant longtemps encore les causes habi- 
tuelles qui transforment les monuments en amas de ruines (i). 

[Février mai 1904] 

Femand Sauve. 

(i) En établissant plus haut l'hypothèse de l'existence d'une verrerie aux environs 
de Buoux au XII* siècle, je ne connaissais pas un document qui permet de croire que 
cette industrie a pu exister dans cette région dès cette époque; il s'agit de deux 
mentions de verriers établis à La Roche d'Espeil au commencement du XIV» siècle ; 
la première relate la condamnation d'un Guillaume Maurel. • veyrerio de Rocas- 
pelli»,à dix sols d'amende pour avoir secoué tro^ vivement un juifd'Apt (Compte de 
la claverie d'Apt de 1345, archives des Houches-du-Rhône, li 1687, fol. 87); la 
deuxième concerne un certain Jean Raustiti, « veyrerio de Rocaspelli », condamné A 
10 sols d'amende, parce qu'ayant une discussion avec Jacques Vesycuni, clerc, il 
avait frappé ce dernier : « Cum quodam baculo uno ictu supra quodam pondus vitri 
percussit. » {Ibidem, fol. 89 ) 

Il est d'ailleurs acquis aujourd'hui que les verriers du moyen Age n'avaient pas de 
grands établissements et qu'ils s'installaient de préférence dans les vallées qui leur 
fournissaient en abondance du bois mort et des plantes indispensables A leur 
industrie. 




ORANGE ANTIQUE 



Un nouveau Monument romain. 



I. 

Orange et l'Archéologie. 

Le nom de la ville d'Orange est maintenant connu partout, 
grâce à ses monuments romains, et aux superbes représentations 
données sur son Théâtre antique, par les meilleurs artistes de 
la Comédie française et de TOpéra. 

A notre époque matérialiste, plus de deux cent mille specta- 
teurs, épris d'idéal ou de curiosité, sont venus, depuis quelques 
années, à des représentations inattendues de drames grecs, sur 
rimmensité béante d'une scène dévastée depuis quinze siècles, 
et que les barbares semblaient avoir désaffectée, à tout jamais, 
par le fer et par le feu dont les sommets rougis de ses grands 
murs portent encore l'empreinte. 

Un nombre considérable de savants, d'amateurs ou de sim- 
ples touristes viennent, tous les jours de Tannée, contempler les 
restes étonnants de la splendeur d'Orange à l'époque romaine, 
et comme souvenir de leur pèlerinage artistique, ils envoient à 
tous les coins du monde des milliers de cartes postales illus- 
trées, moyen admirable et peu coûteux de vulgarisation archéo- 
logique. 

Pour mieux recevoir tant de visiteurs, on a fait la toilette des 
monuments antiques. 

Après l'Arc de triomphe, respectueusement restauré par Témi- 
nent architecte Caristie, avec beaucoup de science et de con- 

8 



194 MÉMOIRES 

science (i), Thémicycle de THippodrome a été déblayé. On a 
rajeuni, avec moins de bonheur, la pittoresque décrépitude du 
Théâtre, en mettant à ses précinctions écroulées des files raides 
et peu sûrement restituées (2) de gradins blancs, qui lui vont 
comme une robe de mariée à une momie millénaire. 

La ville moderne n'a pas voulu être en reste de coquetterie. 
Les abords, jadis presque déserts de la gare, sont ourlés mainte- 
nant d'une double file de constructions neuves, qui font un cadre 
d'aisance et de gaieté à l'avenue ombreuse transformée en fau- 
bourg. 

A la suite, une rue nouvelle, entreprise il y a 3o ans, au milieu 
de quartiers étroits et tortueux, puis abandonnée en esprit de 
contradiction par des municipalités insuffisantes, vient d'être 
enfin définitivement percée pour faire à la cité une entrée digne 
d'elle et de ses hôtes. 

Les hôtels, les cafés, les maisons particulières se sont piqués 
au jeu et ont fait peau neuve. Qui n'aurait pas revu Orange 
depuis quarante ans, ne reconnaîtrait plus la vieille ville déridée 
et poudrée à blanc, comme une grande dame, pour recevoir 
ses invités. 

A côté d'autres causes diverses, c'est avant tout à l'archéologie 
et aux archéologues qu'est dû cet heureux accroissement de 
confortable urbain et de prospérité générale. 

Les patients antiquaires, dont il est facile avec ou sans esprit de 
railler les travaux, peuvent se permettre quelque légitime fierté 
d'avoir si largement contribué à faire connaître, restaurer et pour 
ainsi dire mettre en valeur le riche capital des antiquités d'Orange, 
qui fructifie maintenant en bénéfices nombreux pour l'universa- 
lité des habitants. 

En i8o5, Millin disait, dans ses Notes de voyage demeurées 
classiques et toujours consultées pour le midi de la France : 

(i) Caristie, Monuments antiques à Orange, Paris, i856, in-fol. L'éminent architecte a 
établi, dans ce bel ouvrage, les principes scientifiques de restauration scrupuleuse, 
que personne avant lui n'avait formulés et qui sont maintenant classiques. 

(2) Il n'existe à rintérieur du Théâtre antique qu'une seule inscription, répétée en 
deux endroits, sur la face antérieure du g-radin le plus bas : EQG'III. Elle indiquait 
que les trois premiers gradins étaient réservés aux chevaliers. Il ne restait en place 
que ceux-là, avec le marche-pied du bas et l'épaulement du dessus, lorsque les 
restaurations commencèrent. Rien dans les amorces antiques ne s'opposait au réta- 
blissement, après ces places réservées, de la séparation qui se voit aux théâtres non 
restaures d'Arles, de Timgad, de Pompéi, etc. On a au contraire superposé sans 
discontinuité seize nouveaux gradins vSur ceux qui existaient déjà, ce qui produit un 
entassement énorme de 20 gradins sans compter le marchepied initial. Cette volée 
vertigineuse est d'une disproportion choquante avec les autres étages. 



: bE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSË I9S 

« Sans les remarquables restes d'antiquités, qui sont encore 
j l'ornement d^Orange et qui font sa célébrité, on y est à peine 

^ entré qu'on en voudrait déjà sortir. Quittons ces masures maus- 

sades pour ne nous occuper que des restes précieux de la gran- 
deur romaine. ... Les habitants retiendraient plus longtemps les 
étrangers, s'ils mettaient plus d'importance à leurs monuments 
et s'ils paraissaient les soigner davantage (i). » 
Ce vœu est aujourd'hui pleinement exaucé. Rien n'est négligé 
i pour la conservation des antiquités et l'embellissement de la ville 

! moderne. 

J Or, il se trouve que, par singulière fortune, les travaux 

I récents d'édilité en ont fait retrouver d'anciens. L'ouverture de 

f la nouvelle rue Centrale et de l'égout qui doit la desservir ont 

! amené des découvertes archéologiques du plus haut intérêt. Elles 

permettront probablement, après un supplément de fouilles, la 
détermination d'un somptueux édifice antique qu'on ne soupçon- 
nait pas. 

[ Avant de décrire les débris retrouvés, il ne sera pas hors de 

I propos de rappeler brièvement l'origine d'Orange et les causes 

de sa grande prospérité sous la domination romaine. 



II. 

Orange et la région vauclusienne avant la venue 
DES Romains. 

Dès la plus haute antiquité, Orange dut exister à l'état 
d'agglomération préhistorique comme paraît le prouver son 
premier nom d'Araus antérieur à la venue des Grecs, auxquels 
on attribue la terminaison ou suffixe ion commune à plusieurs 
villes du voisinage 2). 

On ne sait rien de ce bourg jusqu'à la venue des Romains. Il 
n'est pas nommé dans les historiens à propos du passage d'An- 

(1) Millin. Voyage dans les départements du Midi de la France, t. II, p. 148. 

(2) AoJ8v-Kiiv, Avignon, — KaSêXÀ-icov, Cavailloni — Oûa^-ioiv Vaison,— Oov3aVi-.Jv, 
[Vedènes?) — Ce suffixe ion ne serait-il pas seulement la forme grecque d'un suffixe 
indigène io7 

On a cru trouver le radical d*Apaya-icov (Orange) dans le nom dMrals, qui désigne 
une source dans UQ domaine touchant le tour de ville d'Orange. Malgré la jolie 
consonnance archaïque du mot Araîs, l'identification reste douteuse. 



igti MÉMOIRES 

nibal, bien qu'on s'accorde généralement à fixer en face de son 
territoire la fameuse traversée du Rhône par les éléphants de 
Carthage. 

C'est dans le géographe Strabon, au !•' siècle de notre ère, 
qu'il est fait mention pour la première fois d'Orange, sous sa 
dénomination grecque : 'Apajaic.'» 

Antérieurement, d'autres points du voisinage avaient eu succes- 
sivement une importance plus considérable, suivant les modifica- 
tions de l'état social dans la vallée du Rhône. 

Dans les temps primitifs, la prépondérance sur presque tout le 
pays qui forme aujourd'hui le département de Vaucluse, paraît 
avoir appartenu au bourg de Vénasque, dont le suffixe, asca, 
ligure ou ibère, garde le souvenir des premiers envahisseurs que 
rhistoire a connus dans la vallée du Rhône (i). 

Surveillant les passages montagneux, alors presque unique- 
ment pratiqués dans les combes de Sénanque et de la Nesque, 

— dominant les sentiers de la plaine marécageuse et peu acces- 
sible où vaguaient TOuvèze, la Sorgue et les autres cours d'eau, 

— le bourg de Vénasque tenait la clé de toutes les pénétrations. 
Quand les Grecs émigrés de Phocée eurent fondé Marseille, 

600 ans avant Jésus-Christ, ce fut le tour de supériorité d'Avi- 
gnon et de Cavaillon, qui commandaient la navigation du Rhône 
et de la Durance, et qui devinrent les comptoirs prospères des 
nouveaux venus, hardis explorateurs, dédaigneux de laborieuses 
conquêtes, et préférant le monopole des importations chez des 
peuplades encore barbares (2 . 

L'arrivée des envahisseurs gaulois, vers l'an 3(X) avant notre 
ère, ne semble pas avoir changé cet état de choses, dans la plaine 
où la tribu des Cavares résidait, laissant à d'autres les monta- 
gnes. Jamais contre eux la république marseillaise ne fit appel, 
comme pour les Ligures ou les Albiciens, à son alliée la répu- 
blique romaine. Celle-ci, dans ses premières incursions en Gaule, 
gratifia Marseille de nouvelles dépendances comme échange de 
bons procédés, et lui assura la prédominance sur les deux rives 
du Rhône, jusqu'aux Cévennes et à l'Isère. 

(i) D'Arbois de Jubainville, Le5 premiers habitants de l'Europe, i- II, p. 99: Le suffixe 
asco en France. — Vénasque, petite commune du département de Vaucluse, a des 
restes de remparts romains et un baptistère du VP siècle. Les invasions lui avaient 
redonné de l'importance comme refuge fortifié. Le siège épiscopal de Carpentras y 
fut quelque temps transféré, après le saccagement de cette ville parles barbares. 

(2) Etienne de Bysance, EMni«/Mes, aux mots Avignon et Cavaillon ajoute : ville des 
Marseillais. Cette indication était prise dans de très anciens auteurs aujourd'hui 
perdus. 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE I97 

Mais César, pour punir les Marseillais d'avoir pris le parti de 
son rival Pompée, leur enleva tout, sauf la banlieue de leur ville 
et quelques points de la côte. Il organisa en province romaine 
tout le territoire jadis abandonné à Tinfluence marseillaise. 

Pour ménager adroitement Tamour-propre des cités déjà 
enrichies et policées au contact de la civilisation grecque, César 
laissa aux villes de Cavaillon et d'Avignon une autonomie rela- 
tive, sous le titre de colonies latines. C'était un degré intermé- 
diaire entre les cités provinciales traitées en étrangères, et les 
colonies de citoyens romains jouissant de la plénitude du droit 
public et privé. 

Mais pour faciliter l'assimilation du pays, il créa contre le 
petit bourg cavare d'Orange une grande colonie romaine, sous 
la dénomination officielle de : Colonia Jiilia Secundanorum 
Arausio, qui rappelait à la fois le nom du fondateur et celui des 
colons pris parmi les vétérans de de la deuxième légion (i). 



III. 
Orange colonie romaine. 

Ce fut, dès lors, un des rendez-vous privilégiés des trafiquants 
romains et des grandes compagnies financières, qui venaient 
exploiter le pays neuf des Gaules à peine conquises, et dont le 
séjour était moins sûr que celui du pays cavare, annexé sans 
combat par une adhésion volontaire. Comme le disait déjà Cicéron, 
pas un écu ne se remuait alors dans la Gaule méridionale sans 
passer parles banques des citoyens romains i2). 

Tandis qu'Avignon et Cavaillon végétèrent dans une auto- 
nomie honorable, mais sans profit, Orange, centre régional du 

(i) On a beaucoup discuté pour savoir si des vétérans de la deuxième légrion avaient 
été vraiment envoyés a Orangfc, ou s'il ne fallait voir dans l'appellation officielle de 
cette colonie qu'un hommage honorifique rendu à la deuxième légion. C'est en ce 
ce dernier sens que concluent Mommsen. Herzog, Hist. Galliae Narb., p. 81. 

.Malgré ces autorités, j'ai peine à croire qu'un honneur si platonique eût beaucoup 
satisfait les légionnaires romains. Des concessions de terre ou d'autres profits fai- 
saient beaucoup mieux leur affaire. 

f2) CictTor, Pro Fonteio ch. 5, § 11 : «iMeferta Gallia negociatorum est plena civium 
romanorum ; nummus in GallLi nullus sine civium Romanorum tabulis commovetur. • 
Sur le mouvement énorme d'affaires à cette époque, voir Deloulme, Les manieurs 
d'argent Je Rome, Paris. Thorin, 1890. 



MÉMOIRES 



bal, bien qu'ors 
Titoire la fam^ 
irthage. 

C'est dans le ^ 
ril est fait me 
^nomination g: 
Antérieureme 
cernent uneirn^ 
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Dans les tem^ 
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L'arrivée d^ 
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> en France, 
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: ::usir w . 51$ Dn sait qu'il existe encore, dans une prairie, au delà du cours 

er.:rsp''»tge3sriint-Martin, les substructions des Arènes, qu'au XVIII* siècle 

- 7 encsinîf S' Pise avait vues hors de terre avec les jambages de leurs 
- - -. raridiie QU:i eaux, et dont il a donné une restitution fantaisiste (i). De Gas- 

nn et Caristic en ont retrouvé l'emplacement (2), et ici encore 

.^-..^^ l,.::.angage populaire, conservateur de souvenirs abolis, n'a pas 

.-— -^ «lan fc ^^ d'appeler ce quartier rural le quartier des Arènes. 

~^V' D'"' ' ^^^^ noter cette coexistence, dans une ville provinciale, de 

P-nc:-^ les monuments destinés aux plaisirs publics : Théâtre, 

- *^-» 'y^ .;:)podrome. Arènes, — et dans des proportions à contenir plus 

* ^ sept mille spectateurs au Théâtre et de vingt mille à THippo- 

^^^ î^me (3). Ce seul fait suffit à prouver l'importance considérable, 

•* *^"^^* ^..-'époque romaine, d'une ville qui, cependant, est à peine 

"-- *^ ^r^nmée par les géographes antiques, et qui n'a joué aucun rôle 

- -^. P^^^'^.cial dans l'histoire. 

- -^ ^*"'" "vlais elle résumait l'activité de tout le riche pays Cavare, qui 
:endait sur la rive gauche du Rhône, depuis la Durance et 

'-'^ ' it-ètre même depuis les Alpines, jusqu'à l'Isère (4). Sa 

. - -^ :: -♦'^/* nde prospérité lui était venue subitement, par le décret de 
-zr --' ^-^ es César. 

^ .. ^'~ Jn tel centre ne devait manquer d'aucun des édifices néces- 

..^ .-.<- "-es au fonctionnement d'une importante colonie et aux 

gences de la grande vie romaine, faite de tous les raffinements 

_♦ .'' civilisations antérieures. 

^ ^ '- ' .es admirables découvertes d'Algérie et de Tunisie nous ont 

-:. *-élé quelle multiplicité et quelle richesse de constructions 

iportaient des municipes bien moindres, et de création beau- 

- . -.p plus récente que la colonie Julienne d'Orange. 

- -; .es créateurs, escomptant des affluences soudaines, lui avaient 
"- ' . - :é une enceinte très considérable cerclée de tours et de murs 

'_ . lelés, dont quelques restes subsistent encore, sous le nom de 

- " " * ^ '''' ^''^^' (vieux remparts), entre l'Arc de triomphe et le chemin 
->""" * fer, et dont les substructions relevées complètement par 

-•istie enferment un espace où la ville actuelle tiendrait six fois ! 

La Pise, Histoire Jes princes et Je la principauté d'Orange, 1741, p. 29 et pi- 
espondante. 
~~ - ~ Gasparin, Histoire de ta ville d'Orange, p. io5et suiv. — Caristie. op. cit., pi. I. 

Ce sont les chiffres donnés par Caristie. 
,_ * " Sirabon, IV, 12, donne aux Cavares tout le pays en plaine depuis la Durance 
u'à risère. D'autre part, la circonscription territoriale de la cité d'Avigrnon paraît 
e ôtenduc jusqu'aux Alpines et jusqu'aux limites du territoire d'Arles, confor- 
leni aux divisions diocésaines antérieures à la Révolution. 



igS MÉMOIRES 

culte officiel de Rome et d'Auguste (i), siège des grandes 
administrations de la province, entrepôt général de commerce, 
cité de luxe et de plaisirs, vit son enceinte se peupler et ses 
monuments s'élever avec la même rapidité que s*y faisaient des 
fortunes immenses. 

C'est ainsi qu'après quelques années de fondation, et dès le 
commencement de notre ère, Orange était déjà ce que Strabon 
appelle ncJXiv Kouapwv (2), la capitale des Cavares, c'est-à-dire la 
capitale de toute la rive gauche du Rhône, comprise dans les 
départements actuels de la Drôme, de Vaucluse et de la moitié 
de l'arrondissement d'Arles. 

Il ne faudrait pas croire que le patrimoine architectural de 
cette grande ville romaine se bornât aux monuments dont on 
admire encore les restes, et qui, n'ayant pas de rivaux en France, 
soutiennent la comparaison avec les plus beaux du monde 
entier, et même de Rome (3). 

Si le Théâtre et l'Arc de triomphe furent toujours connus et 
admirés, on resta longtemps sans se douter, qu'à côté même du 
Théâtre antique, existaient les ruines d'un Hippodrome qui tra- 
verse la ville actuejle en droite ligne dans toute sa largeur, 
depuis la montagne où il s'adosse jusque vers la porte de 
Langes (4). 

Le langage populaire avait pourtant conservé, à la place 
actuelle du Théâtre antique, le nom de Place du Cirque, et les 
savants s'étonnaient de cette dénomination qui paraissait s'appli- 
quer incorrectement au Théâtre (5). 

Or, sur cette place s'ouvre, en réalité, à l'angle ouest du 
Théâtre, une des portes principales du Cirque ou Hippodrome, 
dont on a maintenant déblayé toute la partie courbe, et dont fai- 
sait partie le mur romain sur arcatures de la rue du Pontillac, 
longtemps pris à tort pour un fragment d'aqueduc (6). 

(i) Il y avait à Orange un âamine de Rome et d'Auguste, Corpus inscriptionum lati- 
narum, t. XII, n^ 5236. 
(a) strabon, IV, ii. 

(3) Voir dans CarisUe. op. cit., les planches XXVII, XXVIII, XLI. XLIV. donnant 
les plans et élévations comparés des monuments similaires de ceux d'Orange. 

(4) Caristie, op. cit., pi. I, plan de la ville actuelle d'Orange, avec l'emplacement des 
monuments antiques et notamment du Cirque d'après les restes existants sur divers 
points. 

(5) Maffei, Antiquités de France. — Gasparin, Histoire d'Orange, p. 101. 

(6) Pour l'attribution à un aqueduc on invoquait une étymologie décevante : rue 
du Pontillac =: Via Poniis aquae, rue du Pont de l'eau. Ce n'est qu'au commence- 
ment du XIX* siècle que M. Labbadie démontra l'impossibilité d'un aqueduc. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE I99 

On sait qu'il existe encore, dans une prairie, au delà du cours 
Saint-Martin, les substructions des Arènes, qu'au XVIIP siècle 
La Pise avait vues hors de terre avec les jambages de leurs 
arceaux, et dont il a donné une restitution fantaisiste (i). De Gas- 
parin et Caristie en ont retrouvé remplacement (2), et ici encore 
le langage populaire, conservateur de souvenirs abolis, n'a pas 
cessé d'appeler ce quartier rural le quartier des Arènes, 

Il faut noter cette coexistence, dans une ville provinciale, de 
tous les monuments destinés aux plaisirs publics : Théâtre, 
Hippodrome, Arènes, — et dans des proportions à contenir plus 
de sept mille spectateurs au Théâtre et de vingt mille à l'Hippo- 
drome (3). Ce seul fait suffit à prouver l'importance considérable, 
à l'époque romaine, d'une ville qui, cependant, est à peine 
nommée par les géographes antiques, et qui n'a joué aucun rôle 
spécial dans l'histoire. 

Mais elle résumait l'activité de tout le riche pays Cavare, qui 
s'étendait sur la rive gauche du Rhône, depuis la Durance et 
peut-être même depuis les Alpines, jusqu'à l'Isère (4). Sa 
grande prospérité lui était venue subitement, par le décret de 
Jules César. 

Un tel centre ne devait manquer d'aucun des édifices néces- 
saires au fonctionnement d'une importante colonie et aux 
exigences de la grande vie romaine, faite de tous les raffinements 
des civilisations antérieures. 

Les admirables découvertes d'Algérie et de Tunisie nous ont 
révélé quelle multiplicité et quelle richesse de constructions 
comportaient des municipes bien moindres, et de création beau- 
coup plus récente que la colonie Julienne d'Orange. 

Ses créateurs, escomptant des affiuences soudaines, lui avaient 
tracé une enceinte très considérable cerclée de tours et de murs 
crénelés, dont quelques restes subsistent encore, sous le nom de 
Barri viei (vieux remparts), entre l'Arc de triomphe et le chemin 
de fer, et dont les substructions relevées complètement par 
Caristie enferment un espace où la ville actuelle tiendrait six fois ! 

(1) La Pise, Histoire des princes et Je la principauté d'Orange, 1741, p. 29 et pl« 
correspondante. 

(2) Gasparin, Histoire de la ville d'Orange, p. loSet suiv. — Caristie, op, cil., pi. I. 

(3) Ce sont les chiffres donnés par Caristie. 

(4' Strabon. IV, 12, donne aux Cavares tout le pays en plaine depuis la Durance 
jusqu'à l'Isère. D'autre part, la circonscription territoriale de la cité d*Avignon paraît 
s'Otre «Henduc jusqu'aux Alpines et jusqu'aux limites du territoire d'Arles, confor- 
mément aux divisions diocésaines antérieures à la Révolution. 



200 MÉMOIRES 

Comment était occupé ce vaste périmètre? Où étaient les 
temples, le forum, le palais de la curie, les basiliques, l'es mar- 
chés, les thermes, que signalent à Timgad, à Lambessa, à 
Dougga et ailleurs les grandes publications récentes sur les 
antiquités d'Afrique (i)? 

Il ne reste que quelques souvenirs et quelques débris épars. 
La Pise nous a dit ses regrets d*avoir vu démolir, de son temps, 
sous la montagne du côté de Pourtoule, une grande construction 
arrondie, que les princes d'Orange avaient autrefois utilisée 
comme château, et qu'il appelle Bains antiques. Si son dessin 
n'est pas trop infidèle, c'était plutôt une porte de ville, avec ses 
deux grandes ouvertures pour l'entrée et la sortie des chars, et 
de chaque côté deux autres plus petites pour les piétons (2). 
Lui-même s'accuse d'avoir fait démolir, dans sa maison, un mur 
antique, pour en utiliser les belles pierres et les corniches (3). 

En Afrique, où les Arabes ne bâtissent guère, les restes des 
cités écroulées sont demeurés intacts, sous les empiétements du 
désert qui reprenait ses droits. Et maintenant, de savantes 
recherches peuvent ressusciter les villes mortes débarrassées du 
linceul de sable et de remblais qui les a conservées, comme les 
déjections du Vésuve nous gardèrent les ruines de Pompéi. 

Mais à Orange, plusieurs fois détruit et rebâti sur place, et où 
Maurice de Nassau ensevelit dans ses trop fameux bastions les 
derniers restes de plusieurs constructions romaines (4), il n'y a 
qu' a une pioche fortunée », comme disait M. Mommsen (5), qui 
puisse nous livrer, de temps à autre, quelques-uns des secrets 
enfouis sous la terre ou dans l'épaisseur des vieux murs. 

C'est précisément un de ces mystères que pourront éclaircir 
les découvertes importantes qui viennent d'être faites, et dont il 
faut donner maintenant un rapide aperçu. 



(1) Il y a des comparaisons très intéressantes à établir entre les monuments 
romains d'Afrique et ceux de Provence. On ne saurait trop consulter à cet effet les 
grandes publications de MM. Gagnât, Bœswihvald, Ballu, Gsell, Carton, etc. 

(a) La Fisc, op. cit., p. 32. 

(3) /Wd., p. 29. Il reste encore dans les caves de cette maison habitée par M. Sou- 
chièrc, rue Notre-Dame, les substructions du mur romain démoli par La Pise. 

(4) Ibid.. p. 7. 

(5) Lettre à M. Allmer, Revue èpigraphique, t. III, p 142. 



DE l'académie de VAUCLUSE 201 

IV. 

Emplacement des découvertes. 

Dans les derniers jours du mois de mai 1904, une tranchée fut 
ouverte sur toute la longueur de la rue Vieille-Fusterie, à Orange, 
pour la construction d'un égout. 

Cette rue commence à l'extrémité de la nouvelle percée qui 
fait maintenant à la ville d'Orange une fort belle entrée. Elle se 
dirige vers la place du Théâtre antique, reste bien réduit de l'an- 
cien forum qui, selon toute probabilité, se prolongeait jusqu'à 
la sous-préfecture actuelle. 

Les travaux commencés sur la place du Théâtre antique et 
poursuivis dans la rue Vieille-Fusterie, n'avaient donné lieu à 
aucune trouvaille, lorsque, en approchant de l'angle méridional 
de la sous-préfecture, on tomba sur un amoncellement considé- 
rable de débris antiques, enfouis à une profondeur moyenne 
de deux mètres et demi. 

Il y avait là dans un enchevêtrement inextricable de ruines, à 
côté d'un angle de bâtisses en très gros blocs, des fragments de 
toute espèce de marbres et de pierre sculptés : grands chapiteaux 
presque entiers et seulement écornés aux angles, tronçons de 
colonnes de diverses grosseurs, moulures variées, pans de frises, 
de corniches, de linteaux et de piédroits délicatement ornés, enfin 
des portions de statues de difi"érentes grandeurs, et une dizaine 
de morceaux de plaque de marbre avec inscription. Rajustés 
avec soin, ils ont donné sans discontinuité un texte officiel 
des plus intéressants et des plus rares, mais malheureuse- 
ment trop incomplet. 

La municipalité d'Orange fut avertie aussitôt de ces trou- 
vailles par M. Aymès, chef de section à la Compagnie du chemin 
de fer, qui chargé de la direction des travaux, fit très louable- 
ment surveiller les fouilles et mettre en lieu sûr, dans les dépen- 
dances du Théâtre antique, tous les fragments intéressants. On 
en transporta plusieurs charretées. 

Malheureusement, les recherches ne purent être poursuivies 
au delà de la largeur prévue, au milieu de la rue, pour la 
construction de Tégout, et il est resté, sous les deux bords et sous 
les maisons voisines, une quantité considérable d'autres débris 
antiques. 



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DE l'académie de VAUCLUSE 203 

V. 

Résultat des fouilles. 

Parmi la grande quantité de fragments transportés au Théâtre 
antique, j*ai photographié, comme types, quelques-uns de ceux 
qui m'ont paru les plus intéressants, et dont la reproduction 
suppléera aux descriptions toujours insuffisantes. 

Voici quelques courtes observations relatives à chaque 
groupe d'objets : 

I. — Substructions. 

En travers de la rue, et un peu en biais, avec son axe, se trou- 
vaient des substructions en très gros blocs solidement scellés 
sur des moellons avec du mortier très résistant. Ces grands blocs 
gênaient pour le passage de Tégout, ils furent extraits et mis à 
part comme documents pour des rapprochements ultérieurs. Le 
plus volumineux, en calcaire roux et grossier des carrières de 
Courthézon ou de Sérignan, mesure 2 m. i3 de long avec 
une section de o m. 64 sur o m. 55. A côté on a trouvé d'autres 
pierres de même nature, mais de proportions moindres, termi- 
nées au sommet par une petite moulure en forme de doucine 
renversée et qui formaient probablement le socle d'une façade 
de monument. 

2. — Bases de colonnes. 

Les fragments de base qui ont pu être recueillis sont d'un 
profil sobre- et élégant, comme la plupart de celles du Théâtre (i). 
Elles se composent des moulures essentielles de la base attiquei 
scotie entre deux tores inégaux et en plus d'une baguette et d'un 
filet à chaque extrémité de la scotie. 

3. — Fûts de colonnes. 

Les fûts, généralement lisses, sont en brèches violette, noirâtre 
ou rouge et en marbres unis ou veinés, blancs et colorés. 
Il yen a aussi de canelés et rudentésen marbre blanc veiné. 

(I) CarisUe, op. cil., pL XXXVIII,6. 



202 MEMOIRES 



Ce gisement occupe une longueur d'environ vingt-cinq mètres. 
Il cesse un peu avant le débouché de la rue. Ce n'était pas la 
première fois que des trouvailles se produisaient au même 
endroit. 



On m'en a cité une assez ancienne, sur laquelle il ne m'a pas 
été possible de recueillir des détails suffisamment précis, mais 
d'où proviendrait, probablement, le fragment du Parcellaire ou 
cadastre, qui donna lieu, vers 1891 en Allemagne et en France, à 
de très intéressants commentaires de MM. Mommsen, Hirschfeld 
et Allmer (i). 

Le savant épigraphiste M. Hirschfeld, de passage à Orange, 
l'avait acheté à un marchand antiquaire, nommé Charasse, qui 
demeurait précisément dans la portion de la rue Vieille-Fusterie 
où les découvertes actuelles viennent d'être faites. 

Après avoir gardé quelque temps, comme sujet d'étude, ce 
précieux fragment de Parcellaire, M. Hirschfeld a eu la délicate 
attention de l'offrira M. Héron de Villefosse, membre de l'Aca- 
démie des inscriptions et conservateur des Antiques au Louvre, 
pour qu'il fût donné à un musée français. 11 est maintenant dans 
celui des Antiquités nationales de Saint-Germain. 



J'ai vu moi-même, il y a un peu plus de trois ans, extraire du 
fond de la cave de la maison Marin, située au même endroit, et 
en face du mur est de la sous-préfecture, une grande quan- 
tité de débris de marbre, parmi lesquels un chapiteau assez bien 
conservé et d'autres fragments moulurés ou sculptés. 

Après avoir eu d'abord des prétentions très élevées, le proprié- 
taire les a récemment cédés, pour un prix modique. M. Roger 
Valentin les a fait porter dans sa collection bien connue de 
Montélimar. On aime à penser que M. Valentin suivrait le géné- 
reux exemple de M. Hirschfeld, si quelques pièces de son acqui- 
sition étaient indispensables pour compléter les suites qui pour- 
ront être formées, après le résultat de nouvelles fouilles conduites 
méthodiquement et qu'il faut espérer très prochaines. 



{ï) Allmer, Revt4e èpigraphiquc, t. III, p. 142 el i5«j. 



DE l'académie de vaucluse 2o3 

V. 

Résultat des fouilles. 

Parmi la grande quantité de fragments transportés au Théâtre 
antique, j'ai photographié, comme types, quelques-uns de ceux 
qui m*ont paru les plus intéressants, et dont la reproduction 
suppléera aux descriptions toujours insuffisantes. 

Voici quelques courtes observations relatives à chaque 
groupe d'objets : 

I. — Substructions, 

En travers de la rue, et un peu en biais, avec son axe, se trou- 
vaient des substructions en très gros blocs solidement scellés 
sur des moellons avec du mortier très résistant. Ces grands blocs 
gênaient pour le passage de Tégout, ils furent extraits et mis à 
part comme documents pour des rapprochements ultérieurs. Le 
plus volumineux, en calcaire roux et grossier des carrières de 
Courthézon ou de Sérignan, mesure 2 m. i3 de long avec 
une section de o m. 64 sur o m. 55. A côté on a trouvé d'autres 
pierres de même nature, mais de proportions moindres, termi- 
nées au sommet par une petite moulure en forme de doucine 
renversée et qui formaient probablement le socle d'une façade 
de monument. 

2. — Bases de colonties. 

Les fragments de base qui ont pu être recueillis sont d'un 
profil sobre et élégant, comme la plupart de celles du Théâtre (i). 
Elles se composent des moulures essentielles de la base attique» 
scotie entre deux tores inégaux et en plus d'une baguette et d'un 
filet à chaque extrémité de la scotie. 

3. — Fûts de colonnes. 

Les fûts, généralement lisses, sont en brèches violette, noirâtre 
ou rouge et en marbres unis ou veinés, blancs et colorés. 
11 y en a aussi de canelés et rudentés en marbre blanc veiné. 

(I) Caristic, op. cit., pL XXXVIII.6. 



204 MÉMOIRES 

L'état de fractionnement rend les mesures précises difficiles à 
prendre, pour certains échantillons, à moins de les calculer sur 
les courbures. Il suffira de dire que les plus grands diamètres 
varient entre 44 et 45 centimètres. Le plus petit, pris sur un 
tronçon finement canclé en marbre blanc, est de 23 centimètres. 

La largeur des canelures, leur profondeur et leur écartement 
sont variables, même sur des modules semblables. Les plus 
grandes ont 63 millimètres de largeur, 02 de profondeur et 
25 d'écartement. 

4. — Chapiteaux. 

Les deux chapiteaux de la planche I sont de grosseurs din"é- 
rentes, mais du même faire et de la forme corinthienne classique. 
Les feuilles d*acanthe bien nervées, finement découpéa|et refouil- 
lées, dans une frisure élégante, tapissent le vase sanAonfusion. 
Les caulicoles décapités de leurs volutes supportaient un tailloir, 
dont il reste juste assez pour le savoir formé d'un lisLMfcemé de 
petits fleurons et d'une gorge ornée de canaux divefljpnts des 
deux côtés d'un motif central en saillie qui n'a laissâque son 
empreinte. 

Le chapiteau A de la planche II est d'un dessin plus souple 
et plus savant, interprétant la forme corinthienne avec une gra- 
cieuse liberté. Bien qu'il ait dû être roulé, après sa chute, au 
point d'en perdre toutes les parties saillantes et d'en devenir 
presque cylindrique, ce qui reste dénote une main très habile. On 
ne peut dire comment finissait le chapiteau et son tailloir, il 
n'existe que le bas du couronnement composé d'un rai de perles 
entre deux filets, et au-dessus un rangd'oves dont on ne voit que 
la naissance. 

Il sera intéressant de rapprocher ce chapiteau d'un autre de 
forme encore plus fantaisiste, provenant du Théâtre antique, où 
des feuilles d'acanthe sortent des grifibns afirontés et pris 
dans des pans de draperies. Bien que la composition soit très 
difl'érente, il y a beaucoup d'affinités dans la fine allure et la 
sveltesse des détails (i). 



(1) Ce grand chapiteau du Théâtre ne semble pas avoir été connu en entier de 
Carislic. 



DE l'académie de VAUCLUSE 205 

Avec le quatrième chapiteau B,pl. II, nous tombons au contraire 
à une forme encore gracieuse, mais d'une exécution barbare. La 
silhouette élancée est de très bon eflet, l'agencement, les détails et 
la sculpture sont d'une décadence avancée. D'un premier rang 
de feuilles d'acanthe mal dessinées et à peine dégrossies, sort, 
en imbrication, un second rang d'autres feuilles unies, sans ner- 
vures et simplement épanelées. Au centre de chaque face, un 
troisième rang de feuilles très allongées, très raides et côtelées 
verticalement de stries parallèles montent jusqu'au tailloir, où 
elles se recourbent et reçoivent sur leur retroussis d'autres 
feuilles sortant de dessous le bandeau terminal et posées en 
inclinaison comme des écailles de toiture. A chaque angle deux 
palmettes minces et parallèlement acouplées s'enroulent au som- 
met en volutes terminales, avec une courbure assez prononcée, 
pour supporter les extrémités angulaires du tailloir. Celui-ci est 
formée d'une simple gorge plate, ornée au centre d'un fleuron 
à six pétales ayant de chaque c6té un autre fleuron plus petit et 
à quatre pétales. 

Ce chapiteau, si sommairement traité et lourdement imité de 
certaines compositions orientales, ne saurait être contemporain 
des précédents, qui portent le cachet de la meilleure époque. 
Sa présence isolée, au milieu de tant de fragments bien supé- 
rieurs, suggère tout de suite la pensée de quelque restauration 
très tardive. 

Peut-être, dans une accalmie de règnes réparateurs ou qui 
essayant de Tôtre, faisaient . mettre aux revers des monnaies 
la légende Felicis temporis reparatio, s'occupa-t-on, à Orange, 
de réparer en effet les ruines des vieux monuments. 

Il n'ost pas à penser que la province appauvrie et pressurée ait 
pu élever, dans les troubles de l'empire finissant, un édifice avec 
les grandioses proportions que notre chapiteau suppose. C'est 
d'ailleurs une question que de nouvelles fouilles pourront 
élucider. 

Quoiqu'il en soit, malgré toute sa gaucherie et même à cause 
d'elle, ce chapiteau intéresse davantage que de plus parfaits, 
grâce aux pensées qu'il évoque. On y sent l'effort intéressant 
d'une main inhabile, que le manque de savoir réduit à dénaturer 
les bons modèles dont la forme générale est seule observée. 

5. — Piédroits et encadrements. 

Les enroulements et rinceaux de feuillages où se jouent souvent 
de petits animaux, étaient couramment employés pour la décora- 



206 MÉMOIRES 

tion des pilastres, piédroits d'arceaux, jambages de grandes 
portes, frises, etc. On en voit de semblables en place aux arcs de 
Cavaillon, de Saint-Remy et d'Orange. Le musée Calvet d'Avi- 
gnon en a plusieurs échantillons provenant de Vaison et de 
Nimes. Mais ils étaient le plus souvent pris dans la masse des 
pierres de la construction, tandis que les nôtres, sculptés sur 
d'épaisses plaques de marbre blanc, étaient employés en revête- 
ments. 

Le fragment de gauche (pi. III) est traité avec beaucoup plus de 
finesse que l'autre. Ils appartenaient évidemment à des parties 
différentes, ce qui suppose à l'édifice où ils étaient employés de 
vastes proportions. 

Les charmants motifs sculptés sur la face et sur l'épaisseur de 
gauche d'un même prisme rectangulaire de marbre (pi. IV) 
étaient sans doute encastrés comme encadrement autour de 
l'ouverture extérieure de quelque baie. Ils sont d'une légèreté 
et d'une souplesse qui dénotent une excellente époque. 

6. — Architraves, jrises, corniches, etc. 

Les trois planches suivantes, V, VI et VII, offrent des spéci- 
mens d'architraves, de frises, corniches de dimensions diverses. 
Plusieurs présentent la plus grande analogie et pour un ou deux 
une ressemblance complète avec des décorations similaires de 
l'Arc de triomphe et du Théâtre antique d'Orange, ainsi qu'on 
peut le voir dans les grandes planchées de Caristie (i). 

Les fragments décorés de coquilles et de mufles sont à remar- 
quer, ainsi que le petit morceau de corniche à côté orné de rais 
de cœur gravés avec la sûreté et la finesse d'une ciselure sur 
métal et destinés sans doute à être vus de très près. 

7. — Restes d'une petite fontaine. 

Deux fragments de marbre d'une courbure ovale et de 35 à 
40 centimètres carrés sur 3 d'épaisseur, appartenaient à une petite 
vasque, dont la plus grande largeur'ne dépassait guère i mètre. 
Les bords étaient renforcés d'un bourrelet. Ce sont les indices 



(I) Caristie, op, cU., pi. X. XI, XII, — XXXVIII. XXXIX. Cf. G. Bourges. U àionu- 
ment triomphal de Cavaillon, Mémoires de V Académie de Vaucluse, année 1897, et tirage 
à part, p. II, i5, 21. Ce travail, aussi substantiel que documenté, est un des meil- 
leurs qui aient été publiés sur l'art antique de notre région» 



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P L. IV 




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Pbototjrp- E. Lacour • Marseille 




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P L. VIII 




Pbototyp. E. LBOOor • HarsAllle 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 2O7 

d'une fontaine, à laquelle se rapporte probablement le morceau 
orné de suites de coquilles cité à Tarticlc précédent. C*était un 
motif de décoration usité pour des édicules destinés à des débits 
d'eau (i). Un débris de caniveau, creusé dans un bloc de marbre 
de 22 centimètres carrés, trouvé au même endroit, devait écouler 
Teau de la fontaine. Il en est resté, paraît-il, en terre, une plus 
grande longueur engagée sous le trottoir de la rue. - 

8. — Restes de statues et de bas-reliefs. 

En outre de la tête et de la portion d'une autre statue repro- 
duites sur la planche VIII, il a été trouvé dans les fouilles 
quelques grands morceaux de draperies et d'autres plus petits de 
membres nus. Leur forme trop imprécise ne permet aucune 
tentative sûre d'identification. 

Cependant, un assez grand éclat de marbre identique à celui de 
la tête pourrait avoir fait partie d'une jambe et d'un genou. 
Quant à la tête, tout ce qu'on en peut dire c'est qu'elle apparte- 
nait à une statue plus grande que nature et qui devait être d'un 
très bel effet. Bien qu'un connaisseur ait cru y retrouver les traits 
féminisés de Néron, je ne puis y voir qu'une vraie figure de 
femme. La douceur de l'expression, la plénitude et la molle flexion 
du bas du visage doucement arrondi, la courbure des joues, les 
cheveux follets des tempes dont il reste l'extrémité d'une boucle 
près de la pommette gauche et un arrachement en dessous de 
l'oreille, la gracieuse torsion du cou et ses proportions allongées, 
tout concourt à donner l'impression bien nette de la beauté fémi- 
nine. 

Si dans l'état de mutilation du sommet de la tête, l'encolure 
paraît d'abord un peu forte (ce qui était en effet le cas de Néron), 
cette illusion disparaît bien vite dès qu'on rétablit la coiffure par 
la pensée ou mieux encore par un dessin découpé d'après 
d'autres têtes antiques et appliqué sur la phototypie. 

Il est intéressant de rapprocher la tête ainsi complétée d'une 
autre trouvée au Théâtre antique d'Orange. Artaud (2) qui lavait 
en sa possession, la donna au musée de Lyon, dont il fut le 



(i) Gagnât et Bœswilwald, Timgad, Thermes. 

(2) Artaud a laissé plusieurs ouvrages, notamment sur les mosaïques du musée 
de Lyon. Il vint finir sa vie â Orange, où il voulait organiser un musée local sous 
un portique circulaire qui aurait suivi la courbe de la route autour de TArc de 
triomphe. Il fut un des signalés bienfaiteurs du Musée-Calvet d'Avignon. 



208 MÉMOIRES 

créateur et le premier conservateur au commencement du XIX* 
siècle. Caristie Ta reproduite (i) sous le nom de tôte de Livie 
qu'Artaud lui avait donné. 

En donnant ces indications, je n'ai pas la moindre pensée de 
tenter une attribution quelconque, mais il est très utile de 
comparer le plus possible les restes d'antiquité soit avec ceux du 
même pays, soit avec tous les autres que les moyens de repro- 
duction, si heureusement répandus, mettent aujourd'hui à la 
portée des chercheurs. 

Il n'y a pas de meilleur moyen d'étudier le mouvement provin- 
cial des arts dans l'antiquité, et d'arriver même à des précisions 
inespérées sur l'âge d'un monument ou la provenance des types 
qui ont servi de modèle aux architectes et aux décorateurs. 

A ce point de vue, il est assez piquant d'indiquer que la portion 
de statue assise, trouvée dans les fouilles d'Orange, ressemble 
presque entièrement à un tronçon de statue pareillement assise, 
trouvé dans les ruines du Théâtre antique de Dougga (Tunisie) 
et pareillement privé au même endroit de la partie supérieure 
qui, dans les deux cas, était peut-être rapportée (2). 

Les artistes provinciaux à l'époque romaine se déplaçaient 
comme de nos jours, et ils avaient à leur disposition des recueils 
de modèles plus ou moins célèbres. Il ne faut pas plus s'étonner 
de trouver à deux extrémités de Tempire romain des productions 
artistiques similaires, que de trouver maintenant dans quelque 
ville d'Amérique une réduction de l'Opéra de Paris. 

Toutefois, à côté de ces rencontres de ressemblances qui pour- 
raient faire croire à trop d'uniformité dans les manifestations 
d'art antique, il est d'un très grand intérêt de noter avec soin, 
dans chaque pays, les diflférences d'interprétation, les partis pris 
et les créations dus à des influences locales très variables de 
culture, de prospérité, de mœurs, de caractère ou de traditions 
antérieures. 

Ces influences se révèlent parfois dans les plus petites comme 
dans les plus grandes choses, et aussi bien dans la manière 
d'interpréter avec excès ou sobriété un simple profil de moulure, 
que dans la façon de compliquer ou de simplifier l'ornementation 
des plus grands édifices. 

A ce point de vue, on aurait pu pousser plus loin les déductions 



(1) Op. cit., pi. XL. 

(2) D» Carton, Le Théâtre romain de Dougga, pi. VUl. 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE 209 

tirées des spécimens extraits des fouilles d'Orange, en tâchant 
de suivre l'exemple donné récemment dans ces Mémoires, avec 
tant d'autorité et de profit par M. Gabriel Bourges, dans sa belle 
restitution du monument triomphal de Cavaillon(i). Mais c'eût été 
abuser prématurément de la trop bienveillante hospitalité que 
l'Académie a bien voulu accordera ce travail. L'occasion pourra 
se retrouver bien plus utilement, si de nouvelles fouilles augmen- 
tent le nombre et l'importance des pièces de comparaison. 

9. — Fragments d'inscriptions. 

Deux fragments d'inscriptions différentes ont été sortis des 
fouilles de la rue Vieille-Fusterie. Le premier ne se compose 
malheureusement que de deux lettres entière» et des extrémités 
de deux autres. 



.EG 



La grandeur des lettres et leur très belle forme indiquent une 
inscription dédicatoire, où il était question probablement d'un 
légat. 

C'est tout ce qu'on peut conjecturer, en souhaitant que des 
découvertes ultérieures complètent ce débris et nous révèlent la 
nature de l'édifice auquel ce légat s'était intéressé. 



La seconde trouvaille épigraphique se compose d'un très 
curieux fragment d'une inscription des plus rares et des plus 
importantes, dont on a pu recueillir et ajuster dix morceaux. 

Le début et la fin manquent II n'est pas possible de conjec- 
turer rétendue totale de l'inscription. Mais les quinze lignes de 
notre fragment suffisent pour nous renseigner sur son but et sa 
portée. C'est le procès-verbal d'une concession ou adjudication 
publique de terrains domaniaux, faite à Orange il y a dix-huit 
siècles, et qui dut être ajouté au Parcellaire ou cadastre de la 
colonie, gardé sur marbre à perpétuité, pour servir de base aux 
droits des possesseurs et aux perceptions du fisc. 

En voici la reproduction : 

(I) Mémoires de CÂcadémiedc Vauclust, année 1897» P* i99* 



2ÎO MEMOIRES 

M ANC • C • N AEVI VS ' R VSTIC VS 

IN PERPET-EIVS REI FIDE 

I VSSOR • C • VESIDIVS • QU A 

DRATVS AD K 

MERISIIIINFRONTEPXXXIV-XLXIXS 

SET MERISTÏÎT-IN FRONT 

P-XXXV ÎN ANNSINGXI 
M ANC • C • N AEVIVS • RVSTIC VS 

IN • PERPET • EIVS ' REI • FIDE 

IVSSOR C VESIDIVS QVADRA 

TVS AD K 
MERISV-IN FRONTE P LVS -XC 

ET-MERISVÎADLVDVM 

Hauteur de la plaque . . . o"45 

Largeur o"52 

Épaisseur o"027 

Hauteur des lettres o'oi? 

Lettres d'assez bonne forme. Barres transversales des T. L. E. peu prononcées. K 
formés d'une haste et d'un appendice semilunaire peu développé. Ponctuation 
régulière. 

A remarquer la disposition graphique, qui fait ressortir sur les marges, à droite et 
À gauche, la désignation des parcelles, du concessionnaire et du prix, afin de faci- 
liter les recherches. 

Lecture et traduction : 



Manc{eps) C{aius) Naevius Rusticus 

in perpet(uufn) ejus rei Jidc- 
Jussor C(aius) Vesidius Qua- 
dratus Ad K(ardinem) ? 

Meris ÎÛ in fronte p(edeS) XXXIV(denarii) LXIX S{emis) 
s{emel) ? et meris iJîl infront(e) 
p(edes) XXXV in ann(os) sing:{ulos) XL 

Afanc{eps) C{aius) Naevius Rusticus 
in perpet{uum) ejus reifide- 
Jussor C(aius) Vesidius Quadra^ 
tus. Ad K (ardinem) 7 

MerisTl in fronte p(edes) LV S[emis) (denarii) C... 
et meris vl ad ludum 



Adjudicataire (ou concessionnaire) Caius Naevius Rusticus 

à perpétuité; de ce débiteur (ou de cet engagement) caution 

Caius Vesidius Quadratus. 

Le long de la rue Centrale (Nord-Sud) (?) 
Parcelle IIl, en façade, pieds : trente-quatre ; 

deniers : soixante-neuf et demi une fois payés (?) ; 

et parcelle IV, en façade, pieds : trente-cinq ; 

chaque année onze (deniers?). 



DE l'académie Dé VAUCLUSE 211 

Adjudicataire (ou coDcessionnaire) Caius Naevius Rusticus 

à perpétuité ; de ce débiteur (ou de cet engagement) caution 

Caius Vesidius Quadratus. 

Le long de la rue Centrale. (?) 
Parcelle V, en façade, pieds : cinquante-cinq et demi, 

deniers: cent 

et parcelle VI, le long du ludus. 



En tête, dans la partie qui manque, devait figurer un exposé 
qui nous eût renseignés sur le sens complet du texte, la nature 
de l'opération et la situation précise des parcelles. Notre 
fragment contient seulement la fin du premier lot, le deuxième 
lot en entier et le commencement du troisième. 

Chaque lot comprend deux parcelles désignées par leur numéro 
d'ordre et par leur dimension en façade. La profondeur n'est pas 
indiquée, contrairement à l'usage constant. On peut supposer 
qu'elle était identique pour chaque parcelle, et qu'elle figurait 
une fois pour toutes dans le début de l'inscription qui nous 
manque. Il est probable que cette profondeur n'était pas en 
disproportion trop grande avec les largeurs qui varient de 34 à 
^5 pieds, soit environ de 12 a 18 mètres. De si faibles surfaces 
ne pouvaient être que des terrains à bâtir ou des emplacements 
commerciaux. 

Après l'indication des parcelles viennent, dans chaque lot, le 
prix de redevance, le nom du concessionnaire et celui de sa 
caution. 

D'après le contexte du deuxième lot, il semble que le prix pou- 
vait consister en une somme une fois (?) payée ou en rede- 
vances annuelles. 

11 reste à expliquer pourquoi j'ai cru pouvoir remplir l'abré- 
viation AD'K- par ad Kardinem, le lonfr du Cardo ou rue Cen- 
trale du nord au sud. 

Tout d'abord, il faut se demander si la formule AD-K* ter- 
mine ou commence un lotissement. Le doute vient de ce que 
cette formule figure sur la même ligne que la fin des lotissements ; 
elle semble donc les clôturer. Mais, d'autre part, il y a entre 
la fin des lotissements et la formule AD-K- un espace tellement 
marqué et si constamment reproduit, qu'il semble bien que cette 
mention est détachée pour faire corps avec le lotissement sui- 
vant et lui servir en quelque sorte de titre initial. 



2 1 2 MEMOIRES 

Dans la première hypothèse, la formule AD- K* finissant un 
lotissement ne saurait se remplir par Ad Kalendas (Aux 
calendes) ; une pareille indication de date serait trop vague. On 
pourrait proposer avec plus de vraisemblance Ad Kalendarium 
(au registre public) ; car il existait dans les municipes des 
registres tenus par des fonctionnaires appelés cnratores ou 
quaestores kalendarii, La formule AD- K- équivaudrait ainsi à la 
mention d'enregistrement qui termine aujourd'hui nos contrats. 

Je ne pense pas qu'il faille voir dans notre sigle K une nota- 
tion numérale. J'ai préféré lire AD- K- comme commencement 
des lotissements et interpréter par AD* KARDINEM, Sur la rue 
Centrale nord-sud. 

En voici les raisons : 

r L'inscription a de la sorte un sens plus complet. Cette 
limite du Cardo donnant le confront de façade des parcelles 
et pouvant servir à déterminer la profondeur, aurait désigné les 
emplacements d'une façon précise. 

2" Les derniers mots lisibles sur notre fragment AD-LVDVM, 
le long du Ludus, qui sont incontestablement l'indication d'un 
confront, permettent de voir dans AD- K- l'abréviation courante 
d'une indication similaire, le long du Cardo. 

3" Le fragment du Parcellaire d'Orange, vendu par Tantiquaire 
Charasse et maintenant au musée de Saint-Germain, porte le 
sigle K, qui a été rempli par Cardo dans le savant commen- 
taire de MM. Mommsen et Hirschfeld (i). 

On pourrait cependant penser à une autre interprétation, en 
remplissant AD- K* par AD- KAPVT. C'eût été une formule de 
style rappelant, à la fin de chaque lotissement, les conditions 
générales énoncées dans l'en-tête d'une sorte du cahier des 
charges : AD- KAPVT, c'est-à-dire : le tout en conformité des 
clauses stipulées dans l'en-téte. 

J'ofi're cette variante d'interprétation qui n'est peut-être pas 
meilleure que l'autre. 

De même pour l'abréviation S du commencement de la 6' ligne; 
j'ai rempli par SEMEL, qui me paraissait indiquer une redevance 
une fois payée, en opposition à la ligne suivante où la redevance 
est marquée IN-ANN'SING-, qu'il me semble difficile de traduire 

(i) Corpus inscriptionum latinarum, t. XII, n* 1'J44. — AUmer, Revue èpigraphique, 
1892, p. 14a. 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE 2l5 

autrement que par in annos singulos : Chaque année. Je recon- 
nais que cette interprétation S = Semel est assez insolite et n'a 
pas de justification. En adoptant une interprétation plus autorisée 
S =■ Simul, c'est-à-dire la parcelle III et ensemble la parcelle IIII, 
que deviendrait la mention in singulos annos, chaque année f 
Faudrait-il admettre qu'elle s'applique communément à la 
redevance de la parcelle III, comme à celle de la parcelle IIII ? 
Mais alors, comment concevoir que de ces deux parcelles voi- 
sines et égales, puisqu'elles ne diffèrent seulement que d'un 
pied en façade, la parcelle III, qui a précisément un pied de plus, 
ne paiera annuellement que ii deniers, tandis que la parcelle IIII 
en paiera 69 et demi? 

Il est vrai qu'avant le chiffre XI qui termine notre septième 
ligne ne se trouve pas -X, signe du denier. 

Faut-il simplement considérer ce signe comme sous-entendu, 
ou son absence est-elle voulue, et faut-il chercher de ce côté la 
clef de l'énigme ? Il esta souhaiter, pour la résoudre sûrement, 
qu'une interprétation plut autorisée soit donnée, ou que de 
nouvelles fouilles puissent apporter à notre inscription un 
complément qui contiendra des indications résolutoires. 

Quoi qu'il en soit de ces interprétations qui restent conjec- 
turales, et que je serais heureux de voir discuter et rectifier, 
notre fragment faisait certainement partie d'un affichage perma- 
nent sous les portiques du forum, à la suite de la Forma 
coloniae, ou cadastre général des attributions de propriétés aux 
colons d'Orange. Il devait y avoir, pour ce cadastre sur marbre, 
une sorte de supplément ajouté à la rédaction primitive, à cha- 
que cession nouvelle du domaine public. 

Peut-être s'agissait-il, dans notre cas, d'une adjudication de 
hors-ligne à la suite de la construction de quelque monument 
public, théâtre, cirque, ou de quelque remaniement de quartier, 
de même que la municipalité d'Orange vient de revendre, il y a 
quelques mois, des terrains à bâtir après le percement de la 
nouvelle entrée en ville, appelée précisément rue Centrale. 

Tne particularité intéressante nous est révélée par la fin de 
notre fragment qui donne pour confront à la 6* parcelle un 
luJus. Ce terme générique signifie école ou lieu d'exercice, dont 
la nature spéciale est ordinairement précisée, dans les textes, par 
un qualificatif (i). 

|i;Daremberg et Saglio, Dictionnaire des antiquités, au xx\o\ Ludus. 



14 MÉMOIRES 

On aurait désiré trouver à la ligne suivante de notre fragment 
un adjectif qui nous fixât mieux sur ce ludtis ; mais cette ligne 
est juste sur la cassure du marbre, où on ne voit que des pointes 
de lettres d*ailleurs indécises et qui ne paraissent pas se rap- 
porter sûrement à un qualificatif du ludus. 

S*agissait-il d'une école de grammaire? On pourrait l'admettre; 
mais, il faut observer que l'instruction publique chez les 
Romains ne ressemblait pas à l'instruction officielle de nos 
jours. Le maître d'école n'était point un fonctionnaire, mais un 
entrepreneur qui, à ses risques et périls, ouvrait des classes. De 
pareils établissements n'avaient peut-être pas une fixité suffi- 
sante pour en graver le nom comme confront stable dans une 
inscription à durée indéfinie. 

Il ne serait peut-être pas trop téméraire de penser à un Itidus 
gladiatorius, en rappelant l'existence à Orange de ces Arènes, dont 
Gasparin et Caristie ont vu et signalé les substructions dans 
le quartier suburbain qui porte encore le nom de Quartier des 
Arènes (i). Non loin de là, près du cimetière actuel, ont été trou- 
vées plusieurs épitaphes de gladiateurs, dont deux de mirmil- 
lons furent achetées à l'antiquaire orangeois Néry, par le 
Musée Calvet d'Avignon, en i885 12). Il aurait donc pu y avoir, 
dans l'antiquité, à Orange, une troupe et une école de gladia- 
teurs, que peut-être notre inscription rappellerait. 

Puisque nous sommes dans les hypothèses, en voici encore 
une pour finir : 

Il y a plusieurs années, lors de la découverte de divers 
fragments antiques, presque au même endroit, dans la cave de 
la maison Marin, j'avais conclu à la découverte d'un monu- 
ment important, mais dont rien ne pouvait encore indiquer la 
nature. Notre inscription circonscrit le champ des conjectures et 
peut faire penser à une basilique judiciaire ou même au siège de 
la Curie, c'est-à-dire à l'Hôtel-de-ville de l'époque romaine. C'est 
sur les murs de pareils monuments, généralement voisins et 
parfois même mitoyens sous les portiques du forum (3), 
qu'étaient gravés sur bronze ou sur marbre les actes publics, 
dont la consultation permanente était utile aux habitants de 
la cité. 

(1) Gasparin, Histoire d'Orange, p. lao. — Caristie, Les Monuments antiques d'Orange, 
note de la planche i . 

(a) Catalogue ms. du Musée Calvet, n" i23, 124. — Allmer, op, cit., t. II, p. iiA. — 
Corpus, t. XII, n** 5836.'5837. — Espérandicu, op. cit.. p. 166. 

(3) Vitruve, V, 1.— H. Thédenat, Le Forum romain, p. 7. 



DE l'académie de VAUCLUSE 21 5 

Il reste à souhaiter que de nouvelles fouilles permettent de 
remplacer ces suppositions par une contribution plus certaine 
à la topographie de la ville antique d'Orange, dont les monu- 
ments encore debout attestent la merveilleuse prospérité, et 
font vivement regretter la perte de tant d'autres, qu'il serait si 
intéressant de pouvoir reconstituer. 

Il faut enfin grandement louer la municipalité actuelle d'Orange 
du soin qu'elle a pris de ne rien laisser distraire des trouvailles 
de la rue Vieille-Fusterie, et de les avoir fait déposer à part dans 
l'enceinte du Théâtre antique. 

F. DiGONNET. 




Nouvelles archéologiques 

INTÉRESSANT LE DÉPARTEMENT DE VAUCLUSE, 



Enlèvement de mosaïque romaine a Vaison, 
Fouilles de Venasque, 

Le sol de Vaison est si riche en monuments antiques qu'il ne 
se passerait pas de saison sans nouvelles découvertes, si Ton 
voulait bien se donner la peine de chercher. Il serait un champ 
d'exploration des plus fertiles, où la nouvelle Société française 
de fouilles archéologiques pourrait avec succès développer son 
activité. 

La construction de la ligne du chemin de fer d'Orange au Buis, 
qui va nécessiter des tranchées assez profondes dans les terrains 
où s'étageait le Vaison antique, mettra très certainement au 
jour des objets curieux. Nous souhaitons vivement qu'ils ne 
s'égarent pas et qu'ils soient recueillis, je n'ose pas dire dans 
l'Hôtel-de-ville de Vaison, caries collections qui s'y trouvaient 
jadis ont été presque entièrement dilapidées, mais dans le musée 
de la ville d'Avignon, chef-lieu du département. La Compagnie 
du P.-L.-M. semble y être heureusement disposée. Sur interven- 
tion des Ministères de l'instruction publique et des travaux 
publics, elle vient en effet de donner à cet établissement une 
mosaïque romaine, qui existait sur l'emplacement où elle a le 
projet d'édifier la future gare des marchandises de Vaison. 

Cette mosaïque, bien qu'inédite, n'est pas connue seulement 
d'aujourd'hui. Elle avait été trouvée, voilà bien des années, près 
d'une campagne qui est située hors de la ville moderne à une 
centaine de mètres au nord-est de Saint-Quenin ; la route sortant 
de Vaison pour aller à Villedieu sépare cette propriété de la 
chapelle de Saint-Quenin. Elle avait même été vendue il y a 
quelque temps, mais l'acquéreur qui s'était sans doute rendu 
un compte insuffisant des difficultés d'extraction et s'était 
leurré sur sa valeur vénale, n'avait pas donné suite au marché. 



2l8 MÉMOIRES 

La Compagnie du P.-L.-M. l'a sauvée de la destruction en 
acquérant le champ où elle se trouvait encore et en la faisant 
enlever soigneusement (mai 1904) par un spécialiste avignonais. 
Ajoutons qu'elle est à peu près intacte et que sa restauration 
sera des plus faciles. Klle n'était recouverte que d'une couche de 
terre épaisse de 65 centimètres environ. Ses dimensions sont 
d'ailleurs assez restreintes : elle mesure à peine deux mètres de 
côté, le béton sur lequel elle reposait faisant encore une saillie de 
20 centimètres. 

Ordonnée très simplement et avec un goût parfait, elle se com- 
pose de petits cubes (7 à 8 millimètres de côté) rouges, noirs, 
jaunes, dont l'arrangement sur un fond blanc prend diverses 
formes géométriques. Il est à remarquer que les cubes primiti- 
vement d'un blanc jaunâtre ont pris une teinte grisâtre assez 
accentuée, par suite de leur long séjour dans la terre. 

Au centre est un cercle de 48 centimètres de rayon encadré de 
noir (2 rangées de cubes) avec liseré jaune ou écoinçons rouges ; 
son ornementation intérieure consiste en triangles noirs équila- 
téraux (8 centimètres de côté) se rejoignant par les angles et 
entourant des losanges ou hexagones blancs, ces derniers chargés 
au milieu de quatre cubes noirs placés en croix. Ce grand cercle 
central s'inscrit dans un carré délimité par une bordure de 
5> centimètres, comprenant deux rangées de cubes noirs, trois de 
blancs et un dernier de noirs. L'encadrement se compose ensuite 
d'une torsade de 88 millimètres de largeur, formée de cinq ran- 
gées de cubes (noirs, rouges, jaunes, blancs et noirs) ; puis d'une 
seconde bordure semblable à la première ; d'une bande blanche 
de 104 millimètres, chargée d'une suite de triangles noirs posés 
les uns au-dessus des autres; d'une troisième bordure de 65 milli- 
mètres, présentant deux rangs de cubes noirs, trois de blancs et 
trois de noirs; enfin, tout à fait sur le bord, d'une dernière bande 
uniquement blanche de 64 millimètres. Le tout est donc d'une 
régularité remarquable. 

Dans les angles ménagés par l'inscription de la circonférence 
dans le carré, le mosaïste a dessiné, avec les quatre couleurs dont 
il avait la disposition, des oiseaux de i52 millimètres de long, 
dont deux semblent becqueter dqs cerises. 

L'arrivée de ce monument au Musée Calvet complète donc 
d'une façon intéressante la précieuse collection de souvenirs 
antiques du vieux Vaison qui y est conser\'ée. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 2I9 

A Venasque, M. le curé Sautel a entrepris, Tautomne dernier, 
avec le bienveillant concours de la Société française d'archéologie, 
des fouilles qui ont été couronnées de quelque succès. C'est sur 
le terrain qui, immédiatement à Test, avoisine le pont de la route 
de Carpentras à Murs, en face Notre-Dame de Vie et le long du 
chemin conduisant à cet ancien couvent, que des tranchées ont été 
creusées. M, Tabbé Sautel pensait retrouver auprès du pont les 
fondations de l'ancienne chapelle de Saint-Babylas, dont la dispa- 
rition remonte au XVI* siècle ; mais s'il n'a pas réussi à les 
dégager, il est arrivé par contre à découvrir des restes de 
constructions antiques à grand appareil, des débris de tuiles et 
de marbres, une curieuse statuette de dieu lare en bronze et une 
petite grenouille de même métal. Ce n'était d'ailleurs pas la pre- 
mière fois que de pareils souvenirs de l'antiquité étaient exhumés 
de ce sol et des environs : une autre statuette notamment avait 
été trouvée presque au même endroit ; des masses de plomb 
fondu dans un incendie y avaient été signalées, sans parler des 
inscriptions et autres monuments, qui fournissaient la preuve que 
l'emplacement de Notre-Dame de Vie avait été habité par les 
Romains ou Gallo-Romains. 

Diverses circonstances ont empêché la continuation des fouilles ; 
celles-ci vont être reprises par le propriétaire du terrain, M. de 
Cabissole. Quand elles seront achevées, je dirai ici quels auront 
été leurs résultats et je donnerai des détails plus complets sur 
les découvertes déjà faites par M. l'abbé Sautel. J'ai voulu tout 
simplement aujourd'hui attirer l'attention sur elles et prendre 
date. 

L.-H. Labande. 



Séances de TAcadémie. 



PROCÈS -VERBAUX. 



Séance du 5 mai 1904. — Présidence de M. de Vissac, président. 

Présents : MM. Labande, secrétaire général ; D' Alphant, D' Arnaud de Fabre, 
abbé Aurouze, V. Bonnet, Blanc, Bayol, Bourges. Duprat, Genin, D' Larché, 
Limasset, Mouzin, Naquet. D' Penne, D' Réguis, capitaine Reboulet et Didiée. 

Sont présentés pour faire partie de r Académie : 
MM. de Beaulieu, notaire à Avignon, par MM. de Vissac, de Terris et abbé Requin ; 
Antiq, notaire à Avignon, par MM. de Vissac, Labande et de Terris ; 
Antoine Salles, avocat à la Cour d*appel, président de la Société littéraire, 
historique et archéologique de Lyon, par MM. Faure, D' Florence et D' 
Sabatier. 

M. le Président transmet aux membres de l'Académie de Vaucluse l'invitation que 
leur fait le Capoulié du félibrige, d'assister â la fête qui sera donnée par le consis- 
toire félibréen, le a3 mai 1904 (lundi de la Pentecôte), au château de Fontsegune 
(Gadagnc). à l'occasion du cinquantenaire de la fondation du félibrige. — M. le 
Président ajoute que, par réciprocité, l'Académie avait invité les féllbres aux fêtes 
qui auront lieu en juillet prochain, en commémoration de la naissance de Pétrarque 
dont on célébrera le sixième centenaire. 

M. Labande communique une demande d'échange de bulletin formulée par ta 
Société des naturalistes de l'Ain. Il fait part à l'Académie des remerciements du 
D' Augros, récemment admis parmi les membres. Il donne quelques renseigne- 
ments sur le prochain Congrès archéologique international d'Athènes et rappelle que 
les adhésions peuvent être envoyées jusqu'à fin décembre 1904. Il signale que le 
Congrès de la Société française d'archéologie aura lieu au Puy et que les inscriptions 
ne seront plus reçues après le 31 mai. Le programme comporte plusieurs excur- 
sions, notamment à la Chaise-Dieu. 

Enfin, M. Labande rend compte des fêtes scientifiques organisées à Paris par la 
Société des Antiquaires de France qui célébrait son centenaire. Les réunions, tenues 
au Louvre dans le Salon carré, ont été particulièrement brillantes et M. Labande 
qui y représentait l'Académie de Vaucluse, apporte les remerciements que le prési- 
dent de la Société adresse à notre compagnie. Il dépose sur le bureau un superbe 
volume d'études et mémoires publiés à cette occasion par les Antiquaires de France. 
Une heureuse digression l'amène à parler de l'exposition des primitifs et des tableaux 
de l'école provençale qui y faisaient fort bonne figure, notamment la Pietà de 
l'hospice de Villeneave-lez-Avignon et le Couronnement de la Vierge dû au pinceau 
d'Enguerrand Charenton (i453). 

M. Mouzin, au nom de M. Mordon, président honoraire de l'Académie, après avoir 
rappelé la mort tragique de l'infortuné Abel Jeandet, lauréat de l'Académie de Vau- 



222 MEMOIRES 

cluse, assassiné alors qu'il était résident au Sénégal, fait connaître que le gouverneur 
de cette colonie vient, par un décret dont il donne lecture, d'attribuer à la place 
Escale-de-Podor, à Saint-Louis, le nom de place Abel-Jeandet. 

L'Académie tient â honneur de s'associer à l'hommage rendu à ce héros et M. le 
Président prie M. Mouzin de transmettre à f\. Mordon les remerciements de 
l'Académie; mention spéciale de ce décret sera insérée au procès-verbal de la 
séance. 

La parole est donnée à M. Gustave Naquet, ancien président du tribunal de com- 
merce d'Avignon, qui explique et résume le rapport présenté par lui à la Chambre 
de commerce, en vue d'étudier les mesures propres à défendre et A développer le 
commerce extérieur de la France. Il rappelle et établit la situation, avantageuse à ce 
point de vue, de notre patrie avant les désastres de 1870; il analyse les conséquences 
funestes de cette guerre et ses terribles contrecoups; il montre, devant la France 
amputée de ses provinces, une Allemagne puissamment organisée, orgueilleuse de 
sa victoire, confiante dans sa force envahissante, bouleversant les marchés et bous- 
culant tous ses rivaux: il signale la poussée brutale d'autres nations, jeunes ou 
vieilles, âpres au gain, dures à la lutte : États-Unis, Italie, Japon, etc.; il constate 
avec tristesse que, malgré tous nos efforts et nos sacrifices, les résultats de notre 
action commerciale sont dérisoires et que notre déchéance à ce point de vue tend à 
s'accentuer. Il en tire la conclusion qu'il est urgent de réformer nos mœurs, nos 
coutumes, nos méthodes commerciales et qu'il faut môme, si c'est nécessaire, refondre 
notre outillage national. 

Examinant les causes de nos insuccès, M. Naquet les voit : dans notre apathie 
invétérée pour les voyages ; dans notre insuffisante connaissance des langues étran- 
gères; dans le mode de recrutement de nos représentants à l'étranger, trop peu 
soucieux des intérêts commerciaux; dans les divergences des lois qui régissent le 
monde commercial ; dans l'application de tarifs de transport qui font obstacle à 
l'activité de nos nationaux, etc. A chacun de ces maux, M. Naquet oppose un remède 
et les solutions judicieuses qu'il préconise semblent de nature â aider la France 
commerciale à sortir du marasme insupportable qui l'anémie. 

M. le Président exprime à M. Naquet les vifs remerciements de l'Académie et fait 
des voeux pour que des réformes heureuses viennent rendre à notre patrie le rang 
qu'elle doit occuper dans le monde des affaires commerciales. 

M. Labande donne lecture de la première partie d'un mémoire de M. Sauve sur 
l'archéologie et l'histoire de la région aptésienne. Il accompagne cette lecture de 
quelques explications sur la pénurie incompréhensible des répertoires archéologi- 
ques dans nos contrées méridionales, indique que le département de Vaucluse est 
pour ainsi dire encore inexploré et signale à la reconnaissance de l'Académie les 
chercheurs qui, comme M. Sauve, veulent bien consacrer leur érudition à combler 
cette lacune. 

M. le Président ajoute que cette première partie de l'étude de M. Sauve est pleine 
de promesses et adresse à notre collègue les remerciements de l'Académie. 

Cette étude devant paraître au Bulletin n'est pas analysée dans le présent procès- 
verbal. 

Les membres présentés au début de la séance sont admis. 



Séance du 2 juin 1904. — Présidence de M. de Vissac, président. 

Étaient présents : Miss Owen, MM. de Vissac, Labande, Alphant, Joleaud, Larché, 
Réguis, Fichaux, Poupart, Bourges, Genin, de Terris, abbé Aurouze, Bayol, Bonne- 
caze, Chobaut, Raynolt, Legras, abbé Durand, Châtelet. 

M. le Président annonce les présentations suivantes : 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE 223 

MM. Lestang et Blache, professeurs à l'École d'agriculture d'Avignon, présentés par 
MM. Réguis, Blanc et Châtelet ; 
l'abbé Benoît Roux, curé de Velleron. par MM. les abbés Trouillet et Aurouze 

et M. Bonnecaze ; 
Ramon Capdevilla aîné, industriel à Avignon, par MM. Dominique Capde- 
villa, Chobaut et Labande. 

Lecture est donnée d'une lettre de remerciements de M. Antoine Salles, élu membre 
de l'Académie dans la précédente séance. 

M. le Secrétaire général dit qu'il y a lieu de s'occuper du renouvellement du bail 
de la salle de réunion du Bureau. Cette question est renvoyée au Bureau. 

M. le Président annonce que le programme des fêtes académiques du 6' centenaire 
de la naissance de Pétrarque est arrêté en principe. Il comprendra ; le samedi, 
i6 juillet, une excursion à Vaucluse, avec banquet et séance des jeux floraux. Le 
dimanche, réception des délégués à l'Hôtel-de-ville d'Avignon, séance solennelle de 
l'Académie et distribution des récompenses aux lauréats des concours. Le soir, 
banquet ofifert aux personnages officiels par l'Académie. 

M. le Président ajoute que le Bureau ayant décidé de remettre aux lauréats du 
concours un diplôme, il s'est adressé à un graveur de Paris, qui réclame pour la 
confection et le tirage à 5oo exemplaires du projet adopté la somme de 370 fr. Le 
Bureau n'a pas voulu engager nos finances sans consulter l'Académie — M. Bourges 
demande que l'exécution de ce diplôme soit confié à un artiste vauclusien et propose 
d'établir un concours.— M. le Président fait remarquer qu'il esta craindre que, dans 
ces conditions, il ne soit pas gravé pour les fêtes.— Après un échange d'observations 
entre quelques membres, il est décidé que la question sera renvoyée à l'étude du 
Bureau. 

M. le D' Chobaut rend compte ensuite de son excursion en Camargue au bois des 
Rièges. C'est une région curieuse au point de vue botanique, où poussent quelques 
essences intéressantes : lentisques, tamaris et genévriers de Phéaicie qui atteignent 
dans cette station jusqu'à 4 à 5 mètres de hauteur. A signaler encore le phénomène 
du mirage qu'a pu observer notre collègue en se rendant au bois. Dans cet îlot de 
végétation vivent quelques espèces rares de coléoptères, dont notre collègue donne 
la description. 

M. Labande rappelle que l'Académie doit se rendre le dimanche 6 juin en excursion 
à l'abbaye de Montmajour. Il annonce que ce monument historique, qui appartient 
à la ville d'Arles, a été gracieusement mis à notre disposition par la municipalité 
arlésienne et que la Société du Vieil-Arles se joindra à nous pour la visite de l'abbaye. 
— Il donne en outre quelques renseignements sur la date de* la construction de la 
chapelle Saint-Gabriel, que l'on verra tout d'abord. En comparant son architecture 
avec celle des églises de Vaison, de Saint-Trophime d'Arles, de Saint-Honorat des 
Aliscamps, il conclut que cette date ne peut pas remonter au-delà du XII* siècle et 
que c'est à tort que M. Révoil l'avait datée de l'époque carolingienne, sur la foi d'un 
texte (charte de Charles le Chauve) reconnu pour être un faux fabriqué par l'église 
de Vienne, désirant enlever à celle d'Arles sa suprématie. 

Abordant ensuite l'étude archéologique de Montmajour, il en détaille les princi- 
pales parties, la chapelle de Saint-Pierre, l'édicule de Sainte-Croix, l'église dont 
l'acte de consécration est de ii83 ; il signale l'intérêt que présente la crypte, dont le , 
plan très savant et le très bel appareil ne permettent pas de faire remonter la 
construction au-delà du milieu du XII* siècle. Il rappelle que Montmajour a souffert 
des guerres du XIV- siècle et que c'est de i368 que date la construction de la tour 
gothique. 

Avant de lever la séance, MM. Lestang. Blache, Ramon Capdevilla et l'abbé Roux 
sont élus membres de l'Académie. 

Le Stcréiaire, Le Président, 

"Ce Chatblbt. Baron M. de Vimac. 



224 MÉMOIRES 



Excursion de i/Académie de Vaucluse a Saint-Gabriel bt a Montmajour. 

Le dimanche 6 juin, un groupe de membres de l'Académie de Vaucluse, auquel 
s'étaient jointes quelques personnes amies de nos vieux monuments, s'est rendu par 
voitures d'abord à Saint-Gabriel, puis â Montmajour. 

La petite chapelle de Saint-Gabriel sur le territoire de Tarascon et sur l'emplace- 
ment de l'antique Ernaginum a vivement intéressé les excursionnistes, qui on^ 
admiré ses heureuses proportions et la décoration si curieuse de sa façade. 

A Montmajour, M. A. Véran, président de la Société des Amis du Vieil-Arles, et 
plusieurs de ses collègues attendaient les membres de l'Académie de Vaucluse pour 
leur faire les honneurs de la vieille abbaye. M. Véran s'est fait leur guide autorisé 
et a donné de savantes explications qui ont été fort goûtées des auditeurs. La visite 
de Montmajour s'est faite dans l'ordre suivant : la chapelle de Saint-Pierre avec le 
confessionnal de Saint-Trophime, la chapelle de Sainte-Croix au milieu des tom- 
bes creusées dans la roche, l'abbaye elle-même avec son église inachevée et sa 
crypte, son cloître mi-roman mi-gothique, sa tour gothique, sa salle capitulaire, etc. 

Un déjeuner, préparé par les soins de M. Bessières, d'Arles, a été servi à midi 
dans la salle capitulaire elle-même. A la fin, M. Labande, secrétaire général de 
l'Académie, a remercié la Société des Amis du Vieil-Arles et spécialement son pré- 
sident, de leur cordiale réception . M. Véran a répondu en ces termes : 

Mesdames et Messieurs, 

c La Société des Amis du Vieil-Arles, heureuse de répondre à votre amical appel, 
s'est empressée de venir souhaiter la bienvenue à sa grande sœur et lui exprimer 
les sentiments confraternels qu'engendrent naturellement la conformité des études 
et la similitude du but qu'elles poursuivent l'une et l'autre. 

« Votre champ qui embrasse toute la vieille terre de Provence est plus vaste et votre 
moisson plus abondante. Les confins du vieux pays d'Arles limitent le nôtre, et 
notre programme s'attache surtout à défendre contre l'oubli, l'indifférence, les 
atteintes inconscientes ou la ruine, l'héritage de monuments et de souvenirs histo- 
riques que nos pères nous ont légué. 

« En cela, et comme vous, nous croyons faire oeuvre patriotique, car ainsi que cela 
a été dit, les petites patries font la grande patrie, et étudier son pays, c'est l'aimer et 
le servir. 

€ Le passé, a dit Victor Hugo, est une partie de nous-mêmes, la plus essentielle 
peut-être. Tout le flot qui nous porte, toute la sève qui nous vivifie nous vient du 
passé. Qu'est-ce qu'un arbre sans ses racines? Qu'est-ce qu'un fleuve sans sa source? 
Qu'est-ce qu'un peuple sans son passé ? 

t Pour évoquer ces souvenirs du passé, quel site peut être plus heureusement choisi 
que celui de Montmajour, cette colline privilégiée que la nature avait posée au 
milieu des eaux dans un mystérieux isolement, qu'elle avait parée de plantes aro- 
matiques et de fleurs embaumées, qui a servi de retraite aux ancêtres des temps 
. préhistoriques et gardé leurs tombeaux, d'asile aux premiers chrétiens et d'assise 
a une des plus puissantes abbayes du moyen âge, sanctuaire de piété et de science 
visité par des foules innombrables venues en pèlerinage des pays lointains, fait et 
agrandi par les libéralités du peuple, des princes et des comtes de Provence, dont 
plusieurs dorment sous les dalles de son cloître. 

€ Aujourd'hui, l'action du temps et celle des hommes ont profondément altéré l'an- 
tique physionomie de Montmajour, dévasté les splendides constructions abbatiales, 
dispersant les précieux trésors de sa bibliothèque et de ses archives. Vous venez 
néanmoins, pèlerins de la science visiter et interroger ses grandes ruines, dont û 
est permis de dire que les pierres elles-mêmes parleront. 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 227) 

« Nous vous ''remercions de nous avoir conviés à ce pèlerinage de souvenir... et 
aussi à ce banquet confraternel. 

€ D'après un document de nos archives, en Tannée 1476,1e roi René avait désiré de 
venir dîner à Montmajour avec la reine et de ne composer son repas champêtre que 
de poissons pochés tout exprès dans les eaux de Tîle. Textuellement : « Mandé que 
• voliet venir dinar à Montmagrour ambé la Reyneta et que hon fessa provision de 
< barquas et de fiUats per prendre peyssons. » 

f Nous remercions les organisateurs de ce banquet d'avoir bien voulu ne pas bor- 
ner le menu au produit aléatoire des pêcheries de Montmajour, qui n*est plus 
une île. 

c Mais nous vous remercions d'autre part, Mesdames, d'avoir bien voulu aujour- 
d'hui, par votre aimable présence, rappeler la visite de la Reyneta et sa gracieuse 
Cour. • 



L'après-midi a été consacré à des excursions aux environs de Montmajour. 
notamment aux grottes préhistoriques du Castelletet de la montagne de Cordes. 

Vers 5 heures, l'Académie de Vaucluse prenait congé de la Société des Amis du 
Vieil-Arles et reprenait la route d'Avignon. 



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Volumes et Fascicules 

REÇUS PAR L'ACADÉMIE 

Depuis la publication du dernier fascicule des Mémoires. 



l — Envois du Minlstèra de l'Instruction publique 
et des Beaux-Arts. 

I* Comité des travaux historiques et scientifiques. Congrès des Sociétés savantes 
de 1903 tenu à Bordeaux : section des sciences morales. — a' Documents relatifs au 
comté de Champagne et de Brie (1172-1361), publics par Auguste Longnon, t. II. — 
3" Comptes rendus du Congrès des Sociétés savantes de Paris et des départements, 
tenu à Bordeaux en i9r.3 : section des sciences. — 4" Bulletin archéologique du 
Comité des travaux historiques et scientifiques, 1903, i" livr. 

II. — Dons des auteurs. 

r M. Emile Bonnet, avocat à la Cour d'appel de Montpellier : Des Variations de 
va4eur de la monnaie melgorienne. — 2' M. L. Tiersonnier : Le nombre ou le mérite : 
lois constitutionnelles basées sur le mérite. — 3 iM. il. de Gérin-Ricard, membre 
titulaire de l'Académie : Sur la présence de matériaux et d'objets antiques dans les 
châteaux du moyen âge; — Monographies de communes, archéologie et histoire. 
Fuveau. — 4* M. Adolphe Conry : Suppression des armées permanentes ; — Révision 
de la constitution ; — Séparation des Églises d'avec l'État, suivi de Vox popuU, vox 
Dei: — Réformes à opérer dans les principaux Ministères; — Création d'une caisse 
nationale de retraite ; — Grand concours international de comptabilité : Paris, 1900. 
Rapport général. — 5» M. le marquis de Monclar, membre titulaire de l'Académie: 
La Maison do Pétrarque à Vaucluse. — 6" M. Alfred Picard, commissaire général de 
l'Exposition universelle de 1900: Rapport général administratif et technique de cette 
exposition, pièces annexes. — 7* M. E. l^ouchinot : L'Actualité archéologique au 
pays d'Arles: Arles, allées couvertes, colline de Gordes. - 8* M. Vayssiôres, membre 
titulaire de l'Académie : Résultats des campagnes scientifiques accomplies sur son 
yacht par Albert I*', prince souverain de Monaco, fasc. XXVI. Mollusques hétéro- 
podes provenant des campagnes des yachts Hirondelle et i rincesse- Alice. — 9* M. le 
comte Pinchia. d>:puté au parlement, sous-secrétaire d'Etat au ministère de 
l'Instruction publique d'Italie : Per Francesco Petrarca, dircours prononcé à l'ouver- 
ture des fêtes du centenaire à Arezzo en 1904. — lo* M. Charles Janet, membre 
correspondant de l'Académie : Observations sur les guêpes; — Anatomie du Gasler 
delà Myrmica rubra; — Observations sur les fourmis; — Sur le mécanisme du vol 
chez les insectes.— ii* M. Emile Perrier, président de la Société de statistique de 
Marseille : La mort d'un ambassadeur russe à Marseille (1779) ; — Les Marseillaises 
et le connétable de Bourbon ; — L'Hôtel et le château d'un financier aixois au XVII 
siècle ; — Les Bibliophiles et les collectionneurs provençaux anciens et modernes. 
Arrondissement de Marseille.— 12' M.Gabriele Fantoni : Sulla Originalità délie rime 
Petrarchesche. 



MEMOIRES DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 



III. — Envois des Sociétés correspondantes. 

Revue de Saintonge et d'Aunis, i«j04, fasc. 3 et 4. — Société languedocienne de 
géographie : Bulletin, 19^x4, 1" fasc. — Société d'études des Ilautes-Alpes : Bulletin, 
1904, '2* et 3' fasc— Société littéraire, historique et archéologique de Lyon : Bulletin, 
1904, i"" fasc. — Revue horticole de Marseille, 1904, avril, mai, juin. — Bulletin 
historique du diocèse de Lyon, n' 27. — Société des sciences naturelles de Saône- 
et-Loire : lUilletin, n** 3 à 6. — Ilistorische und antiquarischc Gesellschaft zu Basel : 
Basler Zcitschrift, III Bd, 2 IL — Société d'études provençales : Annales, 1904, n*" 3et4. 

— Société des Antiquaires de l:i Morinie : Bulletin historique, 1904, n" i. — Revue du 
département du Tarn, t. XXI, n- i à .'^. — Société archéologique de Tarn-et-Garonne : 
Bulletin, i. XXXI (190.'^). — Société Les Amis des sciences et arts de Rochechouart : 
Bulleiin, n"' .' à G. — La Diana : Bulletin, t. XIII, n' 8. - Anales del Museo nacional 
de Mexico. i'j04, t. I, n" 5. — Revue des langues romanes, t. VU (1904), n' 3. — 
Académie de Lille : Bulletin, 19)4, n* -2. — Revue d'Auvergne, 1904, n*' 2 et 3. — 
Société linnéenne de Lyon : Annales, année 1903. — Société archéologique du Midi 
de la France : bulletin, n" :<i. <'2. — Société des lettres, sciences et arts de la Corréze : 
Bulletin, i:<«4, i'« livr. — Société scientifique et littéraire d'Alais : Revue cévenole, 
[903. n' IV. — Société d'archéologie et de statistique de la Drôme: Bulletin, i5o* livr. 

— Société d'agriculture, industrie, sciences et arts du département de la Lozère : 
Bulletin, 1903, 4* fasc. — Annales de Saint-Louis-des-Français, t. VIU, 4* fasc. — 
Académie du Var : Bulletin, f<jo3. — Missouri botanical garden : Fifteenth annual 
report (K/A*). - - Revue savoisienne, i9.')4, 2* fasc. - Société agricole, scientifique et 
littéraire des Pyrénées-Orientales : Mémoires, année 1904. - Académie des belles- 
lettres, histoire et antiquités de la Suéde : Manadsblad. 1898-1899, 1901-1902. — 
Université d'Upsal : Results of the swedish zoological expcdion to Egypt and thc 
White Nile 1901, under the di'oction of L.-A. jiigcrskiold, part. i. 



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LETTRES INÉDITES 

DE ROVÈRE 

Membre du Conseil des Anciens, 
A SON FRÈRE 

EX-ÉVÊQUE CONSTITUTIONNEL DU DÉPARTEMENT DE VAUCLUSE. 
i** janvier 1796 — i5 août 1797. 

(Suite.) 



XXV. 

Au citoyen Rovère jeune à Bonnieux, 

Paris, le 8 messidor an 4 de la Republique (96 juin 1796). 

J'avois déjà appris, mon cher frère, que vous aviés fait une 
petite incursion dans le Gard, lorsque votre lettre du 3o prairial 
m'est parvenue. Des bons et loyaux citoyens de Tarascon ont été 
vous cherchera Beaucaire; ils me témoignent leur vif regret de 
ne vous avoir pas rencontré. 

Je suis charmé que vous ayés trouvé un moyen pour réaliser la 
lettre de change, que le gouvernement vous avait transmise pour 
le payement de votre place de consul. 

Il me parait que vous avés enfin touché les mandats, que 
j'avois comptés a Dervieux; il vaut mieux tard que jamais. Vous 
aurés vCi par mes précédentes que j'ai adressé vingt-huit mille 
livres de la même monnoiea Hurard /rére (i), pour l'acquisition 
de la terre des Chartreux. Notre ami Mathieu, que vous avés vu a 
Avignon, me marque que les soumissionnaires de cet effet en 
fairont la cession. Je vous prie de surveiller cette affaire et de 
leur donner un. léger bénéfice, si le cas y échoit. 

Les afiaires semblent prendre ici une teinte moins noire ; cepen- 
dant l'horizon est loin d'être dégagé des vapeurs sanguinolentes 

(1) C'est Simon Hurard, le ci-devant frère convers (voir lettre VU, note 9). Il décéda 
à Sorgues le 8 frimaire an VI. 



•i3o MEMOIRES 

dont il etoit chargé depuis une fameuse époque, je ne perds pas 
vos interests de vue : nous serons assassinés, ou les principes de 
justice, de liberté et de vrai républicanisme triompheront. Vous 
serés peut-être étonné de la nouvelle que je vais vous donner : on 
traite dans ce moment avec le pape, pour qu'il reconnaisse les 
evêques et les prêtres constitutionnels. Je crois que c'est le seul 
moyen de faire cesser dans la Republique le germe de dissen- 
sions religieuses toujours influentes sur le bonheur public (2). 

Je ne vous conseille rien : vous aviserés ert voire sagesse ce que 
vous croirés le meilleur ; Grégoire (3), qui vous aime beaucoup, 

(3) A la faveur de la loi du 3 nivôse an III (21 février i795), qui avait décrété la 
liberté des cultes, quelques évêques tels que Saurine, évoque des Landes, Royer, 
évoque de l'Ain, Desbois, évéque de la Somme, Primat, évoque du Nord, et Grégroire. 
évoque du Loir-et-Cher, formèrent le dessein d'opérer, avec le secours du pape et le 
consentement du grouvernement, la réconciliation entre les prêtres insermentés et le 
clergé constitutionnel, afin d'amener en France la pacification religieuse. Sous le 
nom d'évéques réunis, ils adressèrent dans ce but des encycliques et des lettres à 
toutes les églises et à tous les prêtres pour les exhorter â concourir à cette œuvre 
salutaire. Pendant ce temps, partout les églises se rouvraient pour l'exercice du culte. 
Sur les sollicitations des évoques réunis et surtout de Grégoire, qui était véritable- 
ment l'âme de cette rénovation religieuse, le Directoire ouvrit des négociations avec 
le pape, en vue de faire cesser le schisme. Sous le nom de Giuseppe Evangelisti, 
secrétaire de légation, l'abbé Salamon, internonce, prit une part active à ces négo- 
ciations. On était au milieu de l'année 1796 : c Le Directoire, dit l'internonce dans ses 
Mémoires, fit faire des ouvertures au pape par le marquis de! Campo, ambassadeur 
d'Espagne. Le cardinal Pusca, secrétaire d'État et nouveau ministre du pape, m'or- 
donna de m'aboucher avec del Campo et m'envoya, pour être mon second, un ecclé- 
siastique italien nommé Pierrachi. Nous eûmes des conférences avec le ministre des 
affaires étrangères [Charles Delacroix]. » Le Directoire faisait beaucoup de conces- 
sions pour obtenir du pape qu'il sanctionnât la constitution civile du clergé. La 
moitié des anciens évêques aurait été rappelée et rendue â leurs sièges, et la moitié 
des évoques constitutionnels aurait été conservée. En cas de vacances, le Direc- 
toire présenterait trois sujets et le pape choisirait l'un d'eux pour remplir le siège 
vacant. Telle était la base de ce concordat offert par le Directoire. Le paps, de son 
côté, en récompense du zèle que Grégoire avait montré pour la conclusion de lapaix^ 
promettait de lui concéder, ainsi qu'à Saurine, le chapeau de cardinal et reconnais- 
sait aussi la légitimité des évoques constitutionnels. Malheureusement, le Directoire 
exigeait des évêques et des prêtres un nouveau serment, et d'autre part refusait 
d'accorder au pape les légations de Bologne et de Ferrare. Pie VI ne voulut pas 
souscrire â l'obligation du serment et tint bon pour les légations. Nous aurons â 
revenir à propos des lettres suivantes sur cet épisode peu connu de l'histoire reli- 
gieuse du Directoire. 

(3) Grégoire (Baptiste-Henri, comte), né â Veho (Meurthe), le 4 décen bre 1750. mort 
â Paris le 26 mai i83i. était curé d'Embermesnil lorsqu'il fut nommé, le 27 mars 1789, 
député du clergé aux États-généraux. Il prêta le serment constitutionnel et fut élu 
évoque â la fois dans la Sarthe et dans le Loir-et-Cher (1790); il opta pour Blois. 
Membre de la Convention nationale, il n'eut pas à se prononcer dans le procès 
du roi, étant alors en mission dans le département du Mont-Blanc. Le 19 frimaire 
an IV, il devint membre de l'Institut. Nommé, le 23 vendémiaire de la même année, 
député au Conseil des Cinq-Cents, il siégea dans cette assemblée jusqu'en germinal 



bÊ l'académie de vaucluse 23 r 

me charge très souvent de le rappeler a vôtre souvenir ; il vous 
estime infiniment. 

Je ne peux pas venir a bout de joindre le jacobin Marchand ; je 
crois qu'il craint infiniment la liste des deux mille conspirateurs 
mentionnée a Tinterrogatoire de Babeuf. 

Je suis fâché que vous ne vous plaisiés pas a Bonnieux ; vous 
avés plusieurs maisons a votre disposition dans notre départe- 
ment ; tachés de passer la vie le plus agréablement, le plus paisi- 
blement que vous pourrés, en attendant que le gouvernement 
aye pris l'assiette qui convient aux directeurs d'une grande Repu- 
blique. Puget-Barbentane a été renvoyé de Marseille (41, Maçon 



an VI. Nous avons vu dans la note précédente la part prépondérante qu'il prit sous le 
Directoire à la résurrection de l'église constitutionnelle. Il sera de nouveau question 
de Grégoire dans les lettres suivantes. On trouvera d'autre part des détails tri^s com- 
plets sur son rôle à cette même époque dans A. Gazier, Études sur l'histoire religieuse 
de la Révolution Jrançaise (Paris, 1887) et dans les Mémoires inédits de l'inler nonce à 
Paris {Mgr de Salamon) pendant la Révolution, 1790-1801, par l'abbé Bridier (Paris, 
1890). 

(4) Puget (Hilarion-Paul-François-Bienvenu), marquis de Barbentane, né à Paris le 
7 mars 1754 et y décédé le 27 mars 1828. appartenait à la faniille noble des Puget- 
Barbentane, de Provence. Lorsque la Révolution éclata, il commandait le régiment 
d'Aanis, qui arbora le premier la cocarde tricolore. Dés ce moment, il eut, comme il 
le dit lui-même, c la fièvre révolutionnaire t, se lia avec Lafayette, pleura Mirabeau 
et fréquenta assidûment le club des Jacobins. Il fut élu suppléant de Paris à la 
Constituante et, le 6 octobre 179». envoyé dans le Midi comme maréchal de camp. Il 
se déclara pour les Marseillais, lorsque ceux-ci allèrent désarmer à Aix le régiment 
suisse d'Ernest. Traduit pour ce fait devant une cour martiale, il fut acquitté et conserva 
ainsi son commandement, à la grande satisfaction des patriotes marseillais, auprès 
desquels il était très en faveur. II contribua à l'organisation d'Avignon et du comté 
Venaissin après la réunion de ces États à la France et fut en récompense nommé 
lieulenant-géncral, le 7 septembre 1792. Il passa, en août 1793. â l'armée dts Pyré- 
nées-Orientales, où il se conduisit brillamment; il n'en fut pas moins destitué comme 
ci-devant noble et emprisonné sur l'ordre de Robespierre. La journée du 9 thermidor 
le sauva de l'échafaud. Au i3 vendémiaire, il marcha contre les sections de Paris et 
peu de temps après il fut employé dans la 8* division à Marseille, sur la sollicitation 
d'une députation de patriotes marseillais qui vinrent le demander expressément à 
Barras. Arrivée Marseille, pendant que Fréron y était en mission, Puget-Barbentane 
fut chargé par ce représentant d'aller faire exécuter ses arrêtés dans la 9' division 
militaire comprenant les départements du Gard, de la Lozère et de l'Ardèche et y 
combattre le royalisne. Il y resta deux mois, puis au départ de Fréron, il reçut 
l'ordre du ministre de retourner dans la 8* division à Marseille. Sur ces entrefaites. 
Bonaparte, général en chef de l'armée d'Italie, partagea la 8* division, comprise 
dans cette armée, en deux subdivisions : l'une comprenant le département du 
Var, dont il donna le commandement au général Mouret ; l'autre, embrassant Vau- 
cluse et les Bouches-du-Rhône, qui fut donnée à. Puget-Barbentane (2 germinal 
an IV|. Puget, dans son nouveau commandement, se prononça fortement en faveur 
des patriotes, se fit le correspondant de Poultier, l'ennemi de Rovère, et ainsi qu'il le 
dit lui-même, mit tout en œuvre # pour achever de comprimer les cunire-révolution- 
naire du ci-devant haut Comtat et relever le patriotisme > . Pendant ce temps. 



232 MKMOmES 

d'Avignon (5) ; les juges élus parle peuple sont rétablis a Carpen- 

Rovère le faisait attaquer dans le Gardien de la Constitution et autres journaux à. sa 
dévotion» comme étant partisan du duc d'Orléans et parvenait à le faire inscrire à ce 
titre sur les registres du Comité de sûreté générale. Le Directoire s'émut lui-même de 
ces accusations et, le 5 messidor an IV, prit un arrêté par lequel Pugei-Barbentane 
était relevé de ses fonctions de commandant de la 8' division militaire. Sur cet 
arrêté, le ministre de la guerre lui prescrivit de se rendre immédiatement au quar- 
tier-général de rarmée d'Italie, où le g néral en chef lui donnerait une autre desti- 
nation. Puget-Barbentane ne quitta définitivement la 8» division que dans les pre 
miers jours de thermidor. 

(5) Maçon (Pierre), chef de la 57' brigade, commandait la place d'Avignon en état 
de siège, depuis déjà quelques mois, lorsqu'il fut déplacé, comme Puget-Barben- 
tane, par l'arrêté du Directoire du 5 messidor an IV. Peu de temps après, il fut arrêté 
gUr l'ordre du général Willot, commandant à Marseille, et incarcéré au fort Saint- 
Jean. Bonaparte, qui s'intéressait À Maçon, écrivit en sa faveur au Directoire exécutif 
la lettre suivante datée de Vérone, le 3o nivôse an V : 

f Je vous prie d'ordonner au général Willot qui détient en prison contre les lois le 
chef de la 57' demi-brigade, qu'il a fait arrêter à Fréj us rous des prétextes très 
frivoles, de rendre ce brave homme à sa demi-brigade. Vous réparerez une injustice 
et vous accorderez la récompense la plus douce à cette demi-brigade. Buonaparte. » 
Willot. ayant eu connaissance de cette lettre par les journaux, y répondit dans le 
Journal de Marseille, le 26 pluviôse, dans ces termes : 

f J'ai vu avec surprise, citoyen g néral, le rapport imprimé que vous faites au 
Directoire des derniers succès qu'a remportés l'armée que vous commandez, terminé 
par une demande qui m'inculpe d'injustice assez légèrement. Si vous-même aviez 
été juste, vous auriez suspendu votre opinion sur un militaire qui peut n'avoir pas le 
bonheur de vous plaire, mais qui n'en est pas moins irréprochable. 

€ Le citoyen Maçon, chef de brigade à la suite de la 57' demi-brigade, avait été 
destitué du commandement d'Avignon par le Directoire avant mon arrivée. Nombre 
de plaintes m'ont été portées contre cet officier des départements des Basses-Alpes 
et de Vaucluse où il a été employé. L'esprit de parti qui agite ces contrées m'a fait 
penser qu'elles pouvaient être exagérées et je ne me suis point prévenu contre lui 
avant de l'avoir observé moi-même Je l'ai employé à Marseille, où il a mis au moins 
beaucoup de négligence dans ses devoirs. Il était parti cependant avec un bataillon 
de sa demi-brigade pour se rendre â l'armée. En passant â Aubagne, il ne prit 
aucune mesure pour arrêter des désordres et des violences, auxquelles se sont livrés 
des militaires de son bataillon, qui ont menacé les jours du commandant de la place 
et tenté de forcer les prisons. La municipalité de Fréjus m'adressa de nouvelles 
plaintes contre lui, qui constatent que ce chef s'est porté à des excès et a fait délivrer 
du pain blanc à sa troupe, quoique celui de l'étape fût recevable, ainsi qu'il a été 
prouvé par procès- verbal. 

c Voilà, citoyen général, les motifs qui m'ont déterminé à le punir d'après les lois, 
parce qu'il m'importe peu qu'un homme se dise patriote, quand il se conduit mal et 
que ce n'est pas sur des mots que je le juge. J'en avois renJu compte au ministre. 
J'ai mis cet officier en liberté et l'ai fait partir pour l'armée, le i" nivôse, longtemps 
avant votre demande si singulièrement placée. 

» Continuez, citoyen général, d'écraser les ennemis extérieurs de la République; 
je n'accueillerai jamais que le récit de vos succès et continuerai mes efiforis pour 
remplir une tâche moins brillante que la vôtre, mais aussi nécessaire : celle de faire 
respecter les lois constitutionnelles et de comprimer les factieux et les brigands dans 
la partie de l'intérieur qui est confiée à ma surveillance.— Willot. » 

Màcon était né à Chasselay (Rhône), le i3 janvier 1769; soldat au 6- régiment d'in- 
fanterie le 8 novembre 1787, capitaine en 1793. il fit comme chef de bataillon les cam- 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE 233 

tras (6) et bientôt peut-être tous ces sales coquins de la queue de 
Robespierre et de Maignet seront chassés par le gouvernement. 
Je vous enverrai sous peu de temps le contingent de la 
citoyenne Chaix. Je vous embrasse de tout mon cœur, et suis tout 
a vous. 

Signé ;J.-S. Rovère. 



XXVI. 
Au citoyen Rovère jeune à Bonnieux, 

Paris, le 17 messidor an 4 de la Republique françoise (16 juillet i79^j- 

Votre lettre d'Avignon, mon cher frère, du 5, me parvient 
aujourd'huy ; vous avés reçu diverses missives de ma part, qui 
vous auront appris le parti que j'avois pris pour racqui3ition de 
la terre des Chartreux ; j'attends la réponse du citoyen Hurard 
pour sçavoir si je dois envoier des fonds pour avancer ce 
payement. 

J'espère que vous serés dispensé d'en venir a des procès avec 
le citoyen Marchand; a force de le chercher, je l'ai trouvé; il m'a 
avoué fort ihgenùement que non seulement vous ne lui déviés 
rien, mais qu'il etoit votre débiteur; qu'il viendroit aujourd'hui, 
et que nous arrangerions définitivement vos affaires. Je lui propo- 
serai s'il veut se désister de sa portion, et sur quel pied il vou- 
droil être payé. Par le prochain courrier, je vous informerai du 



pagnes des Pyrénées-Orientales, servit ensuite â l'armée d'Italie, à l'armée d'Angle- 
terre cl a celle de l'Ouest. Il passa â l'armée des Alpes en Tan VIII et se signala À 
Mimiebcllo et à Marengo. Rentré en France, il fut fait sous-gouverneur du palais 
des Tuileries le i" vendémiaire an XI et général de brigade le 9 fructidor suivant 
Nous ignorons la date de sa mort. 

^6) Avant les destitutions faites par Fréron, le tribunal criminel du département de 
Vaucluse étaitcotnposéde Bernardy, président ; Miffre. Félix (Joseph-Ignace), Bruny, 
juges ; Jamet, accusateur public, tous républicains modérés. Fréron les remplaça 
par le personnel suivant : L.-A. Raphel. président ; Joseph-Ignace Gluais, Louis 
liioulcs. Denis Dugat et Joseph-Ignace Félix, juges ; Charles-Louis Chambon, accu- 
sateur public provisoire ; Antoine Teste, commissaire du pouvoir exécutif ; Joseph 
Dut(»ur, substitut. Dans l'épuration opérée après le départ de Fréron, Raphel resta 
présideni avec Denis Dugat, Félix. Joseph-Xavier-Félix Vitalis, Jean-Joseph- Augustin 
(iaud, juges; Giraudy. commissaire du Directoire exécutif, et Dejean, accusateur 
public. 






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DE l'académie de VAUCLUSE 23S 

Tour (6) et Chambon (7) frappés de mandats d'arrest; le tribunal 
de Carpentras rétabli a peu près comme il etoit nommé par le 
peuple (8). Avec de la sagesse, de la modération, du respect pour 
la constitution de gS, nous nous tirerons d'affaire; recommandés, 
au nom de toutes les vertus républicaines, toute abjuration de 
vengeance, de reaction ; la loi seule doit prononcer les peines et 
l'opinion seule le mépris dont certains individus doivent être 
couverts le reste de leur vie. 

J'espère qu'avant deux ou trois mois vos désirs de placement 
seront effectués, mais ne me pressés pas et ne vous impatientés 
pas. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 

réfugier à l'armée des Alpes, où il trouva une place d^attaché aux fournitures de cette 
armée. Il reparut à Hagnols après le 9 thermidor et À la date du 17 nivôse an IV 
(5 janvier 1796), fut nommé sur la proposition de Fréron, commissaire du Directoire 
exécutif près les tribunaux civil et criminel du département de Vaucluse. Il fut 
destitué le 31 prairial an IV et décrété d*arrestation le 8 messidor suivant, sur un 
ordre du ministre de la justice à qui il avait été dénoncé comme coupable de détour- 
nement de pièces commis au greffe du tribunal, et aussi < comme ennemi du gouver> 
nement et de la paix publique et anarchiste dangereux». Le i3 fructidor de la même 
année, il fut de nouveau dénoncé comme ayant été l'instigateur et le provocateur des 
rassemblements armés qui venaient d'avoir lieu à l'Isle. Plus tard il remplit encore 
quelques fonctions publiques dans le département de Vaucluse, puis se retira défini- 
tivement à Bagnols, où il rouvrit son étude de notaire. 

(6| Dutour (Jean-Joseph), était notaire à Laudun (Gard), au moment où éclata la 
Révolution. Il en adopta les principes et fut élu par le peuple chef de bataillon de la 
garde nationale, puis juge de paix de son canton et ensuite administrateur du district 
du Pont-Saint-Esprit. Dénoncé après le 9 thermidor comme terroriste et ancien ami 
de Marat, il fut arrêté, mais bientôt relâché par ordre du Comité de sûreté générale. 
Il vint alors habiter Avignon, où grâce à la protection de Fréron, il obtint la place 
de substitut du commissaire du Directoire près les tribunaux civil et criminel du 
départe ..ent de Vaucluse. Teste venait d'en être nommé commissaire. Dutour 
cumula pendant deux mois ces fonctions avec celles de commissaire du Directoire 
près l'administration municipale du canton de Roquemaure. Or, le 21 pluviôse an IV, 
sur les ordres du général Puget-Barbentane, une troupe armée commandée par un 
chef de bataillon cerna Bagnols, fit des visites domiciliaires, des arrestations arbi- 
traires, commit des attentats â la sûreté et à la liberté individuelles, pilla les fonds 
de la caisse publique, etc. Dutour avait pris part à celte expédition. Accusé de ce 
chef et dénoncé comme terroriste, il fut destitué. En frimaire an V, il était encore â 
Avignon en prévention et sous la surveillance. 

(7) Chambon (Charles-Louis) était, comme Teste, natif de Bagnols et y exerçait la 
profession d'homme de loi. Ayant dissipé toute sa fortune, il se lança dans la Révo- 
lution pour la réparer. Signale à F'réron comme un vrai patriote, ayant des talents, 
il fut nommé accusateur public près le tribunal criminel du département de Vaucluse 
dont ce représentant était en train de faire Tépuration, et c'est lui qui, le 9 germinal 
an IV, requit en cette qualité contre les auteurs de la rébellion qui avait éclaté â 
Avignon, le 6 vendémiaire précédent, contre le représentant Boursault. Il fut destitué 
pour avoir pris part avec Dutour dont il était l'ami à Tcxpédition contre Bagnols du 
ai pluviôse an IV. 

(8) Voyez lettre précédente, note 6. 



234 MÉMOIRES 

résultat. A mettre quelqu'un a Sorgues je prefererois le citoyen 
Roux au cy-devant curé Raphel (i), qui pourra reprendre son 
culte, les prêtres constitutionnels étant au moment d'être avoués 
par le pape, et le prçmier n'ayant pas le même avantage. Je crois 
qu'il est prudent d'attendre le succès de la négociation du citoyen 
Hurard. J'écrirai toujours a Roux de se rendre auprès de vous a 
Bonnieux; j'ai écrit a Lapeyre que le temps pressait pour cet 
acqueduc, et de décider enfin ses citoyennes. Voila Charlet (2), 
Etienne Martin (3), Maçon (4) destitués, Teste de Bagnols (5), du 

(i) Raphel (Joseph-François), né à Tlsle (ComtéVenaissin), le 25 septembre 1732. 
y décédé le 27 brumaire an VIII, à Tâgre de 77 ans, appartenait avant la Révolution à 
l'ordre des Carmes déchaussés, sous le nom de Père Barthélémy de Sainte-Cécile. Il 
avait été mô«ne, en 1774. prieur de la maison que Tordre possédait à Arles en Pro- 
vence. Il prêta le serment constitutionnel et fut nommé vicaire â Istres (Bouches-du> 
Rhône), puis vint à l'Isleoù il exerça successivement le& fonctions de pro-curé et de 
curé, du 29 juillet 1792 au 2 ventôse an II, date de son abdication. Il fut ensuite 
employé comme secrétaire-greffier de la municipalité de sa ville natale, démissionna 
le 14 prairial an III, a vu son grand âge et ses infirmités ». et vint habiter Avignon. 
puis Entraigues, il prêta tous les serments et mourut sans avoir repris les fonctions 
sacerdotales. 

(2) Charlet (Philibert), né à Saint-Sever-en-Brionay, était capitaine de gendar- 
merie à Avignon, lorsque, le 2 fructidor an II. il fut écroué à Avignon, à la prison du 
Fort, sur un mandat d*arrét du Comité de salut public, en date du 29 thermidor pré- 
cédent. Élargi le ai fructidor an II, sur Tordre des représentants Perrin et Goupil- 
leau. il fut incarcéré en Tan III sur une accusation de complicité dans un assassinat 
commis en avril 1793, sur un prisonnier enlevé de vive force de la prison du Fort. Le 
mandat d'arrêt signé de Curnier (21 nivôvSe an III) visait également d'autres délits 
graves et des abus d'autorité dans Texercice de ses fonctions. Dans le numéro du 
21 fructidor an IV du journal VAmi des lois, rédigé par le représentant Poultier, on 
lisait au sujet de ce personnage : « Un nommé Charlet qui s*est couvert de crimes 
pendant le règne de la terreur, dénoncé justement comme le bourreau du Midi par 
le Gardien de la Constitution et le Courrier républicain, est aujourd'hui le plus intime 
confident de Rovère et son espion le plus chéri. Le ministre Cochon a beaucoup 
accueilli cet homme de sang; il Ta fait employer par le bureau central qui lui a 
permi '. de rester à Paris, quoique la loi en expulse les officiers destitués. • 

(3) Etienne Martin, patriote d'Arles, avait été nommé commissaire de police de 
cette ville par arrêté du département des Bouches-du-Rhône du 17 février 1798. Chassé 
par les fédéralistes, il rentra dans Arles avec Tarmée de Carteaux en août 1793 et y 
reprit ses fonctions. Il passa dans la gendarmerie en Tan III et résidait â Avignon en 
floréal an IV, où il commandait la gendarmerie nationale. Il était Tamide Poultier qui 
en faisait grand éloge dans VAmi des lois, et le protégé de Barras qui le recomman- 
dait a Carnoi. Il n'en fut pas moins destitué et vint à Paris, où il se trouvait en ven- 
démiaire an V. 

U) Voyez lettre précédente, note 4. 

(5) Teste (Antoine), né à Bagnols (Gard), le 27 aotit 1743, y décédé le26 juin 1807. 
fut un des plus chauds patriotes du Midi. Il exerçait la profession de notaire, lorsque* 
en juin i70'.il fut élu administrateur du district du Pont-Saint-Esprit. Il futmaire de 
Ra^rnols de décembre i gr au i3 novembre 1792, date de sa nomination aux fonctions 
Je procureur général syndic du département du Gard. Il fut ensuite membre du 
Diiecioirc du môme département (6 nivôse au 2 pluviôse an II). Suspect d'avoir été 
partisan des Girondins, il fut révoqué par le Comité de sûreté générale et dut se 



DE l'académie de VAUCLUSE 23S 

Tour (6) et Chambon (7) frappés de mandats d'arrest; le tribunal 
de Carpentras rétabli a peu près comme il etoit nommé par le 
peuple (8). Avec de la sagesse, de la modération, du respect pour 
la constitution de gS, nous nous tirerons d'affaire ; recommandés, 
au nom de toutes les vertus républicaines, toute abjuration de 
vengeance, de reaction ; la loi seule doit prononcer les peines et 
l'opinion seule le mépris dont certains individus doivent être 
couverts le reste de leur vie. 

J'espère qu'avant deux ou trois mois vos désirs de placement 
seront etïectués, mais ne me pressés pas et ne vous impatientés 
pas. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 

réfugier àl*armée des Alpes, où il trouva une place d'attaché aux fournitures de cette 
armée. Il reparut à Bagnols après le 9 thermidor et à la date du 17 nivôse an IV 
(5 janvier 1796)» fut nommé sur la proposition de Fréron, commissaire du Directoire 
exécutif prés les tribunaux civil et criminel du département de Vaucluse. Il fut 
destitué le 21 prairial an IV et décrété d'arrestation le 8 messidor suivant, sur un 
ordre du ministre de la justice à qui il avait été dénoncé comme coupable de détour- 
nement de pièces commis au greffe du tribunal, et aussi t comme ennemi du gouver- 
nement et de la paix publique et anarchiste dangereux ». Le i3 fructidor de la même 
année, il fut de nouveau dénoncé comme ayant été l'instigateur et le provocateur des 
rassemblements armés qui venaient d'avoir lieu à l'Isle. Plus tard il remplit encore 
quelques fonctions publiques dans le département de Vaucluse, puis se retira défini- 
tivement à Bagnols, où il rouvrit son étude de notaire. 

(6) Dutour (Jean-Joseph), était notaire à Laudun (Gard), au moment où éclata la 
Révolution. Il en adopta les principes et fut élu par le peuple chef de bataillon de la 
garde nationale, puis juge de paix de son canton et ensuite administrateur du district 
du Pont-Saini-Esprit. Dénoncé après le 9 thermidor comme terroriste et ancien ami 
de Marat, il fut arrêté, mais bientôt relâché par ordre du Comité de sûreté générale. 
Il vint alors habiter Avignon, où grâce à la protection de Fréron. il obtint la place 
de substitut du commissaire du Directoire prés les tribunaux civil et criminel du 
départe ;.ent de Vaucluse. Teste venait d'en être nommé commissaire. Dutour 
cumula pendant deux mois ces fonctions avec celles de commissaire du Directoire 
près l'administration municipale du canton de Roquemaure. Or, le 21 pluviôse an IV, 
sur les ordres du général PugetBarbentane. une troupe armée commandée par un 
chef de bataillon cerna Bagnols, fit des visites domiciliaires, des arrestations arbi- 
traires, commit des attentats à la sûreté et à la liberté individuelles, pilla les fonds 
de la caisse publique, etc. Dutour avait pris part à cette expédition. Accusé de ce 
chef et dénoncé comme terroriste, il fut destitué. En frimaire an V, il était encore à 
Avignon en prévention et sous la surveillance. 

(7) Chambon (Charles-Louis) était, comme Teste, natif de Bagnols et y exerçait la 
profession d'homme de loi. Ayant dissipé toute sa fortune, il se lança dans la Révo- 
lution pour la réparer. Signalé à Fréron comme un vrai patriote, ayant des talents, 
il fut nommé accusateur public prés le tribunal criminel du département de Vaucluse 
dont ce représentant était en train de iaire l'épuration, et c'est lui qui, le 9 germinal 
an IV, requit en cette qualité contre les auteurs de la rébellion qui avait éclaté â 
Avignon, le 6 vendémiaire précédent, contre le représentant Boursault. Il fut destitué 
pour avoir pris part avec Dutour dont il était l'ami à l'expédition contre Bagnols du 
21 pluviôse an IV. 

(8) Voyez lettre précédente, note 6. 



236 MÉMOIRES 



XXVII. 



Au citoyen Rovère jeune à Bonnieux. 

Paris, le 26 messidor an 4 de la République françoise (14 juillet 1796). 

On ne peut rien de plus amical et de plus fraternel, mon cher 
frère, que ce que vous venés de faire pour moi, et pour vôtre 
petit neveu; je n'ai pas besoin de vous rennouveler mon attache- 
ment et ma reconnoissance ; je suis fâché que vous ayés fait le 
sacrifice momentané de vos quarante louis, infiniment plus jolis 
que la pièce de douze sols de l'abbé Lapeyre (r) chés M"* d'An- 
selme 2) ; je vais donner des ordres, mon cher ami, pourque cette 
somme vous soit remboursée en mêmes espèces. Le chargé d'af- 
faires de Grenoble nous a annoncé le payement de la Saint-Jean 
comme devant être efiectué, et j'espère que vous pourrés bientôt 
reprendre vos réparations du Large. Vous ne me dites pas le prix 
précis du moulin de Courtheson ; je présume par la proposition 
de Vaton de tripler treize mille livres, que l'évaluation doit être 
de quatre fois cette somme, ce qui vaut cinquante-deux ; vous en 
avés payé vingt-huit en rescriptions, je vais en payer vingt-quatre a 
la trésorerie. Je ferai passer par le prochain courrier la rescription 
a Hurard ; je vous prie de tenir la main a la quittance finale (3 . 



(i) L'abbé de Lapeyre (Jean -Joseph), oncle de Pierre-EIzéar de Lapeyre. resta pen~ 
dant soixante ans curé successivement à Lacoste, à Goult et à Bonnieux dans le 
comté Venaissin. Il prêta le serment constitutionnel à Tâge de 91 ans et vécut 
pendant toute la durée de la Révolution retiré à i^onnieux, sa ville natale, sans y être 
inquiété. 

(2) Jeanne-Henriette de Chaternet, née à Avignon, fille de Paul de Chaternet et de 
Marie-Béatrix-Angélique d'Anselme, avait épousé, le 19 octobre 1774, Joseph- 
Hyacinthe-Philippe d'Anselme dit Saint- Victor, chevalier de Saint-Louis, co-seigneur 
de Saint-Didier et de Venasque au comté Venaissin. Le chevalier d'Anselme rési- 
dait  Bonnieux. Il fut porté sur la liste des émigrés du département de Vaucluse, 
dressée le 4 prairial an II. 

La famille d'Anselme, originaire de Florence, avait eu une de ses branches qui 
avait passé dans le comté Venaissin vers 1434 et dont les membres s'étaient établis 
à diverses époques à Avignon, à Joucas, à Roussillon et à Bonnieux. Denis d'Anselme 
fut, en 1712, la .souche des d'Anselme de Bonnieux. (Voir sur cette famille les nobi- 
liaires d'Artefeuil, La Chenaye-Desbois, Mistarlet, etc.) 

(3) La totalité du prix d'achat du moulin de Courthézon devait être fut payée en 
rescriptions ou en mandats fournis par Rovère aîné, mais la loi du 8 thermidor an IV 
(•->6 juillet 1796) ayan-t spécifié que le dernier quart du prix des domaines nationaux 
soumissionnés depuis la loi du a6 ventôse qui créait les mandats, serait payé en numé> 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE 287 

L'objet des biens nationaux est en discussion au Conseil des 
Anciens (4) ; la question est bien ardue; il est notoire qu'il se 
commet des vols et des rapines effrayantes ; on pourra revenir 
sur la cession d'autres biens d'après les estimations. 

Les choses paroissent prendre une assés bonne tournure; les 
jacobins conspirent toujours sourdement; on les déjoue: on 
force leurs protecteurs a tirer sur eux. Je recommande a tous nos 
amis d'être prudents et respectueux envers les lois et fortement 
attachés a la constitution de gb. L'administration municipale de 
Bonnieux m'a écrit relativement aux craintes qu'on lui a inspirées 
sur le changement de canton ; j'ai déjà écrit a Lapeyre, et lui ai 
cité l'article de la constitution qui s'y oppose ; vous pourrés ras- 
surer nos concitoyens et les assurer de tout mon zèle a les défen- 
dre (5). Je vous écrirai par le prochain courrier. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 

raire métallique en six paiements égaux, Rovère jeune dut verser ledit quart s'élevani 
à 9.145 fr. 40 centimes, déduction faite de la somme de i.oSg francs escomptés pour la 
valeur des rescriptions fournies par Rovère aîné. Ces six payements furent faits à la 
caisse du receveur des domaines à Avignon, aux dates des 3 vendémiaire, 16 nivôse, 
I" pluviôse et 1" prairial an V, 22 germinal et 24 thermidor an VI. L*acte de cession 
faite par le citoyen Vaton, avec les frais afférents, avait coûté la somme de 760 francs. 

L'achat fut avantageux, puisqu'avec quelques réparations le moulin put être 
aflTermé, en germinal an VI, 3.200 francs à un certain Jean-François Fabre, meunier 
de Courthézon. 

Cet immeuble resta dans la famille de Rovère jusqu'au 22 mai 1816, date èl laquelle, 
en exécution d'une ordonnance du tribunal de r* instance d'Avignon, rendue à la 
requête des créanciers, tous les biens dépendant de la succession de Rovère aîné 
durent être mis en vente. Claude-Xavier Lagarde, propriétaire rentier, et son épouse 
Marie-Louise-IIenriette de Vitalis, domiciliés à Orange, s'en rendirent acquéreurs 
au prix de 20.000 francs (minutes d'Eusèbe-Jean-Joseph Quinquin, notaire à 
Avignon). Il est dit dans l'acte que ce moulin à farine à deux tournants, que 
M"* Rovère possède indivis avec son fils Jules de Rovère, comme bien acquis de 
l'Étal par son défunt mari, sous l'empire de la communauté, est vendu, quant èl la 
moitié appartenant à M- de Rovère au prix de m 800 francs, et quanta l'autre 
moitié que Jules de Rovère. mineur émancipé, détient comme héritier de son père et 
dûment autorisé par sa mère, au prix de 9.2(X> francs. (Voyez aussi sur ce moulin la 
lettre XXIII, note i.) 

(4) Cette discussion après avoir donné naissance à divers projets de loi successi- 
vement rejetés par le Conseil des Anciens, aboutit À la loi du 8 thermidor an IV. 
Voy. note 3. 

(5) Le bruit courait alors que Bonnieux allait cesser d'être chef-lieu de canton et 
serait rattaché à celui d'Apt. 



238 MÉMOIRES 



XXVIll. 



Au citoyen Rovère jeune à Bonnieux, 

Paris, le 28 messidor an 4 de la Republique (16 juillef 796). 

Je VOUS annonçois avant-hier, mon cher frère, que je ferai partir 
aujourd'hui une rescription de vingt-quatre mille livres pour 
solde entière du moulin ; je l'adresse effectivement a Hurard pour 
qu'il en fasse incontinent l'échange avec le cy-devant receveur du 
district d'Avignon et me fasse concéder quittance finale. On 
s'occupe depuis quatre jours (et c'est déjà bien long) d'un plan 
relatif aux mandats aux domaines nationaux ; je crois que la 
position de ceux qui auront payé en totalité ne sera pas la plus 
mauvaise (i). 

Je n'ai pu voir encore M. de Roussières (2 ; il dine chés moi 
ordinairement une fois par décade, je le verrai au plus tard le 2. 

Deleutre est parti cette nuit (3) ; il a grande envie de vous voir. 
J'attends a chaque moment des nouvelles de Grenoble pour vous 
faire rembourser les quarante louis, que vous avés si généreuse- 
ment prêtés au petit Minou (4), qui est bien gentil. Nous avons 
dans le moment a déjeuner le citoyen Rousseau (5) et ses filles, 
qui me demandent beaucoup de vos nouvelles, et me chargent de 
vous dire beaucoup de choses empressées. On parle beaucoup de 
la paix avec le pape; son envoyé est ici, j'ignore son nom ; on 
assure qu'il est question de faire cesser le schisme .6;. 



(1) Voir lettre précédente, notes 3 et 4. 

(2) Roussières (Pierre-Constantin de), ancien commissaire des guerres, chevalier 
de Saint-Louis, âgé de 90 ans 6 mois, né à Courthézon. y domicilié, fils de défunt 
Etienne, aussi commissaire des guerres, et de Jeanne Nicolas, veuf de Marie de 
Sarpillon, décéda à Avignon, le i" août 1822. (Addition et rectification à la note 3. 
lettre XXII ) 

(3) Voir lettre XVIII, note 12. 

(4) Appellation affectueuse donnée à son fils par Rovère. 

(5) Personnage non identifié. 

(6) A la suite des succès de Bonaparte en Italie, le pape Pie VI alarmé. lui avait 
envoyé à Bologne, l'ambassadeur d'Espagne pour négocier la paix (fin juin 1796). Le 
général en chef y mit pour conditions que les légations de Bologne et de Ferrare 
resteraient indépendantes, que la ville d'Ancone recevrait une garnison française, 
que le pape donnerait 21 millions, cent statues ou tableaux, cinq cents manuscrits, 
des provisions de blé, des bestiaux, etc. Un armistice fut signé à Bologne le 
31 juin 1796. aux termes duquel (article 3) le pape devait envoyer le plus tôt possible 
un plénipotentiaire à Paris pour obtenir du Directoire exécutif la paix définitive. 



DE l'académie de VAUCLUSE 289 

Je ne reçois plus de lettres du brave Lapeyre ; éveillés un peu 
son humeur si amicale parfois. 

J*ai reçu une lettre très obligeante de notre ami Ainard ^y). Voila 
les destitutions qui vont rondement pour notre département ; je 
leur prêche la paix et- Toubli des offenses, l'attachement a la 
constifution de gS et l'abandon de toute idée reactionnaire qui 
nous perdroit a jamais. Je vous prie d'activer le citoyen Hurard. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XXIX. 

Au citoyen Rovère jeune à Bonnieux. 

Paris, le 3o messidor an 4 de la Republique (18 juillet 1796). 

Je reponds a votre lettre d'Avignon du 22, mon cher frère. 
Vous verres par celle d'avant hier, que j'ai déjà fait une partie de 
ce que vous desiriés; j'ai envoyé une rescription de vingt-quatre 
mille livres a Hurard pour solder la totalité du moulin ; je crains 
que le défaut d'estimation ne nuise a nôtre opération (i). Si vous 
pouvés l'échanger pour un objet liquide, vous fairés bien, quoi- 
que celte acquisition me paraisse bonne. 

Je ne suis pas surpris des politesses que nous avons reçues de 
la famille Roussières. Ce sont d'excellents voisins; nous nous 
entretenons bien souvent de nôtre futur voisinage avec Roussières 
que je vois fort souvent, et qui joue un rôle intéressant quoique 
non apparent. 

Je vous ai toujours dit et vous repète, que vous serés le maitre 
d'arranger nos affaires d'interest a vôtre plus grande satisfaction, 

Mais à l'approche de Warmser, Pie VI se flattant d'une délivrance prochaine, viola 
les conditions de l'armistice et les négociations furent définitivement rompues sur 
son refus de révoquer les brefs rendus contre la France et la constitution civile du 
clergré qu'exigeait le Directoire. Voy. lettre XXV. note a. 

(7) Voir lettre IV, note 8. 

(i) L'vssiimation du moulin de Courthézon fut faite le a thermidor an IV. conjoin- 
tement par Pierre Manobre ou Manaubre. délégué de Rovère, et François-Joseph 
Deyxtîer, expert désigné par le département. L'estime fut de 2.300 francs en 
revenus et de .39.600 francs en capital. 



240 MÉMOIRES 

pourvu que nous ne morcelions pas les propriétés ; vous pourrés 
vous arranger de la nouvelle, je ne demande rien tant que de 
vous voir heureux et tranquille. 

L'affaire de la poste de Sorgues est impossible. Ferrier, etapier 
de la commune d'Avignon, a obtenu la place de maitre de postes 
a Sorgues. Il est vend m'en faire part lorsqu'il a eu son brevet; il 
a acheté des chevaux, et part pour aller s'installer ; c'est un brave 
homme, fort ennemi des anarchistes ; il etoit notre collègue a 
l'assemblée du cy-devant Comtat. Vous temoignerés mes regrets 
au citoyen Manobre (2), et mes offres de services en toute autre 
occasion. 

J'écris a Mathieu une lettre insignifiante; j'ai bien compris 
depuis le commencement qu'il avoit plus de bonne volonté que 
de crédit. 

Quant a Marchand, je crois, mon cher, qu'il faut suspendre votre 
projet d'assignation ; les principes de vertu et de constitution de 
95 gagnent tous les jours, et vous devés vous en convaincre par 
les changements qui s'opèrent dans nôtre département, au grand 
déplaisir des amis de Drouet (3) et de Babeuf (4). 

(2) Pierre Manobre, dont il est parlé dans la note précédente, habitait Courthézon 
en l'an IV et en était natif. 

13) Voy. lettre XI, note 8. 

(4) Babeuf (François-Noel), connu plus généralemeni sous le nom de Gracchus 
Babeuf, était né le 24 novembre 1760 à Saint-Quentin. Tour à tour peiii clerc, puis 
domestique chez M. de Bracquemont, près de Roye, dont il épousa une servante. 
Marie- An ne-Victoire Langlet, en 1782, commissaire à Turin en 1785, il se jeta dans la 
Révolution et au 14 juillet fut au premier ran^ des vainqueurs de la Bastille ; il fut l'ami 
de Marat. En septembre 1792 il devint administrateur du département de la Somme, 
puis du district de Montdidier; il fut révoque puur falsification de l'acte de vente d'un 
bien national et cundan\né par contumace à \ingt ans de fer. Le 21 prairial an 11, il 
fit annuler par le tribunal de cassation le jugement du tribunal de Montdidier et fut 
acquitté par les juges de Laon. devant lequel le tribunal de cassation l'avait renvoyé 
Il fonda à la mort de Robespierre le Journal de la liberté de la presse, bientôt rem- 
placé par le Tribun du peuple. Ayant insulté dans son journal le- parti thermidorien, 
un ordre d'arrestation fut lancé contre lui par le Comité oe sûreté générale le 22 ven- 
démiaire an III (i3 octobre I7q4), sur une dénonciation de Tallien qui l'accusait 
d'outrage à la représentation nationale. Il se cacha à Paris et ne put être arrêté que le 
19 pluviôse an III. 1/amnistie de brumaire an IV le rendit à la liberté. Il reprit alors 
la publication de son journal le Tribun du peuple, dans lequel il fit une propagande 
communiste effrénée. Dénoncé à l'accusateur public par le ministre de la justice, 
comme prévenu d'avoir provoqué à .a violation des propriétés, il fut araôié de nouveau 
et écroué à la Petite-Force le 17 pluviôse an IV. 

Mais le parti de Babeuf n'en restait pas moins très redoutable. Compose d'ex- 
conventionnels terroristes et de jacobins violents, il constituait la majorité du club ou 
société du Panthéon. La cherté des denrées, la menace de disette, l'extrême misère qui 
régnait alors à Paris, tout favorisait un mouvement révolutionnaire d'autant que 
4.000 jacobins venaient de s'introduire à Paris le 29 pluviôse et y renforçaient le 



DE L ACADEMIE DE VAUCLUSE 24 1 

Je verrai demain Grégoire, qui m'a paru vous être très attaché ; 
je saurai Tetat des négociations; la dernière fois que je le Vis, il 
m'exhorta beaucoup a vous dire de reprendre vos fonctions. Il a 
été a Versailles donner la confirmation ; on assure que l'on négocie 
fortement avec le prince de Rome. J'enverrai par le prochain 
courrier une procuration a Vaton (5; et vous me fairés part de vos 
vues d'arrangement pour l'échange et l'acquittement de vos 
droits legitimaires (6). Vous verres par les papiers publics les 



parti. Le Directoire effrayé ne parlait rien moins un instant que de quitter le Luxem- 
bourg et d'aller au Palais national se mettre sous la protection du Corps législatif. 
Il fit fermer le club du Panthéon (') ventôse an IV|, mais cette fermeture n'arrêta pas 
le mouvement communiste, seulement la propagande par la voie de la presse fut 
remplacée par une conspiration dans l'ombre, où toutes les mesures furent prises 
pour soulever le peuple aux cris de : Haine aux riches ! vive la constitution de 1793 I 
ta liberté ou la mort ! Déjà des rassemblements séditieux se formaient ; des placards 
incendiaires étaient affichés, autour desquels le peuple chantait les chansons de 
Sylvain Maréchal : 

Mourant de faim, mourant de froid. 

Peuple, dépouillé de tout droit. 
Tout bas tu te désoles. 
Ou bien : 

Soyez-en sûrs, le peuple est las, 

La faim l'agite et le réveille. 

Il veut du pain, non des débats. 

Ventre affamé n'a pas d'oreilles. 
Des «émissaires avaient été envoyés dans les provinces pour révolutionner les dépar- 
tements. L'armée était travaillée sourdement. Un comité in^urrecteur avait la haute 
main sur la direction des conspirateurs. On dit que Barras lui-même, bien qu'il s'en 
soit défendu, était de connivence avec eux. Ce qui est certain, c'est que la conspira- 
tion babouviste, comme nous l'avons vu. comprenait plusieurs conventionnels, beau- 
coup d'officiers subalternes et une grande partie de la légion de police. Le Directoire 
effrayé dénonça la conspiration au Corps législatif, qui pour premières mesures^ 
promulgua les lois dès 27 et 38 germinal contre les provocations par voies d'affiches^ 
les attroupements et les écrits révolutionnaires. Ce même jour 28, la cavalerie char- 
geait un rassemblement au Pont-au-Change. Le 21 fl »réal an IV, les principaux 
conjurés étaient arrêtés. Leur procès fut porté, par suite de la complicité du repré- 
sentant Drouet, devant une haute cour constituée à Vendôme. Les accusés, à 
l'exception de Drouet, qui parvint à s'échapper de sa prison de l'Abbaye, furent 
transférés dans celte ville le 10 fructidor (27 août 1796). Leur procès dura du 4 bru- 
maire an V au 7 prairial (27 mai 1797 . Babeuf et Darthé furent condamnés à mort. 
Entre temps, dans la nuit du 23 au 24 fructidor an IV (9 au 10 septembre 1796), 
plusieurs centaines de jacobins, conduits par des ex-conventionnels, marchèrent sur 
le palais du Directoire et tentèrent de soulever le camp de Grenelle, favorisés, dit-on. 
par Barras qui, bien qu'ayant dans ses attributions la police, était à la campagne, 
ainsi que son collègue Rcwbel. (Voy. iiabeufet hiarras, par Paul Robiquet, dans 
la Revue de Paris. i"mars 1896.) 

5) Pierre Vaton avait soumissionné le moulin de Courlhézon, le 27 floréal an IV. 
(6) Par acte passé â Avignon aux minutes de Louis Faulcon, le 24 avril 178a, Rovère 
aîné avait reconnu et déclaré que les droits de légitime, compétents et appartenante 
son frère l'abbé, sur les biens de leurs père et mère, avaient été fixés et réglés 



24^ MÉMOmE^ 

diverses resolutions prises sur les finances. Le petit se porte 
bien. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 

P. S. Je reponds a Ainard. Bien des choses a Barbusse. 



XXX. 

Au citoyen Rovère jeune à Ai>ignon. 

Paris, le 6 thermidor an 4 de la Republique (24 juillet 1796). 

Je reçois votre lettre du 28, mon cher frère, et y reponds tout 
de suite pour vous dire que j'envoie par le même courrier la 
procuration a Vaton, avec prière d'expédier le plus tôt possible. 
Je n'ai pu vous envoyer l'argent pour la citoyenne Chaix. Voila 
en divers objets environ soixante mille livres de mandats, pris 
sur mes économies. Les fermiers du département de l'Isère n'ont 
pas fait passer la paie de la Saint-Jean ; ce qui m'a mis dans un 
retard bien fâcheux^ puisqu'on ne peut plus payer en mandats, 
tout payement est suspendu par la revocation des articles 2 et 3 
de la loi du i5 germinal (i). Quoi qu'il en soit, nous aviserons 
dans le temps a nous oter cette épine du pied. Voila que Cor- 
nailles (2i aura échappé aux mandats, comme il l'avoit fait aux 
assignats : c'est un terrible homme que ce Cornailles, car il avoit 
aussi échappé a une espièglerie contre-révolutionnaire, qui en 
eût conduit bien d'autres a la mort. 

entr'eux à la somme de la.ooo livres, monnaie de France Mais comme Rovère aîné, 
alors marquis de Fonvielle, n'avait pas la somme à sa disposition, il s'était engagé 
par le môme acte à en supporter à son frère l'intérêt au 4 "/. jusqu'à entière libéra- 
tion. 

(i) Ce fut dans la séance du 38 messidor an IV (16 juillet 1796) du Conseil des Cinq- 
Cents que sur la proposition de Oauchy, les articles 2 et 3 de la loi du i5 germinal, 
spécifiant le payement obligatoire en mandats des transactions entre particuliers, 
furent rapportés. Les mandats n'avaient donc plus cours forcé. Chacun pouvait 
désormais traiter comme il lui plairait et en monnaie de son choix, les mandats ne 
devant plus être reçus en payement qu'au cours réel établi chaque jour par la 
trésorerie. (Voir Moniteur de l'an IV, n** 199, ao8, 201 et 3o3.) 

(al Voir sur ce personnage lettre VII, note 3. 



\ 



bE i/aCADÉMIE [>Kf VAUCI.USK ^4^ 

Les héros de la Glacière (3) sont arrivés dans cette capitale 
depuis deux ou trois jours. Dom Poultier(4)aaccordé sa protection 
a Martin Etienne (5), et Ta refusée a Charlet (6). Je crois que ces 
patriotissimes ne trouveront pas les choses aussi favorablement 
disposées qu'en vendémiaire. 

Je ne peux pas joindre Marchand ; nous n'y perdons rien par 
le retard. Chaque jour, les amis de la constitution de gS gagnent 
du terrain : vous vous en serés convaincu par les nominations 
des bureaux des Conseils (7). Avec de la sagesse et de la patience, 
nous rentrerons dans le sentier de la justice, dont on nous avoît 
fait sortir a coups de canon. 

Faites vos arrangements pour nos échanges. Roussières m'as- 
sure que ce moulin vaudra au moins 4,000 livres de rente. Je 
présume que le Large vous en rendra deux. Sçavés-vous que 
beaucoup d'aines de bonne maison, comme disoit un grand cy- 
devant baron, n'en avoient pas autant ? 



(3) Les massacres de la Glacière constituent le plus sombre drame de la révolution 
avignonaise. Dans la nuit du 16 au 17 octobre 1791, 61 prisonniers détenus dans les 
prisons du Palais des papes, parmi lesquels i3 femmes, a prêtres et 3 enfants, furent 
assommés à coups de barres de fer et précipités ensuite au fond d'une tour du palais 
dite la Glacière. Ce massacre fut une représaille du meurtre du patriote Lescuyer 
qui avait eu lieu la veille. (Voy. pour les détails : P. Charpenne, Les grands épisodes 
de la Révolution dans Avignon elle (.omtai, t. II : Les massacres de la Glacière, avec 
additions et notes parle D' Victorin Laval, Avignon, 1901.) 

{4) Poultier-d'Elmotte (François-Martin), né à. Montreuil-sur-Mer (Pas-de-Calais) le 
3i décembre 1753. mort à Tournay (Belgique), le 6 février i8a6. Successivement mili- 
taire, professeur, moine bénédictin, puis de nouveau officier, il fut en septembre 179a 
élu membre de la Convention nationale par le département du Nord, devint membre 
du conseil des Anciens et fut réélu en 1799 au conseil des Cinq-Cents par le Pas-de- 
Calais. Après le 3i mai 1793, il avait été envoyé en mission dans le Midi pour orga- 
niser avec Rovère le département de Vaucluse créé par la loi du 26 juin 1793. Au 
conseil des Anciens il soutint énergiquement le Directoire dans son journal l'Ami de^ 
lois, qu'il fit paraître à partir du i" frimaire an V et dans lequel il fit une guerre 
acharnée À son ancien ami Rovère, qu'il accusa d'ôtre l'agent de l'étranger, de s'être 
vendu au royalisme, après avoir été à Avignon le portier de la Glacière, etc. 
Rovère, de son côté, lui rendait la monnaie de ses aménités dans les journaux À sa 
dévotion. 

(5) Voir lettre XXVI, note 3. 

(6) Voir lettre XXVI, note a. 

(7) Le conseil des Cinq-Cents procéda au scrutin pour le renouvellement de son 
bureau dans la séance du r' thermidor an IV. Boissy-d'Anglas fut élu président ; 
Ruelle. Pastoret, Baraillon et Bornes, furent nommés secrétaires. Boissy-d'Anglas 
remplaça Pelet de la Lozère et les secrétaires sortants furent Dumolard, Soulignac, 
Philippe-Delleville et Leclerc, de Loir-et-Cher. 

Le Conseil des Anciens avait nommé dans sa séance du i" messidor an IV : 
Portails, président ; Cretet, Mathieu Dumas, Moisset et Rabaut-Pommier. Le i" ther- 
midor an IV. elle nom na en remplacement Dussaulx, président ; Himbert, Durand- 
Maillane, Dupont de Neraours et Desgranges, secrétaires. 



244 MÉMOIRES 

Je guette toujours le moment pour vous faire rendre justice (8), 
j'arriverai a coup sûr; maison ne peut préciser Tepoque. Il 
existe une classe d'+iommes qui aime infiniment les coquins et 
déteste les gens probes, amis des Ipis et de l'humanité. Je crois 
que notre ami Donis (9) lairoit bien de faire un voyage a Paris, 
nous verrions de lui procurer quelque chose. Sa présence seroit 
d'autant plus utile que je me suis imposé la rigoureuse privation 
de n'aller chés les minisires ny au Directoire ; il faut que j'use de 
moyens indirects pour être utile a mes amis. 

Quelle est donc la cause du silence du citoyen Lapeyre, qui 
m'aimoit tant et se fachoit de ce que je n'avois pas l'air persuadé 
de ses grandes assurances? La vigne et lacqueduc? Si ces dames 
s'obstinent a faire les difficiles, nous pourrions changer le cours 
de l'antique fontaine couverte. J'ai écrit un ultimatum bien poli a 
Lapeyre, resté sans réponse. Je vous adresse la lettre chés 
Donis que j'embrasse bien tendrement, ainsi que vous. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XXXL 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon. 

Paris. le i6 thermidor an 4 de la Republique (3 août 1796). 

J'etois bien en peine sur vôtre compte, mon cher frère, en 
apprenant les nouvelles horreurs commises a Aix et a Marseille 
par les exclusifs (ij, ne recevant pas de vos nouvelles depuis 

(8) Il s*agissait d'obtenir la réintégration de Rovère jeune dans les consulats. 

(9) Les Donis habitaient à Avignon rue Dorée n" 11, actuellement maison Béchet. 
Voy. sur cette famille lettre V, note 1. 

(I) Dans la séance du conseil des Cinq-Cents du 10 thermidor an IV, Siméon, 
député des liouches-du-Rhône, exposa que le i*" du mois les assemblées primaires 
de Marseille avaient été souillées par des actes de violence et que le sang avait coulé 
à l'occasion de l'élection des ofticiers municipaux. C'est aux cris de: Vive la Monta- 
gne ! Vive la constitution de 93 ! qu'une minorité factieuse composée de patriotes 
exclusifs, avait essayé d'empêcher à. lo^ut prix la liberté des voles. Dans i5 sections 
sur 34, les urnes furent violées et les bulletins déchirés. Trois assassinats furent 
commis dans les sections de Marseille et cinq dans la seule section de Mazargues 
(banlieue de Marseille). 

A Aix, dans la nuit du 3 au 4 thermidor, trois citoyens furent assassinés sur la 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE 245 

quelques jours: Notre ami Donis m'a singulièrement soulagé, en 
m*apprenant que vous etiés a Avignon, plein de courage et de 
bonne santé. Je vous ai^ écrit par le gênerai Willot (2), qui est 
parti hier pour se rendre a Marseille ; il doit s'arrêter un moment 
a Avignon. 

Voila la loi rendue sur le quatrième quart des biens natio- 
naux (3). Elle a été fortement débattue a notre Conseil ; elle a 
passé comme par hazard. Quoiqu'interessé, je n'en suis pas fâché ; 
le brigandage étoit porté a un point trop audacieux. Je vais 



promenade du cours. Le commissaire du Directoire exécutif, nommJ Bernard fut 
blessé grièvement au bas-ventre, d'un coup de baïonnette; Mercurin, un des gardes 
de police, fut tué d'un coup de feu, etc. Ces assassinats se liaient aux troubles du 
Marseille et avaient été commis également par les exclusifs. 

Le Conseil, après avoir demandé au Directoire les renseignements qu'il pouvait 
avoir sur ces événements, nomma une commission pour en connaître et en faire 
rapport. (Voy. pour les détails : séances du conseil des Cinq-Cents des lo, iG et 17 
thermidor ; Moniteur n*' 3iG,324 et 325 des 16, 24 et 25 thermidor an IV.) 

(a) Willot Victor-Amédée, comte de), né à Saint-Germain-en-Laye (Seine-et- 
Oise) leSi août 1755, mort à Choigny, môme département, le 17 octobre 1823, officier 
dans l'armée royale avant la Révolution, fut attaché en 1791, comme aide-de-carop 
au général Choisy et l'accompagna dans le comté Venaissin, lorsque, en octobre de 
la môme année, ce général reçut l'ordre d'occuper le pays nouvellement annexé. Le 
7 novembre, les troupes françaises entrèrent dans Avignon et ce fut Willot. qui, 
après avoir pris livraison du Palais des papes, où s'était retiré Jourdan dit Coupe- 
têtes» avec ses gardes nationales, se signala par l'activité qu'il mit à faire poursuivre 
et arrêter cet instigateur des massacres de la Glacière. Willot servit ensuite avec les 
grades de colonel et de général de brigade À l'armée des Pyrénées-Orientales. 
La paix faite avec l'Espagne, il passa en Vendée sous Hoche, puis reçut le 
commandement de la 8* division avec résidence à Marseille. En mars 1797, le 
collège électoral des Houches-du-Rhône renvo.ya siéger aux Cinq-Cents où il se 
signala par son opposition au Directoire. Devenu un des chefs du parti clichicn, il 
fut déporté au 18 fructidor an V avec Rovère, mais parvint à s'échapper de Cayenne 
le 3 juin 1798; revint en France avec les Bourbons en 1814 ; fut nommé chevalier de 
Saint-Louis le 27 novembre de la même année et fait comte le 2 mars 1816, pendant 
qu'il était gouverneur de la Corse. 

Le général Willot nommé au commandement de la 8' division, en remplacement 
du général Puget-Barbentane, partit de Paris le 14 thermidor an IV. s'arrêta peu 
de jours à Avignon, et dès son arrivée à Marseille, fit afficher une proclamation 
adressée aux habitants des départements de Vaucluse, Houches-du-Rhône. Var et 
Basses- Alpes placés sous son commandement. Dans cette proclamation, dont on Ut 
le texte dans le n* du 6 fructidor an IV du Journal de Marseille, Willot annonce qu'il 
vient pour combattre tous les partis et faire régner la justice et la paix. Les terroristes 
de Marseille répondirent immédiatement à cette proclamation par un mémo:re en 
date du la fructidor, dans lequel ils dénoncent le général comme vendéen, chouan 
et royaliste, fauteur de contre révolution dans le midi et réclament son rappel. 

(3) Dans la séance du 8 thermidor an IV (26 juillet 1796), le conseil des Cinq-Cents, 
après un comité secret tenu le 6, résolut que le dernier quart des biens nationaux 
soumissionnés d'après la loi du 28 ventôse serait payé en numéraire. Le texte de cette 
résolution est au Moniteur, n- 3i2. an IV. Le conseil des Anciens l'adopta dans sa 
séance du i3 du même mois. 



prendre des arrangements pour faire face aux nouvelles obliga- 
tions. 

J'ai dinc hier chés ces dames et M. Vatters (4). Toute la famille 
m'a chargé de vous dire mille choses obligeantes. Je les avois 
perdues de vue depuis très longtemps ; le hazard nous a fait 
rencontrer a diner chés un de mes collègues, et alors beaucoup 
de reproches de la part de la mère a la fille de n'avoir pas été 
plus reconnoissante, etc. 

Les fameux exclusifs, partis d'Avignon pour bouleverser Paris, 
sont venus a résipiscence. Le célèbre Martin (5 m'a apporté 
ma pipe bien humblement. Charlet (6) a tout avoué ; il a 
fait des révélations très utiles a la chose publique. Gardés le 
plus grand secret sur cet objet; si vous entendes jaser, vous 
serés instruit et garderés le silence. On nous annonce du mouve- 
ment pour lafeste du dix aoust (7). Nous sommes prévenus : c'est 
un grand point. 

• Je vous prie de vous tenir sur vos gardes. Le projet des me- 
neurs cannibales de Marseille est d'exterminer tout ce qui est 
honnête et n'a pas volé et assassiné depuis le commencement de 
la Révolution. 

Soyés en garde contre tous ces hommes et très retenu pour 
accorder amitié et protection a des hommes qui n'ont cessé de 
nous accuser et de nous maudire, lorsqu'ils ont cru que nous 
étions les plus faibles, et n'ont cessé de nous aduler lorsqu'ils 
imaginoient que nous pouvions leur être utiles. J'ai des raisons 
particulières pour vous donner ces avis. Je dois y ajouter 
qu'Olivier Gerente (8) s'est emparé de la correspondance, qu'il ne 

(4) Personnage non identifié. 

(5) Voy. lettre XXVI, note 3. 
(G) /dew, note 2. 

(7) Le 8 thermidor an IV, Chenier fit voter par le conseil des Cinq-Cents que les 
fûtes du 14 juillet et du lo août seraient désormais célébrées chaque année. 
< Gloire immortelle, s'écria-t-il, au 9 thermidor qui a renversé la tyrannie décemvi- 
virale, mais aussi gloire immortelle au 14 juillet, premier jour de la Révolution 
française î Gloire immortelle au 10 août, dernier jour du despotisme, d [Moniteur. 
n* 3i:^, an IV.) Le 10 thermidor, le conseil des Anciens approuva cette résolution. 
La fête du 14 juillet devait Otre célébrée le 2G messidor et celle du 10 août le 23 ther- 
midor. 

.8) De Gêrenle, dénommé tout simplement Joseph-Fiacre, citoyen de Pernes. 
district de l'Ouvéze, dans le procès-verbal de l'assemblée électorale tenue à Valence 
du '2 au 14 septembre 1792 pour l'élection des députés à la Convention, s'appelait en 
réalité d'Oliyier de Gérente, ainsi qu'en témoigne l'acte de son mariage, en 1781, avec 
Mario-Thérè*;c de Pcyre. fille de François-Antoine, conseiller du roi, juge royal et 
criminel tir la ville et vit.'U(Mio do Peaucairi-. 11 était fiK de Joseph d'Olivier de 



hE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE^ 247 

me montre quasi jamais, pour avoir le plaisir de faire le faiseur. 
Que ceci reste entre vous et moi. Votre petit neveu commence à 
marcher seul; ce qui nous amuse beaucoup. La citoyenne 

Gérente et de Catherine de Salva, de Mollans en Dauphiné, et c'est à Mollans, pays 
de sa mère, qu'il naquit le 3o août 1844, bien que son pure habitât Carpentras. 
Avant la Révolution, il servit dans les gendarmes de la ^»-arde du roi où il était entre 
sous Louis XV, en 1764 Ayant peu de goût pour l'état militaire, il l'avait quitté au 
bout de quelques années et s'était retiré à Pernes, dans le comté Venaissin où il fut 
élu premier consul. En 1775, sur la présentation du conseil de ville, le vice-légat le 
nomma juge-viguier. 11 siégea dans lés États du Venaissin, à Carpentras, comme 
premier consul de Pernes. (Voir Dictionnaire de la Drôme de Brun-Durand.) 

Il embrassa dès le début les principes de la Révolution et fut élu le 14 septembre 
1791, membre de la Législative, et le 5 septembre 1792. député de la Drôme à la 
Convention (le troisième) par 423 suffrages sur 463 votants. 

Voici le portrait qu'en fait l'auteur des Mémoires en italien et en français sur la 
Révoludon française, t. II, p. 218, publiés à Rome en 1793 : « Possédant l'art de 
débiter des riens avec une emphatique facilité, suppléant au défaut d'esprit par son 
impudence, il sut feindre cette hypocrite popularité qui séduit la multitude et dont 
se couvraient tous les factieux. Son système était celui des hommes corrompus qui 
ne cherchent qu'à satisfaire leurs passions, en foulant aux pieds tout principe de 
vertu. » En réalité, l'homme valut mieux que le portrait. A la Convention il siégea 
toujours parmi les modérés et dans le procès du roi il vota, pour le sauver, d'abord 
la détention, puis le sursis. Lié avec les Girondins, il fut un des 73 députés qui, le 
6 juin J793, eurent le courage de protester contre les journées des 3i mai et 2 juin. 
Il fut de ce chef décrété à son tour d'arrestation et ne dut son salut qu'au neuf ther- 
midor. Rappelé à la Convention le 18 frimaire an III, avec ses autres collègues pro- 
testataires, il fit voter le 2 pluviôse an III, la célébration d'une fête annuelle commé- 
morative de la chute de Robespierre, par opposition à l'anniversaire du 21 janvier 
qu'avaient institué les terroristes. Tous les actes d'Olivier de Gerente jusqu'à la fin 
de la session furent marqués d'un esprit de réaction contre le terrorisme. Envoyé en 
mission (1794) dans les départements du Gard, de l'Hérault et de la Lozère, il se trou- 
vait de passage â Avignon, au moment de l'arrestation du marquis de l'Estang qui y 
avait fomenté une insurrection royaliste, dans laquelle le représentant Boursauli, 
alors en mission en Vaucluse, faillit périr. Olivier-Gérente contribua à ramener 
l'ordre dans celte ville. Sa mission dans le Midi fut du reste humanitaire et répara- 
trice de la terreur des agents de Robespierre. 

Rappelé à la Convention le 10 vendémiaire an IV, il fut réélu au Conseil dcb Anciens 
comme député de la Drôme, mais ne cessa de s'occuper des intérêts de celui de 
Vaucluse et entretint une correspondance active avec tous les hommes politiques de 
ce département, au grand déplaisir de Rovére, qui voyait ainsi son influence s'amoin- 
drir. Éliminé par le sort du Conseil des Anciens en mai 1797, Olivier-Gérente vint se 
fixer à Avi;:rnon et fut nommé président de l'administration centrale de Vaucluse et 
conservateur des forêts du même département. Pendant toute la durée du Consulat 
et de l'Empire il fut membre du conseil général. L'empereur le fit baron le 8 avril 
i8i3 et, le i3 mai i8i5, Vaucluse l'élut représentant a la Chambre des Ceni-Jruirs. Le 
7 juillet de la même année il fut décoré de la Légion d'h(»nncur. 

La Révolution de i83o lui rouvrit la carrière administrative. 11 siégea de nouveau 
au conseil général de Vaucluse et en fut élu président. Il mourut à Travaillans 
(Vaucluse^ dont il était maire, à sa campagne de Saint-Jean, le 21 juin i83;, âgé de 
v^ ans. 

tMivicr de (îércntc lais<;a deux fils. L'ainé. Ilippoîyte. né i\ .Kvijjnon en ryS-j, décéda 
à Paris en mai \Hr>>. Lntru d'abord dans l'adminisiraiion des toieis de ri'^tai, cl en 



248 MÉMOIRES 

Galean-Janson (9) est-elle dans nos départements, ainsi que la 
citoyenne sa mère nous Ta assuré (10)? 
Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XXXII. 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon, 

Paris, le ao thermidor an 4 de la Republique (7 août 1796). 

J'ai reçu votre lettre du 12, mon cher frère. J'ai vu tous les soins 
et toutes les courses que vous avés faites pour finir notre affaire 

i835, fut nommé administrateur du domaine privé du roi. Sauf une courte interrup- 
tion en 1842, il représenta à la Chambre des députés l'arrondissement de Carpentras 
de i837 â la Révolution de 1848 qui le rendit définitivement à la vie privée. Casimir, 
second fils d'Olivier-Gérente, était sous-préfet de Carpentras en 1837; il mourut à 
Nyons (Drôme). le 3i décembre 1847. 

(9) Cornélie-Henriette-Sophie-IIortense-Louise-Gabrielle, princesse de Galéan, avait 
épousé Michel-Palamède de Forbin, marquis de Janson. Elle était née le 24 mars 
1763, fille de Charles-Hyacinthe-Antoine de Galéan. baron des Issards et de Cour- 
tine, sire et marquis de Salerne, comte du Castellet, seigneur des Angles, et de 
Marie-Françoise-Henriette Trémoletti de Montpezat, née 1029 mai 1739 et mariée 
elle-même, le i" septembre i758(Ronnet et Pasteur, notaires à Avignon). 

La maison de Galéan, originaire de Toscane, était venue s'établir à Avignon en 
i352 et avait formé trois branches : Galéan. seigneurs de Vedènes et depuis barons 
des Issards; Galéan, barons de Vedènes et depuis ducs de Gadagne ; Galéan, sei- 
gneurs du Castellet, de Cadarache. marquis de Salerne. ducs de Galéan, princes 
romains et du Saint-Empire, devenus aussi barons des Issards par l'extinction de la 
première branche et le mariage de Charles-François de Galéan, seigneur du Castellet, 
avec Lucrèce-Gabrielle de Galéan des Issards (28 mars 1668). 

Charles-Hyacinthe- Antoine de Galéan précité, était né le 18 septembre 1737 du 
mariage (i73i) de Charles-Hyacinthe de Galéan. marquis de Salerne et des Issards 
(mort le 17 août 1754). et de Madeleine Yolande-Adélaïde-Charlotte-Félicité (décéJée 
en i743),fille de Gaspard-Palamède de Forbin, seigneur de la Barben. 

Le même, d'abord grand-maître de la maison du prince-électeur Palatin, fut créé 
prince romain avec toute sa descendance masculine par le pape Clément XIII I1759) 
et prince du Saint-Empire romain, avec tous ses descendants des deux sexes, par 
diplôme de l'empereur François 1" du i5 septembre 1761. Depuis, il s gnail 
prince Galaén des Issards. et c'est en vertu de ce titre transmissible que sa 
fille, après son mariage avec le marquis de Forbin-Janson, signa à son tour marquise 
de Forbin-Janson. princesse de Galéan. 

Armes des Galéan : < a d'argent à une bande de sable remplie d'or, accompagnée 
de 2 roses de gueules. Pour cimier : un tion d'or; devise : ab^ottice sœvioribiL (Diction- 
naire de la noblesse de la Chenaye-Desbois.) 

(10) Il résulte de la note précédente que la mère de la citoyenne Forbin-Janson 
était Marie-Françoise-Henriette Trémoletti de Montpezat, fille elle-même de Jean- 
Joseph-Paul-Antoine Trémoletti, duc de Montpezat-lez-Uzès en Languedoc, baron de 
Montmaur en Dauphiné et de Marie-Justine-Espérance d'Agoult-Montmaur. 



DE l'académie de VAUCLUSE 249 

du moulin. Je presumois qu'il ssroit évalué plus haut ; voila une 
partie du prix, nouvellement décrété, payée par anticipation. Il 
faudra que vous me fassiés passer une note exacte de ce que nous 
devons encore, pour que je me mette en règleet a Tabri de toute 
déchéance, TafTaire étant très bonne et pouvant être portée au 
moins a quatre mille livres de rente, avec quelques réparations, 
et rassurance d'avoir son revenu malgré la grêle, le vent et la 
gelée. 

Vos propositions, mon cher ami, sont inadmissibles. Je ne puis 
joindre Marchand, et je ne pourrai en venir a bout que lorsque 
les anarchistes seront tout a fait terrassés. Je vous ai dit dans ma 
précédente que j'évaluerai votre portion du Large (i) a deux mille 
livres et le moulin quatre, ce qui vaut six; jugés si ma portion 
yaudroit mieux. Souvenés-vous dans quel état j'ai trouvé la 
succession de nos pères. Vous parlés des sacrifices que vousavés 
faits : je ne les dispute pas, mais je sçais aussi que pendant mon 



(1) Voici sur ce domaine quelques détails complémentaires de ceux qui ont été 
donnés. Lettre I, note 4. 

• Le 8 germinal an III, Jacques-Nicolas Levillain. négociant A Paris, rue de Bussy, 
n' i5i, vend à Simon-Stylite Rovére, vice-consul de la République à Livourne, 
demeurant à Paris, rue de Grenelle, io3, la moitié appartenant audit Levillain: 
!• d'une grange avec son tènement de terre appelé le Large, etc.; 2 d'une terre de 
même origine (les Dominicains d'Avignon), bordée de mûriers, avant une allée de 
saules, sise au terroir d^ l'isle, etc. (Lettre I, note 4.) 

« Cette moitié de terres appartient à Levillain comme propriétaire, conjointement 
avec René-Joseph Marchand, de la totalité d'icclles, au moyen de la vente qui leur en 
a été faite par Raymond Verninac et Fleury Gombault, suivant contrat passé devant 
Ballet (?) notaire à Paris, le i5 brumaire dernier ; lesquels Verninac et Gombault s'en 
étaient rendus adjudicataires au Directoire du district d'Avignon, suivant procès- 
verbal du 24 ventôse de Tannée dernière, comme propriétés nationales, > 

Par ce môme acte du 8 germinal an 111. il est dit que Rovère Stylite paye à Levil- 
lain pour prix d'achat de sa moitié. ii.Soo livres en assignats et qu'il s'engage en 
outre, à remettre chaque année, un mois après la récolte, à Levillain et à son épouse 
Catherine d'Espagne, en tel endroit qu'il désignera à Avignon, la quantité d'au 
moins 3oo bouteilles de vin cru, de la terre présentement vendue ou de deux ton- 
neaux, valeur évaluée à cent livres par an. Cet acte fut transcrit en entier, le 
27 prairial an Vil, au bureau des hypothèques d'Avignon, où on peut encore le 
consulter. 

Telle est l'origine exacte de la propriété qu'avait Rovère jeune de la moitié du 
domaine du Large. Quant d la seconde moitié, celle appartenant à Marchand, qu'il 
convoitait si ardemment, afin déposséder la totalité, disons tout de suite que, malgré 
les belles assurances que lui donne son frère dans ses lettres, elle lui échappa. Par 
acte en effet du i5 vendémiaire an VII (6 octobre 1798). ledit René-Joseph Marchand, 
demeurant à Paris, rue .de Sèvres (?) n* 1292. vendit sa part indivise, au prix de 
17.800 livres, à André-Joseph Taffin, rentier à Paris, boulevard de la Madeleine, 
n* 043, avec jouissance à compter du r' floréal prochain. Cet acte de vente se trouve 
également transcrit au bureau des hypothèques d'Avignon. 



2So MÉMOIRES? 



• 



procès avec Barrct (2) et depuis la Révolution, je n'ai cessé de 
disputer le ^terrain a la pointe de Tepée et que si je suis parvenu 
a quelque chose, j'en ai été le principal artisan. Souvenés-vous 
que dans un partage il ne faut tout vouloir. 

Par la nouvelle loi, les cessions de biens nationaux ne doivent 
point de droit d'enregistrement ; ainsi, nous nous arrangerons; 
quand vous voudrés, aux conditions que j'ai acquiessées après 
votre lettre du dit. Je n'ai pas entendu parler d'une reforme des 
commissaires des guerres ; il s'agit d'une loi relative a leur orga- 

(2) François de Saint-Marc, âgé de 83 ans, dernier héritier d'une famille de robe 
d'Aix-en-Provence, retiré à Bonnieux, avait, par son testament mystique du 12 août 
1765, constitué pour héritier universel Ripert de Baret, son parent résidant à Apt. 
Dès que les Rovùre, qui se prétendaient aussi parents â un degré plus rapproché du 
testateur, eurent connaissance de ce testament, ils accusèrent Barret de captation 
d'héritage, enlevèrent le vieux Saint-Marc de son domicile de Bonnieux (17 mars 1770) 
et le conduisirent chez un notaire d'Orgon.'où à la fois par menace et par persuasion, 
ils lui extorquèrent un acte en bonne forme par lequel le sieur de Saint-Marc faisait 
donation solennelle et irrévocable de tous ses biens fonds à Joseph-Stanislas-Fran- 
çois-Alexis de Rovère-Fontvielle, son cousin, à la seule charge pour le donataire et sa 
postérité, de porter le nom et les armes du sieur de Saint-Marc. (Note aux minutes de 
Rostand, notaire à Orgon, le 21 mars 1770.) Mais, le même jour, Ripert de Baret, 
l'héritier évincé, porta plainte contre l'enlèvement criminel du vieillard et la donation 
que Rovère lui avait arrachée. Il s'ensuivit un procès qui fut porté successivement 
devant le lieutenant-criminel ae la sénéchaussée d'Avignon — c'était pendant l'occu- 
pation française — et devant le Parlement d'Aix. Ce dernier, par ses arrêts des 
27 février et i5 juin 1771, déclara qu'il y avait eu enlèvement fait par violence de la 
personne du sieur de Saint-Marc et captation de donation et* décréta les Rovère père 
et fils, de prise de corps. Ceux-ci en appelèrent en cassation à Paris pour vices de 
forme. De part et d'autre, on prit les meilleurs avocats. Le fameux Portails plaida 
pour Ripert de Barret, M* Demours de Paris pour les Rovère-Fontvielle. Il y eut des 
arrêts contradictoires, des ajournements, mais enfin en 1775, intervint sentence défi- 
nitive du Conseil d'Étant du roi, déboutant Rovère-Fontvielle fils de toute prétention 
sur la succession du sieur de Saint-Marc et le condamnant à tous frais et dépens. 

« Cette succession, dit un contemporain {Histoire de la Révolution d'Avignon, Rome 
1793, en italien et en français), Rovère avait cherché à l'enlever en corsaire, mais il 
n'en relira d'autre fruit que d'avoir consommé sa propre fortune à la poursuite de 
celle qui lui échappa et d'avoir été décrété de prise de corps avec son père et sa 
mère qu'il avait entraînés dans ce forfait. -» 

Ajoutons toutefois que si Rovère perdit l'argent, il garda du moins le titre et qu'il 
parut désormais dans le monde, sous le nom de marquis de Fontvielle-Sainl-Marc, 
donnant ainsi l'illusion d'une parenté authentique avec une famille des plus consi- 
dérables et des plus considérées de Provence, qui comptait encore à cette époque, de 
norhbreux magistrats au Parlement d'Aix et notamment le procureur-général baron 
Ripert de Monclar-Saint-Marc. 

Voir sur ce procès retentissant : i* Mémoire instructif pour le sieur de Barret de la 
ville d'Apt, contre le sieur de Fontvielle de la ville de Bonnieux, sur l'instance en 
cassation pendant au conseil de Sa Majesté, des arrêts du Parlement de Provence des 
27 février et i5 juin 1771. {Signé : Portails, avocat.) 

2" Précis pour le sieur de Fontvielle-Saint-Marc contre le sieur Ripert de Barret 
par M* Demours, avocat. (Paris, i775.) 



DE l'académie de VAUCLUSE 2^1 

nisation(3). J'ai préparé sur cet objet une opinion; je m'infor- 
merai plus exactement de ce que Ton compte faire, mais je peux 
vous assurer qu'il n'y a ni loi, ni arrêté du pouvoir executif. Je 
serai très charmé d'être utile au citoyen Sartelon (4), que je 
connois sous les rapports les plus avantageux. Quant aux acqui- 
sitions, je crois que la prudence exige d'aller pas a pas ; il faut , 
terminer le payement du moulin ; nous verrons ensuite ce qu'il y 
aura a faire. Les biens de M. d'Entrechaux (5) sont grevés d'une 
infinité d'hypoteques et sont une fourmilière de .procès : il faut 
donner dans des afiaires nettes. Je croîs que le payement du 
quatrième quart au cours faira déguerpir beaucoup d'accapa- 
reurs. 
Je suis charmé que les citoyens Trie, Guion et Guerin (6) 

(3) Le corps des commissaires des guerres était régri par la loi du 28 nivôse an III. 
Dans la séance du Conseil des Cinq-Cents du 14 thermidor an IV, Savary, député de 
Maine-tt-Loire, présenta un projet de rcorganisQtion de ce corps qui fut renvoyé à 
une commission spéciale. C'est à ce projet de loi que Rovôre fait allusion. Mais ce 
projet dormit longtemps dans les cartons et ce ne fut que bien plus tard, le 23 fruc- 
tidor an VII (9 Septembre 1799) qu'une loi réorganisa le corps sur de nouvelles bases. 

(4) Sartelon (Antoine-Léger), né à Tulle (Corrèze), le i6octpbre 1770, était en l'an IV 
commissaire des guerres de la 8' division, en résidence à Avignon et y était employé 
comme garde-magasin des subsistances militaires. II s'y trouvait encore l'année 
suivante, à répt»que des sanglantes journées de pluviôse et mérita les éloges du 
général Tisson pour sa belle conduite et le courage qu'il montra. EmplO)é ensuite à 
l'armée d'Italie, il fit plus tard la campagne d'Egypte, d'abord comme commissaire 
des guerres, puis comme ordonnateur. Sous l'Empire, il fut employé comme commis- 
saire ordonnateur de la grande armée et fit en la môme qualité les dernières campa- 
gnes de Napoléon. 

Député de la Corréze au Corps législatif de 1814 à 1817, il ne fut pas réélu en 1818 
et fut compris dans l'organisation du corps de l'intendance avec le grade d'inten- 
dant militaire. Il mourut à Châlons-sur-Marne où il était intendant de la 2* division, 
le 2 noven.bie 1825. 

(5) Personnage non identifié, appartenait peut-être à la famille d'Entrechauxd'Aix. 
annoblie en la personne de Joseph-Gerfroy d'Entrechaux, reçu conseiller au parle- 
ment de Provence le 5 janvier i-iS; ce pourrait être cet Entrechaux, ancien officier de 
marine, qui déclara adhérer à la protestation faite par la noblesse de Provence, dans 
son assemblée du 20 janvier 1789. 

|6) Trie (Jacques), originaire de Lyon, ex-procureur de la Chartreuse de Portes, fut 
nommé vicaire-général de l'évoque constitutionnel du Gard, le i" août 1791- H en fut 
aussi pendant quelque temps le premier secrétaire. Un des menibres fondateurs de la 
Société populaire de Nimes (i3 novembre 1791). il en devint bientôt le président. Le 
i5 frimaire an II. il abdiqua ses fonctions ecclésiastiques et son titre de vicaire épisco- 
pal. 11 était alors Agé de 61 ans. Entre temps, l'ex-chartreux avait fait plusieurs séjours 
à Avignon, notamment en février 1791, époque à laquelle il avait été délégué avec 
Corbeau, capitaine d'artillerie, par la Société des Amis de la constitution de Valence, 
pour faire rapport sur les troubles d'Avignon et du comté Venaissin, On peut lire ce 
rappon qui porte la date du 4 mars 1791. dans le ms. de la Bibliothèque d'Avignon, 

• 2538, fol. 159. Philippe Labaume, qui s'intitule le V'éridiquc, dit de lui ilJcm, ms. 
n* 29*X) , à propos de sa mission à Avignon: «Trie le petit, qui s'insinue partout 



252 MÉMOIRES 

soient aux bons principes ; nous en avons besoin pour maintenir 
la tranquillité dans notre département. 
Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XXXIII. 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon. 

Paris, le 36 thermidor an 4 de la Republique (i3 août 1796). 

Je vous fairai passer, mon cher frère, une procuration pour 
affermer le moulin deCourthezon. M. de Roussières me garantit 
que sa valeur sera portée â quatre mille livres, qu'il se charge 
d'être notre surveillant ; il nous conseille de ne l'affermer que 



et prétend faire l'important à l'ombre de Corbeau son compagnon. » Pendant 
le séjour des Marseillais à Avignon^ Trie fut arrêté; incarcéré et fut du nombre 
des 32 prisonniers qu'ils firent conduire dans les prisons de Marseille dont ils 
ne sortirent qu'à l'entrée du général Carleaux dans celte ville, le 25 août 1793. 
Il retourna alors t\ Nimes, puis vint à Avignon, ou dès le mois de pluviôse 
an II, nous le trouvons membre du directoire de ce district. Il sut y faire ses 
affaires, si ce que nous en raconte Afrricol Moureau est vrai : a Trie, dil-il, étaij 
prêtre et moine, vicaire frénéral de l'cvCque du Gard. Il vint un jour me trouver au 
Département. Le nctier «Je prêtre ne vaut plus rien, me dit-il, faites en sorte de me 
faire avoir du pain. — Je lui offre une place de 1.800 livres. Sur ces entrefaites. 
Rovère lui propose une place d'administrateur au district. Il opte pour cette dernière 
et préfère ainsi 1.200 à 1.800 livres de traitement. C'est beau de la part d'un moine, 
mais attendez, le moine va reparaître. Simple commis au département, il n'eût pas 
présidé aux ventes des biens nationaux, à leur dilapidation, à leur vente fraudu- 
leuse faite a ses amis au-dessous de leur valeur. Il n'eût pas acquis une honnête 
fortune. » Il était en effet président du district d'Avignon, lorsque le 14 floréal an II 
sur un ordre du représentant Maignet, il fut arrêté et écroué aux prisons du Palais 
pour malversations dans l'adjudication des biens nationaux. 11 fut élargi par un 
arrêté du Comité de salut public du 29 thermidor an II et il était directeur de la poste 
aux lettres à Avignon, emploi auquel il avait été nommé le 8 brumaire par le repré- 
.sentant Goupilleau, successeur de Maignet, lorsque un arrêté du Directoire exécutif 
du 16 nivôse an IV, en fit un des administrateurs du département de Vaucluse, 

— Guion, natif de Sault, fut nommé le 9 brumaire an III membre du district de 
Carpentras. Il était antérieurement procureur de la commune. 11 fut nommé admi- 
nistrateur du département de Vaucluse par arrêté du Directoire exécutif du 16 nivôse 
an IV. A la même époque son fils était commissaire des guerres à l'armée d'Italie. 

— Guérin, originaire de Carpentras, était en vendémiaire an IV conducteur en chef 
des charrois à Avignon, lorsque le même arrêté du Directoire exécutif du 16 nivôse 
an IV le nomma administrateur du département de Vaucluse. 



DE l'académie de VAUCLUSE 253 

pour une année; je crois même qu'il seroit prudent de prendre 
quelques pots de vin. Vous êtes prudent et sage, sur les lieux, et 
vous fairés tout pour le mieux. Je vais passer chés le notaire 
pour faire rédiger la procuration. 

Je vais chercher les papiers du Révérend Père Trie (i) ; il sera 
peut-être un peu difficile de trouver ses Jamentations, mais je 
voudrois bien a mon tour que Ton me fit payer mes honoraires 
de 91 et 92 auprès de l'Assemblée législative. Vous aviés fait des 
démarches dans le temps auprès de la première commission ; j'en 
avois fait nommer une seconde par décret de la Convention, 
Magnon (2) en etoit membre ; quelques opérations ont été enta- 
mées. Ce seroit une excellente afiaire de venir a bout de se faire 
payer une dette aussi sacrée et aussi ancienne. 

Je ne puis pas venir a bout de voir M. Marchand. Tant que 
les exclusifs auront quelques espérances, je ne pourrai le rejoin- 
dre. Alors, il pourra se départir de la moitié de son acquisition. 

Je vais m'occuper de l'afiaire qui interesse M"** de Gram- 
mont (3), le cy-devant recteur Pieracchi (4), appelé M. le comte. 



(i) voir lettre précédente. 

(2) Cette commission fonctionna sous Jean Debry, représentant du peuple, envoyé 
en mission dans la Drôme, l'Ardèche et Vaucluse (an II). Jean Debry avait amené 
avec lui Magnon comme secrétaire en chef. 

(3) André-Joseph-Hippolyte de Gramont-Caderousse avait épousé en 1779 Marie- 
Gabrielle de Sinéty. Il était fils de Marïe-Philippe-Guillaume de Gramont, qui ayant 
recueilli en 1767 les biens de la maison d'Ancezune, parmi lesquels était le duché de 
Caderousse. porta le premier le titre de duc de Gramont-Caderousse. 

La maison de Gramont établie en Dauphiné depuis le milieu du XV* siècle, avait 
été titrée marquis de Vachères par lettres-patentes de juin 1688. 

Emmanuel de Gramont, duc de Caderousse. fils de André-Joseph-Hippolyte et de 
Marie>Gabrielle de Sinéty, fut maréchal de camp, chevalier de Saint-Louis et de la 
Légion d'honneur. Il décéda en 1841- 

Les Gramont-Caderousse avaient leur hôtel à Avignon au n* 24 du Plen de Lunel. 

(4) Pieracchi (Christophe), né â Pise, de famille noble, fut nommé recteur du comté 
Venaissin par bref du pape du 3o mars 1787. Il se trouvait alors en France depuis 
plus de 13 ans. Il y était venu en qualité d'auditeur de la nonciature auprès du 
nonce apostolique Joseph Doriâ et quand celui-ci quitta la cour du roi de France 
pour retourner en Italie, après avoir été promu cardinal en 1785, Pieracchi resta seul 
chargé de la nonciature. 11 ne vint prendre possession de son nouveau poste à 
Carpentras qu'à l'arrivée à Paris du nouveau nonce, en novembre 1787. D'impor- 
tantes négociations l'ayant rappelé à Paris, il y retourna vers le milieu de janvier 
1788. tout en conservant son titre de recteur du comté Venaissin. Son absence ne fut 
d'ailleurs que momentanée, et le 23 septembre 1789, il revenait définitivement à 
son poste. Son séjour à Paris n'avait pas été inutile pour les intérêts du Comtat. 
Grâce à ses démarches, il avait pu garantir cet État de l'augmentation que les fer- 
miers généraux de France voulaient établir sur le prix du sel qui se consommait 
dans les États pontificaux de France, sous prétexte que les habitants de ces deux 
pays fournissaient en contrebande du sel aux provinces françaises voisines. Ainsi 



2D4 MÉMOIRES 

est ici en qualité de ministre plénipotentiaire du pape. Dites bien 
des choses au citoyen Gasquy(5^;, auquel je prends le plus vif 
interest. 

La citoyenne la Saulais (6; et plusieurs autres personnes de 
notre connoissance vous saluent et se plaignent de votre silence, 

échoua définitivement la tentative que les fermiers généraux poursuivaient avec achar- 
nement depuis 1786. Quand Pieracchi quitta Paris, la capitale et la province étaient en 
grande fermentation relativement à la nouvelle constitution que l'Assemblée natio- 
nale voulait donner au royaume. Les esprits n'étaient pas moins agités à Avignon et 
dans le Comtat où l'on réclamait aussi des réformes et tandis qu'Avignon s'arra- 
chait brutalement à la domination pontificale, le Comtat rêvait d'avoir, comme en 
France, ses États généraux. Pieracchi ne put empêcher que, malgré la défense du 
pape, ceux-ci ne s'assemblassent sous le nom d'a> semblée représentative (24 mai 
1790). Le zèle qu'il mit à maintenir la paix dans le pays, môme en faisant des 
concessions qui furent blâmées à Rome, fut en pure perte. On ne tint pas davan- 
tage compte du service qu'il avait rendu aux habitants en obtenant du Saint-Siège 
renvoi de blé d Italie dans cette période calamiteuse. On lui fit un grief a'avoir 
prohibé les attroupements, d'avoir créé une garde dont il avait été nommé généra- 
lissime, d'avoir augmenté le nombre des cavaliers de maréchaussée destinés à main- 
tenir l'ordre. On l'accusa d'avoir mis tout en œuvre pour contrarier le vœu du peuple, 
en refusant de demander à la cour de Rome d'autoriser la tenue de l'assemblée 
représentative. Il fut contraint de se justifier sur ces divers chefs d'accusation 
présentés contre lui dans la séance de cette assemblée du 25 octobre 1790. ^ù il fut 
du reste proposé de- supprimer le tribunal de la rccturie et d'inviter Pieracchi à. 
sortir du Comtat dans les trois jours. Cette suppression fut en eHet \otée le lende- 
main 26, mais par application de la DècUraiwn des droits de l'homme, le recteur 
dépossédé fut autorisé à rester comme simple particulier dans le Comtat ou à s'en 
retirer purement et simplement. 

Dans la séance du 27 octobre, lecture fut faite des réponses écrites de Pieracchi 
aux imputations calomnieuses dont il était l'objet. Elles parurent convaincantes à 
l'assemblée, qui le 29 déclara unanimement qu'il n'y avait pas lieu à inculpation 
contre lui. Mais la situation s'aggravant chaque jour. Pieracchi prit le parti de quitter 
Carpentras et se retira provisoirement au couvent des Minimes d'Aubignan 
(24 décembre 1790), sis à une petite distance de Carpentras, pour y attendre les 
événeibents. Le 10 janvier 1791, à la nouvelle qu'une troupe partie d'Avignon 
venait assiéger Carpentras, il se transporta dans le village de Bouchet, sur les 
limites du haut Comtat. puis successivement à mesure que la révoJuticiU comtadine 
devenait plus menaçante, à Montélimar et à Chambéry. C'est de cette dernière ville 
que le 5 mars, il lança une protestation solennelle contre tous les actes faits ou qui 
pourraient être faits dans le comté Venaissin et à Avignon, contre les droits de la 
souveraineté pontificale. Il partit ensuite pour l'Italie. 

Pieracchi fut le dernier recteur du comté Venaissin La rectorie de cette province 
avait duré 5 16 années, de 1274 à 1790. Mais on voit par celte lettre que le rôle poli- 
tique de Piera:chi ne finit pas avec elle. 

(5) Gasquy (Vmcent-Marie-Xavier), homme de loi. avait été porté sur la liste des 
émigrés du département de Vaucluse dressée le 4 prairial an II. Il en fut rayé par 
arrêté du Comité de législation du 10 messidor an IV. grâce aux pressantes sollicita- 
tions de Rovère. 

(6) Le marquis de La Saulais avait fait partie de l'armée de Condé pendant l'émi- 
gration et fut fait grand'croix de Saint-Louis le 20 janvier iHoi. Cette famille appar- 
tenait à la noblesse de Bretagne. 



DE L* ACADÉMIE DE VAUCLUSE 255 

entre autres le pauvre Grimaud (y), qui attend avec impatience 
votre réponse. 

Mandés-moi, comme je vous Tai dit, la note précise de ce 
qu'il est du pour le quatrième quart. 

Adieu» mon cher frère, je vous embrasse de tout mon cœur. 

SigJié : J.-S. RovÈRE. 



XXXIV. 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon, 

Paris, le 4 fructidor an 4 de la Republique (21 août 1796). 

Jecomptois vous faire passer aujourd'hui, mon cher frère, la 
procuration que vous m'avés demandée : les lambineries des 
gens d'affaires de Paris me forceront d'attendre le prochain cour- 
rier. 

J'ai vu M. Roussières, qui m a donné l'état ancien et nouveau 
du moulin ; il etoit affermé cinq mille livres avant la Révolution 
et quinze cent livres actuellement. M. de Modcne (i) s'etoit refusé 
aux réparations les plus urgentes ; il s'agira de le reparer et de 
le mettre sur le pied des moulins de Sorgues avec des bluttoirs, 

(7) Personnagre non identifi'4. 

(1) François-Charles de Raymond de Mormoiron. comte et marquis de Modène, né 
en 1734, entra dans la diplomatie dès l'ûge de 17 ans. Attaché d'abord aux ambas- 
sades de Madrid et de Venise, il devint ministre plénipotentiaire en AUemagrne en 
17G2 et en Suéde au mois de mai 1768. Au moment où éclata la Révolution, il était 
gentilhomme du comte de Provence, et gouverneur du palais du Luxembourg 
à Paris. Il avait épousé le 3 octobre 1773, une filleule de Louis XVI, Philippine- 
Louise-Christophe de Lieurray, fille de Jean-Baptiste baron de Lieurray et de 
Marie-Charlotte de Mezières. Pendant Témigration, le comte et marquis de Modène 
suivit le duc de Provence en Prusse et y mourut en 1799, laissant deux fils, 
Taîné Gabriel qui se fit naturaliser russe, et le cadet Amédée-Hippoîyie-Joseph- 
Charles-Chrysaiithê, né le 5 avril 1777 et mort au château de Verneuil en Touraine, 
le 29 novembre 1860. Il était chevalier de Saint-Louis, officier de la Légion d'honneur 
et ancien maréchal de camp. 

Modène est une petite commune de 188 habitants, à 9 kilomètres de Carpentras. 
François-Charles de Raymond de Mormoiron précité rendit hommage au pape 
pour la terre de Modène. le i3 juin 1781. La famille de Raymond de Mormoiron- 
Modène, quand elle ne résidait pas à Paris, habitait Carpentras. rue Dorée, dans son 
hôtel qui depuis a appartenu successivement aux marquis de la Valette et Brassier 
'de Jocas. (Voir J.-L. Prompsault. Histoire de Modène, Carpentras, i883.) 



256 MÉMOIRES 

ce qui nous assurera un rapport au moins de quatre mille 
livres. 

D'après votre lettre enonciative de divers objets impôrtans, 
délaissés par les soubmissionaires depuis la loi du payement 
au cours, j'ai parlé a Combes (2); il ma autorisé et prié de 
vous écrire d'arrêter tout ce qu'il y auroit de beaux et bons 
objets, que l'argent ne manqueroit pas et que nous nous 
entendrions pour la partie d'interest respectif. Je sens que 
vous me fairés l'objection qu'il seroit assés imprudent de 
mettre sur nos têtes ces différentes soubmissions ; vous pou- 
vés vous entendre avec Vaton et tel autre, ni'envoyer sans 
délai la note des objets, la manière dont vous aurés traité et les 
procurations dont vous aurés besoin. Je crois qu'il n'y a pas a 
balancer et qu'il faut agir avec célérité. 

Souvenés-vous bien de ne pas vous laisser duper pour 
l'échange du moulin ; Roussières, qui s'entend aux affaires, m'a 
assuré que c'etoit une excellente possession, qui ne peut être 
endommagée, ni contrariée par aucun événement. Vous verres les 
nouvelles par les papiers publics : nous sommes toujours a 
lutter contre les coquins. 

Trie ma écrit ; je lui ai repondu ) ces messieurs ne sçauroient 
plus mal faire que de nommer au département un intriguant 
appelé Lefebvre (3^ le dénonciateur de tous les gens honnêtes, le 



(2) Personnage non identifié. 

(3) Lefebvre (J.-Louis) qu*on dit originaire de Mazan. dans l'ancien comté Venais- 
sin, aurait été d'abord valet de Tabbé de Sade qui lui aurait appris â lire et à écrire. 
Après la mort de cet abbé, il serait passé dans les bureaux de M. d*Albertas à Aix, 
dont il serait devenu l'homme d'affaires. Pendant la Révolution» il fut tour à tour 
jacobin et royaliste, suivant que son intérêt ou les circonstances l'exigeaient. En 
1793,11 fut désigné par le Comité de salut public pour faire une enquête dans les 
départements de la Drôme, de Vaucluse et des Bouches-du-Rhône sur l'état du 
commerce, de l'agriculture et des arts et rechercher les moyens de les faire fleurir 
dans ces départements. Parmi les idées utiles qui lui furent présentées, il fut surtout 
frappé des avantages considérables qui résulteraient de la construction d'un canal 
déjà anciennement projeté par l'ingénieur Antoine d'Allemand {1717) qui, dirigé 
de Saint-Chamas, en Provence à Donzère. en Dauphiné et alimenté par les eaux 
du Rhône et de la Durance, donnerait quarante lieues de navigation et arrose- 
rait environ 3 10.000 hectares de terres. Lefebvre reprit ce projet qu'il fit sien et 
l'exposa dans une brochure mtitulée : Mémoire en forme de rapport sur un canal de 
navigation, adresse au mirfistre de l'intérieur par le citoyen L. Lefebvre, commissaire du 
Directoire exécutif imprimé en exécution d'un arrêté de l'administration du district de 
Carpentras, d'après une pétition de ta Société populaire de cette ville. Carpentras, J.-A. 
Proyet, 1793, in-4* de i3 pp. Par suite des circonstances troublées de cette époque, 
aucune suite ne fut donnée à ce projet, mais le mémoire donna à son auteur dans le 
département dç Vaucluse une notoriété qui favorisa ses ambitions politiques. Devenu 



DE L*ACADÊMIE DE VAUCLUSE 25 



— '/ 



flagorneur de Freron et des satellites. J'en ai écrit a Trie et lui 
ai indiqué la voye qu'il devoit prendre pour être payé. 
Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XXXV. 

Au citoyen Rovère Jeune à Avignon, 

Paris, le 6 fructidor an 4 de la Republique {'23 août i7</»i. 

J'ai reçu votre lettre du 21 thermidor, mon cher frère, datée de 

patriote modéré au 9 thermidor (.ï), il fut après le i3 vendémiaire an IV, donné pour 
adjoint au représentant Fréron dans sa seconde mission dans le midi. 

Dclestrac, membre di l'administration du département de Vaucluse, ayant donné 
sa démission, Payan de la Coste, ci-devant agent national du district d*Apt, fut 
nommé à sa place (6 messidor an IV) ; mais sur son refus formel d'accepter la 
charge, les administrateurs, contrairement au sentiment de Rovère, désignèrent pour 
le remplacer Lefebvre (6 thermidor an IV). qualifié de propriétaire de la commune 
de Mazan (Vaucluse). 11 fut installé le 3 frimaire an V. On peut lire de Lefebvre 
|ms. n* 3545 de la Bibliothèque d'Avignon, p. 217) un discours qu'il prononça le 
9 thermidor an V, comme administrateur du département, en commémoration de la 
chute de Robespierre. Il fut depuis cette époque considéré par les patriotes exclusifs 
d'Avignon comme vendu au royalisme. On lit par exemple dans un mémoire qui a 
pour titre : Lès rèvubUciins avii^nonais traduits devant le tribunal criminel de la 
Drame, au peuple français pour la deuxième fois (Valence, 3 messidor an V|,ce portrait 
de Lefebvre : t Depuis sa dernière arrivée de Paris, il a mis le trouble dans Avignon. 
Sans fortune, sans parents, sans domicile, cet intrigant ambitieux a voulu jouer un 
rôle et a réuni autour de lui la brillante jeunesse ; il a relevé son espoir abattu, lui a 
promis les secours de son esprit et quand il est parvenu à se faire un parti composé 
dePécume de la société tels que les Carrière, les Biscornette, les Rachet, les Matafan, 
les Anrès et les Blahié(&), il n'a plus gardé de mesure. Aujourd'hui Noèl Bertrand 
est as.sassiné par ses sicaires, demain c'est Peyre et il propose audacieusement à 
l'administration centrale où il est tombé de crimes en crimes, d'appeler dans Avignon 
les bandes sanglantes de Jehu du haut Comtat. Il a échoué pour représentant du 
peuple ; caméléon politique, etc. . • (Bibliothèque d'Avignon, ms. n* 3995, pièce 34.) 
Lefebvre devint sous le consulat sous-préfet de Verdun. Il occupait ce poste en 
l'an XII. époque où il publia un écrit sur VÊtude de l'éloquence. On croit qu'il est 
mort à Paris ou dans les environs. Voir sur Lefebvre outre les sources déjà signa- 
lées, l'appréciation de Raphel, président du tribunal criminel de Vaucluse en l'an IV : 
Ms. de la Bibliothèque d'Avignon n* 35io. 

(a) Voir l'autobiograohie de Lefebvre, dit Pot-de-fer, dans l'opuscule intitulé : 
Justice contre Maignet, destructeur de Bédouin (i3 germinal an III, ms. à la bibliothè-* 
que d'Avignon, n- 3644, p. 437). 

{b) Fougueux royalistes avignonais. 



258 MEMOIRES 

Bonnieux. Je vous envoie la procuration (i) que vous désirés, 
avec laquelle vous traiterés avec Ferrier. Je vous prie d'observer 
dans la location que vous lui fairés, de ne pas obstruer le point 
visuel, tendant de la grande route a la grande porte intérieure du 
bâtiment, traversant les écuries actuelles, étant résolu a faire 
rentrée dans cette direction, au lieu de celle des anciens posses- 
seurs, qui Tavoient dirigée devant leur église. Vous pourrés 
provisoirement lui céder les bâtiments qui lui seront néces- 
saires, ainsi que les écuries, en attendant qu'il ait bâti ; et c'est 
sur cette désignation que je vous prie d'observer ma direction 
pour Tavenue que je veux faire. 

Le citoyen Grienet (2- doit partir au premier jour; vous aurés 
aussi des arrangements à faire pour un moulin a garance, dont 
je crois vous avoir envoyé depuis votre arrivée les plans. Fn cas 
que je me trompe, il vous les soumettra et vous arrangerés le 
tout pour le mieux. Dans la maison de fermier, je crois, comme 
vous me lobservés précédemment, qu'il n'y a pas de meilleur 
moyen pour tirer parti de cette maison, que d y établir divers 
objets de manufactures. 

Je vous reitère les instances de Combes pour quelques biens 
nationaux importans et productifs. 

J'approuve vos reflexions sur le culte et vos observations sur 
la situation politique de nos départements. J'ai bien recommandé 
au gênerai Willot de frapper sur les extrêmes des deux partis qui 
m'ont toujours paru également a craindre. M"' de la Saulais (3) et 
sa mère me chargent de vous dire mille choses amicales. J'ai 
diné chés elles avant hier. M"'*' la Grave (4) est a la campagne a 
soigner sa nièce qui a accouché d'une fille. Ce pauvre chevalier 
de Savornin se trouve mort, sans meubles, sans argent, sans 
hardes, et devant des arrérages a la ditte demoiselle, entendons- 
nous, des arrérages d'argent : c'est une singulière comédie que 
ce monde. J'ai fait procéder hier a la levée des scellés du défunt 
Rien de plus risible que cet inventaire ; cependant l'aveugle 
Savornin doit s'estimer bien heureux d'avoir les Isles d'Hyère et 

(i) La procuration dont il s'agit fut donnée par devant Gibert et Mathieu, notaires 
à Paris, le 4 fructidor an IV. Par cet acte, Rovère constituait son frère procureur 
général pour tous achats de biens, fermages, locations, etc. 

(a) Personnage non identifié. 

(3) M"* de] la'JSaulais, non identifiée. 

(4) M"' de la Grave, personnage non identifié, mais qui pourrait être l'écrivain de 
ce nom, romancière des plus fécondes, auteur d'un grand nombre de romans publiés 
sous le Directoire et pendant le Consulat et l'Empire. 



t)E l'académie de VAUCEUSE 2D9 

les biens de Villeneuve : un homme adroit les eût achetés facile- 
ment. Quinze jours avant sa mort, Chiappe ^5) voulait les acheter. 

Vous aurês peut-être trouvé encore a Avignon le gênerai 
V^illot, porteur d'une lettre pour vous : c'est un brave homme ; 
son voyage nous avoit continuellement fait peine par les bruits 
que les exclusifs faisoient courir de sa mort. 

Vous verres par les papiers publics comme quoi divers minis- 
tres extraordinaires ont été congédiés [G . 

N'oubliés pas mes provisions d'epautes '7), de lentilles, de pois 
chiches; Ferrier se chargera de me fair^ parvenir le tout par ses 
charretes. Adieu, mon cher frère, je vous embrasse de tout mon 
cœur. 

Sifflé : J.-S. RovÈRE. 

(5) Chiappe (Ange-Marie), né ù Sarlène (Corse) le 3o avril 17G6, décédé à Paris le 

18 juillet 1826. Il était contrôleur des actes à Sarlùne, lor-que, le 5 juin 1789, il fut élu 
suppléant du Tiers aux Eials-Gcnôraux pour la Corse. Successivement officier muni- 
cipal, chef de bataillon de la j,^'irde nationale, membre du Directoire du département 
de la Corse, il fut élu par le même département député à la Convention nationale le 
17 septembre 1792 II siéjj^ca parmi les modérés et, dans le procès du roi, vota pour la 
détention pendant la guerre et le bannissement à la paix Ennemi prononcé des 
jacobins, il proposa, dans la séance du 20 avril 1793, de déclarer que les 22 membres 
de la Gironde dénoncés par les sections de Paris n'avaient pas cessé de mériter la 
confiance de la Convention. 

Après le 9 thermidt)r, il fut envoyé en mission dans le Midi, où il comprima 
énergiquemcnt les terroristes. A la Convention, il vota l'envoi de Duhem à l'Abbaye 
comme coupable d'avoir dit que depuis la mort de Robespierre l'aristocratie et le 
royalismz triomphaient. Le a3 vendémiaire an IV, il entra aux Cinq-Cents et s'éleva, 
le 7 novembre 179-^, contre le décret d'arrestation des nouveaux députés impliqués 
dans la révolte du i3 vendémiaire, sortit du corps législatif en mai 1797 et, après le 

19 brumaire, accepta le poste de consul d'abord aux États-Unis, ensuite à Gotten- 
bourg (Suède), puis à Carthagône (Espagne). Nomir.é sous-préfet dAlba (Stura) le 
10 décembre 181 1, il rentra ensuite en Corse où il devint juge d'appel des tribunaux 
de rîle. En 1814, il vint, à la tète d'une députation des habitants d'Ajaccio, féliciter le 
roi sur son retour en France et assurer le monarque de l'entier dévouement de la 
Corse. Il abandonna peu de temps après la politique et se retira à Paris. 

(6) Entr'aulrcs M. s^c Kehaussen. Malgré l'intervention pressante de l'ambassadeur 
Staël-Hostcin, le Dirccioiro rendit, le 18 thermidor an IV, un arrêté refusant d'accré- 
diter ce perse jnna^'c un qualité do chargé d'affaires du roi de Suéde et donna l'ordrie 
au mini<ître de la ^^iAxcc ^-^énérale de lui notifier les lois delà République relatives 
aux étrangers [Moniteur \v 325 de l'an IV, 25 thermidor). 

{7) Épautc ou épcautrc, variété de froment dont on fait en Provence des potages : 
* snupn d'esfi'outo > en provençal. 



200 ' MÉMOIRES 



XXXVI. 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon, 

Paris, le 8 fructidqf an 4 de la Republique (a5 août 1796). 

J'ai reçu, mon cher frère, vos lettres des 29 et 3o thermidor et 
pièces incluses. Je crois que lorsque Ton est divisé d'opinions ou 
d'interest, le plus court parti est de choisir un ami de chaque 
côté pour terminer les dilTerens, et s'en rapporter loyalement a 
leur décision. Si cette proposition vous plait, vous choisiras, je 
nommerai de mon coté, et il ne sera plus question de discussion 
d'interest entre nous. Les rapports que Ton vous a fait sont faux 
ou exagérés ; je desirerois ]de tout mon cœur que vous eussiés 
vingt et quarante mille livres de rente, j'ai assés payé de ma 
personne pour vous le prouver. Lorsque j'ai fait la comparaison 
de votre fortune et de la mienne, ce n'est pas a titre d'envie, mais 
de justice ; je serai toujours charmé d'améliorer le sort des 
cousins germains de mes enfans, puisque j'ai prié plusieurs 
personnes de marier le commissaire des guerres (i) avec promesse 
de lui faire un parti. 

J'apprends avec un double plaisir l'arrivée du gênerai Willot a 
Avignon et la votre ; les instructions que vous lui donnerés ne 
pourront qu'être avantageuses a la chose publique. Empêchés 
toute reaction ; les deux extrêmes doivent être contenus avec la 
même sévérité et la même surveillance; nous présumons que 
les terroristes emploieront tous leurs moyens pour dénoncer, 
harceler et faire destituer ce brave gênerai ; il faut que ses 
actions soient frappées au coin de la prudence et de la consti- 
tution. 

J'écris a Bonnieux au sujet de cette abominable calomnie, 
l'occasion est des plus favorables, ayant a repondre a une lettre 
extrêmement obligeante des administrateurs de l'hôpital. 

Vous recevrés la procuration a l'adresse de Donis. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 

(I) Louis-Philippe-Ëdouard Clareton. 



bÈ L* ACADÉMIE DE VAUCLUSÈ 2^1 

XXXVII. 
Au citoyen Rovère jeune à Avignon. 

Paris, le 12 fructidor an 4 de la Republique (29 août 1796). 

J'ai reçu, mon cher frère, vos deux lettres des 2 et 3 ; vous 
avés très bien fait de ne pas aller dans une commune aussi trou- 
blée que celle de Sorgues. Vous auriés fait grand bien a la chose 
publique en m 'instruisant en détail des événements qui y ont 
eu lieu (i). 

J'avois raison de vous conseiller de ne pas venir a Paris, d'après 
les dangers que les honnêtes gens y courent journellement. 
Nous avons failli être assassinés la nuit dernière, les exclusifs ont 
été déjoués, leur ressource a été de tirer leurs boettes pour 
donner le signal du carnage, et de répandre dès drapeaux 
blancs et des" cocardes de bazin (2). 

Ils vouloient enlever Babeuf et compagnie qui sont partis 
pour Vendôme ; égorger le Directoire, une partie des deux " 
Conseils etoit leur projet. Les voilà encore déjoués, mais si nous 



(!) Les derniers mois de l'an IV furent profondément troublés à Sorgues (Vaucluse). 
Les royalistes poursuivaient depuis Thermidor leurs vengreances contre les patriotes. 
Ceux-ci essayaient de se défendre. Les attaques à main armée étaient journalières 
et le sang coulait. Le i3 floréal» un rassemblement armé, ayant à sa tête un certain 
Paul Chrétien, de Bédarrides (Vaucluse), s'introduisit dans la maison de Pochy jeune 
pour lui faire un mauvais parti. Ce Pochy (Jean-Baptiste), cousin de l'officier muni- 
cipal qui avait été misérablement tué d'un coup de fusil, ie 19 septembre 1791, en 
cherchant à s'évader par le toit de sa maison, était l'objet de la haine des royalistes. 
C'était un ex-bénédlctin, d'abord curé assermenté de Sauveterre (Gard), puis cure 
constitutionnel de Sorgues, élu le i3 août 1792 en remplacement de Louis Péru, qu^ 
après avoir prêté le serment constitutionnel, l'avait rétracté. Pochy vivait maintenant 
retiré, mais sa qualité de républicain patriote le désignait aux vengeances du parti 
opposé. 11 avait épousé, le 9 floréal an II, Marie-Jeanne Fournier. 

Les 39 floréal et a prairial, André Benezet est trouvé mort devant la porte de sa 
propre maison ; des coups de feu sont tirés sur Saillard ; Cornillon père, âgé de 80 ans, 
et Désandré sont grièvement blessés, Chastel a la tète fendue, Aurès flls est assommé 
dans la campagne, Martel est assassiné sur les bords du Rhône, etc. 

(2) Le II, à trois heures du malin, des boîtes et des pétards furent tirés dans divers 
quartiers de Paris, quantité de cocardes blanches furent jetées dans les rues. Mais 

cette nouvelle tentative fut déjouée par la vigilance du ministre de la police. Le 
lendemain on se saisit de cinq drapeaux de taffetas blanc portant cette inscription : 

Mort aux républicains, vive le roi ! Ce qui tendrait à faire croire qu'il ne s'agissait pas 

seulement de délivrer Babeuf, comme le dit Rovère. mais en réalité de renverser le 

gouvernement pour substituer le roi à la République. 

3 



202 MÉMOIRES 

ne prenons pas de mesures rigoureuses, ils finiront par nous 
détruire. 

Je ne doute pas que le gênerai Willot, entouré de la confiance 
des bons citoyens, ne vienne a bout de vous redonner le calme ; 
les coquins de Paris comptoient, et comptent encore infiniment 
sur leurs compères des départements méridionaux. 

Vous me parlés de vos droits legitimaires : vous afligés mon 
cœur et l'attachement que je n'ai cessé d'avoir pour vous, 
lorsque vous traités cette affaire comme vous pourries le faire 
avec un indiffèrent. Je ne désire rien avec plus d'ardeur que de 
vous voir content et heureux, car on ne peut jouir d'aucun 
bonheur sans la tranquilité d'esprit; six mille livres de rente en 
fonds de terre sont un apanage qui me paroit honnête; il fut un 
temps ou nous eussions abonné vous et moi a moitié. Reprenés 
vos sentimens de générosité et d'amitié, et soyés toujours per- 
suadé que ce que j'ai et pourrai avoir sera censé vous appar- 
tenir. 

Je recevrai avec grand plaisir la note du cit. Gasquy (3), 
je crois n'avoir pas grand choses a payer pour cette première 
échéance ; n'oubliés pas les vues de Georges Combes, il y a de 
bonnes choses a faire dans cette partie. 

Les partages de la succession Belmont sont faits, nous avons 
notre lot a cinq lieues de Lyon, le château de Belmont (4), ses 
dépendances, beaucoup de forets et une maison a Grenoble, le 
tout évalué au rabais cinq cent mille livres en ecus, sans le 
mobilier. 

Vous devriés vous occuper dans vos courses a marier le com- 
missaire des guerres, nous lui ferons un parti honnête ; si vous 
pouviés avancer quelque chose au curé Raphel vous me fairiés 
plaisir. 

Salut et amitié. 

Signé ;J.-S. Rovère. 



(3) Receveur de* domaines à Avignon . 

(4) Le château de Belmont faisait partie du domaine de Mayout, situé dans les 
communes de Belmont, et de Bizonnes (Isère). Ce 'domaine et ce château échurent 
en effet en partage & M*' Rovère. 



bfe L*ACADÉMIE DE VAUCLÙSÈ ♦ 263 

XXXVIII. 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon, 

Paris, le i3 fructidor an 4 de la Republique (3o août 1796). 

Le citoyen Grienet, mon cher frère, dont je vous ai precedam- 
ment parlé plusieurs fois, part pour Avignon et Sorgues, où il 
se propose d'établir un moulin a garance dans notre propriété 
de Gentilly. Je vous prie de vous entendre avec lui, pour que cet 
établissement ne gène en. rien le grand bâtiment, sans trop 
empiéter sur le logement du fermier; j'ai oublié si je vous avois 
envoie dans le temps, le plan qui avoit été levé a cet effet, qui 
m'avoit paru bien levé. Je vois fouiller dans mes cartons pour 
voir si je le trouverai. 

Le citoyen Grienet est un brave et galant homme dont vous 
serés très content, il se chargera des constructions du moulin, 
et vous lui passerés un bail pour le temps que vous conviendrés, 
en vertu de la procuration que je vous ai adressée chés Donis ; 
vous fairés pour le mieux, et je m'en rapporte parfaitement a 
votre amitié et a votre intelligence. 

Si dans le logement du fermier vous ne trouvés pas de quoi 
loger Grinet, vous pourrés lui assigner un logement dans la 
partie du bâtiment que nous occupions pendant l'assemblée de 
Bedarrides, a coté du père prieur que vous aviés créé maître ; 
vous verres aussi de lui céder une partie du jardin du fermier, 
si la chose est possible. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XXXIX. 



Au citoyen Rovère jeune à Avignon 

Paris, le 16 fructidor an 4 de la Republique (2 septembre 1796). 

J*ai reçu, mon cher frère, une lettre du citoyen Gasquy, rjcc- 
veur du domaine national ; nous ne sommes pas d'accord sur les 



2^4 t MÉMOIRE^ 

faits; il ne compte que dix mille quatre cent livres d'excédent, 
tandis que d'après les deux rescriptions que j'ai envoyées, il doit 
y en avoir vingt-deux mille quatre cent, qui me sont passés au 
huit pour cent, conformément a la loi, somme qui fait le sixième 
du quatrième quart en argent. Cependant pour ne pas courir 
risque de déchéance, je vais payer neuf, ou dix mille livres 
aujourd'hui, en mandats. Ce sera autant de payé par anticipation 
sur le second sixième ; je vous prie d'avoir Toeil a cette aflaire. 

Si vous voyés le gênerai Willot, dites-lui mille choses de ma 
part ; recommandés lui d'être extrêmement sur ses gardes ; les 
coquins cherchent ici a lui jouer quelques tours de leur métier. 
Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XL. 
Au citoyen Rovère jeune à Avignon. 

Paris, le ao fructidor an 4 de la Republique (6 septembre 1796). 

Depuis votre lettre du 3 de ce mois, mon cher frère, je n'ai reçu 
de vos nouvelles, permettés-moi de vous dire que ce n'est ni 
amical, ni fraternel. 

Je vous dirai d'abord que la sœur de ma femme, Pauline 
est morte a son neuvième jour de petite vérole ; nous avons 
appris cette nouvelle hier au soir ; voilà de nouveaux partages a 
faire et un grand regret de n'avoir pas voulu adopter l'inocula- 
tion. 

En second lieu, j'ai traité avec M. de Sade pour ses biens de 
la Coste et de Bonnieux; nous sommes d'accord sur le prix, l'acte 
sera passé sous peu de jours (i). Ne manques de voir Gau- 

(î) Dodatien* Alphonse-François, marquis de Sade, naquit à Paris le 2 juin 1740, 
fils de Jean-Baptiste-François- Joseph, capitaine héréditaire du château de Vaison au 
comté Venaissin, seigneur de Saumanes («View), Lacoste {idem), seigneur en partie de 
Mazan {idem), et de Marie-Éléonore de Maillé, dont Jean-Baptiste-François-Joseph de 
Sade, marié en I733 ; il n*eut que ce seul fils. (Voir Artefeuil, Histoire héroïque de la 
noblesse de Provence.) A l'âge de sa ans le marquis de Sade épousa, le 17 mai 1763, 
" l'église de Saint-Roch à Paris, Renée-Pélagie, âgée de 23 ans, fille de Cordier de 
♦reuil, seigneur de Launay, président de chambre à la Cour des comptes, dont 



n 



DE L'ACADKMIt: DE VAUCLUSE 2C5 

fridi (2) pour que rien ne soit enlevé. 11 reste des débris de meu- 
bles et batteries de cuisine au château, des tonneaux dans la 
cave, tout est compris dans la vente ; vigilance et secret. 

Marchand doit venir décidément après demain pour arranger 
vos affaires, je ferai des tentatives pour avoir le tout. 

Salut et amitié. 

J.-S. ROVÈRE. 



les terres étaient à Échauffour en Normandie. Il entra fort jeune au service, fit la 
guerre de Sept ans et quitta Tarmée en 1766, avec le grade de capitaine de cavalerie. 
Fut lieutenant-général de Bresse. Déjà connu pour ses libertinages, il fut arrêté une 
première fois à Paris en 1768. puis incarcéré de nouveau et condamné À mort par le 
parlement de Provence en 1772 pour un crime commis dans une scène de débauche. 
Ayant obtenu sa commutation de peine, il fut successivement enfermé à Vincennes, 
À la Bastille et à Charenton, et ne fut rendu à la liberté que le 17 mars 1790. Le 
Châtelet prononça le divorce du marquis de Sade avec sa femme le 9 juin 1790. 
Celle-ci mourut k ÉchaufTour le 7 juillet 1810. 

Le marquis de Sade s'était jeté dans tous les excès de la Révolution. Il professait 
notamment un véritable culte pour Marat, et à propos de son assassinat par Charlotte 
Corday il composa ces vers : 

Du vrai républicain insigne et chère idole. 
De ta perte, Marat, ton image console. 
Qui chérit un grand homme adopte ses vertus ; 
Les cendres de Scevota ont fait naître Brutus. 

C'est à la même époque qu'il écrivit ses livres les plus licencieux. Son immoralité 
notoire le fit de nouveau incarcérer, ainsi qu'en témoigne un arrêt du Comité de 
sûreté générale du 22 vendémiaire an III, par lequel Sade, homme de lettres, âgé 
de 60 ans, détenu aux Picpus, maison dite Coignard, par ordre de la police •, fut 
mis en liberté et les scellés ainsi que les séquestres sur ses biens levés. Plus tard, 
Bonaparte, premier consul, le fit enfermer comme fou à Charenton. Il y est mort le 
2 novembre 1817. A l'autopsie, on constata, à la grande stupéfaction de tous les 
phrénologues, que son crâne offrait les bosses de toutes les vertus ! 

Le marquis de Sade avait eu trois enfants issus de son mariage : Louis-Marie, né 
le 27 août 1767, tenu sur les fonds baptismaux par le prince et la princesse de Conti, 
assassiné par des brigands, le 7 juin 1809, près de Mercugliano en Italie. Il était alors 
lieutenant au régiment d'Isembourg, régiment étranger au service de la France dans 
le royaume de Naples ; Donatien-Claude-Armand, né en 1768. 11 était en 1819 chef 
d'escadron et chevalier de Saint-Louis ; Madeleine-Laure, née le 17 avril 1771 et morte 
en 1844 a Échauflfour. C'était la dernière descendante du marquis. 

La maison de Sade était originaire d'Avignon où elle était florissante dès le 
XIP siècle. A la mort de Girard de Sade, seigneur d'Eyguières et en partie de Mazan, 
de Venasque et de Saint-Didier, survenue vers 1490, la descendance se partagea en 
deux branches : celle des seigneurs d'Eyguières et celle des seigneurs de Saumanes. 

(Voir pour biographie du marquis de Sade les nobiliaires d'Artefeuil, d'Hauterive, 
La Chenaye-Desbois, et les dictionnaires biographiqves de Michaud, de Barjavel. 
les journaux la Revue aptésienne du i" février i835, VIndicateur d'Avignon du 23 mai 
1841.) 

(2) Gaufridi (Gaspard-François-Xavier), notaire â Apt (Vaucluse) de 1757 â 1799. 



2^4 t MÉMOIRES 

faits; il ne compte que dix mille quatre cent livres d'excédent, 
tandis que d'après les deux rescriptions que j'ai envoyées, il doit 
y en avoir vingt-deux mille quatre cent, qui me sont passés au 
huit pour cent, conformément a la loi, somme qui fait le sixième 
du quatrième quart en argent. Cependant pour ne pas courir 
risque de déchéance, je vais payer neuf, ou dix mille livres 
aujourd'hui, en mandats. Ce sera autant de payé par anticipation 
sur le second sixième ; je vous prie d'avoir Tœil a cette afiaire. 

Si vous voyés le gênerai Willot, dites-lui mille choses de ma 
part ; recommandés lui d'être extrêmement sur ses gardes ; les 
coquins cherchent ici a lui jouer quelques tours de leur métier. 
Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



XL. 
Au citoyen Rovère jeune à Avignon. 

Paris, le ao fructidor an 4 de la Republique (6 septembre 1796). 

Depuis votre lettre du 3 de ce mois, mon cher frère, je n'ai reçu 
de vos nouvelles, permettés-moi de vous dire que ce n'est ni 
amical, ni fraternel. 

Je vous dirai d'abord que la sœur de ma femme, Pauline 
est morte a son neuvième jour de petite vérole ; nous avons 
appris cette nouvelle hier au soir ; voilà de nouveaux partages a 
faire et un grand regret de n'avoir pas voulu adopter l'inocula- 
tion. 

En second lieu, j'ai traité avec M. de Sade pour ses biens de 
la Coste et de Bonnieux; nous sommes d'accord sur le prix, l'acte 
sera passé sous peu de jours (i). Ne manques de voir Gau- 

(I) Dodatien- Alphonse-François, marquis de Sade, naquit  Paris le 2 juin 1740, 
fils de Jean-Baptiste-François- Joseph, capitaine héréditaire du château de Vaison au 
comté Venaissin. seigneur de Saumanes {idem), Lacoste {idem), seigneur en partie de 
Mazan {idem), et de Marie-Éléonore de Maillé, dont Jean-Baptiste-François-Joseph de 
Sade, marié en 1733 ; il n'eut que ce seul fils. (Voir Artefeuil. Histoire héroïque delà 
noblesse de Provence.) A l'âge de aa ans le marquis de Sade épousa, le 17 mai 1763. 
en l'église de Saint-Roch à Paris, Renée-Pélagie, âgée de 23 ans, fille de Cordier de 
Montreuil, seigneur de Launay, président de chambre à la Cour des comptes, dont 



DE L*ACADKMIE DE VAUCLUSE 265 

fridi (2) pour que rien ne soit enlevé. Il reste des débris de meu- 
bles et batteries de cuisine au château, des tonneaux dans la 
cave, tout est compris dans la vente ; vigilance et secret. 

Marchand doit venir décidément après demain pour arranger 
vos affaires, je ferai des tentatives pour avoir le tout. 

Salut et amitié. 

J.-S. ROVÈRE. 



les terres étaient à ÉchaufiTour en Normandie. Il entra fort jeune au service, fit la 
guerre de Sept ans et quitta Tarmée en 1766, avec le grade de capitaine de cavalerie. 
Fut lieutenant-général de Bresse. Déjà connu pour ses libertinages, il fut arrêté une 
première fois à Paris en 1768, puis incarcéré de nouveau et condamné à mort par le 
parlement de Provence en 1772 pour un crime commis dans une scène de débauche. 
Ayant obtenu sa commutation de peine, il fut successivement enfermé à Vincennes, 
à la Bastille et à Charenton, et ne fut rendu à la liberté que le 17 mars 1790. Le 
Chàtelet prononça le divorce du marquis de Sade avec sa femme le 9 juin 1790. 
Celle-ci mourut à ËchaufTour le 7 juillet 1810. 

Le marquis de Sade s'était jeté dans tous les excès de la Révolution. Il professait 
notamment un véritable culte pour Marat, et à propos de son assassinat par Charlotte 
Corday il composa ces vers : 

Du vrai républicain insigne et chère idole. 
De ta perte, Marat, ton image console. 
Qui chérit un grand homme adopte ses vertus ; 
Les cendres de Scevola ont fait naître Brutus, 

C'est à la même époque qu'il écrivit ses livres les plus licencieux. Son immoralité 
notoire le fit de nouveau incarcérer, ainsi qu'en témoigne un arrêt du Comité de 
sûreté générale du 32 vendémiaire an III, par lequel Sade, homme de lettres, âgé 
de 60 ans, détenu aux Picpus, maison dite Coignard. par ordre de la police >, fut 
mis en liberté et les scellés ainsi que les séquestres sur ses biens levés. Plus tard, 
Bonaparte, premier consul, le fit enfermer comme fou à Charenton. Il y est mort le 
2 novembre 181 7. A l'autopsie, on constata, à la grande stupéfaction de tous les 
phrénologues, que son crâne offrait les bosses de toutes les vertus ! 

Le marquis de Sade avait eu trois enfants issus de son mariage : Louis-Marie, né 
le 27 août 1767, tenu sur les fonds baptismaux par le prince et la princesse de Conti, 
assassiné par des brigands, le 7 juin 1809, près de Mercugliano en Italie. Il était alors 
lieutenant au régiment d'Isembourg, régiment étranger au service de la France dans 
le royaume de Naples ; Donatien-Claude-Armand, né en 1768. 11 était en 1819 chef 
d'escadron et chevalier de Saint- Louis ; Madeleine-Laure. née le 17 avril 1771 et morte 
en 1844 a ÉchaufTour. C'était la dernière descendante du marquis. 

La maison de Sade était originaire d'Avignon où elle était florissante dès le 
XII» siècle. A la mort de Girard de Sade, seigneur d'Eyguières et en partie de Mazan, 
de Venasque et de Saint-Didier, survenue vers 1490, la descendance se partagea en 
deux branches : celle des seigneurs d'Eyguières et celle des seigneurs de Saumanes. 

(Voir pour biographie du marquis de Sade les nobiliaires d'Artefeuil, d'Hauterive, 
La Chenaye-Desbois, et les dictionnaires biographiqves de Michaud. de Barjavel. 
les journaux la Revue aptésienne du i"' février i835, l'Indicateur d'Avignon du 23 mal 
1841.) 

(2) Gaufridi (Gaspard-François-Xavier), notaire à Apt (Vaucluse) de 1767 à 1799. 



266 MÉMOmES 

XU. I 

Au citoyen Rovère jeune à Avignon \ 

I 

Paris, le 34 fructidor an 4 de la Republique (10 septembre 1796). 1 

Malgré votre long silence, mon cher frère, je dois vous aviser ! 

que j'ai suivi votre conseil. J'ai acquis les biens de Sade dans les 
territoires de Bonnieux et de la Coste, avec tous les meubles, \ 

effets, titres qui se trouvent chés Gaufridi, pour entrer en 
possession au premier vendémiaire prochain (i); j'ai peut-être i 

fait une mauvaise affaire, mais n'importe, il vaudra mieux avoir 
des biens a portée que des maisons a Grenoble, et des objets 
que Ton ne voit jamais ; j'ai pris des termes pour payer et 
envoyé des procurations pour vendre deux objets dans le dépar- 
tement de risère qui couvriront infiniment le prix de ces objets. I 

Je vous avois prévenu par ma dernière de voir Gaufridi 
père (2), pour que les pièces qu'il a en mains ne fussent pas ! 

distraites, ainsi que les titres et documents. Je compte sur votre 
amitié. î 

Vous verres s'il est plus avantageux d'affermer en bloc ou en 
détail ; quelles sont les réparations, 'améliorations que Ton doit 
faire dans ces terres; le château est dévasté (3); le parc pourra 

(i) Le marquis de Sade possédait à cette époque dans le département de Vaucluse : | 

I* La terre de Mazan, consistant en un château, grand jardin, prés et terres de | 

labour, au quartier dit le Pied marin ; 

3* La terre de la Coste, consistant en un château, un moulin, maison basse, et une 
ferme dite TAvelan ; 

3* La terre de Saumanes, comprenant un château, un moulin et plusieurs rentes. 

On trouve une notice intéressante sur le château de Saumanes dans le ms. n" ia.470, 
folio 214, de la bibliothèque d'Avignon. 

La vente des biens de la Coste ne fut faite à Rovère que le 22 vendémiaire an V. Le 
marquis de Sade acheta en remploi le domaine de Grandviliers en Eure-et-Loire et 
celui de la Malmaison en Seine-et-Oise d'une valeur totale de 73.000 fr.. affermés | 

4.000 fr. I 

(2) L'ainé de ses fils, Elzéar Gaufridi, homme de loi â Âpt, embrassa en juin 1793 i 
le parti fédéraliste, s'enrôla dans l'armée départementale, se réfugia à Toulon avec | 
les débris de cette armée et fut déclaré émigré. i 

(3) Sur cette dévastation du château de Lacoste, nous avons quelques détails dans 
une réclamation (collection d'autographes de vauclusiens : Bibliothèque d'Avignon 
du marquis de Sade adressée, le 17 octobre 1792, à Roland, ministre de la justice. Le 
marquis de Sade, qui signe Sade Louis, soldat â la 8* compagnie de la section des 
Piques, commissaire pour l'organisation de la cavalerie de ladite section, rue Neuve- 
des-Mathurins, n* ao, expose qu'il n'a jamais quitté Paris depuis la Révolution, qu'il 



DE L AGADÉMIL UE VAUCLUSE ** 267 

servir d'une garenne ; vous verres le meilleur parti que Ton peut 
tirer de ces biens. Gaufridi vous donnera de grands éclaircisse- 
n)ents, étant chargé depuis très longtemps de leur surveillance. 
J'ai pris la précaution de stipuler que les payements que je 
faisois seroient employés en acquisitions de biens fonds pour 
repondre des hypothèques existantes sur ceux qui m'ont été 
vendus (4). Je pense qu'une opération complémentaire seroit 
d'acquérir la bastide du médecin Vitalis (5). La principale richesse 

fait son service en personne» qu'au moment actuel il est même employé à la ville 
dans la commission organisatrice des hôpitaux, qu*il a envoyé très exactement ses 
certificats de civisme et de résidence, etc. ; que, nonobstant, le 17 septembre dernier, 
le peuple s'est porté en foule dans sa maison du bourg de la Coste, district d'Apt, 
qu'il a ravagé cette maison, qu'il en a pillé les meubles, brisé tout ce qu'il ne pouvait 
pas emporter, qu'animé enfin d'une rage suggérée par des agitateurs, il a brisé les 
cloisons, enfoncé les planchera et arraché jusqu'aux portes et fenêtres ; que la garde 
nationale dudit lieu n'a, dit-on, que faiblement empêché ces désordres et que l'on 
reproche à son capitaine d'avoir pris pour son compte des effets de cette maison ; que 
la municipalité, au contraire, avait défendu la propriété avec beaucoup plus d'activité, 
qu'elle avait fait réunir dans la maison curiale tout ce qu'elle avait pu retrouver des 
effets de Sade, mais que huit jours après, un ordre du département des Bouches-du- 
Rhône avait fait enlever tous ces effets de la maison curiale pour être transportés A 
Apt où l'on assure qu'après avoir disposé du meilleur, on ne sait pour quel usage, les 
commissaires du département auraient remis le reste au district. 

Sur cette réclamation, le ministre Roland écrivit aux administrateurs de Vaucluse 
(21 février 1793) pour avoir des renseignements et faire justice, mais l'enquête qui 
suivit ne donna pas de résultat. Il convient d'ajouter que déjà en 178a le château de 
la Coste était en assez mauvais état, puisque une certaine demoiselle de Rousset qui 
y séjournait, on ne sait exactement à quel titre, écrivait au marquis de Sade « que les 
cuisines y étaient notamment d'une cochonnerie à faire vomir trente-six chats •. Elle 
lui conseillait en même temps de remplacer son intendant Gaufridi par un certain 
Ripert de Roussillon, avocat retiré, très propre à remplir cette place. (Voir Paul de 
Ginisty, La marquise de ^ade. Paris 1901.) 

(4) Voir note i. t 

(5; La bastide du médecin Vitalis est située à Bonnicux, au quartier de Trigaud, 
confrontant la forêt communale, sur la limite des terroirs de Bonnieux et de la Coste. 
Sur ce point existe un sentier ou viol dit âraye de Vitatts. Cette bastide ou grange 
appartient aujourd'hui a la famille Paraud. 

La famille Vitalis qui existait & Bonnieux au XVUI* siècle était importante et 
riche, à en juger par le manifeste de Vitalis (Joseph , bourgeois sur lequel on voit de 
nombreux immeubles, notamment le domaine des Crest qui passa sur la tête de 
M. Beau mont-Lacoste, la grange de Trigaud, la Gardiole, etc 

Jean-Joseph Vitalis figure en 1789 sur le registre des délibérations du conseil de 
la communauté comme membre de cette assemblée et y est qualifié de bourgeois. 

Son frère, Jean-Vincent-Augustin-François-Xavier, époux de Marie-Anne Tournel, 
dont il eut deux filles, après avoir habité Bonnieux pendant quelques années, alla 
ensuite s'établir à Nimes comme médecin. Il reparut à Bonnieux en germinal an II. 
Le 3 du même mois, il lui fut délivré un certificat de résidence et de civisme, et le 17, 
il demanda acte de sa déclaration comme quoi il était venu de Nimes avec l'intention 
de fixer son domicile à Bonnieux (registre des délibérations de la commune). Il 
mourut peu de temps après, 

La famille Vitalis est aujourd'hui éteinte. Voir aussi lettre VII, note 11. 



268 MÉMOIRES 

des biens de M. de Sade consîstoit dans la fameuse source qui 
arrose la maison basse. Autant que je puis m'en rappeler, elle 
commence a couler a coté de la campagne de Blanqui (6), prenant 
sa source dans le Leberon (7), passant par Vitalis et Gaufridi. 
Si le médecin est mécontent du remboursement en assignats, 
vous pourries arranger TalTaire de manière que tout le monde 
fut content. Lorsque la chose sera connue, veuilles bien annoncer 
a qui voudra Tentendre que les partages de ma femme sont faits ; 
qu'elle a cinq cent mille livres en immeubles, sans compter le 
, nouvel héritage qu'elle vient d'avoir de sa sœur, voila pour les 
affaires domestiques. 

Venons aux affaires politiques. Je vous avois annoncé que les 
jacobins conspiroient, qu'ils en vouloient a nos vies ; plusieurs 
tentatives de leur part ont échoué ; ils viennent la nuit dernière 
d'attaquer le camp de Grenelle (8) ; ils ont surpris et tué un avant- 



(6) La campagne Blanqui est située sur le terroir de Bonnieux, quartier de Trigaud, 
séparée du terroir de la Coste par le fossé limitrophe à ces deux communes, dit le 
fossé (Xcs parties. Elle appartient aujourd'hui à M. Appy (Jean), dit le Major. . 

(7) Le Luberon, dénommé quelquefois Alpes de Provence, dont Taltitude maximum 
est de I.I25 mètres, mais ne dépasse pas en moyenne 750 a 800 mètres, a son origine 
au village des Taillades, près de Cavaillon, à l'ouest, et se termine à l'est, sur les 
bords du Largues à Voix (Basses-Alpes). Il a dans cette direction un développe- 
ment de 45 kilomètres, tandis que du nord au sud il ne mesure que 4 kilomètres et 
demi de largeur. 

(8) Voici ce que dit Barras de cette attaque dans ses Mémoires, t. IL p. 191 : « A la 
suite de toutes les actions et réactions politiques qui avaient dominé la France depuis 
la Révolution, il se trouvait à Paris un grand nombre de citoyens de toute opinion 
tourmentés dans leurs départements ; la plupart étaient venus pour échapper à la 
persécution qui allait les atteindre chez eux, quelques-uns sans doute pour s'unir 
aux entreprises nouvelles qui se déclarent et se décident dans la capitale. Parmi ces 
réfugiés se trouvaient en grand nombre certains de ces patriotes exagérés qui, avant 
le 9 thermidor, avaient rempli des places et qui sans se rendre compte du degré de 
leur aptitude et des progrés du temps, aspiraient encore aux emplois publics, 
premier moyen d'existence et de protection contre le besoin et contre leurs ennemis, 
lis avaient échoué dans leurs demandes; ils étaient mécontents ; leur mécontente- 
ment cherchait des sympathies ; ils en trouvèrent dans quelques hommes qui ayant 
marqué dans la Convention nationale, éprouvaient l'humiliation de n'être plus 
députés et qui avaient eux-mêmes le désespoir de ne pouvoir être placés par le 
Directoire. A ces mécontents qui prenaient leur humeur et leur ressentiment pour du 
patriotisme, se joignaient uu plutôt s'offraient deux ou trois généraux, que par de 
bonnes raisons, le Directoire n'avait pas rendus au service actif. 

« Pour préciser les vœux et rallier les idées, les chefs commencèrent à se réunir sur 
un premier point : une constitution plus populaire que celle de l'an III, la constitu- 
tion de 1793 que le peuple, disaient-ils, avait sanctionnée et qu'on ne lui avait enlevée 
qu*en immolant au 4 prairial ses plus généreux défenseurs, 

€ Ne doutant pas de la facilité qu'ils auraient d'opérer un changement dans ce 
sens, plusieurs des plus hardis acceptèrent la mission de se transporter au camp de 
Grenelle pour sonder les dispositions des troupes : elles étaient excellentes selon 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSE 269 

poste ; on m'asure qu'il y a douze exclusifs de tués et une cin- 
quantaine d arrêtés. Un de ces messieurs que vous avés connu, 
vint, hier matin, m'avertir de me tenir sur mes gardes, que je 
courois les plus grands dangers ; il avoit raison. Je vous donnerai 
les détails circonstanciés par le prochain courrier. 

J'ai reÇu une lettre bien aimable de notre ami Barbusse, je lui 
reponds pour Ten remercier. 

Nous avons pensé avec quelques-uns de nos amis que vous 
fairiés bien de préparer les voies pour vous faire nommer au 
Corps législatif a la prochaine nomination, je vous aiderai de 
tout mon pouvoir auprès de quelques hommes, qui ont de Tin- 
fluence ; prenés vos dispositions en conséquence. 

Salut et amitié: 

Signé : J.-S. Rovère. 

P. S. Vingt exclusifs ont été sabrés par le 2i* régiment de 
dragons et le 14' de chasseurs, qui a fait des prodiges de valeur 
et de civisme; cent cinquante terroristes sont pris les armes a la 
main ils seront jugés militairement conformément aux lois dans 
les 24 heures, ayant été pris les armes a la main. 

Signé : J.-S. Rovère. 



leurs idées et à leur retour, ils en donnèrent l'assurance à leurs commettants. Il fut 
donc résolu que les patriotes les plus fermes qui en se comptant entre eux. pou- 
vaient se croire composer un nombre de douze cents, se rassembleraient au camp de 
Grenelle pour fraterniser, c'est-à-dire pour défendre la liberté contre ses tyrans. On 
devait marcher ensuite sur le Luxembourg, saisir les cinq directeurs sans aucune 
exception, abattre les têtes des « quinquenvirs » et les promener sur des piques. On 
devait proclamer un dictateur ; il devait être conduit en triomphe au Corps législatif 
qui sanctionnerait son élévation émanée du peuple souverain. Les députés qu'on 
appelait indignes devaient être arrêtés ; les autres formeraient une assemblée unique 
et sous les ordres du dictateur, cette assemblée nommerait un gouvernement provi- 
soire. On y portait Fréron, Tallien, Antonelle, Drouet, Rossignol, Real, Babeuf, 
Germain, etc., et ces citoyens auraient pour président le dictateur. Une Convention 
nationale serait convoquée pour établir des institutions et un pacte social vraiment 
démocratique. > 

Au jour dit. les fraUrniciens, guidés par les officiers généraux en uniforme, pénè- 
trent dans le camp de Grenelle sans difficulté. Mais tout était éventé depuis plus de 
quinze jours par la police de Cochon unie à celle de Carnot ; ils furent reçus par un 
feu de mousqueterie qui fit tomber quarante à cinquante de ceux entrés les premiers. 
Cent trente-trois furent pris dans ce piège et parmi eux les ex-conventionnels Cusset, 
Javogues, le général Froy, l'adjudant général Lau. Les généraux du camp de Gre- 
nelle, Malo, commandant le 21* dragons, le général Brune prirent part à la répres- 
sion. Les cent trente-trois conjurés qui avaient été arrêtés furent traduits à la 
commission militaire du Temple : 32 furent condamnés À mort, 3o à la déportation , 
26 à la détention. 46 furent acquittés. 



ayo MÉMOIRES 



XLII. 



Paris, le i" vendémiaire an 5 de la Republique (22 septembre 1796) (r). 

J'ai reçu, mon cher frère, votre lettre du 28; je suis charmé 
que vous soyés content de l'acquisition de la terre de la Coste ; je 
vous envoie une copie de notre acte sous seings privés. Je ne 
dois pas vous cacher que j'ai donné un pot de vin fort considé- 
rable dont j'ai déjà payé une partie, en recourant a mes amis et 
en employant les revenus de ma femme ; nous avons donné ordre 
de vendre une maison a Grenoble et des bois dans la partie qui 
nous est échue en partage. Je vous reitère mes observations sur 
l'acquisition de la bastide de Vitalis, pour consolider parfaitement 
les eaux qui sont la principale valeur de cette acquisition. Vous 
verres par l'acte que nous entrons en possession au !•' vendé- 
miaire; vous avés ma procuration, c'est a vous de voir ce qui 
sera plus utile. Je vous observerai que si vous affermés fixement, 
il faut diviser autant que possible, n'excéder le terme de trois ans 
pour la durée du bail et stipuler des reserves en œufs, poulets et 
cochons. 

Parlons de vos affaires; j'ai vu a différentes fois le citoyen 
Marchand ; j'espère que vos vœux seront accomplis, que vous 
serés a votre Large tout seul. Ils tiennent la dragée un. peu 
haute, cependant nous nous rapprochons. La citoyenne se plaint 
beaucoup de vous, c'est tout naturel, j'ignore si c'est au moral 
ou au phisique : le prétexte est la dépense pour les vignes, le 
fermier actuel que vous protégés, etc., le chien est -toujours 
enragé, quand on veut le noyer. Nous trancherons toutes ces 
difficultés en vous consolidarlt cette propriété. J'avois eu raison 
de vous dire que je ne pouvois hâter davantage cette négocia- 
tion ; il falloit voir la tournure que prendroient les jacobins ; la 
dernière défaite de ces exclusifs m'a valu la visite de ce monsieur 
qui paroit avoir très bien fait ses affaires. 

J'aurai bien de plaisir a voir notre ami Donis (2) ici, et encore 
plus de lui être utile ; la commission qu'il m'a donnée est bien 
difficile a remplir; je ne perds pas espérance. Vous me fairés 



(i) Cette lettre ne porte pas de suscription. 
(a) Voir lettre XXX, note 9. 



DE l'académie t)E VAUCLUSÊ 271 

grand plaisir de me donner des détails des événements de Sor- 
gues et d'engager notre sœur et son fils (3) de ne pas y aller, 
comme ils m'en ont manifesté l'intention. 

Le citoyen de la commune de Tournon (4), qui se présentera de 
votre part sera très bien reçu ; il y a fort longtemps que je n'ai 
vu le parent de celui que vous aviés emmené. Les intrigants 
sont la peste de la société, il faut s'en tenir éloigné le plus 
possible. 

Voyés de tirer parti des foins de Bonnieux et de Sorgues ; il 
faut mettre toutes les pièces en avant pour faire face a nos enga- 
gements. 

Je n'ai jamais voulu profiter des avantages des places que j'çii 
occupées; il faut par conséquent que nous tirions tous nos 
moyens de nos propres fonds. 

Ne négligés pas Gaufridi d'Apt pour les meubles et les titres 
de propriété ; il y a en outre les parchemins dont vous connoissés 
certains, des pièces très curieuses et une concession pour le petit 
moulin au dessous de celui du Pas (5) pour prendre les eaux 
a Font couverte (6). 

•Tous nos amis, notamment Grimaud qui est dans le salon, vous 
saluent ; ce dernier se plaint de vous. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 



(3) Voir lettre III, note 5. 

(4) Tournon, cheMieu d'arrondissement (Ard6che), sur le Rhône; 5. 000 habitants. 

(5) Immédiatement au-dessous du moulin du Pas se trouve le moulin dit des 
Audibert, puis le petit moulin et le grand moulin qui appartenaient au XVIII* siècle 
à M. d'Ing-uimbert de Montouge (note de M. Darriés). 

(6) Le quartier de Font couverte à Bonnieux est celui où se trouve l'ancien couvent 
des Récollets, en amont du chemin de Lamaret. Les eaux dont il s'agit découlent 
dans un bassin sous voûte, situé dans une parcelle de terre qui appartenait à 
M. Perret pré Perret), vis à vis du jardin du couvent et en dehors de l'enclos. Ces 
eaux sont connues aujourd'hui sous le nom ^^eaux du Vatat. Elles coulent dans un 
lavoir public, établi sur le ^chemin de Lamaret et sont employées à l'irrigation des 
prairies du domaine du Pavillon qui appartenait audit Perret (Jean-Baptiste^ et est 
aujourd'hui la propriété de la famille de Terris (note de M. Darriès). 



272 MÉMOIRES 

XLIII. 

Paris, le 4 vendémiaire an 5 de la Republique (aS septembre 1796) (i). 

Je vous ai adressé par le dernier courrier, mon cher frère, une 
copie collationnée de l'acte de vente de M. de Sade ; outre le prix 
convenu, en cet acte, il y a un pot de vin de seize mille livres 
dont j'ai payé partie, et suis obligé de payer le restant pendant le 
mois. Vous avés raison pour Tacte de ratification, le code hypo- 
thécaire étant en activité dans cette partie de la Republique d'après 
les anciennes lois, la clause est toujours sous entendue, et lors 
de la stipulation chés le notaire, il a été expressément convenu 
que le payement ne pourroit être fait qu'au préalable les lettres 
de ratification fussent expédiées. J'ai fait passer la lettre de 
Guion (2) a M. de Sade, et reponds a ce premier que vous êtes 
chargé de mes intentions ; ainsi vous pourrés vous retrancher sur 
moi pour les négations qui pourroient paroitre desobligeantes. 
Monsieur de Rivettes (3) avoit aussi écrit pour proposer un fer- 
mier, on lui avoit repondu négativement. 

Si vous affermés, que ce soit en détail pour trois ans, avec des 
reserves et solvabilité de la part des preneurs, avec des cautions ; 
vous n'ignorés pas que nous n'avons jamais été payés de nos 
fermiers. 

Je vous envoie la lettre de la dame Beroud, que je reçois dans 
l'instant; il n'est pas moralement possible de lui compter dans 
deux jours une somme aussi importante; elle évalue l'eminée a 
deux ou trois cent livres (4), tandis que les terres des environs 



(i) Celte lettre n'a pas de suscription. 

(2) Guion (Pascal-L*Ange), homme de loi de Bonnieux, où il soumissionna en 
floréal an IV de nombreux biens nationaux. 

(3) Jean-Baptiste- Marie de Rivette, fils de Jean-Baptiste et de Marie de Bernard, 
né à Bonnieux en 1744, époux en premières noces de Jeanne-Pauline du Puget- 
Barbentane de Bras, et en secondes noces de Madeleine de Perrache-Pierreruc, à 
laquelle il survécut également. Il était sous l'ancien régime très illustre et très puis- 
sant seigneur marquis de Rivette des Baux, chevalier, baron de la Garde-Paréol. Il 
traversa la Révolution sans être trop inquiété. Devint plus tard chevalier de l'ordre 
royal et militaire de Saint-Louis et mourut à Avignon le 25 septembre 1821. Il était 
alors commandant en second de la succursale des militaires invalides établie dans 
cette ville. 

La maison de Rivette originaire du Dauphiné et établie dès le XV' siècle dans le 
comté Venaissin, fournit une branche qui vint se fixer à Bonnieux et dont il est fait 
mention fréquemment dons les archives de cette commune. 

(4) Avant l'adoption du système métrique la mesure agraire à Avignon et dans le 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLUSH! ^73 

des murs d'Avignon ne se vendent que deux cents livres. Je lui 
repondrai aujourd'hui pour lui proposer diminution et termes. 
J'espère de vous accrocher cette affaire, qui vous donnera 
une superbe possession ; comptés que nous fairons tous les 
sacrifices qui dépendront de nous, car ma femme s'y prête 
d'aussi bonne grâce que moi. 

Revenons a la bastide Vitalis : si vous pouvés avoir des termes 
pour le payement, il ne faut pas regarder a deux mille livres près, 
parce qu'avec de l'économie, et certainement nous la professons 
sans lesineries, nous pourrons faire face a cette affaire et a 
bien d'autres. 

Cette acquisition sera un point d'appui pour les eaux; vous, 
aurés ensuite a traiter avec un voisin le petit Gaufridi, héritier de 
l'invalide espagnol (5), pour une concession d'eau ; le traître 
Lapeyre m'en avoit parlé plusieurs fois. Ils avoient arrangé cette 
affaire avec défunt Vitalis, ils pretendoient par ce moyen obtenir 
la clef de toutes ces grandes sources qui doivent découler du 
Leberon en longeant, approchant le terrein que nous parcourons 
près la bastide de Gaufridi, pour la vérification des limites de 
Bonnieux et de la Coste. Vous pouvés vous transporter sur les 
lieux et avec les connoissances pratiques que vous avés dans la 
partie hydraulique, vous jugerés des convenances. Je ne suis pas 
surpris de l'envie de nos compatriotes, c'est une passion dévo- 
rante dans tous les états, encore plus dans les republiques. 
Quant a Lapeyre, je l'ai bien jugé dans son dernier voyage a 
Paris. Voici, mon cher frère, les conseils que je crois devoir vous 
donner, il faut pour parvenir a notre but (6), que vous vous 
attachiés Aubery de Malaucène (7) . Nous sommes en corres- 



comté Venaissin était la salmée, dont la contenance n'était pas uniforme dans tous 
les pays. La salmée se divisait en 8 iminées et Téminée enao cosses. 

La salmée usitée À Avignon était de 1.736 cannes valant 68 ares ao centiares. 

A risle elle valait 1.800 cannes égalant 70 ares 71 cenUares. 

A Apt et Bonnieux 1.600 — — 63 — 49 — 

A Pertuls 1.600 — — 60 — 74 — 

A Carpentras et Valréas 1.600 — — 6a — 16 — 

Etc. 

(5) Personnage non identifié. 

(6) C'est-à-dire faire arriver Rovère cadet à ta députatlon. 

(7} Joseph^Ëtienne-Augustin-Sébastien Aubéry, né à Malaucène le aô août 174a. 
mort dans cette ville le 1" juillet 1834, notaire, puis juge de paix dans son pays 
natal jusqu'à sa mort. C'était en l'an IV uu électeur influent. On dit qu'il a collaboré 
aux Mémoires sur la Répoluiion d'AiHgnùn et du Comlai-Venaissin (en italien et en 
français, a vol. in-4*, 1793). Ce qui est plus certain, c'est que presque tout ce qui 
concerne Malaucène dans le Mémoire statistique de Maxime Pazzis a été rédigé sur 
les matériaux fournis par lui. 



^74 MÉMomËs 

pondance très active, Liotard de Tisle (8), Gaufridi (9) d'Apt, 
Gondarjd dePertuis (10) que j'ai négligés, que je cultiverai soi- 
gneusement, et a Bonnieux Guion, qui me demande une 
place ; je lui fais des reproches de n'avoir encore déterminé la 
place locale qu'il pourroit désirer ; je crois même que Reboulet 
peut vous être très utile par les liaisons qu'il a conservées avec 
le parti opposé a Lapeyre. Je peux errer pour cette dernière 
partie, mais pour Aubery, Liotard, Gondard et Palliet a 
Orange (11), président delà dernière assemblée électorale, que 
je travaille a faire dénicher de la liste des émigrés, je suis per- 
suadé que ces hommes seront puissamment influans dans les 
prochaines élections. Vous allés souvent a Avignon, vous devés 
voir ceux qui auront de l'influence ; je crois que vous avés bien 
fait de refuser de vous associer a l'administration départemen- 
tale (12) ; ils portent un caractère de réprobation pour leur 
filiation. Aménité, services, compliments : voila, mon ami, la 
grande route a suivre, surtout envers les habitans de la Coste, 
de Buoux et de Si vergues formant le canton de Bonnieux. 

J'ai fait passer, mon cher frère, une rescription de neuf mille 
livres a Gasquy pour le payement du quatriesme quart, c'est 
tout ce que j'ai pu faire. Vendes du foin, vous en avés a Bon- 
nieuz et a Sorgues ; rien d'aussi rare que l'argent a Paris, excepté 
chés les intrigants et les voleurs; comme je les abhorre, je n'ai 
d'autres ressources que nos propres fonds. D'après ce que vous 
m'aviés écrit et ce que j'ai pu rappeler de mes jeunes années 
quand j'etois a la Coste, j'ai forcé les ressorts pour cette acqui- 
sition comme je les forcerai pour la votre. Aidés-moi de votre 
côté, et tout ira bien. Martin, mon ancien aide de camp, est 
ici logé chés nous, il a eu la bêtise de se marier a Manosque, 



(8) Liotard père, de Tlsle (Jean-Joseph), homme de loi, notaire sous Tancien 
régime, époux de Madeleine Crozet, était en Tan IV un électeur influent et à ména- 
ger. U est mort à Tlsle, à l'&ge de 73 ans, le i5 octobre 18 16. Son fils, Pierre-Joseph, 
né le 3 juin 1766, avait émigré en 1793 malgré l'opposition de sa famille. JeaA- 
Claude^Joseph, son autre fils, habitait Avignon en Tan IV et soumissionnait aux 
biens nationaux, de compte à dtmi avec son père. 

(9) Voir lettre XL, note a. 

(10) Gondard (Arnaud), de Pertuis, homme de loi, électeur très inàuent. 
(n)Pidllet (Henri-Melchior-Jean-Baptiste), natif d'Avignon, était notaire à Orange 

avant la Révolution. L'assemblée électorale de l'an IV dont il était président, l'élut 
juge au tribunal civil d'Avignon. 

(19) On a vu, lettre XII, note 3, quels étaient les administrateurs du département 
de Vauduse. Us avaient été nommés sur la proposition de Fréron, le 16 nivôse an V. 



bE l*aCadémie de VaùclUSé 27?» 

sa femme plaide déjà en divorce ; il peste contre le beau 
sexe. 

Vous avés rendu heureux l'ancien curé de Tlsle (i3); il m'a 
écrit une lettre dans laquelle il ne peut tarir sur vos augustes 
qualités. Adieu, mon cher frère, en voila bien long. 

Salut et amitié. 

Signé : J.-S. Rovère. 

Notre petit se porte bien ; il marche seul, mange comme un 
garçon qui a douze dents. 

Le petit Clareton (14) sera conservé dans sa place ; le cadet se 
poussera s'il a de la persévérance. 



(t3) Raphel dont il a été déjà question, lettre XXVI, note i. 
{14I Voir lettre HI. note 5. 



[A suivre,) D' Victorin Laval. 



Victor LEYDET 



Notice lue a l'Académie de Vaucluse a la séance 
bu I" décembre 1904 PAR M. Emile AVON. 

Messieurs, 

L'Académie de Vaucluse éprouvait naguère une perte très 
regrettable dans la personne de M. Victor Leydet, artiste peintre, 
décédé à Sorgues le 20 octobre dernier. Cette mort est une perte 
pour notre Académie, pour Técole de peinture avignonaise, il 
est permis d'ajouter pour l'école française elle-même. 

Nous n'aurions pas pris la parole dans cette circonstance dou- 
loureuse, et nous aurions laissé parler de plus autorisés que 
nous, si notre honorable président ne nous avait engagé à pro- 
noncer quelques mots à l'occasion de cette mort prématurée. 

Victor Leydet, en effet, n'avait que quarante-deux ans lorsqu'il 
a été frappé dans toute la force de l'âge, dans la pleine maturité 
de son talent, alors que ayant produit déjà des œuvres très remar- 
quables, tout nous faisait espérer qu'il obtiendrait un jour dans 
son art une place prépondérante. 

Nous l'avons dit, nous sommes peu compétent pour analyser une 
telle carrière, aussi courte et pourtant aussi bien rempile ; mais 
comptant. Messieurs, sur votre indulgence, nous allons essayer 
de vous transmettre de notre mieux les impressions qui nous 
viennent à l'esprit et au cœur, en pensant à l'artiste que nous 
avons eu le malheur de perdre si tôt, et en nous plaçant en face 
de son œuvre. 

Victor Leydet reçut d'abord les leçons de M. Bourges, l'excel- 
lent professeur, et compléta ensuite son éducation artistique 
dans râtelier de Gérôme, à Paris. Il dut sans doute puiser à ces 
deux enseignements le respect de la forme, la correction parfaite, 
l'honnêteté tant recommandée par M. Ingres, qualités qui sont la 
marque distinctive du talent de Leydet. « Quoique vous fassiez, 
disait Ingres à ses élèves, soyez honnêtes; si, plus tard, on 
retrouve un fragment, même minime, d'un de vos tableaux, qu on 
puisse dire : voilà de la peinture honnête. » 

4 



27& MÉMOIRES 

Nous avons, certes bien autres choses à dire sur la peinture de 
Leydet, mais nous nous plaisons déjà à faire ressortir le grand 
mérite qu'il y a à posséder cette honnêteté impeccable demandée 
à ses disciples par le maître illustre, auquel on décerna le nom 
de Raphaël moderne. 

Il faudrait avoir sous lés yeux les catalogues des expositions 
du Salon de Paris pour suivre Tartiste depuis 1889, date de sa 
première entrée au Salon, jusqu a nos joqrs. Duraat ce laps de 
temps, son talent s'est complu dans la reproduction de sujets 
que le Dictionnaire départemental désigne sous l'appellation de 
Scènes de la vie journalière, et qui constituent de véritables 
tableaux d'histoire, par le caractère tout particulier d'austère 
grandeur, de simplicité et de profondeur que le peintre a su y 
imprimer. 

A la vérité, les œuvres de Victor Leydet s'adressent moins 
peut-être à la masse du public qu'aux amateurs de peinture fine 
et forte à la fois. 

Remarquons d'abord la dimension de ses tableaux qui sont 
conçus dans des proportions modestes, si on les compare aux 
toiles immenses qui sont généralement envoyées dans les exposi- 
tions. 

De plus, nous ne rencontrons pas chez Leydet de ces feux d'ar- 
tifice de couleurs voyantes qui éclatent et obligeraient parfois à 
prendre des lunettes bleues pour les regarder. On n'y trouve pas 
de ces tons chatoyants mis pour le plaisir des yeux ; mais on 
y remarque une lumière douce et tranquille, des mouvements 
justes, une harmonie discrète. Son oeuvre donc, par la façon dont 
il traite ses sujets, va plus directement vers l'élite, qui sait se 
complaire à admirer le sérieux du dessin et la vigueur de l'ex- 
pression, que vers la foule. 

C'est par là surtout que cet éminent artiste avait pu se placer 
dans les premiers rangs. En eflet, plusieurs fois médaillé, il était 
hors concours au Salon de 1900, avec le Vendredi-Saint, acheté 
par l'État et envoyé au musée de la Rochelle. 

Nous n'avonfe pas eu la bonne fortune de voir ce tableau, mais 
nous pouvons dans notre ville contempler deux de ses œuvres : 
Les femmes avant la messe. Salon de 1896, toile achetée par le 
musée, et le tableau intitulé La soupe, acquis et donné par l'État. 
Cette dernière toile, exposée dans une des salles de la mairie, 
nous on*re une certaine hardiesse dans la composition : deux 
Jîommes, pauvres hères, vus de dos, au fond du tableau, sur 



bE l'académie de' vaucluse ' 279 

lesquels se détachent les deux personnages principaux : une 
petite fllle souffreteuse, appuyée sur Tépaule de sa mère assoupie ; 
la pauvre filette a les yeux perdus dans le vague ; la fièvre impi- 
toyable paraît la miner ; une longue chevelure blonde encadre 
ses traits amaigris. Est-ce la facture, est-ce le ton général, ou 
bien les yeux fatigués, et l'expression de crainte et d'angoisse 
répandue sur toute sa personne? Quoiqu'il en soit, bien qu'il 
n'y ait aucune analogie, à la vye de cette tête, le tableau de Paul 
Delaroche représentant Les enfants d'Edouard, nous est revenu 
en mémoire. Quant à la mère, elle a la figure résignée des gens 
qui souffrent depuis longtemps : ses mains s'appuyant sur un 
panier sont d'un superbe dessin, et les têtes d'hommes du fond, 
bien que légèrement estompées, conservent un grand accent de 
réalité et nous offrent, ainsi que tout le reste du tableau, d'excel- 
lents morceaux de peinture. 

On pourrait adresser les mêmes éloges au tableau : Les Jemmes 
avant la messe. 

Nous n'oublierons pas non plus Le gardian de Camargue, nous 
traduisant si bien un côté pittoresque des mœurs de Provence ; 
Le bureau de bienfaisance, compris d'une manière très intéres- 
sante ; La moissonneuse au repos, et enfln Le viatique. 

Cette dernière toile, que nous avons vue dans l'atelier de l'ar- 
tiste, il y a deux ans, autant qu'il nous en souvienne, représente 
un prêtre portant le Saint Viatique à un malade, accompagné de 
son sacristain et suivi par quelques femmes pieuses. C'est une 
œuvre qui se distingue entre toutes par un grand sentiment 
élevé, qui en fait sans contredit une vraie peinture reHgieuse 
dans toute l'acception du mot. 

Nous mentionnerons aussi le Portrait de son père,, qui eut un 
réel succès au Salon des artistes français en 1892, celui de notre 
très distingué secrétaire général, M. Labande, que nous avons 
vu à une de nos expositions avignonaises ; enfin, un nombre 
considérable d'études de têtes charmantes, délicieusement peintes. 
La plupart de ces toiles ont du reste figuré à notre Salon avigrion- 
ais et y ont excité notre admiration ; les portraits nous ont prouvé 
que Leydet, qui excellait dans le genre historique, réussissait 
merveilleusement aussi quand il s'attachait à rendre la physio- 
nomie humaine. Pourquoi ne pas le rapprocher de Clouét pour 
son trait vif et précis, la finesse et le rendu de l'expression? 

Il n'avait donc pas donné toute sa mesure, ce vaillant artiste, 
qui a su nous peindre de sa main magistrale des toiles si atta- 



280 MEMOIRES 

chantes, et nous aimons à nous faire ici Técho de ceux qui appré- 
cient son talent comme il le mérite, en disant que si la mort Tavait 
épargné encore quelques années, il était appelé à remplir un 
de ces vides toujours regrettables, qui ne peuvent malheureuse- 
ment pas manquer de se produire avec le temps. 

Nos sentiments de tristesse se trouvent nécessairement 
augmentés, Messieurs, en voyant le nombre relativement res- 
treint de ceux qui mettent le grand caractère du dessin au-dessus 
de tout. Il nous a été donné de contempler dans Tatelier du 
maître son dernier envoi au Salon : Sur le pas de la porte. C'est 
une scène saisie sur le vif, très finement observée et fortement 
rendue. Entre autres choses, les mains de ces deux bonnes 
femmes se faisant leurs confidences, nous donnaient un vague 
ressouvenir et comme une réminiscence du grand et beau dessin 
de Técble florentine, alors que les figures nous rappelaient quel- 
que chose comme un Holbein tombé dans notre vingtième 
siècle. En regardant cette œuvre remarquable, il nous arriva de 
prononcer le nom du grand portraitiste de Técole allemande, en 
ajoutant dans notre phrase qu'il fallait tenir compte de la distance. 
« Oh 1 oui, s'écria vivement Leydet, très surpris, tenons compte 
de la distance. » L'artiste ^'était mépris sur le sens de nos paroles 
et ne nous avait pas donné le temps d'achever notre pensée. C'était 
seulement une sorte de rapprochement que nous faisions, en 
formulant une réserve à propos de la distance du temps. Cette 
simple allusion avait immédiatement effarouché ce peintre si 
distingué, si consciencieux, et avait provoqué de sa part une 
énergique protestation. 

Ce simple trait prouve avec la dernière évidence jusqu'à quel 
point Leydet joignait à un grand talent une modestie plus grande 
encore. 11 était très loin de tirer vanité de ce qu'il savait, il était 
convaincu qu'il pouvait lui manquer une qualité ou une autre, et 
en cela c'était peut-être un tort, car on ne peut les avoir toutes ; 
mais ce désir de toujours mieux faire est la piQjrre de touche de 
son^vrai mérite, et nous ne pouvons encore une foisqpe déplorer 
profondément la perte de cet artiste très sérieux, savant autant 
que délicat, un véritable maître en un mot, qui nous faisait conce- 
voir les plus belles espérances. 

Nous avons rempli notre tâche, Messieurs; veuillez ne voir 
dans ces quelques paroles qu'un hommage rendu, et bien mérité^ 
à la mémoire de Victor Leydet, que nous pouvions compter au 
nombre de nos amis, et le désir de nous rendre à l'aimable invi- 
tation de notre très sympathique et très honoré président. 



FÊTE A PARIS 

En l'honneur de Pétrarque. 



Les fêtes données en Avignon et Arezzo au mois de juillet dernier, pour 
célébrer le sixième centenaire de la naissance de Pétrarque, ont eu leur 
épilogue à Paris, le dimanche i8 décembre 1904. 

La Ligue franco-italienne avait pris occasion de la présence d*une importante 
délégation des étudiants italiens pour organiser à la Sorbonne, en Thonneur 
de Pétrarque, la cérémonie que son secrétaire général, M. Bouet, avait 
annoncée dans son discours du 17 juillet, en la séance solennelle de l'Académie 
de Vaucluse. Elle avait invité notre Société et la municipalité d'Avignon à s'y 
faire représenter : MM. Coulondre, député de Vaucluse, et Laval, conseiller 
municipal d'Avignon, en ont accepté la mission. 

Cette fête eut lieu dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, sous la prési- 
dence de M. Chaumié, ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, 
assisté de M. Tornielli, ambassadeur du roi d'Italie en France, et de M. Colly, 
vice-président du conseil municipal de Paris. Le président de la République et 
plusieurs ministres s'y firent représenter ; y assistèrent encore de nombreux 
personnages des deux nations amies. 

Aussitôt après le discours de M. Chaumié, la parole fut donnée au délégué 
de l'Académie de Vaucluse, M. Coulondre, Celui-ci, dans une heureuse impro- 
visation fréquemment interrompue par des applaudissements, rappela les jour- 
nées si réussies des 16 qI 17 juillet, où Vaucluse et Avignon célébrèrent à l'envi 
le souvenir de l'illustre poète ; il sut dire combien nous avions été heureux de 
coopérer ainsi au rapprochement de plus en plus intime de la France et de 
l'Italie, et il marqua l'heureuse impression qu'avait produite parmi nous le 
représentant du gouvernement italien, S. E. le comte Pinchia. 

Nous regrettons qu'il ne nous ait pas été possible de reproduire son discours ; 
mais, par contre, nous avons la satisfaction de donner ici les éloquentes paroles 
que le D' Victorin Laval, ancien président de notre Académie, prononça en la 
même cérémonie, en acceptant au nom de la ville d'Avignon le buste de 
Pétrarque offert par la Ligue franco-italienne. 

Monsieur le Ministre, 
Mesdames, 
Messieurs, . 
La ville d'Avignon, en acceptant avec empressement l'invi- 
tation de la Ligue franco-italienne et en déléguant un de ses 



282 MÉMOIRES 

conseillers municipaux pour la représenter à cette cérémonie, 
a voulu fournir bon témoignage de la fidélité de son culte pour 
la mémoire de Tillustre latin que vous fêtez aujourd'hui. 

Ce culte est pour elle d'autant plus légitime que notre cité 
a bien le droit de considérer Pétrarque un peu comme son 
fils, puisque si Tltalie lui donna le jour, la terre avignonaise 
fut sa mère nourricière, et que c'est en s'abreuvant à son 
sein, que se forma et grandit son génie pour prendre ensuite 
son essor vers l'immortalité. 

Or, Messieurs, au mois d'août de Tan 1840, alors que 
Pétrarque était venu demander à la solitude de Vaucluse, un 
peu de paix pour son cœur tourmenté d'une passion inas- 
souvie et que là, tout près de la source célèbre, à l'ombre 
du château seigneurial des évêques de Cavaillon, dans une 
petite maison, perdue au milieu d'un enclos, plein d'ombre 
et de mystère, il écrivait pour l'aimée inhumaine ses plus 
beaux canzoni, le 23 du mois, à la dixième heure du jour, il 
recevait de son compatriote et ami Robert de Bardi, chancelier 
de Notre-Dame, une invitation bien flatteuse. L'Université de 
Paris le conviait en efïet à venir recevoir avec le cérémonial 
antique, la couronne des poètes. 

Pétrarque déclina cependant l'invitation, car, coïncidence 
au moins singulière, le même jour et presque à la ^même 
heure, pareille invitation venait de lui être faite de la part du 
Sénat romain. 

Ainsi les deux plus grandes capitales se disputaient à l'envi 
l'honneur de le sacrer poète. 

Pétrarque ne pouvait hésiter : Paris était bien, il est vrai, 
la ville la plus lettrée du monde, les étudiants y affluaient de 
tous les points de l'Europe ; mais, à ses yeux, Rome était 
plus encore que Paris, la reine de l'univers. Il la regardait 
comme sa patrie à lui et c'est vers elle que l'attirait son 
patriotisme, fait tout entier de son admiration pour l'antiquité 
romaine et de sa compassion pour les malheurs de l'Italie 
désolée par la guerre civile. 

Que la Ville-Lumière, Messieurs, ne garde pas rancune à 
Pétrarque de lui avoir préféré Rome. S'il s'était décidé pour 
Paris, il y eût été sans doute magnifiquement fêté par les 
écoliers de la rue du Fouarre ; il y aurait eu en son hon- 
neur force disputes académiques sur la montagne Sainte- 
Geneviève, sans compter les chevauchées, les cavalcades, les 



DE l'académie de VAUCLUSE 283 

beuveries, les festins pantagruéliques et tout l'attirail inscrit 
au programme des fêtes officielles de VAlma mater. Et aujour- 
d'hui encore, en présence de ce buste, nous saluerions la 
mémoire d'un grand poète et d'un grand humaniste. Ce serait 
assurément une nouvelle fête de l'esprit, mais elle serait loin 
d'avoir la portée et la signiflcation de celle que nous célébrons, 
puisqu'il nous est donné de couronner maintenant non seule- 
ment le poète et le restaurateur des lettres, mais surtout le 
politique et le patriote qui a bien mérité à la fois de son pays et 
de l'humanité. 

Du jour, en effet, où après son couronnement au Capitole, 
Pétrarque eut reçu du Sénat le titre de citoyen romain, une 
nouvelle passion envahit son cœur, passion grande et féconde 
qui avait pour objet la grandeur de l'Italie établie sur la 
conception toute nouvelle de l'égalité des citoyens dans leurs 
droits individuels et dans leurs devoirs envers la patrie. 

N'est-ce pas. Messieurs, surtout à ce titre que Pétrarque a 
pu être justement appelé le premier homme moderne? 

Il vit l'Italie en feu et morcelée en une infmité de petits 
États qui se faisaient les uns aux ^autres une guerre sans 
merci ; il vit le peuple courbé sous le despotisme des nobles 
le tenant dans la plus humiliante servitude, et à ce spectacle 
il fut pris d'une grande pitié. Et comme dans ce peuple il 
restait encore quelque chose de cette vieille âme romaine 
qui avait dominé le monde, il conçut le projet de la tirer de 
sa léthargie et de faire renaître en elle la virilité des âges 
héroïques. 

A cette résurrection de l'âme romaine, l'obstacle était dans 
la puissance des grands : il leur déclara la guerre ; dans la 
division des enfants d'une commune patrie, il leur prêcha à 
tous l'union et la concordé; dans le morcellement de l'Italie, 
il employa toute la puissance de son génie, toute l'éloquence 
de son cœur, toute la fougue de son âme à faire l'union 
d'abord, pour préparer ensuite Tunité. Et quand il crut avoir 
sous la main l'homme prédestiné à réaliser cette unité, qu'il 
fût empereur, prince ou tribun, peu lui importa, c'est à lui 
qu'allèrent ses prières, ses exhortations, ses encouragements, 
comme aussi ses amers reproches, ses cris de colère et ses 
invectives, quand Tun ou l'autre de ceux en qui il avait mis 
sa confiance, eut trompé son attente ou fut resté au-dessous de 
sa tâche. 



284 MÉMOIRES 

Certes, il ne fut pas donné à Pétrarque de réaliser son 
rêve patriotique, mais il jeta des semences qui, après cinq 
siècles, ont donné la moisson attendue. Le jour vint enfin où, 
d'un bout à l'autre de la péninsule, la terre italienne fut secouée 
d'un long frémissement, et c'est aux accents d'une nouvelle 
Marseillaise : 

ScuoU, o Roma, la polvere indegna (i), 

que chacun fut debout pour la Patrie et pour la Liberté. 

Ah ! ce fut un spectacle inoubliable que celui du moine 
Gavazzi qui, nouveau Pétrarque, s'écriait en pleine Rome : 

« Romains, le jour de la délivrance est arrivé ! Voici l'heure 
de la croisade sainte : aux armes ! Dieu le veut ! 

a Celui-là n'^st point digne d'être le descendant des maîtres 
du monde qui refuserait de vaincre ou de mourir pour l'indé- 
pendance de l'Italie ; celle-là n'est pas digne d'être appelée 
Romaine qui retiendrait dans ses bras son fiancé ou qui verserait 
des larmes sur le départ de son fils. Romains, vos aïeux ont 
conquis le monde, voulez-vous être dignes d'eux? Voyez ces 
frontons de pierre, ces fûts dé colonne, ces ruines, antiques 
témoins de la gloire de vos aïeux : ce sont autant de tables que 
la patrie vous ofl're pour recevoir les noms des vaillants et des 
forts ...» 
Et on se pressait en foule pour s'enrôler. 
Le moine cependant continuait : « Salut, ô Capitole, vers 
lequel, hier, esclaves de l'étranger, nous n'osions lever nos 
yeux sans honte ; nous pouvons maintenant te regarder en face. 
Salut, rochers qui vîtes passer les Césars vainqueurs du monde 
et les Brutus vainqueurs des Césars ; nous réapprendrons à vos 
échos le nom sacré de la liberté ! Oui ! nous le jurons !....» 
Et l'unité italienne se fit. 

Pétrarque en avait été le précurseur. C'est pourquoi aujour- 
d'hui au laurier d'Apollon qui couronne son front, nous joi- 
gnons la palme civique en l'honneur du grand citoyen et du 
grand patriote. 

Messieurs, 
C'est avec émotion qu'au nom de la ville d'Avignon, je 
reçois de vos mains le buste que vous voulez bien lui offrir. 

( I ) Secoue, ô Rome, la poussière indigne. 



DE L ACADÉMIE DE VAUCLUSE 285 

Nous donnerons dans notre cité une place d*honneur à cette 
belle œuvre du sculpteur florentin Fortini. Et ne doutez pas 
que, si nos jeunes filles viennent quelquefois contempler avec 
amour les traits du poète, type incomparable de Tamant 
toujours fidèle et jamais lassé dans sa passion toujours sans 
espoir, plus souvent encore nos jeunes concitoyens n'aient 
à cœur de venir saluer la mémoire du politique humain qui, 
déjà au XI V» siècle, osa revendiquer pour le peuple les droits 
de citoyens et proclamer à la face de ses tyrans : « que sans 
la liberté la vie n'est qu'un jeu et qu'il vaut mieux mourir libre 
que de vivre esclave. » 

C'est ainsi que désormais par Avignon le génie tutélaire de 
Pétrarque planera sur les deux grandes sœurs latines, éprises 
d'un commun idéal de fraternité des peuples dans la paix et dans 
la liberté. 

Des applaudissements nourris témoignèrent que ce discours produisit une 
profonde impression. 

La cérémonie continua par d*autres allocutions; des poésies furent récitées 
devant le buste du poète et des chants célébrèrent la gloire immortelle de 
Pétrarque. Ce fut en somnje un magnifique couronnement des fétçs de 
juillet 1904. 



Séances de l'Académie. 



PROCÈS -VERBAUX. 



Séance du 7 Juillet 1904.-^ Présidence de M. de Viasac. président. 

Présents : MM. de Vissac, Labande. Remy Roux, Mouzin, Vayssières, abbé 
Aurouze, abbé Levezou, G. de la Boulie, Edmond Capeau, Genin, Laval, Larché, 
Bourges, Châtelet. 

M. le Président fait en quelques mots l'éloge de M. Caucanas, ingénieur civil à 
Orange, membre titulaire de l'Académie, décédé depuis quelques jours. 

M. le Secrétaire général annonce que notre collègue M. Vayssières, professeur à la 
Faculté des sciences de Marseille, a fait don à notre bibliothèque d'un ouvrage sur 
les mollusques recueillis par le prince de Monaco dans la Méditerranée. 

Sont présentés comme membres titulaires : 

MM. Coulondre, député de Vaucluse, par MM. de Vissac, Laval et Labande ; 
Amalbert, maire de Vaucluse, par les mêmes ; 
Daniel-Ernest Lagarde, inspecteur du Crédit foncier à Avignon, par MM. de 

Vissac, Lassalle et Labande ; 
Madon, notaire à Avignon, par MM. de Vissac, Limasset et Bonnecaze. 

M. de Vissac remercie tous les collègues qui prêtent à l'Académie leur précieux 
concours pour l'organisation des prochaines fêtes du centenaire de Pétrarque et 
permettent ainsi à la Société d'affirmer une fois de plus sa vitalité. 

Ses remerctments s'adressent d'une façon spéciale à M. Francion, président du 
Comité des fêtes populaires qui s'annoncent comme devant rehausser puissamment 
l'éclat des fêtes académiques ; à M. le docteur Laval, dont l'influence auprès de ses 
collègues du conseil municipal a contribué à nous valoir une subvention de la ville ; 
à M. le docteur Pamard, pour le succès de ses démarches auprès de la C** P.-L.-M. ; 
à MM. les docteurs Carre et Remy Roux qui ont bien voulu accepter la tâche d'or- 
ganiser les banquets, dont le crayon de M. Bourges consent à illustrer les menus ; à 
M. Mouzin, rapporteur des concours littéraires; enfin à M. Labande qui, avec son 
dévouement habituel, assume la plus lourde part delà préparation matérielle. 

GrAce À tous ces concours, ajoute le Président, grâce aussi à l'appui moral et 
financier de M. le Préfet du département, de la municipalité d'Avignon et de M. le 
Maire de Vaucluse, le succès des fêtes du Centenaire de Pétrarque dépassera les 
espérances que nous avions conçues tout d'abord. 

Avant que la séance soit levée, MM. Coulondre, Amalbert, Lagarde et Pradon sont 
élus membres titulaires de l'Académie à l'unanimité des membres présents. 



288 MEMOIRES 



Séance du S octobre rgo4. — Présidence de M. de Vissac, président. 

Présents : MM. de Vissac, Labande. Bourges. Arnaud de Fabre, Larché. G. de la 
Boulie, Bonnecazc, Avon, abbé Aurouze, Alphant, Blanc, Didiée, Biret, Ed. Capeau. 
ChAtelet. 

Sont présentés comme membres titulaires : 

MM. Marie, président du tribunal de commerce d'Avignon, par MM. le D' Laval, 
de Vissac et Labande ; 
Léonce Joleaud. licencié es sciences, par MM. de Vissac, Bourges et ChAtelet ; 
Prosper Magre, employé des contributions indirectes, par MM. Reboulet, 

Mouzin et ChAtelet ; 
Lemaire. capitaine au t* génie, par MM. Lassalle, Lagarde et de Vissac. 

M. le président de Vissac exprime la satisfaction réciproque que les membres de la 
Compagnie ont à se retrouver après la séparation momentanée des vacances. Il 
espère que chacun des membres tiendra à honneur, durant la nouvelle étape qui 
commence, d'apporter son contingent littéraire ou scientiflque aux réunions men- 
suelles de l'Académie et d'enrichir ainsi l'écrin de ses annales. 

• Nous nous sommes séparés, ajoute-t-il. après les séances exceptionnelles des i6 
et ry juillet, qui n'auront certainement pas nui au bon renom de l'Académie. De l'aveu 
unanime, en effet, la partie littéraire des fêtes de Pétrarque n'a pas été la moins 
réussie. Le résultat obtenu confirme l'opinion que j'émettais en vous proposant de 
prendre l'initiative d'une célébration académique ; c'est que vous possédiez dans 
votre sein tous les éléments propres k assurer le succès de pareilles entreprises et 
que chaque fois que vous voudrez organiser une solennité de ce genre, vous 
aboutirez glorieusement. > 

M. de Vissac remercie tous les membres de l'Académie, qui par leurs souscriptions 
volontaires ont augmenté les disponibilités indispensables à de pareilles fêtes. Si au 
point de vue pécuniaire nous restons en déficit, il n'en sera pas de même au point 
de vue moral et nous avons, semble-t-il, fait un grand pas vers la déclaration d'utilité 
publique. Une société reconnue en fait d'une manière aussi solennelle que l'a été 
l'Académie de Vaucluse. paraît avoir conquis bien des chances à. une reconnaissance 
de droit. N'est-ce pas. en effet, avec nous directement qu*ont communiqué M. le 
Ministre des affaires étrangères et son collègue de l'instruction publique et des 
beaux-arts, le gouvernement italien, ainsi que les personnages officiels français et 
étrangers accrédités auprès de notre Société? Il y a là une situation à exploiter, un 
précédent à invoquer en temps utile. 

C'est encore sur la requête directe du Bureau de l'Académie, requête apostillée 
avec empressement par M. le Préfet et chaudement appuyée par M. Coulondre, 
député de l'arrondissement, que M. le Ministre de l'instruction publique a bien voulu 
récompenser le mérite de quelques-uns de nos membres : MM. Eysséric. Manivet, 
Remy Roux et Châtelet. nommés officiers de l'instruction publique ou officiers 
d'académie. 

M. le Président fait part ensuite des remercîments adressés à la Société par diverses 
corporations ou personnalités qui n'ont pu répondre À son appel. De ce nombre sont: 
M. le Ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, la municipalité et le comité 
d'Arezzo, le comité de Padoue. l'Académie délia Crusca de Florence, l'Académie fran- 
çaise, par la plume de MM. Gaston Boissier. Mézières.Paul Bourget, marquis de 
Vogué, Costa de Beauregard ; les autres sections de l'Institut par la plume de 
MM. Gebhart, comte de Lasteyrie, etc. 

Il signale entre autres les remerciements du représentant du gouvernement italien, 
M. le comte Emilio Pinchia. 

« Vous avez tous encore présente à l'esprit, dit M. de Vissac. la physionomie fine, 
alerte, spirituelle et sympathique du comte Pinchia ; physionomie franche, ouverte, 
sur laquelle l'étincellement de l'intelligence jaillit en un mélange de charme et de 



DE L*ACADÉMIE DE VAUCLaSÈ 289 

séduction. Certes, c'est bien là le type du vrai galant homme et jamais ritalie n*eût 
pu nous envoyer une nature plus française, j'allais dire plus provençale. U serait 
sage de nous l'attacher définitivement par les liens de l'honorariat. » 

Dans le même ordre d'idées, M. le Président donne lecture d'une lettre de M. Sieyas, 
recteur de l'Institut de droit de Caracas. Ce savant jurisconsulte, qui publie en ce 
moment, en français, une biographie du général Bolivar, se fait l'interprète d'une 
demande de diplômes de membres d'honneur de l'Académie en faveur de S. E. le 
général Cypriani Castro, président de la République de Venezuela, et de M. Gabriel 
de Rosa y Rullo, publiciste, professeur éminent et ancien agent diplomatique de 
Caracas. 

Après d'intéressantes observations échangées à ce propos, l'assemblée, sur la 
proposition du Bureau, nomme par acclamation membres d'honneur de l'Académie 
de Vaucluse : M. le comte Pinchla, S. E. le général Castro, M . de Rosa y Rullo et 
le D' Seyas. Ces nominations sont faites au titre étranger, ce qui entraînera à 
l'art. 4 de nos statuts une légère modification qui est adoptée. 

Enfin, M. le Président fait circuler sous les yeux des sociétaires présents À la 
réunion, le diplôme provisoirement adopté, en attendant le choix d'un type définitif, 
pour constater les récompenses accordées aux lauréats des concours. Il demande 
qu'À l'avenir les personnes élues membres de la Société soient astreintes à un verse- 
ment de 3 francs comme droit de diplôme, et que le même versement soit exigé des 
membres anciens désireux d'obtenir le même diplôme. Adopté. 

M. le Secrétaire général prend ensuite la parole. Il annonce que le Ministère vient 
d'accorder À l'Académie une subvention de i5ofr. pour la publication des lettres de 
Rovère par M. le D' Laval. Pour permettre au trésorier d'encaisser cette somme, la 
Société prend la délibération suivante : « L'Académie de Vaucluse donne pouvoir à 
son trésorier, M. Bonnecaze, de toucher pour elle toutes les sommes qui sont ou 
seront mandatées en son nom . § 

M. le Secrétaire général annonce encore que l'Académie de Montpellier doit décerner 
en 19061e prix Ricard de 600 francs à l'auteur du meilleur travail sur un sujet d'his- 
toire ou d'archéologie du Bas-Languedoc. La réception des manuscrits sera close te 
3i décembre 1905. 

Il rend compte ensuite de la visite qu'a faite la Société éduenne des lettres, sciences 
et arts à notre cité les 14 et iS août dernier, et donne connaissance d'une lettre de 
son président, M. de Charmasse, qui invite l'Académie à rendre à Autdn la visite de 
la Société éduenne. 

Il nous apprend enfin qu'il a vu dernièrement, à Rome, le comte Pinchla, qui l'a 
prié de le rappeler au souvenir de l'Académie et lui a promis ' de faire son possible 
pour assister à la première de nos séances générales. 

M. Edmond Capeau donne lecture de ses impressions de voyage à Arezzo et noua 
fait assister avec lui aux fêtes de la cité en l'honneur de Pétrarque. 

Avant la fin de la séance, MM. Marie, Léonce Joleaud, Magre et Lemaire sont élus 
& l'unanimité membres titulaires de l'Académie. 



Séance du 3 novembre 1904, ~ Présidence de M. de Vissac, président. 

Présents : MM. de Vissac. Labande, Joleaud, Léonce Joleaud, Blanc, Alphant, de 
Faucher, abbé Durand, Amalbert, Didiée, Réguis, Larché, Bonnecaze, Remy Roiix, 
Avon, BayoL Châtelet. 

M. le Président souhaite la bienvenue À MM. Léonce Joleaud et Amalbert nouvel- 
lement élus qui assistent à la séance. Il donne lecture d'une lettre de remercîments 
du comte Emilio Pinchla, sous-secrétaire d'État au Ministère de l'instruction publi- 
que d'Italie, élu membre d'honneur dans la précédente séance. 

Sont présentés comme membres titulaires : . . « 



igO MKMOlREïi 

MM. Granel, pharmacien à Avignon, par MM. Pansier, Laval et Labatide \ 
Pleindoux, vétérinaire à Avignon» par MM. Réguis, Blache et Lestang; 
D' Barrai, médecin à Avignon» par MM. Labande, Belladen et Pansier; 
Emile Perrier, président de la Société de statistique de Marseille, par MM. de 
Faucher» Laval et Labande. 

M. le Président fait en quelques mots l'éloge funèbre de deux de nos collègues 
décédés depuis la dernière séance- : M. Gleizal, qui nous apporta en maintes occa- 
sions le tribut de ses lumières, et le peintre Victor Leydet enlevé dans la matu- 
rité de son talent. 

M. Avofi a bien voulu accepter d'exprimer son appréciation sur l'œuvre artistique 
du peintre regretté comme un suprême hommage rendu par ses coliques. 

La parole est donnée à M. Tabbé Durand pour la lecture de son étude Beaucaire 
sous saint Louis. Après le rattachement de Beaucaire À la couronne de France, une 
sénéchaussée fut établie dans cette ville. Le sénéchal Pierre Dorti s'y fit remarquer 
par ses exactions et ses rapacités. Cet état de choses dura jusqu'en 1247» où l'arrivée 
de nrissi dominici mit un frein aux rapines et à la brutalité des officiers royaux. Mais 
ce ne fut qu'en 1364, 3lu retour de sa première croisade, que saint Louis délivra une 
charte en faveur de Beaucaire. La tranquillité et la sûreté revinrent enfin dans la 
ville. Toutefois, Beaucaire ne peut obtenir le rétablissement de son ancienne admi- 
nistration communale avec le consulat. 

M. le D' Réguis entretient ensuite l'Académie de quelques champignons de la 
région : l'Armillaire couleur de miel (Piboulade). espèce consommée en abondance 
dans la région ; les Russules, représentées en Provence par 3o espèces ; les Lactens 
(Pignen à Marseille, Sang-du-Christ à Vaison), qui présentent la particularité de 
posséder des vaisseaux lactifères, d'où s'échappe un liquide blanc ou rouge 
lorsqu'on les coupe. M. le D' Réguis termine sa causerie par quelques mots sur les 
Salmonidés dont il présente deux espèces. 

La parole est ensuite donnée à M. Bayol pour la lecture de son étude sur les eaux 
potables en Avignon. Notre collègue nous apprend que déjà les Romains avaient 
exécuté de grands travaux d'adduction d'eau dans notre ville, travaux par la suite 
abandonnés. Il nous fait connaître les conditions déplorables, au point de vue de 
l'hygiène, des eaux où se trouvait Avignon jusqu'au milieu du XIX* siècle. M. Bayol 
passe en revue les progrès accomplis dans cette branche importante de l'alimenta- 
tion publique et il nous laisse entrevoir ceux qui restent encore à faire pour 
qu'Avignon soit pourvue d'eau potable de bonne qualité. 

Avant de lever la séance, MM. Granel, Barrai, Pleindoux et Emile Perrier sont 
élus à l'unanimité membres de l'Académie de Vaucluse. 



Séance du /*' décembre 1904. — Présidence de M. de Vissac, président. 

Présents : MM. de Vissac. Labande^ abbé Aurouze, abbé Grimaud, Didiée, E. 
Capeau, Maumet, Biret, Avon, Larchli, de la Boulie. Joleaud.de Faucher, Arnaud de 
Fabre, Manivet, Poupart, Lèm4ire, Pansier, Penne. Ripert, Bayol, Chûtelet. 

M. le Président fait part des remercîments de M. Emile Perrier, élu membre de 
l'Académie dans la précédente séance. 

M»* MarcowiU, professeur à l'École normale de Montélimar, est présentée aux 
suffrages de l'Académie par MM. de Faucher, Labande et de Vissac. 

La parole est donnée à M. Avon pour la lecture de sa notice biographique sur le 
peintre Victor Leydet. Enlevé à l'art à 42 ans, en pleine maturité d'un talent qui 
n'avait pas donné toute sa mesure, Victor Leydet s'adressait moins à la masse 
qu'aux amateurs éclairés. Les sujets de son oeuvre, pris parmi les scènes de la vie 
iBuniUère, les dimensions relativement restreintes de ses toiles, la lumière douce et 



bE L^ACADEMIE DE VAUCLUSE 2^1 

Tharmonie des lignes, tout cela s'adressait à l'élite qui sait le mérite du dessin et là 
vigueur de l'expression. Leydet joignait un grand talent à une modestie plus grande 
encore. Savant autant que délicat, c'était un maître qui faisait entrevoir les plus 
vives espérances et si la mort l'avait épargné encore quelques années, il était destiné 
à remplir quelques-uns de ces vides qui se créent avec le temps. 

M. le Président remercie M Avon d'avoir bien voulu accepter de rappeler à l'Aca- 
démie l'œuvre de Victor Leydet. Sa notice sera publiée au Bulletin et restera ainsi 
comme un témoignage d'admiration envers notre collègue regretté. 

L'ordre du jour appelle la lecture de M. Joseph Didiée sur Un héros vauciusien» 
Après un exposé historique des causes qui amenèrent l'envoi d'une flotte franco- 
anglaise dans la Baltique en i853, et la description de Bomarsund assiégée par les 
armées alliées, notre collègue nous montre le sous-lieutenant de chasseurs Gigot 
(de BoUène), à la tète de quelques hommes, s'emparant, dans la nuit du i3 au 
14 août i853, de la tour du sud, clé de la place de Bomarsund, dont la capitulation 
suivit de peu ce trait d'audace. 

M. de Vissac félicite M. Didiée d'avoir retiré de l'oubli le fait d'armes de notre 
compatriote. Il rappelle que M. le D' Loque, maire de Bollène, qui avait été invité à 
cette séance, s'est excusé de ne pouvoir y assister, retenu par les travaux parlemen- 
taires. 

En l'absence de son fils, M. Joleaud veut bien nous donner un aperçu de l'étude 
due À M. Léonce Joleaud, sur la série miocène dans le bas comté Venaissin. Après 
un aperçu rapide sur la tectonique de la région affectée par des plissements antô- 
oligocènes de direction ouest-est et des plissements miocènes, notre collègue nous 
démontre l'existence de toute la série miocène depuis la mollasse à P. Davidl 
jusques aux sables à Térebratula calathiscus. C'est toutefois avec un point de doute 
qu'il rapporte à cette dernière formation les sables de la base de la colline de Bédar- 
rides. Il attire notre attention sur le démantèlement de toutes les assises miocènes 
supérieures au schlier, démantèlement dû au peu de stabilité des marnes à Pecten 
Gentoni. Il consacre quelques instants à la question du sous-sol d'Avignon que les 
sondages effectués à Monclar ont permis d'élucider. Ce n'est pas comme on le 
croyait jusqu'à aujourd'hui, le pliocène sur lequel reposent les alluvionsde la plaine 
avignonaise, mais le schlier. Ce ne sera donc qu'à une grande profondeur que l'on 
pourra rencontrer un niveau aquifère de quelque importance. 

M. Joleaud fait encore remarquer que le bassin aquifère souterrain d'Avignon est 
de peu d'étendue. En effet, à Sorgues, le schlier ne forme plus le substratum de 
dépôts d'alluvions de la plaine ; il est remplacé par les marnes plaisanciennes. Un 
sondage effectué dernièrement dans cette ville a permis, en effet, de vérifier la 
présence du pliocène. Il existe donc pour notre collègue une ride invisible à la 
surface du sol, qui sépare nettement en deux bassins géologiques les plaines 
d'Avignon et de Sorgues. 

Le temps faisant défaut, M. Joleaud renvoie à une autre séance la fin de sa savante 
conférence. 

Avant de lever la séance, M*' Marcowitz est élue membre de l'Académie de Vau- 
cluse. 

U Stcréiaire, U Président, 

C. Chatslbt. Baron M. de Vimac, 



Volumes et Fascicules 

REÇUS PAR L'ACADÉMIE 
Depuis la publication du dernier Jascicule des Mémoires. 



I.— Envois du Ministère de l'Instruction publique 
et des Beaux- Arts. 

I* Comité des travaux historiques et scientifiques : Bulletin historique et philolo- 
gique, igoS, n** 3 et 4 ; 1904. n- \ et a. — a* Les Médailleurs français du XV siècle au 
milieu du XVII* siècle, par F. Mazerolle. t. III, album — 3* Bibliographie générale 
dos travaux historiques et archéologiques publiés par les Sociétés savantes de la 
France (1901-1902), par MM. de Lasteyrie et Vidier. — 4* Bulletin archéologique du 
Comité des travaux historiques et scientifiques, 1904, a* livr. * 

II. — Dons des auteurs 

I* M. Antoine Sabatier, membre titulaire de TAcadémie de Vaucluse : Le pont 
Morand de Lyon et ses billets de péage. — 2* M. Casimir Châtelet, membre titu- 
laire : Description d'une espèce nouvelle du genre Glandina. — 3' M. Albert 
Breittmayer : Le Rhône, sa navigation depuis les ten^ps anciens jusqu'à nos jours.*— 
4* M. Emile Perner, membre titulaire de l'Académie de Vaucluse : Léon de Berlue- 
Pérussis ; — Les Marseillaises et le connétable de Bourbon. — 5* M Charles Cotte: 
Sur les poteries de l'abri de la Font-des-Pigeons k Château neuMès-Martigues. — 
6' M. Joseph Ducos, ancien président de l'Académie : La Jeunesse du saint roi Louis, 
poème dramatique. 

III. — Envois des Sociétés correspondantes. 

Accademia di conferenze storico-giuridiche : Studi e documenti di storia e diritto, 
anno XXV, fasc. i et 2. — Société d'étude des sciences naturelles de Béziers : Bulle- 
tin, année 190a.— Société pour la conservation, des monuments historiques d'Al- 
sace : Mémoires, a' série, t XXII, livr. 1. — Société de statistique de Marseille : 
Répertoire des travaux, t. 46 (1902-1903). — Société des antiquaires de Picardie : 
Bulletin, 1904. i", a' et 3* trîm. — Société languedocienne de géographie : Bulletin, 
t. V. 1904. — Revue horticole de Marseille, n- 601 à 606.— Académie et université de 
Lille : Bulletin, 1904. n* 3. Société pour l'étude des langues romanes : Revue, 
5* série, t. VII, fasc. iv et v; t. VIII. n* i.— Société des antiquaires de la Morinie : Hulletin 
historique, 1904. a* fasc. — Acadénie de Stanislas : Mémoires. 6" série, t. 1. 1903* 1904. 
— Société de spéléologie : Bulletin et Mémoires, n* 36.— Bulletin historique du diocèse 
de Lyon, n" a9 à 3i. — S(»ciélé des sciences naturelles de Sa ône-et- Loire : Bulletin, 
1904, n** 7 à 10. — Société a'études scientifiques et archéologiques de la ville de 



294 MÉMOIRES DE L'ACADEMIE DE VAUCLUSE 

IJraguignan :. Mémoires, t. XXIII. — Société ' française d'archéologrlc : Congre» 
archéologique de France. 69* et 70* sessions, 190a et 1903. — Société des sciences, 
belles-lettres et arts du Tarn : Revue. 1904. n^* 4 et 5 . - Revue de Saintonge et d'Au- 
nis, 1904, 5- et 6' livr. ; 1905, i" livr. — Académie de Nîmes : Mémoires, i9o3. — 
Société des lettres, sciences et arts de la Corrèze : Bulletin, 1904, a» et 3* livr. — Anales 
del Museo nacional de Mexico, secunda epoca, t. I, n*' 7 a 10; - Boletin, t. 1, n^' 10 à. 
la et supplément. ~ Revista de la Universidad de Buenos-Aires, t. I, n** 3 à 5< 
t. II, n*« 6 à lo. — Académie delphinale : Bulletin, 1903.— Société d'archéologie et de 
statistique de la Drôme : Bulletin, iSret iSa' livr. — Société des Amis de l'Université 
de Clermont-Perrand : Revue d'Auvergne, 1904. n**4 à 6. — Annales de Saint-Louis- 
des-Français, t. IX, fasc. i et a. — La Diana : Bulletin, 1904, n«* i et a. — Académie 
de Metz : Mémoires, i90i-i9oa. — Société de statistique des sciences naturelles et des 
arts industriels du département de l'Isère : Mémoires, 4' série, t. VII, 1904. — Société 
florimontane d'Annecy : Revue savoisienne, 1904, 3' et 4* trim. — Société d'études 
provençales : Annales, 1904, n"* 5 et 6 ; 1905, n' 1.— Comité de l'art chrétien : Bulletin, 
1904, n"» 49. — Société des lettres, sciences et arts des Alpes-Maritimes : Mémoires, 
t. XVIII. 1903. — Société archéologique du Midi de la France : Bulletin, n* 33. — 
Société littéraire, historique et archéologique de Lyon : Bulletin, 1904, 3* et 4* trim.— 
Société neuchateloise de géographie : Bulletin, t. XV, 1904. — Société d'études des 
Haùtes-Alpes : Bulletin, 1904, n* ta. ^ Académie des sciences, d'histoire et d'anti- 
qvjités de Suéde : Anlikvarisk tidsgrift for Sverige, t. XVII, fasc. 3. — Société des arts 
et des sciences de Carcassonne : Mémoires, t X, 1904. — Museo nacional de Monte- 
video : Geografia fisica y esférica de las provincias del Paraguay, y Misiones 
Guaranies, compuesta par don Félix de Azara,... Anotaciones par Rodolfo R. 
Schuller (Anales del Museo nacional : Secciôn hist6rico filosôfica, t. I). — Académie 
des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse : Mémoires, t. IV. — Société 
nationale des antiquaires de France : Mémoires et documents, Mettensia, t. IV. 
fasc. a; mémoires, 7* série, t. III (1903). — Université de Lyon : Annales, i** série, 
sciences, médecine, fasc. i3:, Louis Veunier, Contribution à l'étude des composés 
diazoamidés ; — fasc. 14 : Attale Riche, Étude stratigraphique et paléontologique sur 
la zone à Lioceras concavum du iVont d'or lyonnais; — fasc. i5 : Raymond Le 
Vavasseur, Quelques considérations sur les groupes d'ordre fini et les groupes finis 
continus. — Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers : Bulletin. 
3* ^érie, t. V, a' livr. — Société d'étude des sciences naturelles de Nimes : Bulletin. 
^ XXXI.— Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées-Orientales, 45' vol. 
contenant la table. 



TABLE DU TOME -XXIII 

(ANNÉE 1904.) 



PâgOt. 

Aton (Emile). — Victor Leydet. Notice lue à l'Académie de Vaucluse à la 

, séance du i" décembre 1904 • • 977 

Bibliothèque de 1* Académie : Volumes et fascicules reçus. . . . 87. 936 et ^ * 99! 

Bourges (Gabriel). — Discours à l'installation du nouveau Bureau Y 

Dbstandau. — De l'Enseignement aux Baux avant 1789 17 

DiGONNKT (F.). — Orange antique. Un nouveau monument romain. \ . . • 19) 

P6te À Paris en l'honneur de Pétrarque 98f 

Installation du nouveau Bureau ( 

Labandb (L.-H.). — Bertrand du Guesclin et les États pontiacaux de France. • ^ 

— Nouvelles archéologiques intéressant le département de Vaucluse : 

Enlèvement de mosaïque romaine à Vaison, fouilles de Venasque. • 317 
Laval (D' Victorin).— Discours prononcé à la Sorbonne à la cérémonie en 

l'honneur de Pétrarque 38i 

— Lettres inédites de Rovère, membre du Conseil des Anciens, à son 
, frère ex-évéque constitutionnel du département de Vaucluse. i*' Jan- 
vier 1796-15 août 1797 (suite), 7 399 

Mantbybr (Georges de). — La Sépulture de Silvanus à Vachères. • • . « 11 

Pansirr (D'). — Jean de Tournemire, étude biographique 89 

Procès-verbaux des séances de l'Académie 81, 321 et 387 

Râouis (D'). — Les Amanites de la Provence loS 

Sauve (Fernand). —La Région aptésienne, études d'histoire et d'archéologie. 
— L Le vallon de l'Aiguebrun, Buoux. le village et l'ancien Fort, Saint- 

Symphorien isj 

TissAC (Baron de). — Discours À l'installation du nouveau Bureau S 



ANNÉE 1903 



SUPPLÉMENT DES ANNÉES 1894 A I9O2 (l) 



1348. Affaire Vidal. Les vols de la mai- 

rie d'Avignon. Compte rendu 
sténographique... — Avignon, E. 
Millo, in-S*. 

Cour d'assises de Vaucluse, 
session d'octobre igoS. 

1349. Albe (Abbé Edmond). — Autour 

de Jean XXIL Les familles du 
Quercy. Deuxième partie. II : Les 
cardinaux Gaucelin de Jean et 
Bertrand du Pouget. III : Neveu 
et petit-neveu du pape. Les 
Cardaillac. IV : Dernier neveu et 
autres parents. [Voir n* 1190.] — 
Annales de Saint- Louis-des- Fran- 
çais, t. VII, 1902-1903, p. 141, 287, 
441 ; — Rome, P. Luggiani» 3 bro- 
chures in-8'. 

Cf. MoLiNiER (Charles), dans 
les Annales du Midi, 1904, p. 359. 

i35o. — Contribution à l'histoire du 
diocèse de Cahors. — [Notice 
sur Bertrand Tissandier, évoque 
d'Apt.] — Revue religieuse de 
Cahors et de Roc-Amadour ; — 
Cahors, F. Plantade, in -S*. 

i35i . — Quelques-unes des dernières Vo- 
lontés de Jean XXII. — Bulletin 
de la Société des éludes littéraires, 
scientifiques et artistiques du Lot, 
t. XXVII, 1902, p. 2o5; — Cahors, 
Delpérier, in-8'. 

i352. Albe (Abbé Edmond) et Esquieu 
(L.). — Une Bulle de Jean XXII 
(27 juillet i33o) sur le monastère 
d'Espagnac. — Bulletin de la So- 
ciété des études.., du Lot, t. XXVII. 
1902, p. 227. 

1353. Allard (R.|. — Une Visite à Mis- 

tral. — Nouvelle Revue, i" février. 

1354. Allmer (Auguste . — [Epitaphe 

trouvée à Saint-Marcellin, près 
de Vaison.] — Revue épigraphique 
du Midi de la France, t. III, n* 
84 (1897), p. 447, n* 1184. 



i355. — [Fragment d'une inscription 
monumentale à Vaison.]-— Revue 
épigraphique du midi de la France, 
t. III, n* 83 (1896). p. 43i. n* 1169. 

i356. — [Pierre de limite et épitaphes 
trouvées à Suzette, Beau mont 
et Malaucène.] — Revue épigra- 
phique du midi de la France, t. III, 
n« 78 (1895), p. 354, n- 1117a 
II 19. 

1357. Almanach du Syndicat agricole 
vauclusien. — Avignon, la Coopé- 
rative agricole, 1902 et 1903, 2 vol. 
in-8*. 

i358. Amic (Joseph). — Discipline, hié- 
rarchie, charité- Liberté, égalité, 
fraternité. Rapport sur le con- 
cours pour le prix des anciens 
élèves présenté à la distribution 
des prix de l'école libre Saint- 
Joseph, le 26 juillet 1903. — Avi- 
gnon, F. Seguin, in -8*. 

1359. Annales de l'Académie de liltéra- 
rature [érigée dans le Petit Sé- 
minaire d'Avignon. Voir n ' 570, 
728, 901. io53 et 1191.]— bulletin 
de l'Association fraternelle des 
anciens élèves du Petit Séminaire 
Bienheureux - Pierre - de • Luxem- 
bourg d'Avignon, p. 14. 

i36o. Annuaire administratif, historique 
et statistique de Vaucluse, pu- 
blié par L. Duhamel, ... Année 
1903. — Avignon, Bernaud et C^ , 
in-8*. 

i36i. Annuaire d'Avignon. Administra- 
tion, commerce, industrie. i9o3. 
Edition Ad. Capeau,... — Avi- 
gnon, F. Seguin, in-8*. 

i362. ARDOUiN-DrMA2»T. — Voyage en 
France, 8* série : le Rhône, du 
Léman à la mer. 2' édition. — 
Nancy et Paris, Berger-Levrauli 
et C", in-i6. 

i363. Arnauld de Villeneuve.— Arnaldi 



(i) Les publications dont le millésime n'est pas indiqué sont de Tannée 1903. 



64 



feIBLlOGRAPHiE VAUCLUSIEN>^E: 



de Villanova libellus regiminis 
de confortatione visus [publié 
par le D' P. Pansier]. — Mémoi- 
res de l'Académie de Vaucluse, 
p. 1 ; — Paris, J.-3, Bailliére et 
Jils, in-8-. 

1364. Association amicale des anciens 
élèves de l'école de la rue Téle- 
Noire. Avignon.. . Catalogue des 
livres de la bibliothèque. — 5. /., 
in-S». 

Ligue française de renseigne- 
ment. 

i365. Atau (J.). — Quatre Bulles relati- 
ves à Pierre de Foix le Vieux. — 
Revue -de Gascogne, «nai.' p. ssi . 
Au- ARD (A.). — Voir LXval (D' Vic- 
torin), n' 1461. 

i366 B*LiNC0URT (Comte E. de).— Deux 
Livres de raison du XV* siècle. 
Les Merles de Beauchamps. — 
Mémoires de P Académie de Mmes, 
t.XXVI.p. I ; - Nimes, A. Cfiasta- 
1» gnUr, in-«*. 

1367. BARTHOLOMiBis (V. de). — Di una 
Canzone erroneamente attribuita 
al trovadore Rambaldo de Va- 
queiras. ~- Bolletino délia Società 
filotogica romana , p. ai. 

i368. Batiffol (L.). *- Une Réception de 
Louis Xlll en Avignon. — Revue 
hebdomadaire, 16 mai. 

1369. Baudoin- BuGiïET. ^ Rapport con- 

cernant la vérification des dé- 
penses supportées par la ville 
d* Avignon ft Toccasion des élec- 
tions législatives de igo3. — Avi- 
gnon, E. Milto, in-8*. 

1370. BaumGarten (P. -M.). — Untersu- 

chungen und Urkunden Qber die 
Caméra coUegii cardinalium fOr 
die Zeit von 1295- 1437.— Leipzig, 
1898, in-8v 

1371. Beauquier (H.). — Une Œuvre de 

Jean Aicard au théâtre d'O- 
range. — Revue Jorézienne, sep- 
tembre. 
1373 Bellet (Daniel). — Le nouveau 
Pont métallique d'Avignon. — 
tja Nature, I903, t. II. p. 33i. 

1373. Benoît XII. -* Lettres communes, 

analysée»... par F.-M. Vidal, ... 
Deuxième • fascicule. [Voir n' 
Ï202.] — Paris, A. Fontemoing, 

ln-4V 
Bibliothèque des Ecoles fran- 
^ çaised d'Athènes et de Rome, 3* 

série» Lettres communes des pa- 
. pes d'Avignon... N' 2 bis. 

1374. BBRGlKff et EirrHYMB-CHAPUlS. — 

Saint Elzéarde Sabran, du tiers- 
ordre (ia85-i325). — Paris, 1897, 
in-8^. 

1375. BE:ttNAi»o(E.9. — François Guigue. 

— Avignon, Auàanel frères, in- 16. 

1376. BEiïtiwi-ATTiLj (Clella). — - Il Pe- 

trarca e la poesia d'amore. — 
Cronache delta civiltà êlleno-la- 
tina, p. 360. 



1377. BiRÉ (Edmond). — La Jeunesse 

d'Armand de Pontmartin. — Le 
Correspondant, 10 février, p. 483. 

1378. — Un Chapitre d'histoire litté- 

raire. Les vrais Jeudis de Madame 
Charbonneau. — Le Correspon- 
dant, 35 juillet, p. 359. 

1379. BiRET. — Aperçu historique sur les 

serrures [avec les statuts de la 
corporation des serruriers d'Avi- 
gnon, ibnb.]— Mémoires de l'Aca- 
démie de Vaucluse, 1903, p. 401 ; — 
Avignon, F. Seguin, 1903, in-8*. 

i38o. BizoT(A. . —La Vallée du Rhône. 
De Lyon à Avignon. — [Vienne, 
Ogeret et Martin], in-8*. 

i38i. Bliemetzriedfr. — Zur Geschichte 
der grossen abendlândischen 
Kirchenspaltung. — Studien und 
Mitt/ieilungen, 2' et 3* trimestres. 

Cf. Ledos (E.-G).. dans \a Revue 
des Questions historiques, 1904, 
p. 269. 

i38a. BoLSi (Domingo). ~ L'Amor patrio 
in Francesco Petrarca et le epis- 
tole ad Andréa Dandolo, doge di 
VtntziR,,— Areezo, Cristelli, in-8*. 

1383. BoNNBFONS (Antoine),, — Un Soldat 

d'Italie et d'Egypte. Journal 
d'Antoine Bonnefons [né À Avi- 
gnon, mort à Carpentras]. 7 no- 
vembre 1792-31 février 1801. — 
Paris, J. Leroy, in-8». 

Collection de textes inédits tirés 
des manuscrits de l'Inguimber- 
tine, publiés par Léon-G. Pélis- 
sier. L 

1384. Borghi (L.-C.). — Due Sonetti di F. 

Petrarca studiati. — Venezia, 
1897. in-8*. 

i385. Bourgogne (Maurice). — Ascen- 
sions d'hiver en Provence. Le 
Mont Ventoux. '— Club alpin 
français. Bulletin de la section de 
Provence, p. 33. 
Brian ES (D'). — Voir Laffont (D') 

et Brianes (D'), n^ 1458. 
Brisset (Fernand). — Voir PéTRAR- 
QUE, n* 1490. 

i386. Brousse (Paul). ^ Frédéric Mis- 
tral, ses œuvres, le félibrige. — 
Périgueux, imp. de la Dordogne, 
in-i8. 
Extrait du Bournatdu Périgord. 

i387. Cabanes et L. Na&s (D**). — La 
Médecine dans l'histoire : le pape 
Jean XXII et ses pratiques occul- 
tes. — Chronique médicale, i" juin 
1903. 
Gagnât. — Voir Inscription, n* 1440. 

i388. Calmbt (Abbé P.). — Sommaire 
des bulles de Clément VI con- 
cernant le diocèse de Rodez, 
d'après le sommaire de P. de 
Montroy et les Regesta d'Avi- 
. gnon. [Voir n" io65 et 1310.] — 
Annales de Saint-Louis-des-Fran- 
çais, t VII, 1903-1903, p. 493. 

1389. Calmette (J.). — Benoît XIII et le 



ANNÉE igoS 



65 



muscat de Claira. — Revue d'his- 
toire et cT archéologie du Roussit^ 
ton, p. 229. 
Capeau (Adolphe .—Voir Annuaire 
d'Avignon, n* i36i. 
iSgo. Carlini (Armando). — Studio su 
• l'Africa » di Francesco Petrarca. 

— Firenze, suce. Le Monnier, in-8'. 
Biblioteca Petrarchesca. III. 

1391. Carrêrb (J ). - Le Théâtre d'O- 

range. — Revue hebdomadaire, 8 
et 29 août. 

1392. Carvalho (J.). — La première Re- 

présentation à Orange. — Revue 
hebdomadaire, 22 août. 

1393. Catalogue de la bibliothèque pa- 

roissiale de Saint-Pierre d'Avi- 
gnon. — Avignon, Aubanel frères, 
in-i6. 

1394. Catalogue de la collection musicale 

J.-B. Laurens, donnée à la ville 
de Carpentras pour la bibliothè- 
que d'Inguîmbert. — Carpentras, 
Seguin, 1901, in-8*. 

1395. Cesareo (G.-A.). — Gli Amori del 

Petrarca. — Giornale Dantesco, 
1900, n» 1. 

1396. — La nuova Critica del Petrarca. 

— Nuova Antologia, 16 mars 1897. 

1397. — Le Poésie volgari del Petrarca 

secondo le mdagini più recenti. 
^ Nuova Antologia, ]u\n 1895. 

1398. — Di un Codice Petrarchesco délia 

Biblioteca Chigiana. — Roma, 
1895, in.8', 

1399. Chabas (R.). — Inventario de los 

libros, ropas y demâs efectos de 
Arnaldo de Villanueva. —Revista 
de archivos, bibtiotecas y mitseos, 
t. VIII, 2" partie, p. i57. 

1400. [Circulaire de sœur Jeanne de Sa- 

les Marcel, supérieure de la Visi- 
tation d'Avignon, sur les événe- 
ments accomplis les années pré- 
cédentes dans le couvent. 28 
décenbre I9c3.] — [Avignon, F, 
Seguin], in-4*. 
14CI . Clément VI. — Acla Clementis VI, 
pontificisronnani, 1 342-1 352. Opéra 
Ladislal Klicman. — Prague, F. 
Rivnac, in-8'. 

Mon u me n ta vaticana res gestas 
Bohemicas illustrantia. I. 

1402. CoCHiN (Henry).— Essais et noti 

ces .. Un correspondant français 
de Pétrarque. — Revue d'histoire 
et de littérature religieuse, mai- 
juin. 

1403. — Le Frère de Pétrarque et le livre 

du € Repos des religieux». [Voir 
n**924. I075et 1210.]— Parts, Bouil" 
Ion, in-i6. • 

Bibliothèque littéraire de la 
Renaissance, t. IV. 

1404. CoMBET (J.). — Louis XI et le Saint- 

Siège «1461-1483). — Parts. Ha- 
chette et O* , in-8'. 

1405. Conclusions : i* Pour MM.Pamard, 

Julien Bonnet et Léon Bonnet, 



exécuteurs testamentaires et lé- 
gataires universels de M. Lajard... 
Et 2' Pour MM. Digonnet, Julien 
Bonnet et Helen des Isnards, 
exécuteurs testamentaires d'Es- 
prit ('alvet... contre la ville d'A- 
vignon et autres... — Nimes, A. 
Chastagnier, in -4*. 

Cour d'appel de Nimes, i** 
chambre... 

1406. CosMo |U j. — Messer F. Petrarca 

e i vasai di Ponte di Brenta^— 
Nuova Rassegna, 1894, n* 4. 

1407. Croce (Enrico). -^ La vera Laura 

di Francesco Petrarca. — Cro- 
nache delta ciiHttà elleno-latina, 
anno II, p. 44 et 106. 

1408. Darmangeat (Louis). — Histoire de 

la royale et dévote compagnie 
des Pénitents gtis d'Avignon.- — 
Avignon, J. Roumanille, in-8*. 

1409. DtpREZ (Eugène). — La Guerre de 

Cent ans à la mort de Benott Xil. 
L'intervention des cardinaux 
avant le conclave et du pape 
Clément VI avant son couronne- 
ment (25 avril-t9 mai i342). — 
Revue historique, t. 83, p. 58. 

1410. Des EssAfcTs (E.). — Pour Théodore 

AubaneL — Revue des poètes, 
10 juin. 

1411. Devoluy (P.). — Avignon. — Re- 

vue hebdomadaire, i5 août. 

141 2. DoizÉ floseph). — Le dernier Pape 

d'Avignon [Benoît XIII] — Étu- 
des, revue Jondée par les Pères de 
la Compagnie de Jésus. 5 février. 

1413. — Benoît XIU & Peniscola — 

Etudes... par les Pères de la Com- 
pagnie de Jésus, 5 mai. 
1414 DoNÉVAL (R. de). — Avignon, 
Orange. — Valence, J. Toursier^ 
in-i6. 
Guides Pol. 
Duhamel (L.). — Voir Annuaire, 
n i36o. 

1415. Duhamel (Paul). — De la Situa- 

tion des aliénés dans le Comtat- 
Venaissin et dans Vaucluse. 
1680-I901. — Montpellier, Serre et 
Roumégous, in-8'. 

1416. Espérandieu (Emile). — [Autel À 

Lanovaius trouvé à Cadenet et 
marques de fabriques sur lam- 
pes, à Camaret et Orange]. — 
Revue épigraphique, t. 1 V, n* 97 
(1900), p. 90 et 95, n" i334 et 1345. 

1417. — (Epilaphe en l'église de Vau- 

cluse.] — Revud épigraphique, 
t. IV. n* 99 (1900), p. i3i, n» 1366. 

1418 — [Inscriptions découvertes à Mé- 
nerbes, Vaison, Apt.| — Revue 
épigraphique, t. V. n* 1 10 (i9o3), p. 
34. n»* 1542 a 1546. 
Esquieu. — Voir Albe (Abbé Ed- 
mond) et Esquieu (L.\n<» i352. 
Euthyme-Ch^puis. — Voir Berguln 
et Euthyme-Chapuis, n* 1374. 

1419. Fauchbr (Paul de). — L'B<-slibri9 



66 



BIBLIOGRAPHIE VAUCLUSIENNE 



du marquis de Seguins-Vassieux. 
— Archives de la Société fran- 
çaise des collectionneurs d'ex- 
libris ; — Mdcon, Protat Jrères, 
in-4*. 

1420. — Joseph-Marie-Calvier, peintre 

de Bollène. 1 749- 1819. — Mémoires 
de V Académie de Vaucluse, p. 25i. 

1421. — Mobiles et mobilisés de Vaucluse 

en campagne (1870- 1 871). — Avi- 
gnon, F. Seguin^ in-8'. 

1422. FiNKE (H.) — Arnaldo de Vilanova 

en la corte de Bonifacio VIII. — 
Boletin de la real Academia de 
buenas letras de Barcelona, t. I, 
1901-1902, p. 24. 
FoERSTER (W.). — Voir Nève (Jo- 
seph), n' 1483. 

1423. Foulon de Vaulx (André). — M"' 

Parrocel. — L'Intermédiaire des 
chercheurs et curieux, t. XLVII, 
' col. 355. 

1424. Fredericq (P.). — Deux Sermops 

inédits de Jean de Fayt sur les 
Flagellants (5 octobre 1349) et sur 
le Grand Schisme (1378). — Bul- 
letin de l'Académie royale de Bel- 
gique, classe des lettres, n" 9-10. 
1435. Gaspeponi (G.). — La Canzone air 
Italia del Leopardi in relazione 
con quella del Petrarca. — Savi- 
gnano Rom., 1897. in-8'. 

1426. Gastoué (Amédée). — Les anciens 

Chants liturgiques des églises 
d'Apt et du Comtat. — Grenoble, 
Brotel, 1902, in-8'. 

1427. Géographie pittoresque et monu- 

mentale de la France... Tome V, 
p. 449-480. [Département de 
Vaucluse.] - Paris, E. Flamma- 
rion^ in-8*. 

1428. GÔLLER (Emil). - Zur Stellungdes 

pàpstlichen Kamerars unter Cle- 
mens VII. '" Archiv fur katholi- 
sches Kirchenrecht, Bd 83. p. 387. 
Cf. Ledos (E.-G.). dans la Re- 
vujc des Questions historiques, 1904, 
p. 270. 

1429. Gonnet (Abbé E.). — Biographie 

de M. l'abbé Joseph Chabert, de 
Sorgues, ancien secrétaire géné- 
ral de Tarchevèché d'Avignon 
(1826-1903'. Edition nouvelle, 
augmentée d'une notice biogra- 
phique sur M. l'abbé Arsène 
Odidier,de Sorgues (1822 1899). — 
Avignon, Aubanel Jrcres.\n8'. 

1430. — Biographie de M. l'abbé Victor 

Pons ide Valréas), supérieur de 
l'école libre de Saint- Joseph d'A- 
vignon (i 827-1903). — Avignon, 
Aubanel frères, in-8'. 

1431. — Double Notice biographique sur 



M. l'abbé Joseph Bezet (de Sor- 
gues) et sur M. l'abbé Romuald 
Lambert (de Sorgues). — Avi- 
gnon, Aubanel frères, in-8*. 

1432 . — Notice biographique sur M. Tabbé 

Arsène Odidier, de Sorgues 
(1822-1899). — Avignon, Aubanel 
frères, in-8'. 

1433. GossART (Ernest). — Antoine de la 

Sale (i), sa vie et ses œuvres, a* 
édition. — Bruxelles, H. Lamertin, 
1902, in-8' 

1434. Grabowski (D' Tadeusz).— Petrarca 

i Du Bellay. Kartka z dziejôw 
Renesansu we Francyi. [Pétrar- 
que et Du Bellay. Contribution 
à l'histoire de la Renaissance en 
France.] — Cracovie, KozianSki, 
in-8'. 

1435. Grôber (G.). — Von Petrarca's 

Laura. — Miscellanea di studi 
critici édita in onore di Arturo 
Graf, p. 53. 

1436. GuÉRARD (Abbé L.). — Documents 

pontificaux sur la Gascogne 
d'après les archives du Vatican. 
Pontificat de Jean XXII (i3i6- 
1 334)... IL — Paris^ Champion, 
in-8'. 

Archives historiques de la Gas- 
cogne. 

1437. Hallays f André). — En flânant. 

A travers la France. Touraine et 
Berry, Saumurois. vallée du Loir, 
Velay et Auvergne, Bourgogne, 
Normandie, Provence et Comtat. 
— Paris, Perrin et (M^ in-16. 

1438. Haller. — Die Verteilung der ser- 

vitia minuta und die Obligation 
der Pràlaten im i3. und 14. Jahr- 
hundert.— Quellen undForschun- 
gen aus italienischen Archtven und 
^ibliotheken, t. I (i897), p. 281. 

1439. Héron de Villefosse et Labande 

(L.-H.). — Les Mosaïques romai- 
nes de Villelaure (Vaucluse). — 
Bulletin archéologique du Comité 
des travaux historiques et scienti- 
fiques, p. 3; — Paris, imp. nat., 
in-8'. 

1440. [Inscription romaine trouvée à Mé- 

nerbes. Rapport de M. Gagnât.] 
— Bulletin archéologique du Co- 
mité des travaux historiques et 
scientifiques, 1903, p. cxxii ; 1904. 
p Li et civ 

1441. Jannacconi (R.).— Saggi storici e 

letterari (saggio di spiegazione 
délia canzone del Petrarca air 
Italia). ♦ Aquila, 1900, in-8'. 

1442. Joanne (Adolphel, Avignon et 

ses environs (Villeneuve, l'Isle- 
sur-la-Sorgue, Fontaine de Vau- 



(i) Les ouvrages concernant Antoine de la Salle, le littérateur français du 
XV siècle, seront désormais signalés. Un mémoire paru à son sujet en 1904 a en 
effet démontré qu'il était originaire du diocèse d'Avignon. 



ANNÉE igoS 



«7 



cluse). Guide Jeanne. — Paris, 
Hachette et O' , in-i6. 

1443. Jouve (Auguste). — Révision du 

périmètre et contribution 1902 du 
syndicat de la Durance à Cavail- 
lon. — Cavaillon, Mistral, in-8*. 

1444. Jouve (Michel). — * Journal d'un 

chanoine au diocèse de Cavaillon 
(1664 a 1684^ Fragments du livre 
de raison de Gaspar de Grasse. 

— Mémoires de l'Académie de 
Nimes, t. XXVI. p. 117 ; — Nimes, 
Chastanier, Debroas-Duplan, 1904, 
in-8*. 

1445. Kirsch (Johann-Peter). — L'Ad- 

ministration des finances ponti- 
ficales au XIV* siècle. — - Revue 
d'histoire ecclésiastique, t, I(igoo). 
p. 274. 

1446. — Note sur deux fonctionnaires de 

la Chambre apostolique au XIV* 
siècle. — Mélanges Paul Fabre, 
190a. p. 390. 

1447. — Die p&pstlichen Annaten in 

Deutschland wàhrend des XIV. 
Jahrhunderts. I. Von Johann 
XXII. bis Innocenz VI. — Pa- 
derborn, F. Schûning, in-8'. 

Quellen und Forschungen aus 
dem Gebiete der Geschichte. IX. 
Klicman (Ladislas). — Voir Clé- 
ment VI, n* 1401 . 

1448. KoBNiG (L.).— Die papstliche Kam- 

mer unter Clemens V. und 
Johann XXII.- Wien, 1894, in.8*. 
Labandb (L.-H.). — Voir Héron de 
ViLLEFOSSE et Labande (L.-H.), 
n* 1439. 

1449. — L'Avignon papal d'autrefois. 

Funérailles des souverains pon- 
tifes et fêtes à l'occasion de l'exal- 
tation de leurs successeurs. — 
L'Art, 3* série, t. III. p. 464. 

1450. — Den beromte Elfenbens-Kristus 

i Avignon-Museet i Sydfrankrig. 

— Frem, 22 mars 

1451. — Catalogue des manuscrits de 

la Bibliothèque de Carpentras. 
T. III. 2« partie [table]. Paris, 
Plon-Nourrit et (,**, in-8*. 

Catalogue général des manu- 
scrits des Bibliothèques publi- 
ques de France. Départements, 
t. XXXVI. 

1452. — La dernière Fondation des pa- 

pes avignonais. Le couvent des 
Célestins d'Avignon. — L'Art, 3' 
série, t. III. p. 586 [à suivre]. 

1453. — Familles juives d'Avignon. — 

— L'Intermédiaire des chercheurs 
et curieux, t. XLVII.col. 236. 

1454. — M"« Parrocel, — L'Intermédiaire 

des chercheurs et curieux, t. XL VII, 
col. 354. 

1455. — M. Alphonse Sagnier. président 

d'honneur de l'Académie de 
Vaucluse. Notice lue à la séance 
de l'Académie du 29 mai 1903 et 
bibliographie de ses ouvrages. 

— Mémoires de FAcadémie de 



Vaucluse, p. 225 ; — Avignon, F, 
Seguin, in-8*. 

1456. — Nouvelles archéologiques inté- 

ressant le département de Vau- 
cluse. II. Découvertes d'inscrip- 
ptions et antiquités romaines ou 
gauloises à Vaison. Ménerbes, 
Cavaillon et Malemort. Les fres- 
ques de Simone Memmi au por- 
che de la métropole d'Avignon. 
— Mémoires de r Académie de 
Vaucluse, p. 160. 

1457. Lacour (Léopold). — Au Théâtre 

d'Orange. Le présent et l'ave- 
nir. — La Revue de Paris, i- 
septembre.p. 177. 

1458. Laffont (D') et Brunes (D'). — A 

Messieurs les médecins de Vau- 
cluse. — S. /., in-4'. 

1459. Lang (Alois). — Die Urkunden 

ûber die Beziehungen der pâpst- 
lichen Kurie Zur Prov. und Diô- 
zese Salzburg... in der Avignone- 
sischen Zeit. i3i6-i378. I. i3i6- 
i352. — Grj:f, in-8*. 

Quellen und Forschungen zur 
ôsterreichischen Kirchenge - 
schichte, I, i, i. 

1460. Larché (D'). — Ville d'Avignon. 

Bureau municipal d'hygiène. 
10' année. Rapport pour l'année 
1902. — Avignon, F. Bemaud et 
eu, in-8*. 

1461. Laval (D' Victorin). — Joseph- 

Agricol Viala. sa naissance, sa 
mort, sa glorification, d'après les 
documents contemporains. — 
Mémoires de l'Académie de Vau- 
cluse, p. 41 et III ; — Avignon, F. 
Seguin, in 8*. 

Cf. AuLARD (A.), dans La Révo- 
lution française, 14 janvier 1904. 
p. 79. 

1462. Lecacheux (Paul). — Bulles du 

pape Urbain V concernant le 
diocèse d'Avranches (i 362- 1370). 

— Avranches, Durand, in-8*. 
Lbdos (E.-G.). — Voir Bliemetz- 

RiEOBR. n* i38i, et Gôller (Ernil). 
n- 1428. 

1463. Lefèvre (Edmond). — Bibliogra- 

phie mistralienne. Frédéric Mis- 
tral. Bibliographie sommaire de 
ses œuvres... Notes et documents 
sur le félibrige et la langue d'oc. 

— Marseille, éd. de l'Idéio prouven- 
çalo, in-8«. 

1464. Legs (Les) Lajard et Rouvière au 

Musée Calvet d'Avignon. Mé- 
moire présenté par les exécu- 
teurs testamentaires de Calvet. 
dans l'appel relevé contre les 
jugements du Tribunal civil d'A- 
vignon, des 3 et 11 mars 1903. 
dans les instances engagées par 
la ville d'Avignon contre les hé- 
ritiers universels de MM. Lajard 
et Rouvière. — [Avignon, F, Se- 
guin], in-4*. 



68 



BIBLIOGRAPHIE VAUCLUSIENNE 



• LsopAVDi (G.). — Voir Pétrarque, 
n* 149a. 

1465. Lesquen (G. de) et Mollat (G.). — 

Mesures fiscales exercées en Bre- 
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l'époque du Grand Schisme d*Oc- 
cident. — Annales de Bretagne, 
janvier et juillet 1903 ; janvier 
1904;— Paris, Picard et fils, in-8*. 

1466. LuNEAU (V.). — Quelques Pièces 

inédites. [Demi-gros de Jean XXII 
frappé À Carpe ntras ; petites 
pièces de billon de l'antipape 
Clément Vn... Denier de billon 
de Raymond IV, prince d'Oran- 
ge.] — Bulletin de numismatique ^ 
t. IX, 1903, p. 25, 73, io5. 

1467. Maisonneuve (G.). — Rapport sur 

le concours de bonne tenue de 
ferme du canton de Pertuis, en 
octobre 1903. — Bulletin de la 
Société d'agriculture et d'horticul- 
ture de Vaucluse, p. 247. 

1468. — Les Vins de Vaucluse à la foire 

aux vins d'Orange. — Bulletin de 
la Société d'agriculture et d'Hor- 
ticulture de Vaucluse, p. 8. 
1469- Mantovani (D.). — Il Castello di 
Colloredo, con la descrizione di 
sei quadri del secolo XV raffi- 
guranti i Trionfîdel Petrarca. — 
Homa, i89d, in-8'. 

1470. Mariage de M"* Cvprienne Yvaren 

avec le comte Pierre de Laistre, 
dans l'église paroissiale de Saint- 
Agricol à Avignon, le 6 janvier 
1903. — [Avignon, F. Seguin], ^ 
in-ia. 

1471. Mariéton (Paul).— J. Roumanille, 

étude biographique. — Montlu- 
çon, . Herbin ; Avignon, Rouma- 
nille, in- 16. 

1472. — I^ Théâtre antique d'Orange et 

ses représentations. — Paris, éd. 
de la Revue /éliàréenne,ïn'S* . 

1473. Martel {E.-A.}. — La Gorge de la 

Nesque (Vaucluse). -: La Nature, 
1903. t. I. p. 7- 
1474 Masquin-Masson ID'\ — Notice sur 
l'hydrothérapie, ses effets, ses 
indications, son application à 
l'établissement de Saint-Didier 
(Vaucluse). — Paris, Firmin- 
Didot et C, in- 16. 

1475. Massé (Emile).— Une Épidémie de 

variole à Avignon (décembre 
i902-juini9o3), thèse. Montpel- 
lier. Delord-Boehm et Martial, in-^" . 

1476. Maurin (Georges). Un Évoque 

d'Avignon et d^ Nimes sous le 
premier Empire IJ.-F. Perier. 
d'après le livre de M. l'abbé 
Albert Durand]. — Revue du 
Midi, p. 56. 

1477. M[ÉRrrAN] (J[ules]). — J-a dévote et 

royale Confrérie des Pénitents 
gri.s à propos d'un livre récent. 
— Semaine religieuse du diocèse 
d'Avignon, p. 32 1 et 334. 



1478. — Discours prononcé à la distri- 

bution des prix du petit sérhin^ire 
d'Avignon le 21 juillet 190?, â' 
l'occasion du concours annuel 
pour le prix des anciens élèves. 
-^ Avignon, Aubanel frères, in-8*. 

Moiji^iER (Charles). — Voir Albe 
(Abbé Edmond), n* 1349. 

Mollat (Abbé G.). — Voir Lesquen 
(G. de) et Mollat (Abbé G.), 
n* 1465. 

1479. — Clément VII et le suaire de 

Lirey. - Le Correspondant, 25 
janvier, p. 254. 

1480. MoNACi E.). — Sul Carros di Ram- 

baldo di Vaqueiras. — Bolletino 
delta Società filologica romana, 
1902, p. 17. 

1481. Moulin (Franki). — Le Préhistori-: 

que dans les régions du Sud- 
Est de la France. L'abri du Bau 
de l'Aubesier (Vaucluse). (Epoque 
moustérienne.) Etude géologico- 
palethnologique. — Bulletin de 
l'Académie du Var; — Toulon, A. 
Bordato, 1904, in-8*. 
1483. — Le Préhistorique dans la région 
du Sud-Est de la France. Notes et 
documents. [La Baume des Pey- 
rards dans l'arrondissement 
d'Apt.]— bulletin de l'Académie du 
Var, 1902 ; — Toulon, A. Borda to^ 
1902, in-8*. 
Nass (D' L.). — Voir Cabanes et L. 
Nass (Df). n» 1387. 

1483. Nève (Joseph). — Antoine de la 

Salle, sa vie et ses ouvrages... — 
Paris, H. Champion; Bruxelles, 
Falkfils, in-8% 

Cf. Foerster {W.\ dans le Ute- 
raturblatt fur germanische und 
romanische Philologie, col 402 ; 
Raynaud (Gaston), dans la Roma- 
nia, t. XXXIII. 1904, p. 107. 

1484. NicoLLET (F.-N.). — Les derniers 

Membres de la famille d'Orange. 
Montpellier et leurs possessions 
dans le Gapençais. - Annales 
des Alpes, 1902, p. ; 1903, p. 23. 
— Gap, L. Jean et Peyrot, in -8'. 

1485. Note sur cinq bulles adressées au 

cardinal Pierre de Foix (1440- 
1455). — Etudes historiques et reli- 
gieuses du diocèse de Bayonne, 
1902, p. 553. 
i486. Notes historiques sur les mo- 
nastères de la Visitation d'Avi- 
gnon. [Signé : A. M.] — Semaine 
religieuse du diocèse d'Avignon, 
p. 43o et 454. 

1487. Palais (Le) des papes A Avignon 

[avec plan et projets de restaura- 
tion] — La Construction mo- 
derne, 22 août, p 557. 
Pansier (D' P.). — Voir Arnauld 
DE Villeneuve, n* i363. 

1488. Pantini (R.). — 11 Commenlo al 

Petrarca. — fl Marzocco, 1900, 
n* 12. 



Aî^NÉE ;1903 



è9 



PÉussiEa (Lépn-G.)- ^ Voir Bon- 
N^FONS (Antoine), n* i383. 

Pellegrini. (F.). — Voir Pétrar- 
que, n* 1493. 

1489. Petrarça (Francesco). — L'AUneo, 

1894; n* 14. ^ . 

1490. Pétrarque. — Canzones, Triom- 

phes et poésies diverses. Traduc- 
tion nouvelle avec introduction 
et notes par Fernand Brisset. — 
Paris^ Perrin et O^.in-iô. 

1491. - Le Rime, con note...di Rigutini. 

— Milano^ i8()6. 

1493. — Rime, con l'interpretazione di 
G. Leopardi. — Urenit, Le Mon- 
nier, 1896, in-8*. 

1493. — I Trionfi secondo il codice Par- 

me n se 1036, edito da F. Pelle- 
grini. — Cremona, 1897. in-8'. 

1494. — — Seconda edizione. — Milano, 

1899, in-8*. 

1495. Peyrb (Roger). ~ I^s Villes d'art 

célèbres. Nimes, Arles, Orange, 
Saint-Remy.— Paris, H. Laurens, 
in-4V 

1496. PiERi (M.). - Le Pétrarquisme au 

XVI* siècle : Pétrarque et Ron- 
sard ou de l'influence de Pétrar- 
que sur la pléiade française. - 
Marseille, 1896. in-8-. 

1497. PiSANi |A.). - 11 Patriottismo del 

Petr^rca.— Potenza, 1899. în-8* 

1498 Pogatscher(H.). — Die Herausgabe 
der Rechnungsbucher der apos- 
lolischen Kamnier der XIIL und 
XIV. Jahrhundert. — Die Kultur, 
t. II(J90i). p. 464- 

1499- PORENA Manfredi). — Per l'inter- 
pretazione del sonetto petrar- 
cliesco « Anima bella •. — Ras- 
segna critica délia letleratura 
italianà, 1900, n«'9à 13. 

i5oo. Posocco (C.-y.). — Per Francesco 
Petrarça, nme. — Udine, i8ç^, 
in-8*. 

i5oi. PouGiN (Arthur). — Joseph d'Orti- 
gues. — V Intermédiaire des cher- 
cheurs et curieux, t. XLVII, col. 

i5oa. Projet de statuts d'une association 

de familles catholic^ues [avtgnon- 

aises] pour l'enseignement pri- 

o;iaijre, libre et gratuit. -— [Avi- 

., gnon, F. Seguin\ ïn-^* . 

Prost. — Voir Ranch ier (R.) et 
PposT, p* iSoO. 

i5o3. Provepce (La). Marseille et les Bou- 
ches-du-Rhône. Var, Vaucluse» 
Basses- Alpe9. Livret-guide Ulus* 
tré publié par le Syndicat d'ini- 
tiative de Provence... — Afar- 
seille, Moulloi Jils aîné, in-i6. 

i5o4. Quarta (Nino). — Per la Canzone 
[petrarchesca] délie Bell' acque. 

— Napoli, 1898. in-8*. 

i5o5. * Studi sul testo délie Rime del 
Petrarça. — Napoli, Muca, 1909, 

]5a6. Ranchibr (R.) et Prost. — C&rte 



agronomique <ie la commune de 
Beaumes.-de-Venise [et notice 
explicative], — Carpeniras, im^^ 
moderne, in -piano .et in-B*. 

i5o7. Rapport sur les conférences ecclé- 
siastiques du diocèse d'Avignon, 
tenues en 190a dans les divers 
dovennés — Avignon, Aubanel 
frères, in-8*. 

i5o8. Rastoul (Armand). ^L'Unité reli- 
gieuse pendant le Grand Schisme 
d'Occident (1378-1441). — Paris, 
Bloud et 6'i',in-i6 

Science et religion. Études 
pour le temps présent. 

i5o9. R[aymond] (Abbé H.). — Panégyri- 
que de saint Eutrope, évêque 
d'Orange. — Semaine religieuse 
du diocèse d'Avignon, p. 346, 370, 
38i et 417. 

i5io. — Panégyrique de saint Véran, 
évoque et patron de Cavaillon. — 
Semaine religieuse du diocèse 
d'Avignon, p. 573, 608; année 
1904, p. 33 et 49. 

iSil-Raynaud (Gaston*. — Un nouveau 
Manuscrit du Petit Jehan de 
Saintré [par Antoine de la Salle]. 
Romania, t. XXXI, 190a. p. 537. 
— Voir Nève (Joseph), n» 1483. 

i5i3. Reboui.et 'Capitaine A.). — Le 
Général d'Anselme et ses Maxi- 
mes militaires. — Mémoires de 
l'Académie de Vaucluse, p. 359. 

i5i3. [RiDON (Abbé).] — Notes biogra- 
phiques sur les trente-deux reli- 
gieuses de Bollène guillotinées 
À Orange, du 6 au 36 juillet 1794. 

— A vignon, Aubanel frères, in 8* . 
i5i4. Ricard (Marius). — Rapport dressé 

à la demande de la Société des 
cuivres de France dans l'instance 
pendante entre ladite société... 
contre les S" Carpentras et Ber- 
nard devant le tribunal civil 
d'Avignon. — [Avignon, F. Se- 
guin], in-4'. 

i5i5. RiEii (A.). — Chemins de fer et 
exportation. Vœu émis par le 
Syndicat agricole vauclusien. — 
Bulletin du Syndicat agricole vau- 
clusien, I" mars ; — Avignon, F. 
Seguin, in-8*. 

•i5i6. RicuTiNi (G ).— Nota Petrarchesca. 

— Roma letteraria, 1899, n* i. 
— Voir Pétrarque, n* 1491. 

i5i7. [Roux (Abbé|].— Les Bâtiments du 
Petit Palais. De la Révolution à 
nos jours. — Bulletin de l'Associa- 
tion fraternelle des Anciens élèves 
du petit séminaire Bienheureux- 
Pierrt-de-huxtmbourg d'Avignon, 
p. 38. 

i5i8. Samaran (Ch.).— La Jurisprudence 
pontificale en matière de droit de 
dépouille [d'après trois bulles 
Inédites d'Innocent VI, d'Ur- 
bain V et de Clément VII, i358- 
1390]. — Méiange* dTarcHMogic 



\ 



70 



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discours prononcé à la séance 
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férence des avocats), le !•' avril 
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unico per madonna Laura de 
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évoque de Viviers. — Revue du 
Vivarais, t. XI, p. SSg. 

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frères, in-8'. 

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de la Sale et la légende de 
Tannhâuser. — Mémoires de la 
Société néo-philologique à Hel- 
singfors,i. II (1897). p. loi. 

i5a8. SouzA (Robert de). — Avignon et 
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ancien et moderne, t. XIII, p. aaS. 

1539. Stiavelli (G.). — Gli Amori di 
Francesco Petrarca. — L'Ori- 
fiamma, 1899, n*9. 

i53o. SucHiER (H.). —Recherches sur les 
chansons de Guillaume d'Oran- 
ge. - Romania, t. XXXII, p. 353. 

i53i. Syndicat du canal de Vaucluse. 
Compte administratif présenté 
par M. le Directeur du Syndicat 
pour Texercice 1903. — Avignon^ 
F, Seguin, in-4*. 

i53a. Taudiëre (Henry). — Les Libertés 



et les moyens de les restaurer. 
Conférence faite à Avignon le 
ai juin 1903. — Avignon, F. Se- 
guin, in- 16. 

i533. Tombeau de Gaspard de Simiane 
[au Musée Calvet]. — L'Art pour 
tous, i5 juin. 

1534. Ubald d'Alençon (R. P.). — Ex- 
traits de manuscrits touran- 
geaux sur le B. de Maillé, le B. 
Hélie de Bourdeille, le P. Marc 
d'Aviano, Jean XXII et Saint- 
Ouen-le-Brisoult. — Vannes, 
Lafolye frères; Paris, in -8*. 

i535. Vallbntin (Roger).— Du prétendu 
Atelier carolingien de Venasque 
(Vaucluse). — Bulletin de numis- 
matique, t. III (1895-1896), p. 78. 

i536. — Signification de la légende bili- 
néaire de quelques doubles de- 
niers pontificaux frappés à Avi- 
gnon [au XV siècle]. — Bulletin 
de numismatique, t. II (1893- 1894), 
p. 45. 
Valois (N.). — Voir Zanutto (D' 
Luigi), n» 1542. 

1537. Vidal (Abbé J.-M.). — Notice sur 

les œuvres du pape Benoît XII.— 
Bulletin de la Société archéologi- 
que du midi de la France, 190a- 
1903. p. 298. 
— Voir Benoit XII. n* i373. 

1538. VossLER (K.). — Stil. Rhythmus 

und Reim in ihrer Wechselwir- 
kung bei Petrarca und Leopardi. 
— Miscellanea di studi critici édita 
in onore di Arturo Graf, p. 453. 

1539. WiGG (J.-C). — M"- Parrocel. — 

L'Intermédiaire des chercheurs et 
curieux, t. XLVII, col. 353. 

1540. WuLFF (Fredrik). — Trois Sonnets 

de Pétrarque. [Voir n* i345.] — 
Fraen Filologiska toereningen i 
Lund, t. II (1902). 

1541. Zacharewicz (Ed.). — Champ de 

démonstration créé à Caumont 
sur le traitement des maladies de 
rolivier. — Bulletin de la Société 
d'agriculture et d'horticulture de 
Vaucluse, p. io5. 

1542. Zanutto (D. Luigi). — Il Protono- 

tario Jacopino del Torso e le sue 
legazioni nel tempo del Grande 
Scisma (1407-1408)...— Udine, D. 
del "Bianco, in-8*. 

Cf. Valois (N.). dans la biblio- 
thèque de l'Ecole des Chartes, 
t. 64, p. 628. 

1543. ZuMBiNi (B.). - Ascensione di F. 

Petrarca sul Ventoux. — Nuova 
Antologia, mai 1895.